samedi 30 juillet 2011

VIOLENCE FAMILIALE 25e partie

L’Agresseur

Chez l’agresseur, certaines caractéristiques personnelles contribuent à augmenter son potentiel de violence et les discours existant dans la société lui permettant, également, de justifier ses pertes de contrôle. Son degré d’intégration du modèle masculin l’incite à recourir à des moyens violents pour dominer et soumettre sa partenaire.

Caractéristiques personnelles

Le passé de violence de l’agresseur joue un rôle important dans son apprentissage des comportements violents. En effet, l’homme qui a évolué dans une famille où la violence était employée dans le couple ou envers les enfants risque de reproduire les mêmes gestes de violence. Les comportements de violence s’apprennent et se répètent. La jalousie excessive est une autre caractéristique individuelle, associée à la violence. Dès 1975, Gayford avait identifié cette difficulté personnelle chez les hommes qui maltraitent leur partenaire. Cette jalousie se manifeste par un contrôle démesuré des faits et gestes de la victime (vérifier toutes les activités sociales de la conjointe, minuter son temps de sortie, ses contacts téléphoniques et croire à l’existence de rapports sexuels avec un autre homme dès qu’elle s’absente, etc). La jalousie empêche le fonctionnement normal de l’individu qui en souffre, ainsi que celui de la personne qui en est l’objet.

En outre, l’alcool et la violence sont souvent associés. Effectivement, un grand nombre d’agressions se produisent lorsque l’agresseur se trouve en état d’ébriété. En fait, le problème relatif à l’alcool révèle deux types d’agresseurs. Dans une première catégorie, l’agresseur se sert du prétexte de l’alcool pour justifier ses pertes de contrôle, il se déculpabilise en invoquant son état d’ébriété. Dans bien des cas, son geste était planifié depuis longtemps et l’alcool devient l’excuse idéale. Le problème reste ainsi extérieur à lui. L’alcool lui sert de désinhibiteur pour actualiser son désir d’agression.

Dans une seconde catégorie, l’alcoolisme peut être associé à une difficulté personnelle d’alcool lors des agressions, mais de la maladie comme telle. Cette distinction est importante. L’alcoolique a une dépendance à l’alcool et il peut difficilement composer avec la réalité. L’agression lui sert de moyen rapide pour résoudre ses difficultés. Toutefois, s’il s’arrête de boire, cela ne signifie qu’il abandonnera l’usage de méthodes violentes pour régler ses conflits.

Les hommes, ayant un casier judiciaire pour voies de fait, représentent un groupe à risque. Leurs pertes de contrôle ont, dans bien des cas, dépassé le stade de la seule agression de leurs proches. La violence fait partie des moyens qu’ils prennent pour régler un nombre important de conflits avec leurs pairs.

Voici d’autres caractéristiques personnelles que l’on retrouve chez les hommes violents. Ceux-ci ont une faible estime de soi et un fort sentiment d’insécurité. Ils ont une perception rigide du rôle des femmes et des hommes. Ils expriment peu leurs émotions et présentent une image différente d’eux en dehors du foyer. Finalement, un certain nombre d’entre eux souffrent de dépression. Cet état, que la société accepte difficilement chez les hommes, peut se manifester par des pertes de contrôle. Refusant d’assumer les émotions liées à leur état dépressif, l’agression devient, pour eux, la solution à leur problème.

Mythes et préjugés

Voyons quels sont les discours et les mythes qui peuvent renforcer les comportements d’agression. Tout d’abord, il existe encore un cautionnement social qui justifie la violence faite aux femmes. Bien que les valeurs sociales évoluent, les changements demeurent peu évidents dans les faits. La publicité, la pornographie et le peu de sévérité des sentences soutiennent implicitement la violence. Certains discours sexistes, prétendant que les hommes sont agressifs par nature et que les femmes appartiennent aux hommes, confortent l’agresseur. Avant la modification du Code civil, il y a moins de dix ans, les femmes devaient suivre leur mari et ce dernier était responsable des membres de la famille.

Comme cela a déjà mentionné, les agresseurs ont une perception rigide des rôles des hommes et des femmes. Les stéréotypes masculins traditionnels entretiennent le maintien des comportements violents. L’homme y est décrit comme un pourvoyeur, un être traditionnel, fort et productif. Il n’a pas accès à ses sentiments et encore moins à l’expression d’émotions (tristesse, peur, insécurité), s’opposant à l’image de force et de virilité à laquelle il doit se conformer. Il doit dominer sa partenaire et a le pouvoir de la soumettre. Ce modèle permet donc à l’agresseur de trouver toutes les justifications possibles à l’emploi de la violence. Il agresse sa partenaire pour se prouver qu’il la domine, il la violente pour contrôler ce qu’elle fait ou encore pour la forcer à se conformer à ses propres valeurs.

L’homme violent a souvent de la difficulté à assumer les rôles de performance dictés par le modèle masculin, tel qu’il est établi dans nos sociétés. Ses attentes envers sa conjointe sont élevées, voire démesurées. L’agression devient donc un moyen qui lui permet de correspondre aux normes masculines, de réduire momentanément les tensions et de régler les conflits. Évidemment, ce fonctionnement se retourne contre lui à moyen et long terme. En effet, la relation de couple se détériore, il se mésestime et augmente sa solitude. Toutefois, il demeure le seul responsable de ses actes violents et, à aucun moment, la victime ne doit porter la responsabilité des pertes de contrôle de l’agresseur.

L’agresseur ne se distingue pas de l’homme moyen. Les hommes qui vivent des problèmes psychiatriques importants représentent une minorité. Monsieur Tout le monde peut s’autoriser, une fois, à recourir à la violence pour défendre son pouvoir. Il n’est pas nécessaire d’avoir des problèmes de disfonctionnement pour perdre un jour son contrôle. Toutefois, les agresseurs manquent de capacités pour exprimer leurs émotions. La violence leur sert d’exutoire pour leurs surcharges émotives. Ces hommes créent également des zones de dépendance affective entre eux et leur partenaire, qui doit répondre à leurs besoins affectifs, bien qu’ils ne puissent eux-mêmes définir ces besoins.

Le point commun qui existe entre l’homme violent et la femme violentée est la difficulté à s’exprimer de façon affirmative, qu’ils éprouvent tous les deux. L’agresseur a recours à la violence pour régler ses conflits ou pour obtenir une réponse à ses besoins. Il ne sait pas comment négocier avec l’autre tout en le respectant. La victime, pour sa part, réagit en se repliant sur elle-même, parce qu’elle n’a pas l’habileté nécessaire pour soutenir ses opinions et délimiter son territoire. Ils se trouvent donc aux antipodes, au niveau de leurs comportements, ce qui engendre des rapports de domination. Ce manque de capacités affirmatives caractérise les pôles des stéréotypes sexuels de l’homme et de la femme dans la société. Il n’est pas nécessaire de retrouver des situations exceptionnelles chez un couple pour constater l’existence d’une relation empreinte de violence. En effet, un rapport de domination suffit pour justifier le recours à l’agression.

Certains comportements communs peuvent se retrouver chez la victime et chez l’agresseur. Par exemple, ils peuvent violenter leurs enfants, tenter parfois de se suicider, consommer de la drogue ou de l’alcool. Cependant ces comportements sont souvent reliés à la violence même de l’agresseur alors qu’ils résultent plutôt, chez la femme, de son incapacité à mettre fin aux agressions.

Voyons maintenant comment le cycle de la violence se perpétue et contribue à maintenir l’union conjugale.

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