Position contre la violence
Comme il a été mentionné, précédemment, l’intervention ne se fait pas dans un contexte neutre. La sécurité de la victime prédomine dans l’entrevue. Votre position contre la violence doit être claire pour qu’elle sache que vous ne remettez pas en question son expérience de victime. Il ne suffit pas de prendre position une fois dans l’entrevue pour que la femme battue soit sécurisée. Chaque fois qu’elle se rend responsable ou reprend à son compte le discours culpabilisant de l’agresseur, vous lui répétez que la violence est un mode inacceptable de fonctionnement. Ce discours risque d’être nouveau pour elle. Elle va probablement tenter de vous mettre à l’épreuve, en vous donnant une série d’informations qui renforcent, selon elle, sa responsabilité dans les scènes de violence.
Le soutien reçu dans la dénonciation de violence permet à la victime de se déculpabiliser et de donner un sens différent aux événements. Elle peut aussi se détendre et abaisser ses défenses puisqu’elle n’a pas à donner de justifications à sa situation. Il faut toutefois se rappeler que vous devez dénoncer les actes de violence mais ne pas attaquer l’agresseur en tant qu’individu : « Il a le droit d’être en colère, mais cela ne justifie pas qu’il ait recours à la violence. Même s’il regrette sa perte de contrôle, il n’a aucune excuse de t’avoir frappée. »
Les femmes violentées agressent parfois leurs enfants. Cette réalité ne doit pas modifier la dénonciation de la violence. Toute violence demeure inacceptable et le contexte de victimisation de la femme ne peut justifier sa propre violence. Vos messages peuvent tenir compte de cette situation : « Aucun être humain ne mérite d’être agressé. La violence est inacceptable, qu’elle soit faite envers un enfant ou envers un adulte. » Ces verbalisations peuvent l’aider à exprimer ses propres pertes de contrôle et l’assurer qu’il existe des moyens pour l’aider à résoudre ses difficultés.
La cliente sait donc à quoi s’attendre et se sent respectée comme individu à part entière. Elle sait que vous n’approuvez pas ses agressions envers ses enfants.
Conscientisation
Les femmes battues ont souvent intégré les stéréotypes féminins. Leur fonctionnement se base sur les règles sociales établies selon des rapports de domination. De plus, elles se sentent responsables et coupables de certaines réactions. Elles ne voient pas que les pressions sociales influencent de façon déterminante leurs réalisations personnelles. Ainsi, prennent-elles pour un problème individuel ce qui n’est qu’une conséquence des normes sociales existantes. Être victime de violence les rend honteuses et coupables, mais en réalité ce sont les conventions sociales qui définissent, dans notre société, les femmes battues et violées comme des provocatrices et des masochistes. Ce discours est naturellement repris par l’agresseur qui se sent approuvé par la société.
Une partie importante de ses sentiments de culpabilité et de honte est directement reliée aux pressions sociales. Le travail de conscientisation permet à la victime d’évaluer différemment les origines de ses émotions : « Tu te sens égoïste dès que tu penses à toi, car la règle qu’on exige des femmes, c’est de « s’oublier ». La majorité des femmes sont paralysées lorsque leur conjoint les agresse. On ne nous a jamais dit que le protecteur et le prince charmant pouvaient se transformer en agresseurs, alors quand cela arrive, on est stupéfaites ».
La femme battue est prise dans une « toile d’araignée ». La « toile sociale » qui la garde prisonnière, la maintient dans une position de dépendance au conjoint. Si elle dénonce le piège, elle provoque le maître des lieux et voit la toile se refermer sur elle. Chaque échelon social, juridique, économique de la toile contribue à la maintenir dans sa situation de dominée. Évidemment, les institutions diront que ce n’est pas la toile qui l’emprisonne, mais que c’est la femme elle-même qui tisse ce nid qu’elle aime.
Le travail de conscientisation permet de voir la place qu’occupe la domination des hommes sur les femmes et particulièrement celle de l’agresseur sur sa victime. La femme violentée reçoit donc une nouvelle analyse – non culpabilisante – de son problème, analyse qui ne caractérise pas ses difficultés comme étant d’ordre purement psychologique.
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