CHAPITRE VII
Depuis quelques bonnes minutes, des valises de toutes les couleurs défilent sur le tapis roulant. De temps à autre un voyageur, l’air soulagé, en retire une d’un geste ferme. Hélène fixe le tapis, prise entre une irrésistible envie de dormir et la frénésie de se retrouver dans les rues de Madrid dans moins d’une heure.
-Hélène! Là-bas! La valise brune!
De l’autre côté du carrousel, Odette lui fait de grands gestes. D’un bond, Hélène s’élance sur une énorme valise brune et la hisse avec peine sur le chariot. Ne manque plus que sa valise.
-Señora, Señora.
-Pardon?
Hélène fixe l’homme qui se tient devant elle et reste interdite. La quarantaine avancée, mais fort bien conservée, la silhouette imposante, la posture déterminée, d’abondants cheveux noirs un peu ondulés, le teint légèrement cuivré, des yeux de feu et un sourire à faire damner une sainte. « On dirait une apparition! ». Hélène ne peut s’empêcher de sourire, elle se sent comme une adolescente qui vient d’apercevoir une rock star. Il faut bien l’admettre : c’est sans doute le plus bel homme qu’elle a approché de toute sa vie! Elle a beau bouder son plaisir depuis des années, difficile de rester insensible à une telle prestance!
-Vous parlez français? Je m’excuse, madame, mais je crois que vous avez ma valise…
Le ton légèrement ironique, le sourire encore plus prononcé et l’accent absolument délicieux!
-Ah! Non, c’est la valise de mon amie.
-Mais je…
-Tu l’as ramassée? Oh Hélène! Ce n’est pas ma valise.
Odette vient de la rejoindre.
-Ah bon! Ce n’est pas la tienne?
-C’est justement ce que je disais à madame…
-Ah, mon Dieu!
Odette a à peine murmuré son exclamation, mais Hélène l’a entendue et craint un fou rire. Connaissant le penchant de son amie pour les beaux hommes, surtout les Méditerranéens, elle imagine un peu la suite. Mais tout se règle assez rapidement, l’homme semblant pressé! Les valises sont dûment récupérées et, sur un charmant baise main, l’homme prend congé des deux amies.
-Encore désolée pour l’erreur…
-Mais se faire dérober quelque chose par une aussi jolie femme est un plaisir, madame.
Et le bellâtre s’éloigne à grandes enjambées.
-Et bien, dis donc, pour une femme délaissée, tu as l’œil!
-Odette, arrête un peu! J’ai vu une valise brune, j’ai sauté dessus, c’est tout. Allez, grouille, j’ai envie d’une bonne douche et d’un lit!
Ici dans cette longue rue étroite bordée de hautes maisons anciennes, les plus belles boutiques de mode de Madrid se succèdent. Hélène n’est pas très « luxe », mais comment ne pas frissonner de plaisir devant autant de raffinement?
Elle s’arrête devant la vitrine des cuirs Beltrami Cette fois, elle ne peut s’empêcher, elle qui aime tant le cuir. Dans la boutique, l’odeur de la peau tannée et du bois aiguise son plaisir. Les objets y sont hors de prix, mais chacun est un bijou de réalisation, une perfection. Elle s’attarde un peu et se résigne à sortir les mains vides.
L’impact du choc la fait vaciller. Elle attrape la bordure d’une étagère juste à temps, tandis que l’homme qu’elle vient de heurter de plein fouet dans la porte la rattrape par le bras.
-Je suis désolée, je ne regardais pas, je…
Hélène s’arrête, stupéfaite. Devant elle se tient l’inconnu de l’aéroport. L’homme à la valise brune et au sourire assassin.
-Ça va? Pas trop secouée?
-Ça va! Je m’excuse, j’étais absorbée par les beaux objets…
-Vous aimez?
Il esquisse un geste vers les étalages de la boutique.
-C’est magnifique! Bon, eh bien… bonne journée.
Il s’écarte pour la laisser passer, mais la rattrape dès qu’elle est sur la rue.
-Señora, mais vous avez d’abord tenté de me voler ma valise, puis failli me faire débouler dans la rue, je crois que cela vaut bien un café, non?
Les traits virils dégagent une sorte de puissance, le regard est flamboyant, mais la mimique est tout à coup copine, presque enfantine, et le sourire… Hélène rit de bon cœur.
-Oui, je crois que je peux bien vous offrir un café!
-Ah non, Señora! C’est moi qui vous invite. Je vous l’ai dit : venant de vous, même le vol serait un plaisir…
Il ne lui laisse pas le temps de répondre, lui offre le bras et l’entraîne au bout de la rue.
-Comme c’est beau!
Hélène s’est arrêtée brusquement. Des milliers d’azalées de toutes les teintes de rouge; d’énormes bouquets partout et sur chaque marche de l’imposant escalier qui apparaît au fond de Piazza de España et qui grimpe jusqu’à l’église de la Trinité des monts.
- Piazza de España, l’une des plus jolies places de Madrid. C’est maintenant la fête du printemps, d’où les azalées.
-C’est magnifique!
Hélène en frissonne d’émotion. Les façades du XVIe et du XVIIe siècle. La majesté de cet escalier baroque aux immenses paliers, ces milliers de fleurs qui le bordent, la foule qui flâne autour de la fontaine, le soleil caressant de mai, les petits marchands ambulants, tout contribue à faire de cet endroit un enchantement.
-Venez! Je vous emmène au Café Greco. L’endroit est pittoresque.
Une parenthèse, une sorte de bulle hors du temps? Hélène n’arrive pas à saisir ou à définir nettement ces instants. Une sorte de flottement. Elle est assise, là, devant un homme charmant qui lui fait d’ailleurs du charme, dans l’un des cafés les plus branchés de Madrid, en plein printemps méditerranéen. L’impression d’être dans un film. Soudain, la vie bien rangée de femme exemplaire et délaissée lui semble très lointaine et les perspectives qui s’offrent à elle, un peu déroutantes.
L’inconnu se nomme Raùl Jimenez, il a 50 ans, seul célibataire de son clan familial et, comme tous les hommes de la famille de sa mère, il participe aux destinées des cuirs Beltrami qu’il dirige depuis quelques années.
-Vous êtes libre pour le reste de la journée?
La question arrache Hélène à sa torpeur.
-Non, j’ai rendez-vous pour le travail. Pas loin d’ici sur la Via Del babuino.
-Vous êtes dans le domaine de l’art?
-Oui, comment le savez-vous?
-La via Del babuino est célèbre pour ses galeries.
Et puis, une aussi jolie femme doit fréquenter ce qui est beau!
Le sourire est presque ironique à force de charme. Hélène se secoue. « Réagis, ma fille, allez debout! »
-Merci, M. Raùl Jimenez, ce fut un plaisir…
-Non, ne partez pas si vite, laissez-moi au moins le nom de votre hôtel, un numéro de téléphone… Je pourrais vous faire les honneurs de Madrid.
-C’est gentil, mais notre emploi du temps est très chargé.
-Mais je ne sais presque rien de vous!
-Ah! Vous savez, il n’y a rien de vraiment intéressant à savoir. Tout au plus, il faut éviter de me rencontrer dans les portes ou… les aéroports! Merci encore.
Là-dessus, Hélène sort d’un pas rapide et s’empresse de s’engouffrer dans la Via Del Babuino où elle a rendez-vous avec un galeriste. Tout plutôt que de céder aux charmes de cet homme.
Bien joué, Hélène. Tu vois? Tu as l’œil! Je le savais. Prochain voyage, tu pourras te débrouiller toute seule. Hélène sourit. Elle est assez fière d’elle-même. Il lui a bien fallu quelques minutes pour ramasser ses idées en arrivant chez le galeriste, mais le plaisir du métier a vite repris le dessus et elle a mené son affaire tambour battant.
-Demain, je conclus l’affaire tandis que tu vas chez Nicodemo. On pourrait songer à un événement commun avec des femmes peintres d’ici et de chez nous…
Les deux femmes terminent leur souper en élaborant des projets pour le lendemain.
-Je suis éreintée! Je vais dormir. Tu n’oublies pas : on se retrouve chez Toreador. Tu as noté l’adresse? Tu vas voir : un régal de cuisine espagnole.
Hélène rentre, mais ne trouve pas le sommeil. Le visage de Raùl Jimenez lui revient trop souvent en mémoire à son goût. Elle n’a pas raconté sa rencontre à Odette. Elle redoute la spontanéité de son amie, qui serait bien capable de pires manigances.
D’un geste courtois, le maître d’hôtel lui indique une table près de la fenêtre. L’atmosphère du restaurant est agréable et Hélène est bien contente de pouvoir profiter de quelques minutes d’accalmie avant l’arrivée de son amie. La matinée a été épouvante. La directrice de la galerie l’a prise un peu de haut, elle en a perdu ses moyens et ne s’est pas montrée aussi convaincante qu’elle l’aurait voulu. De plus, elle a à peine fermé l’œil de la nuit et s’est éveillée à l’aube. « J’ai une tête à faire peur! » Elle referme son poudrier et tourne son regard vers la rue. Les badauds, les gens pressés du midi défilent sur la rue vers la Piazza. De l’autre côté de la rue, Odette lui fait signe, flanquée de deux hommes. L’un d’eux est comme prévu, le galeriste Bambino, l’autre, qu’elle ne distingue pas bien, est sans doute son assistant.
-Ça va? On ne t’a pas trop fait attendre? Regarde la belle surprise!
Odette rayonne. Elle s’écarte un peu pour laisser Hélène serrer la main de Bambino, qui lui-même s’écarte laissant apparaître la silhouette et le sourire de Raùl Jimenez qui la regarde sans mot dire, se contentant de sourire.
-Tu te souviens? C’est à lui que tu as failli voler une valise! Une belle coïncidence, non? Je te présente Raùl Jimenez, imagine-toi que c’est un bon ami de Bambino. Il est passé à la galerie et nous l’avons invité à se joindre à nous.
-Enchanté une fois de plus madame. Cette fois, nous aurons le plaisir de faire connaissance.
Hélène lui serre la main et se rassied, en se laissant presque tomber sur sa chaise. Elle se sent rougir malgré elle. Visiblement, Raùl Jimenez semble s’amuser de la situation. Il a tu, semble-t-il, leur rencontre de la veille. Elle lui en est reconnaissante.
Le repas se déroule sur une note légère. Art, design et voyages sont au menu de la conversation. Hélène se défend, se laisse prendre au charme du moment. Raùl s’avère un homme cultivé à la conversation agréable et elle se sent troublée quand il la regarde intensément, chaque fois qu’elle prend la parole. Elle ne sait plus si elle y prend plaisir ou si elle est effrayée par le trouble grandissant que lui inspire cet homme. Mais elle est troublée, ça elle ne peut le nier!
Hélène est sortie la première du restaurant tandis qu’Odette s’attarde aux toilettes et que Bambino s’occupe de régler la facture.
-Je n’ai pas voulu vous embrasser, mais d’avais tellement envie de vous revoir! Aussi, lorsque Bambino m’a présenté votre amie.
Raùl vient de la rejoindre sur le trottoir où l’air frais du soir embaume les parfums du printemps.
-Je vous remercie de ne pas avoir parlé de notre rencontre d’hier.
-Je devrais peut-être me vexer que vous en fassiez l’objet d’un secret.
-Non, je suis d’une nature discrète, c’est tout. Et Odette est adorable, mais elle est…
-Enthousiaste?
Hélène rit.
-Oui, on pourrait dire ça.
-Ah! Ces odeurs de fleurs partout, c’est magique!
Odette vient de sortir à son tour et leur lance à chacun un coup d’œil un peu soupçonneux. Dans la voiture, Hélène ne dit pas un mot. Elle s’en veut d’être aussi émue par ce pur étranger qu’elle ne reverra jamais de sa vie et qui réveille des frissons qu’elle croyait endormis à tout jamais et qu’elle préférait ne pas ranimer.
Bambino la dépose à l’hôtel en promettant de prendre Odette dès 9h30 le lendemain matin. Dans le hall, Hélène garde les yeux sur la moquette et tente d’échapper à l’interrogatoire d’Odette.
-Je ne te comprends pas! Cet homme t’a fait du charme toute la soirée et toi, tu fais comme s’il n’existait pas!
Hélène soupire tandis qu’Odette continue de la talonner de questions et de remarques jusqu’à la porte de sa chambre.
-Odette, tu m’exaspères, arrête!
-Tu sais, parfois Hélène, j’ai l’impression que ce n’est qu’une sorte de snobisme, comme si personne n’était assez bien pour toi… ou alors, c’est que tu as peur, oui c’est ça, tu as peur d’être heureuse, de vivre.
-De souffrir, Odette. Tout simplement de souffrir. Et si ça ne te fait rien, je vais dormir maintenant. Bonne nuit!
Elle ferme doucement, mais rapidement, la porte de la chambre. Elle n’arrive pas à croire qu’elle ait pu répondre une telle chose. De l’autre côté de la porte, Odette, mal à l’aise, mais surprise par ce qu’elle vient d’entendre, se promet d’en apprendre plus à leur retour à Montréal.
CHAPITRE VIII
- Raùl? Tu m’écoutes?
-Oui, bien sûr! Le bureau de New-York… Continue, je t’écoute.
-Non, justement, tu ne m’écoutes pas! Qu’est-ce qui se passe, tu as des ennuis?
-Mais non! Écoute, sois gentil. J’ai un coup de fil à passer. Donne moi quelques minutes et on s’y remet.
-Bien, si ça peut te libérer l’esprit… Je te rapporte un café.
La porte se referme avec un bruit feutré. Raùl se laisse tomber dans son fauteuil et se masse le cou pour chasser les courbatures d’une mauvaise nuit. Il ne comprend pas ce qui lui arrive, ou plutôt oui, il comprend trop bien.
D’habitude, dès qu’il pousse la porte de son bureau, tout le reste de sa vie semble s’évanouir. Plus rien d’autre ne compte que le travail et le plaisir de transiger, de créer, de gagner. Mais ce matin, la magie n’a pas opéré. Miguel a raison : il n’est pas là. Il est ailleurs… il est avec elle.
Il fixe la fenêtre, mais c’est l’image d’Hélène qui lui apparaît. Il y a chez cette femme une douceur, une tristesse tendre qui lui a touché l’âme. Il la trouvait très belle et qu’il lui était très difficile, en tant qu’homme, de ne pas être troublé par son charme. Elle est aussi entrée dans l’univers de ses fantasmes. Et il ne lui a fallu que quelques minutes en sa compagnie pour comprendre qu’elle ne pourrait jamais être une quelconque aventure. Hélène ne peut être que celle qu’il attend depuis si longtemps. Il sourit. C’est Miguel qui en ferait une tête de l’entendre penser ainsi! Lui qui a toujours défendu son célibat avec passion. Voilà qu’il se sent oppressé à la seule pensée de ne plus sentir sa présence si troublante.
Quand Miguel revient 10 minutes plus tard, Raùl lui dit qu’il part pour le reste de la journée.
-Mais où vas-tu?
-Loin, Miguel, très loin. Enfin, je l’espère.
Hélène repousse le drap d’un geste délicat. Ne pas le réveiller, mais simplement le regarder. Regarder son corps d’homme, ce dos puissant, ces épaules, cette nuque où dorment quelques bouclettes noires. Hélène plisse le nez de plaisir, de désir. Elle n’arrive pas à y croire.
Quinze jours que cette féerie a commencé. Le lendemain du souper à quatre, Raùl s’est présenté à l’hôtel. Il est monté à sa chambre, elle a ouvert la porte, et là, sans échanger un mot, ils ont laissé parler leurs yeux. Tout était dit. Elle n’a même pas résisté comme si elle l’attendait, elle l’a laissé entrer et, tandis qu’il la prenait dans ses bras, elle savait qu’elle venait enfin de se pardonner, de se donner le droit de vivre et d’aimer de nouveau. Quand elle a laissé tomber son peignoir à ses pieds, quand elle a senti ses mains sur sa peau, quand elle a goûté à la sienne, elle a su que cet homme l’avait ramenée à la vie. Elle dormait depuis si longtemps.
Et tout a coulé de source. Odette a fait preuve de discrétion, mais de complexité. Entre leurs rendez-vous d’affaires, les expositions et les démarches administratives, Raùl et elle ont réussi à s’approprier chaque minute. Il lui a offert Madrid, son Madrid comme il dit. Un à un, il lui a rappelé tous les plaisirs du corps et du cœur. Depuis plus de deux semaines, elle joue avec son propre désir comme un enfant avec un nouveau jouet. Et elle en redemande. Elle se sent assoiffée comme devant une oasis après une longue traversée du désert.
Les rayons du soleil qui entrent encore timidement dans la chambre créent des jeux d’ombre sur la peau cuivrée de Raùl. Il remue le bras, se réveille, tourne la tête, lui sourit, tend la main, lui caresse le visage et l’attire tout contre lui.
-Je dors encore, mais je fais un si joli rêve.
-Je suis réveillée, mais je fais le même rêve…
Des heures plus tard, ils remontent Piazza Novone main dans la main. Ils vont rejoindre Odette qui a passé la journée à courir les boutiques.
-Comment tu vois la suite?
Hélène lève un regard surpris vers son amie. Les deux femmes sont attablées tandis que Raùl s’est attardé à saluer des gens qu’il connait.
-Que veux-tu dire?
-On rentre à Montréal dans quatre jours…
-Arrête, je ne veux pas en parler ni même y penser…
Hélène est interrompue par l’arrivée de Raùl, elle tente de faire bonne figure, mais une sorte de grisaille voile son sourire. Quatre jours. Elle pourrait compter les heures. Elle n’a pas osé dire à Odette que Raùl lui a demandé de rester encore quelques semaines. Qu’il fait des projets, qu’il viendra à son tour à Montréal à l’automne. Qu’elle aura tout ce qu’elle veut et à son rythme. Elle n’osera jamais avouer à Odette qu’elle a une envie folle de faire toutes les folies qu’il lui propose, de tout plaquer pour être avec lui.
Elle ne lui avouera pas tout cela, simplement parce qu’elle n’y croit pas. Elle n’a pas pu résister à Raùl, à son désir, à cette romance. Mais elle n’est pas assez naïve pourquoi qu’un si bel homme, homme de grande valeur, cultivé peut vraiment être amoureux d’elle. Cette pensée lui arrache une grimace de douleur qu’elle ne peut réprimer.
-Ça va chérie?
-Oui, Raùl ça va. Une petite crampe rien du tout.
Il pleut sur Madrid, la matinée est brumeuse. Sous la pluie, Madrid n’est pas moins beau, il n’en est que plus romantique. Hélène accélère le pas. Elle sait que Raùl doit quitter le bureau vers 12h et elle ne veut pas le rater. Elle n’a pas pu le prévenir de sa venue. Il devait rentrer très tard d’une journée passée à ses bureaux de Cadiz la veille et, en principe, ils ne doivent se retrouver qu’en fin de journée. Mais elle ne veut pas attendre, de peur de changer d’idée. L’avant-veille, Raùl et elle ont passé la nuit à parler. Surtout Raùl, qui échafaudait des plans un peu fous. Elle lui a alors tout avoué. Sa relation avec Étienne l’ex-détenu et comment il s’est moqué d’elle, sa relation avec son ex-mari. Elle a comme une déchirure au cœur en pensant à ses mésaventures. Pourtant au début de sa relation avec Étienne, tout en lui, la plaisait, son intelligence vive, son intensité, le feu qui brûlait ses yeux, son pas sautillant et son corps agile, son aisance et sa franchise absolues dès qu’il s’agissait de sexualité, ses envies, ses plaisirs solitaires, ses coups d’un soir. Elle aimait sa vulnérabilité. Malgré ses airs durs et tranchants (sans doute imposés et renforcés par son travail au bureau) il était prêt à tout, pour peu qu’on l’y invite avec tact, à explorer ses douleurs quand il était incarcéré.
Puis de son ex-mari d’être obligé de vivre avec un homme qu’elle détestait. Ce sont de vieilles histoires, qui remontent, il y a quelques années. Pourtant ces sentiments n’ont pas disparu, ils sont enfoui au plus profond d’elle, encore vivaces, ils influent sur sa vie.
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