DIFFÉRENTS DESTINS DE LA PULSION LÉTHIQUE
Tout comme la libido subit des transformations au cours de la vie psychique (pensons à la qualité tantôt narcissique, tantôt objectale, ou encore aux stades de développement), la pulsion léthique évolue, ce qui donne lieu à des changements qualitatifs, dans ses passages de la position concrète à la position schizoparanoïde, puis à la position dépressive. Cette hypothèse suppose que le destin de la pulsion n’est pas indépendant de la configuration globale dans laquelle elle se déploie. La nature première de la pulsion léthique, son facteur de départ, se manifeste comme une force silencieuse de retrait, typique de la position concrète : ralentissement, immobilité, silence, introversion, survie, digestion, sommeil, etc. en sont d’autres manifestations dans la sphère normale. C’est pourquoi la position concrète n’est pas vécue de façon agressive (même inconsciemment), mais plutôt dans le registre d’un vide, de l’oubli, de l’absence, de la perte, de la mort. Mais une fois intégrée à la position schizoparanoïde, la pulsion léthique devient ensuite une force destructrice et agressive « en plein », donnant lieu à une action plus complexe. La destructivité inhérente selon Freud et Klein à la pulsion de mort, suppose la « volonté » d’un sujet organisé, et ne peut être que postérieure à l’action léthique, version position concrète, la violence de la position schizoparanoïde peut se déchaîner, avec ses multiples remous défensifs (clivage et le reste) lorsque la pulsion d’autoconservation a pu générer un minimum de satisfaction et être source de plaisir. L’activation de la pulsion libidinale assurant une base au clivage entre « bon » et « mauvais ». Dans le ca contraire, le travail de destruction reste silencieux, « oublieux » et complètement exempt de la notion relationnelle sur laquelle une sorte de voile a été jeté.
Enfin, on peut penser que l’élément surmoïque et la culpabilité présents dans la position dépressive constituent l’étape suivante de cette complexification et de cette structuration de la pulsion léthique. Freud (1923) a relié l’action du Surmoi à la pulsion de mort, pour rendre compte de la violence du Surmoi à l’égard du Moi. Le Surmoi œdipien au sens Freudien, qui ne peut survenir dans la mise en place de la position dépressive et sans une résolution au moins partielle de l’œdipe, nous sembles donner à voir, par sa complexité et son organisation, une version plus élaborée et plus complète de ce que la pulsion léthique peut effectuer. L’élaboration tient principalement au fait que la distance que la pulsion génère ne concerne plus l’objet réel ou le soi, mais la représentation de l’objet et la représentation du Soi. La pulsion léthique, dans ce contexte, ne sert plus la destruction de l’appareil psychique, mais sa différenciation.
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