La retraite implique une dépendance économique des individus face à la société et elle dévalorise le retraité (Guillemard et Lenoir, 1974). Le travailleur âgé trouve parfois humiliant de recevoir un revenu sans le gagner à travailler. Gagner son pain à la sueur de son front est un leitmotiv souvent présent dans la pensée des vieux travailleurs. Il s’agit là d’un vieil héritage du jansénisme et de l’éthique protestant du travail. Le fait de se sentir dans une catégorie à part, c’est-à-dire faire partie de la population dépendante plutôt que de la population active, engendre un sentiment d’insécurité, d’infériorité et de dévalorisation. Par contre Guillemard signale que le droit à la pension corrige graduellement cet état de fait.
Au moment de la retraite, le travailleur perd son statut; il devient un vieux (Barus-Michel, 1981). Son exclusion de la sphère du travail affecte l’ensemble de ses rapports avec les amis, sa famille et son milieu. Le moment de la retraite marque l’entrée dans le vieillissement nous dit Guillemard (1977). La mise à la retraite est un processus qui déclenche une modification de l’image de soi et remet en question l’organisation de la personnalité.
Carette (1987), Plamondon et Plamondon (1984) tout autant que Guillemard (1977) et Guillemard et Lenoir (1974) insistent sur l’importance des classes sociales pour comprendre l’adaptation à la retraite.
À l’âge de la retraite les classes populaires ont déjà perdu bon nombre de rôles
sociaux de l’âge adulte et ont déjà vu diminuer leur valeur sociale.
Toutes formes d’avoirs et d’aptitudes qu’elles pouvaient détenir sont usées ou
obsolètes (Guillemard, 1977, p. 25).
On voit que pour certaines classes privilégiées, le passage à la retraite est une phase de transition seulement, c’est-à-dire que le travailleur quitte un travail rémunéré pour une autre forme d’activité tout aussi gratifiante que le travail. C’est souvent le cas des intellectuels qui en profitent pour écrire leurs mémoires.
À l’opposé, les retraités des classes ouvrières sombrent dans l’anonymat et le désoeuvrement. Ce qui signifie qu’à la mise à la retraite :
Le sujet perd son identité sociale et nous assistons non seulement à un
processus de marginalisation et de désintégration, mais également à une crise de
personnalité. Toute la conception de soi doit être restructurée au moment
de la retraite puisque la dévalorisation du statut et la réduction de la
capacité sociale consécutive à la cessation d’activité font éclater les
mécanismes antérieurs sur lesquels étaient fondée l’identité sociale de
l’individu (Guillemard, 1977,p.27).
* à suivre *
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