Nous vivons tous de la répétition dans notre vie de tous les jours. Notre univers spatio-temporel est structuré jusqu’à la retraite en fonction de l’objet du travail, l’heure du lever, du déjeuner, du transport, de la tâche à accomplir, des pauses et des départs. L’activité de travail est le structurant de notre vie quotidienne. Cependant, nous comprenons difficilement comment des personnes âgées qui jouissent de la possibilité d’occuper leur temps comme elles le désirent s’imposent une ponctualité même si personne ne les y oblige, une répétition dans les moindres gestes de leur vie que d’autres adultes actifs prendraient pour une contrainte.
C’est à ce type d’organisation quotidienne de leur vie que les participants aux ateliers sont confrontés. La routine commande presque tout : leurs gestes quotidiens, leurs courses, leur promenade, la récupération du courrier, le ménage, l’achat du journal, l’usage de la télé, etc., s’effectuent aux mêmes heures. Leurs journées sont stéréotypées et semblent se ressembler.
En effet, par leurs rituels de vie, ils ont tendance à immobiliser la vie autour d’eux. En d’autres termes, on peut dire qu’ils effectuent des mouvements en cercle pour ne pas s’éloigner de leur base. Ils semblent de prime abord vivre dans un présent statique, parce qu’ils ne remarquent plus les changements.
Au fur et à mesure que les participants s’impliquaient émotivement dans le déroulement de l’atelier, nous nous sommes aperçus que la routine ne leur était pas désagréable, que la répétition était une façon pour eux de ruser avec le temps, une façon de se protéger contre le temps qui passe et de gérer son angoisse face à l’accélération du temps. C’est une forme de résistance.
Michel Maffessoli nous suggère de « …comprendre la répétition comme la négation du temps » (…) « elle accentue le présent et son vouloir vivre. Répéter revient à nier le temps, c’est le signe d’un ‘non-temps’ qui caractérise le concret de la vie quotidienne, l’instant vécu ».
La répétition transforme le présent en une éternité, elle fait vivre les participants dans l’intemporel. « L’éternel retour permet à la vie sociale et individuelle de se rejouer toujours et nouveau. En ce sens, le passé et le présent maîtrisés comportent un présent éternel ».
Nous avons renforcé les sentiments exprimés voulant que la répétition apaise l’esprit des participants, les sécurise et peut être le lieu de la préservation de soi. Elle permet aussi de donner significations aux multiples situations et pratiques quotidiennes car « …dans la répétition s’exprime un relativisme créateur ». « La répétition archétypale ne signifie pas forcément stagnation, car il peut y avoir dans celle-ci réappropriation effective et originale de pratiques et de situations qui s’enracinent fortement dans une qualité de vie ».
* à suivre *
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