LA RETRAITE ET LA PERTE DU MOI
Nous pouvons associer, à un événement comme celui de la prise de la retraite, la perte successive des éléments constituant le concept de soi (revenu, statut social, rôle, prestige, reconnaissance, relations sociales, etc.,). À ce sujet Balier (1982), nous dit que le retraité ne conserve plus ses relations sociales par crainte de rencontrer chez ses compagnons une image dévalorisée de lui-même. Il tient l’autre à distance et de ce fait, il accentue la perte de souplesse de sa personnalité. Les changements qui surviennent à la retraite apportent irrémédiablement des modifications dans les comportements de l’individu.
La mise à la retraite provoque une remise en question des habitudes et des manières de penser du retraité. Autant le travail était source d’autonomie, autant la retraite amène une dépendance sociale et économique. C’est pourquoi le retraité se trouve mis au rancart et il sent très bien qu’il perd son identité.
Cette mise à l’écart par la prise de la retraite s’explique par un refus social d’accorder une participation du retraité aux valeurs dominantes c’est-à-dire le progrès, l’efficacité, l’autonomie, le profit, le travail, l’avenir, le succès. Le retraité devient un exclu.
La société exige du retraité qu’il fonctionne sur un registre de comportements spécifiques mais qui est complètement inadapté à sa réalité. Le retraité est placé dans une situation paradoxale, c’est-à-dire celle de la non-participation obligatoire à un univers de valeurs de la population active. D’ailleurs certains retraités prétendent que :
…on n’a plus qu’une chose à faire quand on est vieux, c’est regarder la
télévision; on a absolument aucun moyen de s’offrir ce qu’elle nous
propose : voyage, amour, sveltesse, consommation (Simard, 1980, p. 25).
Il serait logique de croire qu’en puisant et en utilisant son soi personnel le retraité pourrait, malgré les pressions sociales, s’actualiser à travers son potentiel psychologique. Comme celui-ci s’acquiert par le vécu ou par un processus intrinsèque au fil du temps, il devient illusoire de prétendre que le retraité sera reconnu par les autres alors que les valeurs actuelles sont fondées sur l’extériorité. Simard (1980) est d’avis qu’il est difficile pour le retraité d’affirmer son moi car la société n’attend plus rien de lui. L’éclatement du moi ou la crise d’identité chez le retraité naît de cette absence de sens ou d’un profond vide éprouvé face au terme de sa vie. Dans ce contexte, comment peut-on prendre goût à la vie lorsqu’on est coupé de toutes les décisions?
* à suivre *
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