Dans un texte remarquable portant sur « Les enfants de la guerre », Nayiri Tavlian trace un tableau saisissant de ce que signifie pour des jeunes de vivre et de survivre dans un contexte de violence généralisée :
« Les enfants qui grandissent dans un environnement de guerre et de violenceMadame Tavlian est d’origine libanaise et sait très bien de quoi elle parle, le Liban étant malheureusement devenu le symbole d’une guerre civile interminable, de massacres, d’attentats, etc.
développent des valeurs d’auto-défense physique et psychologique, qui leur
permettent de pouvoir survivre… »
Par un phénomène pervers d’identification aux méthodes utilisées par leurs agresseurs, certaines jeunes victimes de la violence sous toutes ses formes peuvent être amenées à considérer la violence comme un moyen normal et efficace de solutionner les conflits. Et les occasions de conflits ne manquent certes pas dans leur nouvelle société.
Dès leur arrivée, les jeunes réfugiés sont plongés dans une époque et une société où les jeunes valorisent la violence sous toutes ses formes sous l’influence, entre autres, de la télévision et de jeux vidéo. Par ailleurs, on remarque à Montréal une recrudescence des attitudes xénophobes ou racistes, sous l’impulsion de deux facteurs principaux : la récession économique et l’apparition de groupes organisés d’inspiration néo-nazie ou raciste, tels les « skin-heads » et le K.K.K.
Une troisième donnée vient compliquer la situation : les jeunes réfugiés du niveau secondaire entrent dans des polyvalentes en pleine crise où l’anonymat et une règlementation tatillonne sont peu adaptés à leur tempérament et à leurs habitudes culturelles. Comme conséquence, de nombreux jeunes réfugiés du niveau secondaire sont placés sur des voies d’évitement ou envoyés au secteur adulte. Surtout dans le cas des mineurs qui n’ont pas de famille immédiate au Canada, les risques de se retrouver dans les rues de la métropole en train de flâner sont réels et lourds de conséquences.
Ces dernières remarques peuvent laisser un goût alarmiste amer. Elles sont plutôt dictées par le sentiment de l’urgence de la situation : notre avenir à tous comme société tolérante et pacifique va se jouer autour de l’école et des centres de loisirs, là où se regroupent et malheureusement trop souvent s’affrontent les jeunes.
Pour terminer cette partie, je fais mienne la conclusion de Nayiri Tavlian, vu que je partage entièrement sa vision des choses :
« Les enfants de la guerre (et je me permets d’ajouter : les enfants de la
violence) sont exceptionnels à plusieurs titres. Ils ont pu survivre dans un
enfer dans lequel leurs aînés ont souvent succombé, et ont ainsi développé une
volonté hors du commun, dont ils se servent pour s’enfermer dans leur monde
imaginaire à eux. Si seulement nous pouvions contribuer à libérer ces volontés
emprisonnées. »
* à suivre *
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