Une autre caractéristique des groupes de traitement pour conjoints violents est que l’on y observe des taux d’abandon assez élevés. Cette question apparaît d’autant plus importante que, dans certaines études, on a observé des niveaux plus élevés de récidive chez les hommes abandonnant avant la fin du traitement. Par exemple, Edleson et Grusznski ont observé que 67% des hommes ayant complété le programme sont signalés comme non violents par leur conjointe et ce, 4 mois après le traitement. Ce pourcentage est de 54% pour les hommes ayant abandonné (le suivi ayant été fait en moyenne 9 mois après l’abandon). Une autre étude des mêmes auteurs n’a cependant pas fait ressortir de résultats aussi différents. En effet, on a enregistré que 59% des hommes ayant complété le programme et 52% des décrocheurs sont demeurés non violents, 1 an après la prise de contact, selon les déclarations des conjointes. Finalement, les travaux de Chen et al. Ont mis en lumière que le fait de suivre un programme a un impact sur la récidive à condition que l’homme ait assisté à au moins 75% des rencontres prévues au programme.
Aussi, certains chercheurs ont tenté de mettre en évidence des facteurs permettant de distinguer les hommes qui abandonnent de ceux qui complètent l’ensemble de la démarche. À ce sujet, Grusznski et Carrillo ont tout d’abord constaté que les hommes ayant complété l’ensemble de la démarche font preuve de moins de violence indirecte, tout de suite après la fin de la thérapie. Ils sont par ailleurs davantage scolarisés et plus nombreux à travailler à temps plein. D’autre part, ces hommes ont été plus souvent témoins d’abus dans leur enfance, mais moins souvent violentés eux-mêmes que l’autre groupe. Les chercheurs ont aussi observé que ces hommes obtiennent un score plus élevé à la mesure du « contrôle », tel qu’observé à l’aide du Fundamental Interpersonal Relations Orientation-Behavior Scale (Schultz cité dans Grusznski et Carillo). Enfin, les hommes qui complètent le programme sont aussi ceux qui ont plus d’enfants. Pour Gruzsnski et Carillo, ce dernier résultat laisse croire qu’il y a peut-être un lien entre le fait de compléter le traitement et la durée de la relation avec la conjointe. Les travaux d’Hamberger et Hastings font ressortir que les décrocheurs ont des dossiers criminels davantage chargés. Par contre, les hommes sous ordonnance du tribunal sont moins portés à abandonner. L’analyse discriminante des différentes variables à l’étude fait ressortir que le statut de volontaire, la race, l’emploi, le fait de posséder un dossier criminel avant d’intégrer le programme et le résultat obtenu à l’échelle de consommation d’alcool, sont les indicateurs les plus déterminants dans la prédiction de la poursuite ou de l’abandon du programme. Cette combinaison de facteurs permet de prédire correctement l’abandon ou la poursuite du programme dans 74% des cas.
Saunders et Parker ont eux aussi cherché à mieux comprendre les facteurs associés à la poursuite ou non d’un programme de traitement. Les résultats démontrent que pour les hommes faisant preuve de violence sévère à l’endroit de la conjointe, le fait d’ëtre sous ordonnance de la Cour est associé à la poursuite du programme chez les hommes jeunes et n’ayant pas fréquenté le collège. À l’opposé, la poursuite du programme chez les hommes âgés de plus de 25 ans était associée au fait de posséder au moins une scolarité de niveau collégial et de s’être présentés volontairement au programme. Finalement, la participation volontaire au programme de traitement est la variable la plus fortement associée à la poursuite du programme chez les hommes n’ayant pas rapporté user de violence sévère. Dans une seconde étude, ces mêmes auteurs (Saunders & Parker) ont tenté d’expliquer l’abandon du programme en examinant différentes caractéristiques psychologiques et attitudes de l’homme violent. L’analyse de régression multiple comprenant ces variables a fait ressortir que le manque d’accord dans le couple est le facteur de prédiction le plus important de la poursuite du programme. Pour ces chercheurs, ce dernier résultat, quoique surprenant, laisse supposer que ces hommes sont davantage conscients du travail qu’ils doivent faire pour régler leurs problèmes et, ainsi, sont plus enclins à demeurer dans le programme. De plus, lorsque l’on a ajouté à ces variables psychologiques les données socio-démographiques, le fait d’avoir un emploi est demeuré un facteur important dans l’explication de la poursuite du programme. Finalement, il faut noter que le taux le plus bas de poursuite du programme se retrouve chez les hommes en probation. Pour les auteurs, ceci s’explique statistiquement par les facteurs démographiques, notamment le fait d’ëtre sans emploi, ce qui corrobore les résultats obtenus précédemment par Carrillo.
* à suivre *
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