mercredi 29 juin 2011
VIOLENCE FAMILIALE 7e partie
Les formes de violence conjugale
La violence conjugale revêt plusieurs formes : coups, brûlures, blessures infligées à l’aide d’objets, viols, agressions sexuelles, menaces, intimidation, violence verbale et psychologique. Chacune de ces formes de violence atteint l’intégrité physique et psychologique. Si la violence verbale est moins spectaculaire, elle n’en est pas moins préjudiciable et destructrice au même titre que les coups. Être dénigrée devant autrui, se voir interdire des sorties avec ses amies, perdre son réseau affectif, se faire dire qu’on est bonne à rien, être toujours surveillée, se faire crier après continuellement, recevoir des menaces de coups même si elles ne sont pas mises à exécution, vivre dans la peur du coup ou du cri, se faire insulter, se faire donner des ordres, voilà mille et une facettes de la violence qui ne laissent pas de traces physiques mais réussissent à démolir l’estime de soi et l’intégrité morale de la femme qui subit de la violence. Les types de violence psychologique, verbale et économique peuvent se produire seuls, mais ils s’accompagnent le plus souvent des formes de violence physique et sexuelle plus graves.
mardi 28 juin 2011
lundi 27 juin 2011
VIOLENCE FAMILIALE 5e partie
Les femmes sont-elles davantage victimes de la violence grave?
De l’autre côté du miroir, lorsque nous examinons les statistiques de violence conjugale provenant des sources policières, nous obtenons un tout autre portrait. En effet, les taux de violence conjugale sont alors plus bas mais impliquent une violence physique majeure, plus grave, et, surtout, ils montrent une asymétrie dans la violence subie. La majorité des agresseurs sont des hommes et la majorité des victimes sont des femmes. La violence des hommes est alors instrumentale, exercée dans le but de contrôler la partenaire. Elle est plus systématique et persistante, elle se poursuit au fil du temps.
La violence conjugale majeure cause des blessures et a des conséquences graves sur le plan de l’intégrité physique et mentale. Le taux de blessures nécessitant des soins médicaux ou entraînant une absence au travail varie de 50% à 75%. La violence des femmes, dans ce contexte, est expressive et autodéfensive. On parle d’une dynamique de terrorisme conjugal où les femmes subissent de manière systématique des agressions physiques, verbales et psychologiques.
Dans les enquêtes de victimisation, les personnes déclarent les actes violents perçus comme criminels. Il y a donc une sous-représentation de la violence mineure. Enfin, les données ne sont pas généralisables.
De l’autre côté du miroir, lorsque nous examinons les statistiques de violence conjugale provenant des sources policières, nous obtenons un tout autre portrait. En effet, les taux de violence conjugale sont alors plus bas mais impliquent une violence physique majeure, plus grave, et, surtout, ils montrent une asymétrie dans la violence subie. La majorité des agresseurs sont des hommes et la majorité des victimes sont des femmes. La violence des hommes est alors instrumentale, exercée dans le but de contrôler la partenaire. Elle est plus systématique et persistante, elle se poursuit au fil du temps.
La violence conjugale majeure cause des blessures et a des conséquences graves sur le plan de l’intégrité physique et mentale. Le taux de blessures nécessitant des soins médicaux ou entraînant une absence au travail varie de 50% à 75%. La violence des femmes, dans ce contexte, est expressive et autodéfensive. On parle d’une dynamique de terrorisme conjugal où les femmes subissent de manière systématique des agressions physiques, verbales et psychologiques.
Dans les enquêtes de victimisation, les personnes déclarent les actes violents perçus comme criminels. Il y a donc une sous-représentation de la violence mineure. Enfin, les données ne sont pas généralisables.
vendredi 24 juin 2011
VIOLENCE FAMILIALE 4e partie
Les hommes sont-ils victimes de violence conjugale?
Les résultats obtenus dans les enquêtes portant sur la résolution des conflits familiaux indiquent une symétrie de la violence conjugale. Les taux de violence vécue par les conjoints sont élevés et ont tendance à être équivalents entre les hommes et les femmes.
Ce résultat est constant dans toutes les enquêtes. Dans l’ESG de 1999, le taux de prévalence de la violence subie de la part du partenaire actuel est de 13/00 pour les hommes et de 17/00 pour les femmes au Québec. Au Canada, elle est de 17/00 tant pour les hommes québécois et 29/00 pour les femmes. Les taux quinquennaux paraissent étonnants. Cela signifie-t-il que les hommes sont davantage victimes que les femmes? Selon Laroche (2003, p.37), s’il se confirme dans des enquêtes subséquentes, cet écart sur cinq ans pourrait vouloir dire que « les hommes ont tendance à demeurer plus longtemps que les femmes dans une union marquée par la violence conjugale ». Il est aussi possible que la « désistance » de la violence conjugale soit plus élevée chez les femmes que chez les hommes.
Mais pourquoi existe-t-il une telle symétrie des taux de violence conjugale subie par les femmes et par les hommes dans ces enquêtes? Cela est dû au contexte dans lequel se déroulent ces enquêtes de population. Elles portent sur la déclaration des comportements dans le couple. Cela touche essentiellement la violence mineure, commune, celle dont on peut dire qu’elle est situationnelle. Ce type de violence n’est pas nécessairement chronique et il survient à l’occasion. Il n’implique pas des séquelles graves immédiates et n’est pas considéré par les partenaires eux-mêmes comme un acte criminel. Des 40% à 80% de ces actes ne sont pas rapportés en tant que crimes. La violence constatée dans les enquêtes portant sur des conflits familiaux est plus fréquente, relativement mineure, et elle implique une réciprocité des attaques entre les partenaires, la victime pouvant être aussi l’agresseur. Certains auteurs parlent de mutualité de la violence situationnelle; elle sous-tend une dynamique des relations interpersonnelles axée sur des actions agressives dans la résolution des conflits. Le caractère bidirectionnel de cette violence expliquerait la symétrie dans la prévalence des taux de violence subie par les femmes et les hommes. On peut certes affirmer que les hommes aussi subissent de la violence de la part de leur conjointe. Par contre, la violence grave est peu déclarée dans les enquêtes de population pour des raisons de conformité sociale.
Les résultats obtenus dans les enquêtes portant sur la résolution des conflits familiaux indiquent une symétrie de la violence conjugale. Les taux de violence vécue par les conjoints sont élevés et ont tendance à être équivalents entre les hommes et les femmes.
Ce résultat est constant dans toutes les enquêtes. Dans l’ESG de 1999, le taux de prévalence de la violence subie de la part du partenaire actuel est de 13/00 pour les hommes et de 17/00 pour les femmes au Québec. Au Canada, elle est de 17/00 tant pour les hommes québécois et 29/00 pour les femmes. Les taux quinquennaux paraissent étonnants. Cela signifie-t-il que les hommes sont davantage victimes que les femmes? Selon Laroche (2003, p.37), s’il se confirme dans des enquêtes subséquentes, cet écart sur cinq ans pourrait vouloir dire que « les hommes ont tendance à demeurer plus longtemps que les femmes dans une union marquée par la violence conjugale ». Il est aussi possible que la « désistance » de la violence conjugale soit plus élevée chez les femmes que chez les hommes.
Mais pourquoi existe-t-il une telle symétrie des taux de violence conjugale subie par les femmes et par les hommes dans ces enquêtes? Cela est dû au contexte dans lequel se déroulent ces enquêtes de population. Elles portent sur la déclaration des comportements dans le couple. Cela touche essentiellement la violence mineure, commune, celle dont on peut dire qu’elle est situationnelle. Ce type de violence n’est pas nécessairement chronique et il survient à l’occasion. Il n’implique pas des séquelles graves immédiates et n’est pas considéré par les partenaires eux-mêmes comme un acte criminel. Des 40% à 80% de ces actes ne sont pas rapportés en tant que crimes. La violence constatée dans les enquêtes portant sur des conflits familiaux est plus fréquente, relativement mineure, et elle implique une réciprocité des attaques entre les partenaires, la victime pouvant être aussi l’agresseur. Certains auteurs parlent de mutualité de la violence situationnelle; elle sous-tend une dynamique des relations interpersonnelles axée sur des actions agressives dans la résolution des conflits. Le caractère bidirectionnel de cette violence expliquerait la symétrie dans la prévalence des taux de violence subie par les femmes et les hommes. On peut certes affirmer que les hommes aussi subissent de la violence de la part de leur conjointe. Par contre, la violence grave est peu déclarée dans les enquêtes de population pour des raisons de conformité sociale.
jeudi 23 juin 2011
VIOLENCE FAMILIALE 3e partie
La violence conjugale
« Une femme sur deux est victime de violence. » Titre alarmiste? Au Canada, plus d’une femme sur deux avoue avoir été victime d’un acte de violence physique ou sexuelle au cours de sa vie adulte (Statistique Canada, 1993). Près de 48% de ces femmes ont été agressées par un homme qu’elles connaissaient – 25% par leur conjoint.
En 1980, le Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme publiait une étude basée sur des données de 1978 affirmant que, « chaque année, une Canadienne sur 10 était battue ». Depuis, différentes statistiques circulent et soulèvent toujours des questions sur leur validité. Ce qu’il faut savoir, c’est qu’il existe deux sources de données qui fournissent un portrait contrasté de la violence conjugale. La première source renvoie à une catégorie d’études qui portent sur les stratégies de résolution des conflits familiaux. Elle fournit des statistiques concernant les taux de violence subie par les femmes et par les hommes. Dans ce genre d’enquête, les taux de violence conjugale sont étonnamment semblables entre les femmes et les hommes. Nous verrons pourquoi. La deuxième source provient des données de victimisation liée à des actes criminels rapportées par les corps policiers, les services judiciaires, les maisons d’hébergement et aussi des groupes cliniques. Dans ce cas, la violence conjugale est plus grave, a des conséquences qui touchent la santé physique des personnes et est asymétrique, les femmes y étant les victimes dans plus de 80% des cas et les hommes, les agresseurs (Laroche, 2003).
Les statistiques et le type de violence conjugale
Les chercheurs utilisent l’Échelle des tactiques de conflit (Conflict Tactics Scale ou CTS), élaborée par le sociologue M.A. Strauss dès 1971 et remaniée depuis ce temps. Cet instrument sert à mesurer les actions auxquelles un membre de la famille (homme ou femme) peut avoir recours à l’occasion d’un conflit ou d’une dispute avec un autre membre de la famille. L’échelle est composée de 18 énoncés d’action distribués sur un continuum entre les actions dites raisonnées, les actions d’agression verbale et les actions d’agression physique et sexuelle. La CTS a été utilisée dans de nombreuses études tant aux Etats-Unis qu’au Canada, dans au moins 20 pays et auprès de plus de 70,000 participants d’origine sociale et ethnique diverse. Statistique Canada a utilisé dans l’Enquête sociale générale de 1999 (ESG) une version adaptée de la CTS.
Le taux de violence conjugale, la prévalence sur 12 mois est la prévalence sur 5 ans, de la part du conjoint actuel ou d’un ex-conjoint, Canada et Québec, ESG, 1999.
« Une femme sur deux est victime de violence. » Titre alarmiste? Au Canada, plus d’une femme sur deux avoue avoir été victime d’un acte de violence physique ou sexuelle au cours de sa vie adulte (Statistique Canada, 1993). Près de 48% de ces femmes ont été agressées par un homme qu’elles connaissaient – 25% par leur conjoint.
En 1980, le Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme publiait une étude basée sur des données de 1978 affirmant que, « chaque année, une Canadienne sur 10 était battue ». Depuis, différentes statistiques circulent et soulèvent toujours des questions sur leur validité. Ce qu’il faut savoir, c’est qu’il existe deux sources de données qui fournissent un portrait contrasté de la violence conjugale. La première source renvoie à une catégorie d’études qui portent sur les stratégies de résolution des conflits familiaux. Elle fournit des statistiques concernant les taux de violence subie par les femmes et par les hommes. Dans ce genre d’enquête, les taux de violence conjugale sont étonnamment semblables entre les femmes et les hommes. Nous verrons pourquoi. La deuxième source provient des données de victimisation liée à des actes criminels rapportées par les corps policiers, les services judiciaires, les maisons d’hébergement et aussi des groupes cliniques. Dans ce cas, la violence conjugale est plus grave, a des conséquences qui touchent la santé physique des personnes et est asymétrique, les femmes y étant les victimes dans plus de 80% des cas et les hommes, les agresseurs (Laroche, 2003).
Les statistiques et le type de violence conjugale
Les chercheurs utilisent l’Échelle des tactiques de conflit (Conflict Tactics Scale ou CTS), élaborée par le sociologue M.A. Strauss dès 1971 et remaniée depuis ce temps. Cet instrument sert à mesurer les actions auxquelles un membre de la famille (homme ou femme) peut avoir recours à l’occasion d’un conflit ou d’une dispute avec un autre membre de la famille. L’échelle est composée de 18 énoncés d’action distribués sur un continuum entre les actions dites raisonnées, les actions d’agression verbale et les actions d’agression physique et sexuelle. La CTS a été utilisée dans de nombreuses études tant aux Etats-Unis qu’au Canada, dans au moins 20 pays et auprès de plus de 70,000 participants d’origine sociale et ethnique diverse. Statistique Canada a utilisé dans l’Enquête sociale générale de 1999 (ESG) une version adaptée de la CTS.
Le taux de violence conjugale, la prévalence sur 12 mois est la prévalence sur 5 ans, de la part du conjoint actuel ou d’un ex-conjoint, Canada et Québec, ESG, 1999.
mercredi 22 juin 2011
VIOLENCE FAMILIALE 2e partie
Une question de pouvoir et d’inégalité
Plusieurs recherches montrent que le modèle de la violence familiale s’appuie sur les notions de pouvoir et d’inégalité des sexes et des générations (Propper, 1990). Ce sont les membres les plus forts de la famille qui exercent une violence envers les plus faibles ou les plus démunis : les maris sont violents à l’égard de leur épouse et les parents vis-à-vis de leurs enfants parce qu’ils détiennent un pouvoir social, économique et physique sur eux. L’utilisation de la violence devient alors un moyen de contrôler les individus sur qui s’exerce le pouvoir.
Dans notre société, le groupe des hommes est en situation de pouvoir et d’autorité. Malgré les changements apportés dans les lois, l’idéologie patriarcale sur laquelle est basée cette position de domination est loin d’être disparue. Qui plus est, les structures existantes dans le monde du travail et des loisirs font perdurer cette position privilégiée du groupe des hommes.
Le contrôle patriarcal ne s’exerce pas nécessairement par la violence, mais la violence est un moyen de contrôle qui a été et continue à être souvent employé par les hommes, dans la mesure où elle est tolérée par la société, comme nous le verrons un peu plus loin. Lorsqu’une femme agresse son mari, c’est que la relation de pouvoir est inversée dans le couple. Il en est de même des enfants adultes à l’endroit des parents âgés.
Le pouvoir est-il au cœur de la violence?
Il faut comprendre que les différentes formes de violence s’inscrivent dans des relations de pouvoir où les individus concernés n’occupent pas les mêmes positions : les agresseurs sont en position de domination et les victimes sont dépendantes, moralement et économiquement, de leurs agresseurs.
Du point de vue de la sociologie féministe, le fondement de la violence conjugale se trouve dans les relations inégalitaires entre les sexes. Plus les relations affectives et économiques entre une fille et un garçon, une épouse et son mari, sont inégalitaires, plus les possibilités de voir la violence s’installer dans la relation conjugale sont élevées. D’ailleurs, des études ont montré que, là où les couples vivent leurs relations sur le mode égalitaire, les formes de violence sont quasi absentes. De même, les femmes qui sont indépendantes sur le plan financier ont davantage la possibilité de choisir un mari non violent (Propper, 1990).
Plusieurs recherches montrent que le modèle de la violence familiale s’appuie sur les notions de pouvoir et d’inégalité des sexes et des générations (Propper, 1990). Ce sont les membres les plus forts de la famille qui exercent une violence envers les plus faibles ou les plus démunis : les maris sont violents à l’égard de leur épouse et les parents vis-à-vis de leurs enfants parce qu’ils détiennent un pouvoir social, économique et physique sur eux. L’utilisation de la violence devient alors un moyen de contrôler les individus sur qui s’exerce le pouvoir.
Dans notre société, le groupe des hommes est en situation de pouvoir et d’autorité. Malgré les changements apportés dans les lois, l’idéologie patriarcale sur laquelle est basée cette position de domination est loin d’être disparue. Qui plus est, les structures existantes dans le monde du travail et des loisirs font perdurer cette position privilégiée du groupe des hommes.
Le contrôle patriarcal ne s’exerce pas nécessairement par la violence, mais la violence est un moyen de contrôle qui a été et continue à être souvent employé par les hommes, dans la mesure où elle est tolérée par la société, comme nous le verrons un peu plus loin. Lorsqu’une femme agresse son mari, c’est que la relation de pouvoir est inversée dans le couple. Il en est de même des enfants adultes à l’endroit des parents âgés.
Le pouvoir est-il au cœur de la violence?
Il faut comprendre que les différentes formes de violence s’inscrivent dans des relations de pouvoir où les individus concernés n’occupent pas les mêmes positions : les agresseurs sont en position de domination et les victimes sont dépendantes, moralement et économiquement, de leurs agresseurs.
Du point de vue de la sociologie féministe, le fondement de la violence conjugale se trouve dans les relations inégalitaires entre les sexes. Plus les relations affectives et économiques entre une fille et un garçon, une épouse et son mari, sont inégalitaires, plus les possibilités de voir la violence s’installer dans la relation conjugale sont élevées. D’ailleurs, des études ont montré que, là où les couples vivent leurs relations sur le mode égalitaire, les formes de violence sont quasi absentes. De même, les femmes qui sont indépendantes sur le plan financier ont davantage la possibilité de choisir un mari non violent (Propper, 1990).
mardi 21 juin 2011
VIOLENCE FAMILIALE 1e partie
LA VIOLENCE FAMILIALE
La vie quotidienne, comme nous venons de le voir, s’enrichir de toutes sortes de configurations qui prennent en compte le temps, l’espace et les relations avec les autres. Pourtant, il est un domaine des relations familiales qui, enfermé dans l’espace de la maison, a été longtemps tenu au secret le plus strict. Ne disait-on pas encore tout récemment : « ce sont des secrets de famille »?
Autant les bons coups des membres d’une famille sont fièrement exposés sur la place publique, autant les mauvais agissements, les infractions aux normes, les relations plus ou moins conformes aux valeurs sociales sont passés sous silence, cachés dans la maison, réglés entre membres de la famille. Ce sont les secrets de famille qui taisent les différentes formes de déviance : la violence familiale et conjugale, l’agression sexuelle, l’inceste ou toute autre forme de transgression des interdits sociaux liés à la vie de famille.
De la tolérance au refus
Il ne faut pas croire que le problème de la violence familiale est nouveau. Les sociologues ont tendance à affirmer que la violence n’est pas plus fréquente aujourd’hui que par le passé; c’est plutôt notre tolérance à son égard qui l’est moins (Propper, 1990).
Un sentiment d’insécurité
Si l’on jette un regard rétrospectif sur la violence dans les groupes humains, on peut dire que la société actuelle n’est pas plus violente que celles qui l’ont précédée. Depuis les années 1980, les courbes de la criminalité recensée au Canada plafonnent et ont entamé un mouvement de décroissance (Brodeur, 1994). Il y a moins d’homicides et de vols. La majorité des conflits se règlent au moyen du droit plus que par les poings. Par contre, les types de crime ont changé à la suite du quadrillage judiciaire de la vie privée. Le nombre d’agressions sexuelles et de voies de fait a doublé des années 1960 aux années 1990, puis il s’est stabilisé (Ouimet, 2003).
Étonnamment, le sentiment général dans la population est que la société civile est plus violente. Le sentiment d’insécurité a augmenté parallèlement à la visibilité accordée à la violence et aux agressions physiques. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette apparente contradiction. La population est plus sensible aux phénomènes de violence et la société les combat davantage. IL y aune intensification de la dénonciation des délits d’agression survenant dans l’espace privé. La production des statistiques s’est aussi raffinée. Enfin, les médias contribuent à accorder une grande visibilité à la violence en rapportant de manière détaillée les événements violents, ce qui a un effet de dramatisation. L’information nominale, « monsieur X a été agressé dans le dépanneur situé à telle adresse », rend palpable une violence de proximité. Pourtant, si l’on observe l’histoire de l’humanité, les sociétés occidentales n’ont jamais été aussi pacifiques à l’intérieur de leurs frontières. C’est dans les productions cinématographiques, les émissions télévisuelles et les jeux électroniques que la violence et la résolution agressive des conflits interpersonnels sont omniprésentes.
Les deux volets de la violence parentale et de la violence conjugale sont interreliés, même si la compilation des statistiques et les interventions d’aide sont différenciées. Les mauvais traitements que subissent les enfants ne sont pas le fait du hasard dans la société. Ces situations sont plus fréquentes dans les familles où les mères subissent elles-mêmes de la violence systémique ou dans des familles monoparentales isolées et pauvres.
La vie quotidienne, comme nous venons de le voir, s’enrichir de toutes sortes de configurations qui prennent en compte le temps, l’espace et les relations avec les autres. Pourtant, il est un domaine des relations familiales qui, enfermé dans l’espace de la maison, a été longtemps tenu au secret le plus strict. Ne disait-on pas encore tout récemment : « ce sont des secrets de famille »?
Autant les bons coups des membres d’une famille sont fièrement exposés sur la place publique, autant les mauvais agissements, les infractions aux normes, les relations plus ou moins conformes aux valeurs sociales sont passés sous silence, cachés dans la maison, réglés entre membres de la famille. Ce sont les secrets de famille qui taisent les différentes formes de déviance : la violence familiale et conjugale, l’agression sexuelle, l’inceste ou toute autre forme de transgression des interdits sociaux liés à la vie de famille.
De la tolérance au refus
Il ne faut pas croire que le problème de la violence familiale est nouveau. Les sociologues ont tendance à affirmer que la violence n’est pas plus fréquente aujourd’hui que par le passé; c’est plutôt notre tolérance à son égard qui l’est moins (Propper, 1990).
Un sentiment d’insécurité
Si l’on jette un regard rétrospectif sur la violence dans les groupes humains, on peut dire que la société actuelle n’est pas plus violente que celles qui l’ont précédée. Depuis les années 1980, les courbes de la criminalité recensée au Canada plafonnent et ont entamé un mouvement de décroissance (Brodeur, 1994). Il y a moins d’homicides et de vols. La majorité des conflits se règlent au moyen du droit plus que par les poings. Par contre, les types de crime ont changé à la suite du quadrillage judiciaire de la vie privée. Le nombre d’agressions sexuelles et de voies de fait a doublé des années 1960 aux années 1990, puis il s’est stabilisé (Ouimet, 2003).
Étonnamment, le sentiment général dans la population est que la société civile est plus violente. Le sentiment d’insécurité a augmenté parallèlement à la visibilité accordée à la violence et aux agressions physiques. Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette apparente contradiction. La population est plus sensible aux phénomènes de violence et la société les combat davantage. IL y aune intensification de la dénonciation des délits d’agression survenant dans l’espace privé. La production des statistiques s’est aussi raffinée. Enfin, les médias contribuent à accorder une grande visibilité à la violence en rapportant de manière détaillée les événements violents, ce qui a un effet de dramatisation. L’information nominale, « monsieur X a été agressé dans le dépanneur situé à telle adresse », rend palpable une violence de proximité. Pourtant, si l’on observe l’histoire de l’humanité, les sociétés occidentales n’ont jamais été aussi pacifiques à l’intérieur de leurs frontières. C’est dans les productions cinématographiques, les émissions télévisuelles et les jeux électroniques que la violence et la résolution agressive des conflits interpersonnels sont omniprésentes.
Les deux volets de la violence parentale et de la violence conjugale sont interreliés, même si la compilation des statistiques et les interventions d’aide sont différenciées. Les mauvais traitements que subissent les enfants ne sont pas le fait du hasard dans la société. Ces situations sont plus fréquentes dans les familles où les mères subissent elles-mêmes de la violence systémique ou dans des familles monoparentales isolées et pauvres.
vendredi 17 juin 2011
LA NOTION DU DÉSIR CHEZ LE COUPLE 122 partie
Vérité et jeu du désir
Le désir, nous l’avons expliqué, est une forme de l’attente mais une forme créatrice qui organise le temps le plus proche et qui réclame l’accord de l’autre. Cette tension cet envoûtement signent le désir authentique.
Il y a effectivement des comédies du désir et nous aurons recours pour retrouver les différents désirs, aux très riches contributions apportées ici, dans l’optique lacanienne, par le Dr Millon.
Imaginons un jeune homme à l’intention lucide et raisonnée, soucieux de s’approprier sexuellement une femme et qui tient à rester, pour ce faire, dans le monde calculateur de la conquête amoureuse avec ses gestes et ses dialogues. Cet homme utilise sa science de l’amour, en pleine conscience de ses moyens, quitte à jouer la comédie de l’amour ou celle du désir.
Le désir est ici visé du sexe en tant que tel, il est une forme du comportement des corps pour la satisfaction réciproque des individus qui ont fait la découverte des gestes éveillant le sensorium sexuel. Le sexe est ici sans aléas, il ne passe pas par l’extrême interrogation de l’émotion amoureuse. Son attente embarrassée incarnée dans un désir adulte serait tout autre : non point désir du sexe mais de cette femme dans son sexe. La dialectique serait la même, au féminin et au masculin.
Cette dialectique de l’émotion véritable et de l’imaginaire telle que nous la retrouvons dans le désir adulte, le Dr Millon nous l’explique en ces termes : « Les certitudes et les doutes de l’amour sont au centre du désir et de son accomplissement : le désir se joue sur la grande scène du rapport à l’être, du mien et du tien, désir de fusion et d’unité avec ses multiples symboles : le désir est la forme la plus violente de l’appel à l’autre, la plus difficile, la plus intime, la plus privée….
La tendresse qui colore ici l’émotion amoureuse montre bien que cette femme désirée sera pour cet homme désirant un objet d’amour délicat et exprime l’accord d’une sensibilité qu’il faut conquérir avec le minimum de violence : le désir est né de l’identification au propre désir de cette femme…. Le désir du sexe est demande d’amour, échange au niveau le plus élevé pour l’existence du couple dans l’étreinte à venir. Cette nécessité de l’éternelle demande nous livre son essence qui se trouve non dans l’échange des choses où elle ne saurait être mais dans la communion des existences…Le désir est une recherche de l’émotion recréatrice de l’être…Mon désir investit le monde : je suis reconnu et recréé à chaque rencontre. Le lien qui unit l’homme et la femme, affectif par l’essence, participe de l’ordre, de la chaleur, de l’émotion, du pulsionnel, du passionnel et ne se rompt que dans la folie…Le désir est la passion créatrice, l’espoir et l’attente de jouir de la chaleur du monde, ensemble…. »
Bibliographie
Jacques Salomé (Les mémoires de l’oublié/ Édition Albin Miche)
Denis Vaysse ( Le temps du désir / Édition du Seuil, 1972)
Madeleine Turretini (À propos du besoin et du désir/ document inédit, Genève)
Guy Corneau (La guérison du cœur, 2000); (L’amour en guerre, 1996)
Dr. E. Chesser (Les relations sexuelles)
Dr. A. Willy et C. Jamont (la sexualité; ouvrage collectif)
Patricia Love & Robinson (Psychologie du couple)
Le chemin de l’extase / Édition Albin Michel
Alexandrian – les libérateurs de l’amour (Paris / Édition du Seuil 1977)
Boyin Ra, Le livre de l’amour (Paris / Librairie Médicis 1969)
Brechter, Ruth and Ed (Analysis of Human sexual response)
Evola Julius (la métaphysique du sexe / Paris, Payot)
Patricia Love (Vers une sexualité libérée)
Master & Johnson (Human sexual, 1966, USA)
Lafond, Michel (Éléments d’Érotique transcendentale / Paris, 1979)
Rosenberg, Jack (Total orgasm / Random House, NY 1973)
Singer-Kaplan (La nouvelle thérapie sexuelle / Paris, 1979)
Pagès-Marx (Le travail Amoureux / Paris, Dunod, 1977)
Willy Pasini (Le couple à quoi ça sert)
Le désir, nous l’avons expliqué, est une forme de l’attente mais une forme créatrice qui organise le temps le plus proche et qui réclame l’accord de l’autre. Cette tension cet envoûtement signent le désir authentique.
Il y a effectivement des comédies du désir et nous aurons recours pour retrouver les différents désirs, aux très riches contributions apportées ici, dans l’optique lacanienne, par le Dr Millon.
Imaginons un jeune homme à l’intention lucide et raisonnée, soucieux de s’approprier sexuellement une femme et qui tient à rester, pour ce faire, dans le monde calculateur de la conquête amoureuse avec ses gestes et ses dialogues. Cet homme utilise sa science de l’amour, en pleine conscience de ses moyens, quitte à jouer la comédie de l’amour ou celle du désir.
Le désir est ici visé du sexe en tant que tel, il est une forme du comportement des corps pour la satisfaction réciproque des individus qui ont fait la découverte des gestes éveillant le sensorium sexuel. Le sexe est ici sans aléas, il ne passe pas par l’extrême interrogation de l’émotion amoureuse. Son attente embarrassée incarnée dans un désir adulte serait tout autre : non point désir du sexe mais de cette femme dans son sexe. La dialectique serait la même, au féminin et au masculin.
Cette dialectique de l’émotion véritable et de l’imaginaire telle que nous la retrouvons dans le désir adulte, le Dr Millon nous l’explique en ces termes : « Les certitudes et les doutes de l’amour sont au centre du désir et de son accomplissement : le désir se joue sur la grande scène du rapport à l’être, du mien et du tien, désir de fusion et d’unité avec ses multiples symboles : le désir est la forme la plus violente de l’appel à l’autre, la plus difficile, la plus intime, la plus privée….
La tendresse qui colore ici l’émotion amoureuse montre bien que cette femme désirée sera pour cet homme désirant un objet d’amour délicat et exprime l’accord d’une sensibilité qu’il faut conquérir avec le minimum de violence : le désir est né de l’identification au propre désir de cette femme…. Le désir du sexe est demande d’amour, échange au niveau le plus élevé pour l’existence du couple dans l’étreinte à venir. Cette nécessité de l’éternelle demande nous livre son essence qui se trouve non dans l’échange des choses où elle ne saurait être mais dans la communion des existences…Le désir est une recherche de l’émotion recréatrice de l’être…Mon désir investit le monde : je suis reconnu et recréé à chaque rencontre. Le lien qui unit l’homme et la femme, affectif par l’essence, participe de l’ordre, de la chaleur, de l’émotion, du pulsionnel, du passionnel et ne se rompt que dans la folie…Le désir est la passion créatrice, l’espoir et l’attente de jouir de la chaleur du monde, ensemble…. »
Bibliographie
Jacques Salomé (Les mémoires de l’oublié/ Édition Albin Miche)
Denis Vaysse ( Le temps du désir / Édition du Seuil, 1972)
Madeleine Turretini (À propos du besoin et du désir/ document inédit, Genève)
Guy Corneau (La guérison du cœur, 2000); (L’amour en guerre, 1996)
Dr. E. Chesser (Les relations sexuelles)
Dr. A. Willy et C. Jamont (la sexualité; ouvrage collectif)
Patricia Love & Robinson (Psychologie du couple)
Le chemin de l’extase / Édition Albin Michel
Alexandrian – les libérateurs de l’amour (Paris / Édition du Seuil 1977)
Boyin Ra, Le livre de l’amour (Paris / Librairie Médicis 1969)
Brechter, Ruth and Ed (Analysis of Human sexual response)
Evola Julius (la métaphysique du sexe / Paris, Payot)
Patricia Love (Vers une sexualité libérée)
Master & Johnson (Human sexual, 1966, USA)
Lafond, Michel (Éléments d’Érotique transcendentale / Paris, 1979)
Rosenberg, Jack (Total orgasm / Random House, NY 1973)
Singer-Kaplan (La nouvelle thérapie sexuelle / Paris, 1979)
Pagès-Marx (Le travail Amoureux / Paris, Dunod, 1977)
Willy Pasini (Le couple à quoi ça sert)
jeudi 16 juin 2011
LA NOTION DU DÉSIR CHEZ LE COUPLE 121 partie
C’est la misère du désir
L’expérience intérieure du désir demande à la conscience désirante une sensibilité aussi vive à l’angoisse qui fonde l’interdit qu’à la volonté de la transcender ou de l’enfreindre. Le désir s’impose comme un scandale. L’interdit immémorial qui pèse sur lui doit être matériellement est psychologiquement dépassé pour que le geste d’amour s’incarne. Le désir naît au centre de l’être, contre toute parade, en dépit de toute pédagogie préalable; il visite le moine en sa cellule, l’adolescent dans sa prière, le vieillard dans son lit vide. Le désir ne choisit ni le lieu ni l’heure, il vise la reine comme la bergère, il n’est pas poli, il est libre. Libre, donc menacé. Menacé de l’extérieur, par le réseau légal, certes, mais surveillé plus férocement de l’intérieur par l’interdit mythique, la loi sacrée non écrite, l’angoisse sexuelle. « Je désire faire l’amour avec toi », dit Pierre à Simone et Simone ne dit pas non. Mais le moment est-il favorable et le lieu bien choisi? Recherche du décor idéal et du moment opportun, tergiversations, discussions et détours. L’angoisse s’installe avec le doute, avec la réflexion, avec la crainte. Le désir meurt. « La prochaine fois, je te violerai », dit Pierre à Simone et Simone ne dit pas non. C’est de la sorte que l’intelligence tend à l’instinct ses pièges raffinés. La panne sexuelle, mésaventure anodine, est une trouvaille de l’intelligence pour dépister les amoureux. Les signes y échappent, dit-on. En est-on bien sûr?
Scandaleux, le désir l’est dans son expression, surtout chez l’homme dans notre culture – les Grecs représentaient leurs Hermès en érection – mais il est d’autant plus suspecté qu’il précède un dynamisme, un changement de situation, une métamorphose. Il tend à transformer le monde, les êtres, les choses, et, par sa seule existence, il prélude à la vie et au mouvement. Le désir féminin n’est pas moins scandaleux, même s’il est moins indiscret. Il est clair qu’il n’a pas la même matérialité, et s’il fait sa preuve, c’est par un langage corporel moins focalisé, plus diffus, avec une plus subtile ambiguïté. D’où cet aspect provocant du désir féminin lorsqu’il s’exprime librement et les contraintes imaginées par les groupes sociaux pour éviter d’être provoqués.
Dans les sociétés alignées, matées, conduites au pas et en rangs, le désir reste le refuge aristocratique de la vérité individuelle et la valeur la plus rare de la contestation, tant qu’il a la force de s’exprimer. Je n’aime pas beaucoup les sociétés où les amoureux ne se tiennent pas par la taille et ne se font pas quelque publique caresse. Fragile liberté qui ne s’incarne plus dans un baiser.
L’expérience intérieure du désir demande à la conscience désirante une sensibilité aussi vive à l’angoisse qui fonde l’interdit qu’à la volonté de la transcender ou de l’enfreindre. Le désir s’impose comme un scandale. L’interdit immémorial qui pèse sur lui doit être matériellement est psychologiquement dépassé pour que le geste d’amour s’incarne. Le désir naît au centre de l’être, contre toute parade, en dépit de toute pédagogie préalable; il visite le moine en sa cellule, l’adolescent dans sa prière, le vieillard dans son lit vide. Le désir ne choisit ni le lieu ni l’heure, il vise la reine comme la bergère, il n’est pas poli, il est libre. Libre, donc menacé. Menacé de l’extérieur, par le réseau légal, certes, mais surveillé plus férocement de l’intérieur par l’interdit mythique, la loi sacrée non écrite, l’angoisse sexuelle. « Je désire faire l’amour avec toi », dit Pierre à Simone et Simone ne dit pas non. Mais le moment est-il favorable et le lieu bien choisi? Recherche du décor idéal et du moment opportun, tergiversations, discussions et détours. L’angoisse s’installe avec le doute, avec la réflexion, avec la crainte. Le désir meurt. « La prochaine fois, je te violerai », dit Pierre à Simone et Simone ne dit pas non. C’est de la sorte que l’intelligence tend à l’instinct ses pièges raffinés. La panne sexuelle, mésaventure anodine, est une trouvaille de l’intelligence pour dépister les amoureux. Les signes y échappent, dit-on. En est-on bien sûr?
Scandaleux, le désir l’est dans son expression, surtout chez l’homme dans notre culture – les Grecs représentaient leurs Hermès en érection – mais il est d’autant plus suspecté qu’il précède un dynamisme, un changement de situation, une métamorphose. Il tend à transformer le monde, les êtres, les choses, et, par sa seule existence, il prélude à la vie et au mouvement. Le désir féminin n’est pas moins scandaleux, même s’il est moins indiscret. Il est clair qu’il n’a pas la même matérialité, et s’il fait sa preuve, c’est par un langage corporel moins focalisé, plus diffus, avec une plus subtile ambiguïté. D’où cet aspect provocant du désir féminin lorsqu’il s’exprime librement et les contraintes imaginées par les groupes sociaux pour éviter d’être provoqués.
Dans les sociétés alignées, matées, conduites au pas et en rangs, le désir reste le refuge aristocratique de la vérité individuelle et la valeur la plus rare de la contestation, tant qu’il a la force de s’exprimer. Je n’aime pas beaucoup les sociétés où les amoureux ne se tiennent pas par la taille et ne se font pas quelque publique caresse. Fragile liberté qui ne s’incarne plus dans un baiser.
mercredi 15 juin 2011
LA NOTION DU DÉSIR CHEZ LE COUPLE 120 partie
L’ambiguïté du désir
« Le meilleur moment de l’amour, c’est quand on monte l’escalier », disait Clemenceau, qui avait bien de l’esprit, il est trop évident que la réalisation imaginaire peut être plus riche que la réalité consommée. D’où cette coquetterie qui consiste à faire durer le désir. Mais le désir lui-même est un escalier; il a ses rythmes : on ne peut s’arrêter longtemps à chaque marche; le désir est un intervalle : il faut assortir cet intervalle des multiples jeux de l’amour. La caresse intervient ici comme investissement narcissique du désir et le décor fait au désir sa demeure. Ne nous croyons pas hors du décor. Il est aboli par le plaisir, non par le désir, en tout cas incomplètement. Le désir est aussi une expérience esthétique. À la sexualité qui est une réalité cosmique, la nature donne l’avantage de la fusion symbolique de l’être et du monde. Il n’est pas de plus belles noces que celles des corps, des plages et des forêts. De tous les décors de l’amour, le plus commun est le plus triste, le plus dépersonnalisant, le plus banalisant. Il faut, pour nier le décor, être bien sûr de soi et de l’autre. Combien d’amours sont mortes, en montant l’escalier! C’est le propre des tentatives qui se veulent absolues de se casser sur le décor. Il faut pour défier l’esthétique être follement amoureux, ou complètement aveugle. Alors, le carré de sol nu, comme l’automobile la plus banale devient écrin de joie, île dérivée, alcôve moderne, palais de cristal, tapis de prière, vaisseau cosmique. Il y a une autre esthétique propre au désir, mais elle est, avant tout, une esthétique intérieure. Elle s’exprime par le baiser qui est l’orchestration symphonique du désir et traduit en langage corporel les infinies variations de « l’énamourement »…
Le désir tient sa fragilité du fait qu’il est essentiellement relationnel : il s’accorde à un autre désir. Il lui emprunte sa force et sa sécurité, mais il lui est, en quelque sorte, suspendu. Dans la mesure où la relation est authentiquement une diade, union intime de deux personnes elle vise à une double reconnaissance : en amour tout doit être l’objet de partage : le désir, le plaisir, l’aventure et l’intériorité, toutes expériences problématiques faites d’inventions successives.
S’il permettait de rester intelligent, le désir serait peut-être pour l’homme et pour la femme un peu moins angoissant. Mais le désir rend parfaitement idiots les êtres intelligents. Le désir est bête; il faut être supérieurement intelligent pour accepter d’être bête. Le désir est une polarisation du champ de la conscience, alors que le plaisir en est une expansion. Tout se passe d’ailleurs comme si une telle expansion avait besoin de cette focalisation préalable. Les vaniteux fument pendant le désir, et les philosophes philosophent. Ils ont peur d’avoir l’air hébété. Ils préfèrent se démettre que se soumettre et ils se quittent les uns et les autres avec des pauses intelligentes, plutôt que de se réunir dans les ténèbres de l’instinct.
Sois bête et tais-toi, dit le désir. Mais l’intelligence ne se laisse pas endormir. Je ne pactise pas, dit l’intelligence, je représente l’ordre, la raison, la véritable sexualité humaine…Je pense, donc je suis…Nous en resterions là si Dieu, qui est un grand désirant, n’avait donné au désir humain une biologie hormonale et instinctuelle capable de passer outre aux interrogations de la psyché.
L’interrogation, c’est l’orgueil de l’espèce. Le désir intervient comme un briseur d’interrogations. Il faut pour passer du désir au plaisir que le niveau émotionnel submerge pour un moment le niveau rationnel. On ne rationalise pas le désir. L’ambiguïté du désir vient de l’obscurité qu’il jette sur l’intellect. Le miracle de l’amour est l’acceptation de cette obscurité comme lumière. Hors l’amour, le désir incarne la force de l’espèce. Dans l’amour, l’espèce investit la force du désir. Celui-ci perd alors son ambiguïté et justifie le double abandon à l’émotion extatique.
Le désir comme choix est de l’ordre du paradoxe. On peut certainement énoncer sans crainte de beaucoup se tromper : « dis-moi comment tu fais l’amour et je te dirai qui tu es », mais on ne peut pas étendre cet aphorisme au désir. Le désir est, à première vue, peu compréhensible dans ses choix. Il y a certainement une référence inconsciente, à une expérience de l’enfance, mais il est rare qu’elle soit retrouvée par une recherche consciente. La première émotion et la première expérience prennent ici toute leur valeur. Tel qui aura été initié par une femme noire, se montrera inhibé devant la femme blanche…Quant aux malades – ils sont nombreux – ils recherchent à vivre dans des circonstances identiques un affect déterminé qui aura traumatisé leur psychisme (scène de violence, d’exhibition, de sadisme ou d’inceste). Tel malade cité par Steckel ne retrouvait la preuve de son désir qu’en écoutant une sonate pour piano et orchestre qui avait préludé à ses premières expériences. En dehors de ces caricatures, le désir se cache et se cache bien.
Le coup de foudre est une expérience privilégiée où, d’emblée, une attirance incontrôlée jette l’un vers l’autre deux êtres que rien ne préparait raisonnablement à cette double électivité. S’il n’y a pas une « erreur d’astres », cette rencontre paradoxale du désir peut être le prélude d’une double révélation et néantifier de part et d’autre toute expérience préalable au profit d’une expérience de l’absolu qui reste, dans la nature et dans l’ordre de l’humanité, une grâce d’une extrême singularité.
Les mathématiques peuvent tout expliquer, sauf l’amour. Ainsi, a-t-on coutume de dire que les extrêmes s’attirent et qu’il est bon de se compléter. Rien n’est plus faux, hors le domaine de la curiosité qui jouxte d’assez près celui de la perversion. Il faut se ressembler pour bien s’entendre. La réussite du plaisir, le secret du désir qui la précède, le cas heureux parmi les meilleurs, c’est la rencontre de deux identités inconscientes, de deux êtres semblables au niveau inconscient. Telle est la similitude, qui n’est pas une complétude. + et + donnent +; + et – donnent -. On ne se complète pas, on se prive l’un l’autre si l’on se dissemble au point de chercher à se compléter. Lawrence l’avait remarqué : « L’union de deux êtres est vouée à l’échec si elle est un effort pour se compléter l’un par l’autre, ce qui suppose une mutilation originelle. »
« Le meilleur moment de l’amour, c’est quand on monte l’escalier », disait Clemenceau, qui avait bien de l’esprit, il est trop évident que la réalisation imaginaire peut être plus riche que la réalité consommée. D’où cette coquetterie qui consiste à faire durer le désir. Mais le désir lui-même est un escalier; il a ses rythmes : on ne peut s’arrêter longtemps à chaque marche; le désir est un intervalle : il faut assortir cet intervalle des multiples jeux de l’amour. La caresse intervient ici comme investissement narcissique du désir et le décor fait au désir sa demeure. Ne nous croyons pas hors du décor. Il est aboli par le plaisir, non par le désir, en tout cas incomplètement. Le désir est aussi une expérience esthétique. À la sexualité qui est une réalité cosmique, la nature donne l’avantage de la fusion symbolique de l’être et du monde. Il n’est pas de plus belles noces que celles des corps, des plages et des forêts. De tous les décors de l’amour, le plus commun est le plus triste, le plus dépersonnalisant, le plus banalisant. Il faut, pour nier le décor, être bien sûr de soi et de l’autre. Combien d’amours sont mortes, en montant l’escalier! C’est le propre des tentatives qui se veulent absolues de se casser sur le décor. Il faut pour défier l’esthétique être follement amoureux, ou complètement aveugle. Alors, le carré de sol nu, comme l’automobile la plus banale devient écrin de joie, île dérivée, alcôve moderne, palais de cristal, tapis de prière, vaisseau cosmique. Il y a une autre esthétique propre au désir, mais elle est, avant tout, une esthétique intérieure. Elle s’exprime par le baiser qui est l’orchestration symphonique du désir et traduit en langage corporel les infinies variations de « l’énamourement »…
Le désir tient sa fragilité du fait qu’il est essentiellement relationnel : il s’accorde à un autre désir. Il lui emprunte sa force et sa sécurité, mais il lui est, en quelque sorte, suspendu. Dans la mesure où la relation est authentiquement une diade, union intime de deux personnes elle vise à une double reconnaissance : en amour tout doit être l’objet de partage : le désir, le plaisir, l’aventure et l’intériorité, toutes expériences problématiques faites d’inventions successives.
S’il permettait de rester intelligent, le désir serait peut-être pour l’homme et pour la femme un peu moins angoissant. Mais le désir rend parfaitement idiots les êtres intelligents. Le désir est bête; il faut être supérieurement intelligent pour accepter d’être bête. Le désir est une polarisation du champ de la conscience, alors que le plaisir en est une expansion. Tout se passe d’ailleurs comme si une telle expansion avait besoin de cette focalisation préalable. Les vaniteux fument pendant le désir, et les philosophes philosophent. Ils ont peur d’avoir l’air hébété. Ils préfèrent se démettre que se soumettre et ils se quittent les uns et les autres avec des pauses intelligentes, plutôt que de se réunir dans les ténèbres de l’instinct.
Sois bête et tais-toi, dit le désir. Mais l’intelligence ne se laisse pas endormir. Je ne pactise pas, dit l’intelligence, je représente l’ordre, la raison, la véritable sexualité humaine…Je pense, donc je suis…Nous en resterions là si Dieu, qui est un grand désirant, n’avait donné au désir humain une biologie hormonale et instinctuelle capable de passer outre aux interrogations de la psyché.
L’interrogation, c’est l’orgueil de l’espèce. Le désir intervient comme un briseur d’interrogations. Il faut pour passer du désir au plaisir que le niveau émotionnel submerge pour un moment le niveau rationnel. On ne rationalise pas le désir. L’ambiguïté du désir vient de l’obscurité qu’il jette sur l’intellect. Le miracle de l’amour est l’acceptation de cette obscurité comme lumière. Hors l’amour, le désir incarne la force de l’espèce. Dans l’amour, l’espèce investit la force du désir. Celui-ci perd alors son ambiguïté et justifie le double abandon à l’émotion extatique.
Le désir comme choix est de l’ordre du paradoxe. On peut certainement énoncer sans crainte de beaucoup se tromper : « dis-moi comment tu fais l’amour et je te dirai qui tu es », mais on ne peut pas étendre cet aphorisme au désir. Le désir est, à première vue, peu compréhensible dans ses choix. Il y a certainement une référence inconsciente, à une expérience de l’enfance, mais il est rare qu’elle soit retrouvée par une recherche consciente. La première émotion et la première expérience prennent ici toute leur valeur. Tel qui aura été initié par une femme noire, se montrera inhibé devant la femme blanche…Quant aux malades – ils sont nombreux – ils recherchent à vivre dans des circonstances identiques un affect déterminé qui aura traumatisé leur psychisme (scène de violence, d’exhibition, de sadisme ou d’inceste). Tel malade cité par Steckel ne retrouvait la preuve de son désir qu’en écoutant une sonate pour piano et orchestre qui avait préludé à ses premières expériences. En dehors de ces caricatures, le désir se cache et se cache bien.
Le coup de foudre est une expérience privilégiée où, d’emblée, une attirance incontrôlée jette l’un vers l’autre deux êtres que rien ne préparait raisonnablement à cette double électivité. S’il n’y a pas une « erreur d’astres », cette rencontre paradoxale du désir peut être le prélude d’une double révélation et néantifier de part et d’autre toute expérience préalable au profit d’une expérience de l’absolu qui reste, dans la nature et dans l’ordre de l’humanité, une grâce d’une extrême singularité.
Les mathématiques peuvent tout expliquer, sauf l’amour. Ainsi, a-t-on coutume de dire que les extrêmes s’attirent et qu’il est bon de se compléter. Rien n’est plus faux, hors le domaine de la curiosité qui jouxte d’assez près celui de la perversion. Il faut se ressembler pour bien s’entendre. La réussite du plaisir, le secret du désir qui la précède, le cas heureux parmi les meilleurs, c’est la rencontre de deux identités inconscientes, de deux êtres semblables au niveau inconscient. Telle est la similitude, qui n’est pas une complétude. + et + donnent +; + et – donnent -. On ne se complète pas, on se prive l’un l’autre si l’on se dissemble au point de chercher à se compléter. Lawrence l’avait remarqué : « L’union de deux êtres est vouée à l’échec si elle est un effort pour se compléter l’un par l’autre, ce qui suppose une mutilation originelle. »
mardi 14 juin 2011
LA NOTION DU DÉSIR CHEZ LE COUPLE 119 partie
Le langage du désir comme moyen d’expression
Le désir sexuel est « l’attente du déroulement amoureux et sa réalisation imaginaire ». Mais, le sens de la rencontre qu’il anticipe est à rechercher dans plusieurs directions : langage des corps, mais aussi échanges du sexe. Le désir est une invocation à l’autre. Il est ce par quoi la demande se veut alliance et se fait lien.
« Toute demande est demande d’amour, appel à l’autre en tant que tel. » Le désir sexuel est le moyen le plus secret et le plus révélateur que l’homme et la femme adoptent pour incarner cette signification d’amour. C’est ici que le sexe devient expression de l’échange. Nous sommes loin de « l’esthète » à l’orientale, qui se contemple lui-même dans sa prouesse, observe son intensité et sa durée, se donne à lui-même un brevet de maîtrise. Ici le sexe se fait communication interpersonnelle et se donne le désir pour langage.
Certes, le désir, moyen d’expansion, se donne lui-même des moyens d’expression. C’est la « stratégie amoureuse » qui place, entre notre personnalité et l’action anticipée, une sorte de rituel où se met à l’abri notre angoisse; mais ce rituel lui-même signe notre doute et, en tant que tel, il a valeur d’invocation. Il est un appel au désir de l’autre; je désire que tu me désires.
Le désir est normalement contagieux. La caresse visuelle précède décemment la caresse tactile et c’est bien à ce stade que se lie ou se délie l’amoureuse sollicitude. Le propos personnalisant est une autre caresse, une complicité qui a le don d’émouvoir les dames qui ne croient plus aux compliments; dans une brochure médicale de psychopathologie sexuelle, où il n’est pas interdit de découvrir quelque « badinage », il nous est dit que les femmes acceptent d’être malmenées dans une robe nouvelle… On ne saurait flatter la robe sans énoncer en même temps que l’on s’intéresse à ce qu’elle recouvre. La caresse gestuelle est située entre le désir et le plaisir, au seuil de l’union des corps; elle est, comme le baiser, un acte sexuel, et comme telle elle est relationnelle en son essence, chacun étant à la fois caressant et caressé. Entre aimer et croire que l’on aime, quel dieu verrait la différence? Énonçait Gide. Entre caresser et être caressé, quel autre dieu verrait la jonction? La caresse est don à soi et don à l’autre dans une oblativité où se confondent les caressants.
Nous sommes loin ici, dans ces arcanes bio-psychologiques, de la quotidienneté du désir des époux, ce désir auquel le conditionnement apporte sans doute quelque substantielle gratification. Le désir conditionné se situe en référence à des souvenirs érotiques antérieurs, à des expériences passées, à des associations d’images. André Pecker conseille au couple, dans le mariage, de rechercher et respecter le conditionnement. Il ne serait pas sans danger de renoncer à répondre à un stimulus habituel et adéquat (nudité), quitte à le remplacer par des stimuli inhabituels. Réinventer la pudeur, qui est la poésie du désir, est sans doute plus à notre portée que réinventer le désir, auquel il n’est pas coutumier de renaître de ses cendres après un court déclin. Le désir sexuel meurt, il faut le savoir. Il faut admettre, cependant, qu’il a la vie très dure et qu’il meurt généralement assassiné.
Les échéances de l’âge et les caresses de l’imagination s’allient communément pour briser l’énergie du sexe. Mais l’être humain, hors du sexe, reste cependant un désirant : nous y avons insisté délibérément dans les premières pages de cette réflexion. La sublimation de la libido offre alors au désir les multiples investissements du monde et de la nature : les grands désirants deviennent les grands créateurs. C’est la revanche de l’intelligence qui est un pouvoir d’adaptation.
Au plan sexuel, l’extrême électivité du désir ne nous paraît pas avoir été reconnue par la plupart des psychologues et des psychanalystes qui parlent volontiers de ce thème en biologistes ou cliniciens. Je te désire signifie, en effet, je te reconnais, et je fais de toi cette personne élue par ma conscience désirante et non telle autre et parce que tu es toi-même, telle que tu es, en référence à ma recherche, puis à ma requête, enfin à mon projet. Nous disons que le désir de l’homme est personnalisant et qu’il est impossible de désirer, au sens noble, plusieurs personnes à la fois, sinon peut-être, à la rigueur, de vrais jumeaux ou de vraies jumelles…Celui qui cherche à réaliser l’union sexuelle avec une femme qu’il ne désire pas, en cherchant à penser à une autre femme qu’il désire, sait fort bien qu’il doit exclure mentalement et totalement la première, si tant est qu’il puisse arriver à ses fins.
On ne peut désirer simultanément, mais on peut désirer alternativement, successivement. C’est bien là que se trouve l’option. Car, il s’agit d’une option et de rien de plus. Il n’y a pas de fondement biologique de la fidélité, ni même fondement psychologique au niveau de la conscience désirante. Car la fidélité dans l’expérience du plaisir n’empêche nullement le désir qui visite le fidèle à son insu, comme la tentation dans le désert. Ici, homme ou femme, chacun est concerné autant et aussi souvent. Tel qui lutte contre le désir, désire déjà. Rien n’est plus secret que le désir et, finalement, rien n’est plus profondément authentique, rien ne nous dit plus véritablement ce que nous sommes.
Le désir sexuel est « l’attente du déroulement amoureux et sa réalisation imaginaire ». Mais, le sens de la rencontre qu’il anticipe est à rechercher dans plusieurs directions : langage des corps, mais aussi échanges du sexe. Le désir est une invocation à l’autre. Il est ce par quoi la demande se veut alliance et se fait lien.
« Toute demande est demande d’amour, appel à l’autre en tant que tel. » Le désir sexuel est le moyen le plus secret et le plus révélateur que l’homme et la femme adoptent pour incarner cette signification d’amour. C’est ici que le sexe devient expression de l’échange. Nous sommes loin de « l’esthète » à l’orientale, qui se contemple lui-même dans sa prouesse, observe son intensité et sa durée, se donne à lui-même un brevet de maîtrise. Ici le sexe se fait communication interpersonnelle et se donne le désir pour langage.
Certes, le désir, moyen d’expansion, se donne lui-même des moyens d’expression. C’est la « stratégie amoureuse » qui place, entre notre personnalité et l’action anticipée, une sorte de rituel où se met à l’abri notre angoisse; mais ce rituel lui-même signe notre doute et, en tant que tel, il a valeur d’invocation. Il est un appel au désir de l’autre; je désire que tu me désires.
Le désir est normalement contagieux. La caresse visuelle précède décemment la caresse tactile et c’est bien à ce stade que se lie ou se délie l’amoureuse sollicitude. Le propos personnalisant est une autre caresse, une complicité qui a le don d’émouvoir les dames qui ne croient plus aux compliments; dans une brochure médicale de psychopathologie sexuelle, où il n’est pas interdit de découvrir quelque « badinage », il nous est dit que les femmes acceptent d’être malmenées dans une robe nouvelle… On ne saurait flatter la robe sans énoncer en même temps que l’on s’intéresse à ce qu’elle recouvre. La caresse gestuelle est située entre le désir et le plaisir, au seuil de l’union des corps; elle est, comme le baiser, un acte sexuel, et comme telle elle est relationnelle en son essence, chacun étant à la fois caressant et caressé. Entre aimer et croire que l’on aime, quel dieu verrait la différence? Énonçait Gide. Entre caresser et être caressé, quel autre dieu verrait la jonction? La caresse est don à soi et don à l’autre dans une oblativité où se confondent les caressants.
Nous sommes loin ici, dans ces arcanes bio-psychologiques, de la quotidienneté du désir des époux, ce désir auquel le conditionnement apporte sans doute quelque substantielle gratification. Le désir conditionné se situe en référence à des souvenirs érotiques antérieurs, à des expériences passées, à des associations d’images. André Pecker conseille au couple, dans le mariage, de rechercher et respecter le conditionnement. Il ne serait pas sans danger de renoncer à répondre à un stimulus habituel et adéquat (nudité), quitte à le remplacer par des stimuli inhabituels. Réinventer la pudeur, qui est la poésie du désir, est sans doute plus à notre portée que réinventer le désir, auquel il n’est pas coutumier de renaître de ses cendres après un court déclin. Le désir sexuel meurt, il faut le savoir. Il faut admettre, cependant, qu’il a la vie très dure et qu’il meurt généralement assassiné.
Les échéances de l’âge et les caresses de l’imagination s’allient communément pour briser l’énergie du sexe. Mais l’être humain, hors du sexe, reste cependant un désirant : nous y avons insisté délibérément dans les premières pages de cette réflexion. La sublimation de la libido offre alors au désir les multiples investissements du monde et de la nature : les grands désirants deviennent les grands créateurs. C’est la revanche de l’intelligence qui est un pouvoir d’adaptation.
Au plan sexuel, l’extrême électivité du désir ne nous paraît pas avoir été reconnue par la plupart des psychologues et des psychanalystes qui parlent volontiers de ce thème en biologistes ou cliniciens. Je te désire signifie, en effet, je te reconnais, et je fais de toi cette personne élue par ma conscience désirante et non telle autre et parce que tu es toi-même, telle que tu es, en référence à ma recherche, puis à ma requête, enfin à mon projet. Nous disons que le désir de l’homme est personnalisant et qu’il est impossible de désirer, au sens noble, plusieurs personnes à la fois, sinon peut-être, à la rigueur, de vrais jumeaux ou de vraies jumelles…Celui qui cherche à réaliser l’union sexuelle avec une femme qu’il ne désire pas, en cherchant à penser à une autre femme qu’il désire, sait fort bien qu’il doit exclure mentalement et totalement la première, si tant est qu’il puisse arriver à ses fins.
On ne peut désirer simultanément, mais on peut désirer alternativement, successivement. C’est bien là que se trouve l’option. Car, il s’agit d’une option et de rien de plus. Il n’y a pas de fondement biologique de la fidélité, ni même fondement psychologique au niveau de la conscience désirante. Car la fidélité dans l’expérience du plaisir n’empêche nullement le désir qui visite le fidèle à son insu, comme la tentation dans le désert. Ici, homme ou femme, chacun est concerné autant et aussi souvent. Tel qui lutte contre le désir, désire déjà. Rien n’est plus secret que le désir et, finalement, rien n’est plus profondément authentique, rien ne nous dit plus véritablement ce que nous sommes.
lundi 13 juin 2011
LA NOTION DU DÉSIR CHEZ LE COUPLE 118 partie
Va-t-on redéfinir le désir?
Affirmer que le désir est une intumescence, une congestion localisée tendant à une réduction de la tension et à l’apaisement de la libido par la rencontre sexuelle, nous paraît tout à fait insuffisant; il s’agit d’un naturalisme digne de l’auteur d’une certaine « condition sexuelle des Français », où il ne saurait être question de condition sexuelle, mais de comportements.
Pierre peut désirer le baiser, l’approche, l’étreinte, l’union sexuelle ou même simplement le frôlement, le regard, le parfum ou la voix de Simone, mais il ne désire pas son propre désir, il ne traite pas son désir en objet, il personnalise son désir et s’il désire le désir c’est bien celui de l’autre. Même dans les phantasmes du solipsisme, le désir s’investit dans la personne, il y a désir du sexe de l’autre. Même dans les phantasmes du solipsisme, le désir s’investit dans la personne, il y a désir du sexe de l’autre; même si cet autre n’est qu’une réalité absente, c’est une réalité sexuée.
Le biologiste qui réussirait à capturer Pierre au moment où il désire Simone n’aurait pas de peine à découvrir dans le sang de celui-ci les hormones indispensables, et, en particulier, les stimulines hypophysaires. On perçoit assez vite le circuit corticoviscéral : l’image de simone agit sur la rétine de Pierre, qui « informe » l’hypophyse, laquelle sécrète les gonadostimulines dont l’activité met en état de fonctionnement tout le système réflexe de l’accouplement. Le psychanalyste qui réussirait à capturer Simone au moment où celle-ci vient de désirer Pierre ne manquerait pas, de son côté, d’expliquer son désir par sa relation à ses propres parents, par sa biographie enfantine, ses premières révélations intimes et l’image de l’homme déposée dans son inconscient par de lointaines et ténébreuses intériorisations.
Le biologiste a ses raisons que le psychanalyste peut ne pas connaître. Il déclenche chez la chatte le réflexe d’acceptation du mâle en piquant dans le cerveau de celle-ci le plancher du 4e ventricule ; le chirurgien qui réalise chez l’homme une intervention de psycho-chirurgie modifie également le comportement sexuel, de même que le médecin traitant lorsqu’il injecte des hormones. Le désir peut être influencé, en plus ou en moins, par toute modification du milieu intérieur, nous dira le biologiste; et par toute modification du milieu extérieur, du vécu et de l’histoire personnelle du sujet, ajoutera le psychanalyste. Si, dans quelques années, Simone vient à être privée de ses ovaires, elle désirera Pierre sans doute différemment, mais elle le désirera encore. Elle pourra même le désirer davantage si son enrichissement affectif antérieur l’y a préparée et s’il est intervenu dans son existence des changements favorables. Par contre, nous pouvons imaginer une Simone née sans ovaires et élevée dans une île déserte, elle serait sans désir et sans contre-désir, elle serait asexuée. Les différents facteurs de développement interne et les divers éléments de l’éducation font de notre désir ce qu’il est. Nous ne pouvons davantage les dissocier que nous ne pouvons intégrer un désir sans corporéité ou sans historicité. Notre désir est à notre image : corps et âme confondus, non seulement sexuel, mais génital. Le « sexe dégénitalisé » souhaite, mais ne désire pas.
Entre le besoin et le désir, nous croyons savoir que de notables différences ont été individualisées par les philosophes à partir de la notion de tendances ou à partir de la psychologie des instincts. Nous serons plus grossier dans nos différenciations en disant tout simplement que le désir est personnalisé et qu’il est l’objet d’un choix délibéré. Il serait inexact de dire que l’animal a des besoins et l’être humain des désirs : l’animal « personnalise » et l’on a décrit de véritables mariages chez les oiseaux, voire chez des mammifères élevés conjointement. L’animal « choisit » aussi et nous voyons ici quels peuvent être les aléas d’une « sexologie comparée » qui supputerait que nous puissions vivre de l’intérieur les conduites animalières.
Certes, il est peu probable que l’animal se choisisse désirant, comme dirait Sartre, mais comment Pierre s’est-il choisi? Pierre n’a-t-il pas répondu au message de Simone et, en la préférant parmi ses amies, ne s’est-il pas choisi, lui, avec Simone et non pas avec telle autre? Double dialectique, qui va du toi au moi et revient en ‘feedback’. Peu nous importe ici le choix qu’a fait la chatte! Il ne nous apporte rien, absolument rien.
Lorsque Pierre désire Simone, dans cette rencontre sexuelle qu’il anticipe, il la veut à lui, et telle est la tentation de la possession, mais il se veut à elle; il la veut également elle par lui, tandis qu’elle le désire lui par elle. Dans cette double tentative du moi par toi et du toi par moi, se trouve l’ultime excuse de tout ce qu’il y a d’accaparement dans la caresse et dans la séduction. Car, il faut bien convenir avec Sartre qu’il existe dans la séduction une tentative d’appropriation de la liberté d’autrui, comme dans la caresse une recherche de captation de la chair de l’autre,
La joie de Pierre lorsqu’il se choisit comme séducteur n’est pas dénuée de la satisfaction de se voir lui-même dans son pouvoir et courbant sous sa loi la défense de Simone : seule la tendresse peut ici le sauver du sadisme et du vain ridicule de la toute-puissance.
C’est ici, au niveau de l’expérience amoureuse, que le désir se fait attente et l’attente désir. La joie se développe dans la simultanéité du désir et dans la réciprocité du don. Elle est anticipation du don. Le désir ne saurait se suffire à lui-même, se consumer dans l’instant désirant. Désir du désir, le strip-tease, décantation à vide de la conscience désirante. Ici pas d’anticipation et pas de prévision du don. L’actrice se fait chair, mais non pour la chair, seulement pour la vision. Le spectateur se fait désir, mais, se refusant le plaisir, il se donne à lui-même un succédané de l’action forte au prix le plus bas de l’imaginaire. Finalement il est bien aise de s’en tirer à si bon marché. Divertissement sexuel, non sexué.
Peut-on positivement, au point où nous en sommes, redéfinir le désir?
Affirmer que le désir est une intumescence, une congestion localisée tendant à une réduction de la tension et à l’apaisement de la libido par la rencontre sexuelle, nous paraît tout à fait insuffisant; il s’agit d’un naturalisme digne de l’auteur d’une certaine « condition sexuelle des Français », où il ne saurait être question de condition sexuelle, mais de comportements.
Pierre peut désirer le baiser, l’approche, l’étreinte, l’union sexuelle ou même simplement le frôlement, le regard, le parfum ou la voix de Simone, mais il ne désire pas son propre désir, il ne traite pas son désir en objet, il personnalise son désir et s’il désire le désir c’est bien celui de l’autre. Même dans les phantasmes du solipsisme, le désir s’investit dans la personne, il y a désir du sexe de l’autre. Même dans les phantasmes du solipsisme, le désir s’investit dans la personne, il y a désir du sexe de l’autre; même si cet autre n’est qu’une réalité absente, c’est une réalité sexuée.
Le biologiste qui réussirait à capturer Pierre au moment où il désire Simone n’aurait pas de peine à découvrir dans le sang de celui-ci les hormones indispensables, et, en particulier, les stimulines hypophysaires. On perçoit assez vite le circuit corticoviscéral : l’image de simone agit sur la rétine de Pierre, qui « informe » l’hypophyse, laquelle sécrète les gonadostimulines dont l’activité met en état de fonctionnement tout le système réflexe de l’accouplement. Le psychanalyste qui réussirait à capturer Simone au moment où celle-ci vient de désirer Pierre ne manquerait pas, de son côté, d’expliquer son désir par sa relation à ses propres parents, par sa biographie enfantine, ses premières révélations intimes et l’image de l’homme déposée dans son inconscient par de lointaines et ténébreuses intériorisations.
Le biologiste a ses raisons que le psychanalyste peut ne pas connaître. Il déclenche chez la chatte le réflexe d’acceptation du mâle en piquant dans le cerveau de celle-ci le plancher du 4e ventricule ; le chirurgien qui réalise chez l’homme une intervention de psycho-chirurgie modifie également le comportement sexuel, de même que le médecin traitant lorsqu’il injecte des hormones. Le désir peut être influencé, en plus ou en moins, par toute modification du milieu intérieur, nous dira le biologiste; et par toute modification du milieu extérieur, du vécu et de l’histoire personnelle du sujet, ajoutera le psychanalyste. Si, dans quelques années, Simone vient à être privée de ses ovaires, elle désirera Pierre sans doute différemment, mais elle le désirera encore. Elle pourra même le désirer davantage si son enrichissement affectif antérieur l’y a préparée et s’il est intervenu dans son existence des changements favorables. Par contre, nous pouvons imaginer une Simone née sans ovaires et élevée dans une île déserte, elle serait sans désir et sans contre-désir, elle serait asexuée. Les différents facteurs de développement interne et les divers éléments de l’éducation font de notre désir ce qu’il est. Nous ne pouvons davantage les dissocier que nous ne pouvons intégrer un désir sans corporéité ou sans historicité. Notre désir est à notre image : corps et âme confondus, non seulement sexuel, mais génital. Le « sexe dégénitalisé » souhaite, mais ne désire pas.
Entre le besoin et le désir, nous croyons savoir que de notables différences ont été individualisées par les philosophes à partir de la notion de tendances ou à partir de la psychologie des instincts. Nous serons plus grossier dans nos différenciations en disant tout simplement que le désir est personnalisé et qu’il est l’objet d’un choix délibéré. Il serait inexact de dire que l’animal a des besoins et l’être humain des désirs : l’animal « personnalise » et l’on a décrit de véritables mariages chez les oiseaux, voire chez des mammifères élevés conjointement. L’animal « choisit » aussi et nous voyons ici quels peuvent être les aléas d’une « sexologie comparée » qui supputerait que nous puissions vivre de l’intérieur les conduites animalières.
Certes, il est peu probable que l’animal se choisisse désirant, comme dirait Sartre, mais comment Pierre s’est-il choisi? Pierre n’a-t-il pas répondu au message de Simone et, en la préférant parmi ses amies, ne s’est-il pas choisi, lui, avec Simone et non pas avec telle autre? Double dialectique, qui va du toi au moi et revient en ‘feedback’. Peu nous importe ici le choix qu’a fait la chatte! Il ne nous apporte rien, absolument rien.
Lorsque Pierre désire Simone, dans cette rencontre sexuelle qu’il anticipe, il la veut à lui, et telle est la tentation de la possession, mais il se veut à elle; il la veut également elle par lui, tandis qu’elle le désire lui par elle. Dans cette double tentative du moi par toi et du toi par moi, se trouve l’ultime excuse de tout ce qu’il y a d’accaparement dans la caresse et dans la séduction. Car, il faut bien convenir avec Sartre qu’il existe dans la séduction une tentative d’appropriation de la liberté d’autrui, comme dans la caresse une recherche de captation de la chair de l’autre,
La joie de Pierre lorsqu’il se choisit comme séducteur n’est pas dénuée de la satisfaction de se voir lui-même dans son pouvoir et courbant sous sa loi la défense de Simone : seule la tendresse peut ici le sauver du sadisme et du vain ridicule de la toute-puissance.
C’est ici, au niveau de l’expérience amoureuse, que le désir se fait attente et l’attente désir. La joie se développe dans la simultanéité du désir et dans la réciprocité du don. Elle est anticipation du don. Le désir ne saurait se suffire à lui-même, se consumer dans l’instant désirant. Désir du désir, le strip-tease, décantation à vide de la conscience désirante. Ici pas d’anticipation et pas de prévision du don. L’actrice se fait chair, mais non pour la chair, seulement pour la vision. Le spectateur se fait désir, mais, se refusant le plaisir, il se donne à lui-même un succédané de l’action forte au prix le plus bas de l’imaginaire. Finalement il est bien aise de s’en tirer à si bon marché. Divertissement sexuel, non sexué.
Peut-on positivement, au point où nous en sommes, redéfinir le désir?
vendredi 10 juin 2011
LA NOTION DU DÉSIR CHEZ LE COUPLE 117 partie
Le mystère nommé Désir peut se conjuguer au masculin et au féminin.
Nous allons retrouver au niveau du désir sexuel ce même appel, cette même invitation où s’inscrit infailliblement l’angoisse interrogative du double mesage reçu ou refusé.
Qu’est-ce que le désir sexuel sinon l’anticipation de l’acte? Qu’est-ce que le désir, sinon la préconstruction imaginative de la rencontre sexuelle? En quoi l’ëtre de l’homme et l’être de la femme sont-ils mis en question par leur désir?
L’homme (vir) est consacré par son désir. Le désir donne à l’homme sa marque d’homme : le mouvement, le dynamisme extérieur, l’acceptation du risque.
La femme se reconnaît en tant que femme par le désir masculin. Elle est saluée par ce désir. Tout hommage qui n’est pas sous-entendu par le désir participe de la courtoisie. Celle-ci s’adresse à la personnalité, non à la femme.
La femme, fréquemment, se moque du désir, mais elle l’allume. C’est sa façon à elle de se rassurer sur son être, sur sa vitalité, sur sa pérennité. Lorsqu’une femme se veut, avant tout, désirable, c’est une « coquette ». Lorsqu’elle se fait objet aliéné du désir, on dit qu’elle est une « cocotte ». Lorsqu’elle n’est plus désirable, elle est éteinte, éteinte à ses propres yeux, donc « morte ».
Et voilà découvert le piège féminin du désir où la femme est aliénée et l’homme aliénateur. C’est le petit monde clos du chasseur et de sa proie. À lire la presse féminine, ce schéma simpliste n’est pas dénué de réalité.
À partir du moment où le désir masculin est affecté du signe + et le désir féminin du signe -, le résultat est une aliénation de + par -, il est marqué du signe -; la femme mystifiée est réduite à la condition de proie, avec son propre consentement.
C’est par un véritable renversement des signes que peut disparaître la double situation de l’aliénateur et de l’aliénée : changement de sens, disparition des signes -. La femme qui se veut libre se veut désirante. Le « je te désire » est également féminin.
Voici donc, parmi les nouveaux droits de la femme, le droit au désir, c’est-à-dire l’initiative sexuelle, l’invite sexuelle, l’activité sexuelle.
L’homme peut évidemment se vouloir play-boy et jouer dans la ruche des abeilles le rôle d’un bourdon luxueux et encombrant : il se fait objet de séduction et s’affecte du signe - . son sexe psychologique est mal différencié : il n’intéresse plus le désir féminin. Nous retombons dans la situation primordiale (- et + donnent - ) ou bien dans une situation neutre, c’est-à-dire asexuée.
La seule façon de sauver le désir en brisant l’aliénation est d’affecter du signe positif les deux désirs, celui de l’homme et celui de la femme. Je désire faire l’amour avec toi pour jouir de la chaleur du monde, ensemble. Ce mot ensemble préface le « nous » qui est l’unité du toi et du moi. Je te désire parce que tu es un homme libre, vrai et sexué et je te désire encore parce que tu es l’homme que je cherche. Je te désire parce que tu est une femme véritable, libre et sexuée et parce que tu es cette femme-là et non une autre.
Chacun est ici, tout à la fois, désirant et désiré, simultanément, dans le but de réaliser l’un avec l’autre un peu plus que la simple additon de deux personnes. Ce qu’il y a d’émouvant dans le désir c’est cette volonté mutuelle de croître et de s’accroître. Ce « plus être » est la perspective du désir adulte. Il se peut que le plaisir ne tienne pas les promesses du désir, mais il y a dans le désir une volonté confuse de se multiplier en soi-même qui reste l’un des moyens les mieux éprouvés pour élargir les limites de l’humaine condition.
Nous allons retrouver au niveau du désir sexuel ce même appel, cette même invitation où s’inscrit infailliblement l’angoisse interrogative du double mesage reçu ou refusé.
Qu’est-ce que le désir sexuel sinon l’anticipation de l’acte? Qu’est-ce que le désir, sinon la préconstruction imaginative de la rencontre sexuelle? En quoi l’ëtre de l’homme et l’être de la femme sont-ils mis en question par leur désir?
L’homme (vir) est consacré par son désir. Le désir donne à l’homme sa marque d’homme : le mouvement, le dynamisme extérieur, l’acceptation du risque.
La femme se reconnaît en tant que femme par le désir masculin. Elle est saluée par ce désir. Tout hommage qui n’est pas sous-entendu par le désir participe de la courtoisie. Celle-ci s’adresse à la personnalité, non à la femme.
La femme, fréquemment, se moque du désir, mais elle l’allume. C’est sa façon à elle de se rassurer sur son être, sur sa vitalité, sur sa pérennité. Lorsqu’une femme se veut, avant tout, désirable, c’est une « coquette ». Lorsqu’elle se fait objet aliéné du désir, on dit qu’elle est une « cocotte ». Lorsqu’elle n’est plus désirable, elle est éteinte, éteinte à ses propres yeux, donc « morte ».
Et voilà découvert le piège féminin du désir où la femme est aliénée et l’homme aliénateur. C’est le petit monde clos du chasseur et de sa proie. À lire la presse féminine, ce schéma simpliste n’est pas dénué de réalité.
À partir du moment où le désir masculin est affecté du signe + et le désir féminin du signe -, le résultat est une aliénation de + par -, il est marqué du signe -; la femme mystifiée est réduite à la condition de proie, avec son propre consentement.
C’est par un véritable renversement des signes que peut disparaître la double situation de l’aliénateur et de l’aliénée : changement de sens, disparition des signes -. La femme qui se veut libre se veut désirante. Le « je te désire » est également féminin.
Voici donc, parmi les nouveaux droits de la femme, le droit au désir, c’est-à-dire l’initiative sexuelle, l’invite sexuelle, l’activité sexuelle.
L’homme peut évidemment se vouloir play-boy et jouer dans la ruche des abeilles le rôle d’un bourdon luxueux et encombrant : il se fait objet de séduction et s’affecte du signe - . son sexe psychologique est mal différencié : il n’intéresse plus le désir féminin. Nous retombons dans la situation primordiale (- et + donnent - ) ou bien dans une situation neutre, c’est-à-dire asexuée.
La seule façon de sauver le désir en brisant l’aliénation est d’affecter du signe positif les deux désirs, celui de l’homme et celui de la femme. Je désire faire l’amour avec toi pour jouir de la chaleur du monde, ensemble. Ce mot ensemble préface le « nous » qui est l’unité du toi et du moi. Je te désire parce que tu es un homme libre, vrai et sexué et je te désire encore parce que tu es l’homme que je cherche. Je te désire parce que tu est une femme véritable, libre et sexuée et parce que tu es cette femme-là et non une autre.
Chacun est ici, tout à la fois, désirant et désiré, simultanément, dans le but de réaliser l’un avec l’autre un peu plus que la simple additon de deux personnes. Ce qu’il y a d’émouvant dans le désir c’est cette volonté mutuelle de croître et de s’accroître. Ce « plus être » est la perspective du désir adulte. Il se peut que le plaisir ne tienne pas les promesses du désir, mais il y a dans le désir une volonté confuse de se multiplier en soi-même qui reste l’un des moyens les mieux éprouvés pour élargir les limites de l’humaine condition.
jeudi 9 juin 2011
LA NOTION DU DÉSIR CHEZ LE COUPLE 116 partie
Le désir, c’est quoi au juste?
Au commencement était le désir…Nous sommes fondamentalement désirants. La création est le résultat du désir. L’œuvre est l’objet d’un désir.
Le désir est l’impulsion par laquelle l’être transforme le monde; il faut désirer pour créer : désirer créer, puis créer ensuite. « Le désir, dit Jean Lacrois, est la force primordiale qui est à la base de toutes choses. »
Ainsi, dialectiquement, le désir précède le sexe. Je ne suis littéralement sexué qu’à partir du moment où je veux confronter mon désir à la créature; jusque-là, ma sexualité est virtuelle.
Le désir est langage et communication. Il est trait d’union entre les êtres, un signal qui appelle une réponse. On ne désire pas le désir mais un être ou une chose. Désirer, c’est se dépasser.
L’élément créateur de dynamique du désir est fréquemment sous-évalué. Il l’est par deux écoles différentes : l’une occidentale et mystique, privilégiant le désir de Dieu, met au second plan et au second degré le désir humain dans sa relativité et son éphémère destination; l’autre, orientaliste, traite le désir en terme de péjoration et recherche comme Bien supr^me une certaine sagesse née de l’absence de désir. « La souffrance est désir et le désir souffrance », dit le texte sacré. L’ataraxie orientale, comme la recherhce hindoue du non-désir, est une position philosophique – en fleur de lotus – où tend à s’abîmer dans la contemplation de soi et l’écoute de ses viscères. C’est aussi une avitaminose, mais c’est d’abord, croyons-nous, une avitaminose mentale…
« Devant la face ensanglantée qu’a prise l’histoire de notre temps », il est difficile d’entériner cet esthétisme du non-désir qui est en sorte d’acceptation quiescente de la réalité historique. L’être humain ne progresse-t-il pas dans le sentiment aigu de son inadéquation? Contemporains d’un monde partagé et douloureux, ne sommes-nous pas condamnés à l’action, à l’angoisse, au désir?
Le désir nous paraît être cette dynamique qui nous pousse à ne point rester en l’état, à passer d’un acte à un autre acte et finalement à modifier le monde. C’est le désir qui émerge de l’énergie primordiale et c’est lui qui affronte la nature et qui la plie. Il faut aimer les grands désirants. Désirer, c’est vivre.
Le désir est aussi une gestion du temps. Le désir prend son temps même s’il le bouscule. Il interpose entre l’idée et l’acte une séquence, la sienne, où l’attente devient prélude. Ainsi le désir est espérance : l’attente expectative heureuse, est, comme le désir, relationnelle. On ne s’attend pas soi-même. Mais elle est angoisse, car le temps fuit et le contenu du temps n’est le même pour personne.
L’absence de désir objective une insuffisance du trait d’union qui relie l’être aux autres êtres ou aux évnénements et aux choses. Le désir absent retourne à soi-même dans l’appréhension désolée de la perspetive temporelle : le désert oriental intériorisé.
Se vouloir désirant, c’est s’accepter douloureux : la longue marche, mais également la création continue. Il n’y a pas de plaisir qu’un désir préalable n’ait patiemment invité.
Au commencement était le désir…Nous sommes fondamentalement désirants. La création est le résultat du désir. L’œuvre est l’objet d’un désir.
Le désir est l’impulsion par laquelle l’être transforme le monde; il faut désirer pour créer : désirer créer, puis créer ensuite. « Le désir, dit Jean Lacrois, est la force primordiale qui est à la base de toutes choses. »
Ainsi, dialectiquement, le désir précède le sexe. Je ne suis littéralement sexué qu’à partir du moment où je veux confronter mon désir à la créature; jusque-là, ma sexualité est virtuelle.
Le désir est langage et communication. Il est trait d’union entre les êtres, un signal qui appelle une réponse. On ne désire pas le désir mais un être ou une chose. Désirer, c’est se dépasser.
L’élément créateur de dynamique du désir est fréquemment sous-évalué. Il l’est par deux écoles différentes : l’une occidentale et mystique, privilégiant le désir de Dieu, met au second plan et au second degré le désir humain dans sa relativité et son éphémère destination; l’autre, orientaliste, traite le désir en terme de péjoration et recherche comme Bien supr^me une certaine sagesse née de l’absence de désir. « La souffrance est désir et le désir souffrance », dit le texte sacré. L’ataraxie orientale, comme la recherhce hindoue du non-désir, est une position philosophique – en fleur de lotus – où tend à s’abîmer dans la contemplation de soi et l’écoute de ses viscères. C’est aussi une avitaminose, mais c’est d’abord, croyons-nous, une avitaminose mentale…
« Devant la face ensanglantée qu’a prise l’histoire de notre temps », il est difficile d’entériner cet esthétisme du non-désir qui est en sorte d’acceptation quiescente de la réalité historique. L’être humain ne progresse-t-il pas dans le sentiment aigu de son inadéquation? Contemporains d’un monde partagé et douloureux, ne sommes-nous pas condamnés à l’action, à l’angoisse, au désir?
Le désir nous paraît être cette dynamique qui nous pousse à ne point rester en l’état, à passer d’un acte à un autre acte et finalement à modifier le monde. C’est le désir qui émerge de l’énergie primordiale et c’est lui qui affronte la nature et qui la plie. Il faut aimer les grands désirants. Désirer, c’est vivre.
Le désir est aussi une gestion du temps. Le désir prend son temps même s’il le bouscule. Il interpose entre l’idée et l’acte une séquence, la sienne, où l’attente devient prélude. Ainsi le désir est espérance : l’attente expectative heureuse, est, comme le désir, relationnelle. On ne s’attend pas soi-même. Mais elle est angoisse, car le temps fuit et le contenu du temps n’est le même pour personne.
L’absence de désir objective une insuffisance du trait d’union qui relie l’être aux autres êtres ou aux évnénements et aux choses. Le désir absent retourne à soi-même dans l’appréhension désolée de la perspetive temporelle : le désert oriental intériorisé.
Se vouloir désirant, c’est s’accepter douloureux : la longue marche, mais également la création continue. Il n’y a pas de plaisir qu’un désir préalable n’ait patiemment invité.
mercredi 8 juin 2011
LA NOTION DU DÉSIR CHEZ LE COUPLE 115 partie
Les couples se présentent souvent en thérapie en se plaignant d’incompatibilité de caractère, de divergence dans leurs idéaux et leurs valeurs, d’un sentiment d’étouffement, ou de la crainte d’être abandonnés. Derrière ces souffrances se cache une répétition traumatique des enjeux infantiles réactualisés dans les composantes défensives de leur collusion inconsciente. Ces impasses les paralysent autour d’une même problématique non résolue.
COLLUSION : CONCEPT
Dans notre société post moderne, les références sont plurielles. Certains ont une vision romantique du couple, issue de la lecture des classiques. D'autres nourrissent à son égard des préjugés qui datent des années 60 et 70, aux couleurs de la révolution sexuelle et du conflit des générations. Pour d'autres encore, le couple est une association qui n'existe que pour satisfaire une volonté d'affirmation sociale. Enfin, il y a ceux qui ne désirent que des histoires d'une nuit, et , inversement, ceux qui espèrent que l'union couronnera le rêve de leur vie.
Dans le foisonnement de ces attitudes, il est devenu impossible d'identifier la direction qu'emprunte la modernité: nous avons tous raison ou tous tort, selon les circonstances.
Mais, quels qu'ils soient, ces modèles ont à se confronter au cadre d'une société de consommation qui accorde de moins en moins de place au privé et à la préoccupation morale. Le couple romantique n'existe donc que dans l'imagination. Dans la réalité, il est écrasé par les impératifs du quotidien.
1. LE COUPLE ET LA COLLUSION INCONSCIENTE
Quand le corps est malade, le diagnostic est rapide et le traitement à portée de main. Lorsqu’il s’agit d’un couple, l’issue du pronostic est beaucoup plus incertaine. La complexité des interactions humaines étant un labyrinthe dans lequel même le médecin de l’âme le plus expert risque de se perdre. Les fonctions que l’inconscient attribue à l’union ramènent aux images de l’enfance, qui sont celles vers lesquelles on régresse en cas de crise. À ces démons du passé que nous décrirons volontairement en faisant référence aux figures mythiques étudiées par la psychologue Jungienne, VERENA KOST, on demande parfois de compenser ou de réparer une souffrance, ou encore de se répéter tout simplement dans le temps.
Dans ces lignes, nous limiterons notre examen à quatre types de couples en lutte, en nous inspirant des travaux du psychiatre ZURG WILLI. Si par hasard vous vous reconnaissez dans l’une de ces typologies, ne vous alarmez pas : le fait qu’une relation soit saine ou non ne dépend pas de son appartenance à l’une de ces catégories, mais à l’intensité de la collusion en cause.
L’AMOUR COMME FUSION : LA COLLUSION NARCISSIQUE
Pour former un tel couple, un narcisse ne suffit pas, il en faut deux : un qui exhibe son narcissisme et un autre qui l’inhibe. Pour l’un comme pour l’autre, la pathologie est la même.
Le monde est plein de ces narcisse expressifs. On les reconnaît au premier coup d’œil; dès la première rencontre, ils racontent tout d’eux-mêmes. Ils posent parfois des questions, non par curiosité, mais dans le seul but de souligner l’infériorité de leur interlocuteur. Ils n’ont qu’un désir, que l’on s’intéresse à eux, et même plus : que l’on voit en eux des êtres extravagants, pervers, révolutionnaires ou géniaux. Ils ne demandent qu’une chose, qu’on fasse savoir ainsi à quel point ils sont extraordinaires. Les narcisse vivent de l’admiration d’autrui, ce qui leur fait rechercher la compagnie de personnes insignifiantes, qui ne leur proposent que le reflet d’eux-mêmes.
Fragiles, les narcisse expressifs ont besoin d’être admirés. Incertains de leur propre valeur, ils ne peuvent voir en l’autre que le simple instrument d’une confirmation du soi, et non pas un individu autonome. Ils s’entourent donc de béni-oui-oui et laissent flotter autour d’eux un halo de démocratie marquant leur autoritarisme : leur monde n’est fait que d’amis ou d’ennemis, qui sont, selon le cas, une source d’harmonie ou la cible d’une amertume et d’une agressivité débordantes. A ces derniers, ils livrent de véritables guerres saintes, et enrôlent tous leurs amis affectés sans exception à la dévotion exclusive du général. Il est inutile de préciser que le plus petit signe de dissension signifie la fin de leur amitié. Par définition, un narcisse expressif entretient un rapport de collusion violente avec tout le monde, sans excepter son partenaire inhibé, celui que le jargon médical définit comme un « schizo ide empathique : » Celui-ci n’attend que la reconnaissance de son talent caché d’écoute, qui lui permet de conquérir la confiance d’autrui. Quand deux archétypes de ce genre se rencontrent, c’est l’amour à coup sûr.
Avant de s’aventurer dans les dédales de ce rapport, il est bon de faire un petit retour aux origines de la structure narcissique. Elle est propre aux individus que leur mère a empêchés d’acquérir un soi autonome et qui ont dû apprendre à décrypter ses moindres désirs de peur de ne pas être aimés en retour ou d’être taxés d’ingratitude.
Le couple narcissique reproduit le modèle : l’un des partenaires y abdique en faveur de l’autre. Mais tous les narcissiques n’ont pas le même bonheur en amour. Et ceux qui ne rencontrent pas le bon comportement connaissent des destins divers et variés.
Certains restent attachés à l’objet principal de leur désir, leur mère. D’autres se rabattent sur des prostituées qui leur offrent contre de l’argent des prestations sexuelles qui répondent à leurs désirs : pour d’autres encore, l’onanisme permet de débrider l’imagination. Ce que les relations humaines qu’ils entretiennent habituellement leur interdisent, puisqu’elles mettent en jeu une personne autre, aux rythmes et aux manières qui leur sont propres. D’autres enfin, officiellement unis, vivent des passions narcissiques parallèles et leurs amants doivent être extrêmement stimulants pour mériter les cadeaux que le narcisse aime dispenser avec beaucoup de fierté. Une seule chose est interdite à ces amants d’un jour : compliquer la vie.
Les vrais amours narcissiques sont quant à eux de véritables coups de foudre. Malheureusement, ils sont passagers. Notre narcissique expressif n’étant capable de se livrer totalement que pendant peu de temps, la fée qu’il choisit se transforme rapidement pour lui en sorcière sans intérêt petit à petit exclue de son monde affectif. La personnalité narcissique de type inhibé favorise son autocritique qui veut qu’elle ne mérite pas l’amour de l’autre, et se mésestime. Le fait même d’avoir été choisie la rend prête à n’importe quel sacrifice. Elle rêve de se perdre dans l’autre, dont elle égrène dons et succès, sans laisser la moindre place à un autre type de rapport humain.
C’est le cas de Marthe, une femme de quarante ans que m’a envoyée un gynécologue parce qu’elle refuse depuis six mois tout rapport sexuel. Elle est déprimée et elle a pris du poids. Selon ses dires, son mari Laurent est coupable de tout. Il a quinze ans de plus qu’elle et la retraite anticipée l’a transformé en véritable tyran. C’est du moins la façon dont elle le décrit lorsqu’elle raconte à quel point les exigences sexuelles de son mari ont augmenté. « J’ai du temps libre; profitons-en » semble t-il dire avant de harceler littéralement sa femme. Elle souligne que cette Satyriasis n’est que la dernière d’une longue suite de brimades. Il a commencé par l’empêcher de travailler, la privant ainsi de son seul espace d’autonomie. Puis il l’a contrainte à subir une stérilisation sous prétexte de ne pas augmenter la progéniture qu’il a eu d’un premier lit. Enfin, il a fini par l’obliger à vivre sous le même toit que sa belle-mère. À tant de violence s’ajoutent des relations sexuelles insatisfaisantes : l’éjaculation précoce est le seul épilogue possible des rapports intimes avec Laurent.
Pourquoi Marthe reste-t-elle avec un tel homme? Le seul mot qui me vienne à l’esprit, à l’écoute de l’histoire de sa vie, est celui de masochisme. Cette femme a en effet passé son enfance à s’occuper de son père aveugle. Infirmière de métier et de cœur, elle a réalisé bien tard que son mari n’était guère que le dernier d’une longue liste de personnes qu’elle a assistées depuis toujours. Laurent a certes pourvu aux besoins matériels de la famille, mais son comportement affectif a largement compensé cet échange. Avant d’en avoir une perception claire, Marthe a ressenti cette collusion narcissique dans son corps sous forme de migraines et d’un refus total de la relation sexuelle. Il ne s’agit là que du premier « non » qu’elle devra apprendre à prononcer afin de recouvrer son bonheur.
L’AMOUR COMME NOURRITURE RÉCIPROQUE : LA COLLUSION ORALE
La collusion orale tourne autour de la thématique de la sustentation réciproque. Imaginons que les partenaires soient une mère et son fils. La première doit continuellement répondre aux besoins inépuisables de l’autre. Elle jouit de l’apaisement de son enfant après la tétée, et lui de la nourriture qu’il a reçue.
La relation mère-enfant est la première expérience de la réciprocité. Certaines mères sont tellement remplies d’amour pour leur enfant, qu’elles se sentent offensées et frustrées lorsqu’arrive le moment où il ne se laisse plus manipuler passivement comme une poupée, première séparation qui leur procure un sentiment d’infériorité et de dépression. Le rôle que l’enfant joue dans cette relation, est important. Nous l’imaginons souvent comme une victime inerte : en réalité, il a toute la force de ses cris et de ses caprices pour s’opposer à sa mère. S’il n’évolue pas, sa personnalité orale adulte cherchera un partenaire qui le soignera et s’occupera de lui comme le faisait sa maman. Parfois cette avidité se transforme en boulimie.
Paradoxalement les personnalités orales finissent par haïr ceux qui satisfont à leurs désirs, parce qu’ils sont le témoignage vivant des besoins dont ils sont esclaves. Leurs partenaires idéaux sont donc rarement pétris d’ambitions personnelles. JURG WILLI explique qu’ils ont une prédilection pour les gros pulls, les grandes écharpes, bref, pour tout ce qui leur confère un sentiment de sécurité. Ils aiment la chaleur, s’assoient volontiers devant un feu de cheminée et aiment vivre dans des maisons lambrissées ou remplies de meubles en bois. On est frappé par la hâte avec laquelle ils se mettent à la disposition des autres. Mais leur désintéressement n’est qu’apparent. Ils craignent en réalité que la relation se rompe, si jamais on les trouvait inutiles.
Le rôle du bébé est tenu par celui des deux qui ne parvient pas à s’identifier au rôle maternel, les frustrations vécues avec sa mère ayant été trop nombreuses. Les fonctions maternelles sont donc transférées sur le partenaire qui doit correspondre à l’image idéale d’une mère gratifiante. En revanche, celui (ou celle ) qui assume le rôle maternel cherche sans arrêt à prendre soin de l’autre, n’étant pas capable de s’occuper de lui-même. En projetant sur l’autre le rôle du nourrisson, c’est son côté enfant qu’il prend en charge. Dans une telle collusion, le « bébé » vit une situation de régression. La « mère » de progression. Le premier renonce volontiers à une relation horizontale et compense sa position d’infériorité par toute la « nourriture » qu’il reçoit. Le partenaire-mère éloigne le danger de la régression, en maintenant l’autre à la place infantile qu’il refuse d’occuper lui-même. Le couple ne risque la rupture que lorsque l’envie prend le dessus. La « mère » est alors jalouse de l’attention portée à « l’enfant » qui est à son tour angoissé par la position régressive dans laquelle il est tombé. Ce n’est pas par hasard si, dès que le partenaire-mère tombe malade, le partenaire-bébé fait de même. Ces couples oraux sont prêts à tout lorsqu’il s’agit d’éviter d’échanger les rôles.
Claude se saoulait parfois et frappait alors à la porte de ses voisins, pensant que c’était la sienne. Il est aussi arrivé qu’il urine sur leur paillasson, mais il a été vite pardonné. Ses voisins savent qu’il est veuf, que sa femme est morte d’un cancer de la vessie et qu’elle était à la fois pour lui une mère, une épouse et une infirmière. En tout état de cause, elle était plus qu’une simple partenaire. Claude le sait aussi. C’est ce qu’il exprime en tout cas quand il retrouve sa lucidité. Il redevient un homme d’âge mûr, aisé et sympathique, qui partage sa vie entre ses demeures entre Montréal et Québec. Il parvient même à raconter son histoire, celle d’un jeune homme de bonne famille qui ne s’est révolté contre la sévérité maternelle qu’après l’âge de vingt ans, en quittant le poste dans une compagnie d’assurance, pour se consacrer à sa vraie vocation, la musique.
Il a rencontré sa femme, Huguette, au cours d’une fête à laquelle il participait avec son petit orchestre. Il était alors un playboy qui aimait s’étourdir dans la fête, elle était avocate et dotée d’une personnalité vive et de goûts marqués. Bref, ils formèrent un couple oral typique; pendant douze ans, il se réfugia dans ses bras maternels ou elle l’accueillait comme la plus aimante des mères. Ils n’ont jamais eu d’enfant, il travaillait trop, elle redoutait de perdre sa liberté et ils étaient si bien ensemble! Parfois la nuit, Claude se réveille encore brusquement pour parler à Huguette. Mais elle n’est plus là depuis des mois. Il s’est mis à boire, voulant oublier sa femme, mais il n’y arrive pas. Il vit seul, a abandonné la musique, et son unique plaisir réside dans des repas somptueux qu’il s’offre parfois au restaurant. Huguette avait façonné la personnalité de Claude. Mais celle-ci s’est évanouie avec sa mort. Avant tout, il a fallu mettre un frein à son alcoolisme, puis nous l’avons aidé à parler, à exprimer sa tristesse. Maintenant qu’il va mieux, il pense aller vivre aux U.S.A. ou la vie est plus facile pour les veufs, surtout quand ils sont aisés.
L’AMOUR COMME POSSESSION RÉCIPROQUE : LA COLLUSION SADICO-ANALE
Ce qualificatif peut sembler étrange; il se réfère en fait à l’art des stades de développement décrit par Freud. Celui pendant lequel l’enfant prend plaisir à contrôler ses sphincters. Parallèlement, il existe des couples qui prennent plaisir à satisfaire leur goût du pouvoir en multipliant les conflits dont le seul objectif est que l’autre n’ait pas gain de cause. Tous les prétextes à se quereller sont bons : l’activisme du partenaire ou sa passivité, son autonomie ou sa dépendance, son obstination ou sa souplesse, son amour de l’ordre ou son laisser-aller. Les deux composantes de ces pôles dialectiques sont comme souvent présentes en chacun de nous, mais le rapport pervers de domination pousse à plaquer l’un ou l’autre sur le partenaire dans le seul but de pouvoir le critiquer.
Dans de tels couples, le partenaire dominant fait preuve d’attitudes véritablement despotiques. Non seulement il exige une fidélité absolue, mais il voudrait de plus qu’elle soit le fruit d’une décision spontanée de conjoint : en bref, il a l’ambition de contrôler autant l’esprit de l’autre que ses comportements. Le partenaire passif supporte tout, satisfait de pouvoir déléguer les prises de décision, et de vivre sous la protection de l’autre.
Il s’agit pourtant, encore une fois, d’un mécanisme de pouvoir : la résistance passive n’est guère que le meilleur moyen de dominer son compagnon, tout en feignant d’être sous sa domination. Même violents, les conflits issus de ces collusions ne se placent pas dans une logique de séparation. Sans bouc émissaire il n’y aurait plus de conflit.
L’émergence de tendances jusqu’alors refoulées et protégées sur l’autre déclenche en revanche la véritable crise. Imaginons que le sujet dominant veuille vérifier jusqu’où va son ascendant sur l’autre, alors que celui-ci a décidé d’exprimer sa propre autonomie, le premier affirmera qu’il se comporte de façon aussi tyrannique parce que l’autre fuit et ne se laisse plus contrôler, alors que l’autre prétend qu’il ne se laisse plus contrôler, parce que son partenaire ne lui veut plus que du mal. Il est évident que ces relations trouvent un débouché naturel dans le sado masochisme, ne serait-ce que psychologique.
Dans la vie quotidienne, un rien suffit à exaspérer le litige. Lui serait prêt, par exemple, à préparer de temps en temps le petit déjeuner, mais il ne supporte pas que sa femme le lui demande. «Si pour une fois seulement il me montrait un peu d’attention! » soupire-t-elle. « Si je lui donne le petit doigt, elle me mangera la main. », se dit-il.
L’idée fixe de ces couples est de dominer sans être dominé. Personne ne prend d’initiative, de peur que son geste ne soit interprété comme un signe de faiblesse et ne donne lieu à des revendications. Leur sexualité fonctionne selon le même mécanisme : il n’est pas rare que la femme masque son orgasme, tandis que l’homme tente de précipiter son éjaculation. Bref, personne ne désire montrer à son partenaire qu’il a gain de cause.
C’est le plaisir que procure la peur de l’autre qui rend les conflits de pouvoir inépuisables, à la manière d’une grotesque guerre de tranchées. JURG WILLI cite le cas d’un couple dont les membres s’accusaient mutuellement d’égotisme : ils avaient construit chez eux une cloison mobile qui divisait le couloir de leur maison en deux parties égales, ce qui leur permettait d’entrer et de sortir sans être vu par l’autre. Ils ne communiquaient que par écrit et faisaient preuve d’un sens de la provocation toujours plus raffiné. Le mari en particulier était maître en la matière : avant que sa femme n’entre dans la salle de bain, il urinait dans le lavabo, ou bien il vomissait dans les casseroles à l’heure de la préparation des repas. Elle ne décida de s’en aller que le jour où il la menaça de mettre le feu à l’appartement.
Quelle surprise. Ce départ le rendit apathique et il dut être hospitalisé, ne parvenant plus à se nourrir seul. Il ne se rétablit que le jour où elle devint son infirmière, à leur commune satisfaction. Ce fut la fin de cette lutte conjugale qui n’avait été pour lui qu’une dernière tentative pour exprimer son autonomie. L’échec de ce modèle avait ramené leurs rapports dans un cadre quasi normalisé.
C’est peu dire que pour un thérapeute, ce genre de couple est exaspérant. Les exercices de communication, tellement utiles dans d’autres circonstances, se limitent pour eux à des tentatives de prise de contrôle de l’un par l’autre ou même du thérapeute, comme ce fut le cas avec Élisabeth. En entrant dans mon cabinet, elle tenait presque par les oreilles son mari Fernand. Elle voulait que je le réprimande parce qu’il refusait de subir une vasectomie et parlait le doigt pointé sur son ventre, rond d’une grossesse de cinq mois. Il m’a fallu un peu de temps pour réussir à éclairer la situation, par ailleurs très simple. Plus jeune qu’elle de cinq ans, il avait un an auparavant fait un enfant à l’une de ses maîtresses, qui avait décidé de le garder. À l’annonce de ces faits, la réaction d’Élisabeth avait été explosive : non seulement elle l’avait contraint à lui faire immédiatement un enfant, mais elle le sommait aussi de se faire stériliser. Une conclusion qui correspond bien à l’histoire de ce Canadien installé aux États-Unis depuis dix ans et qui s’est rapidement fait accaparer par l’énergique Élisabeth. Après s’en être emparé, elle voulait le castrer. Elle m’a même trouvé un rôle tout fait : celui du juge qui blâme le mari. Ma première tâche fut de lui démontrer que je ne pouvais être complice d’une telle manipulation.
Dans ces couples, plus l’élément dominateur poursuit l’autre de sa jalousie, plus celui-ci le trompe pour affirmer son autonomie. Mais plus il cherche à fuir, plus son partenaire prétend faire de lui sa propriété privée. Le premier dit : « Je suis jaloux parce que tu es infidèle », ce à quoi l’autre réplique : « je suis infidèle parce que tu m’étouffes avec ta jalousie ».Et la seule envie que nous ayons, nous les thérapeutes, c’est d’abandonner ces couples à leurs inépuisables prises de bec.
L’AMOUR COMME DEVOIR : LA COLLUSION HYSTÉRIQUE
Ce type de rapport est aussi appelé la collusion oedipienne par les psychiatres. Ses origines symboliques se situent dans les manifestations affectueuses que le fils adresse à sa mère : il arrive qu’il se rende compte qu’elle les apprécie, surtout lorsqu’elle est sexuellement insatisfaite, et qu’elle bloque tout à coup le processus de séduction. L’incohérence de ce comportement empêche l’enfant de renoncer à sa mère en tant qu’objet sexuel et le blesse dans son identité masculine. Un phénomène analogue active et interrompt les mouvements oedipiens de la fillette avec son père.
La collusion hystérique reproduit le même modèle comportemental. Superficielle, incohérente dans sa vie sentimentale, la femme hystérique a tendance à transformer les conflits à l’extérieur du couple ou à les transformer en des maladies impromptues. Pour séduire, elle se croit obligée de jouer à la femme désinhibée.
Mais elle évite d’avoir des rapports personnels trop intimes et sexualise tous les autres rapports, au risque de se faire molester par ceux qui ne comprennent pas ses provocations.
En général, l’homme hystérophile a vécu longtemps avec sa mère et son émancipation sexuelle a été tardive. Passif par nature, il évite de le montrer. Il rompt le lien qu’il entretient avec la terre ( à ses yeux la plus importante de toutes les mères ) en choisissant des sports virils et ascensionnels comme l’alpinisme, le parachutisme ou le deltaplane. Il s’occupe des autres pour dissimuler son besoin d’attention. Mais sa vraie nature se révèle dans une sexualité pauvre, qu’il néglige pour mieux cultiver des liens affectifs qui lui permettent de jouer les sauveteurs.
Leur mal de vivre les rapproche. C’est toujours le même schéma qui se répète : une femme qui cherche de l’aide et un homme que sa famille a convaincu de rentrer dans le rang. Elle se marie sans être amoureuse mais pense qu’un jour ou l’autre l’amour viendra. Lui n’aspire qu’à la consoler, mais il est constamment frustré puisque, malgré toutes ses tentatives, sa compagne ne peut sortir de son état d’insatisfaction chronique. Si par hasard il se permet de lui demander de l’aide en cas de maladie ou de difficulté professionnelle, elle le repousse avec dédain. Comment pourrait-elle porter à son mari la moindre attention maternelle?... Yolaine est une femme de la haute bourgeoisie, formaliste et égocentrique. Elle a toujours souffert de maux imaginaires qui n’ont fait qu’augmenter avec l’âge. Lorsque son mari a commencé à souffrir de dysfonctionnements de la prostate, une migraine soudaine l’a mise dans l’impossibilité de s’en occuper . Elle raconte à ses amies à quel point il est difficile de vivre avec un homme atteint de tels maux. Ce qui est loin de déplaire à son mari qui préfère être plaint plutôt que de devoir prendre l’initiative, notamment en matière sexuelle.
Rapidement, ils se comportent comme frère et sœur et elle commence à collectionner les amants en prenant comme prétexte l’indifférence de son mari. Situation qu’il accepte, puisqu’il considère que la virilité des autres est une forme d’agression très éloignée de la noblesse et de la tolérance qu’il manifeste.
Ce type de femme a beaucoup de succès, car les hommes aiment les femmes imprévisibles : elle veut systématiquement le contraire de ce qu’on lui offre, un vieux subterfuge qui lui permet d’avoir toujours raison. Ses amants sont des hommes forts, l’hystérique désirant toujours que soient bien séparés la douce routine du lit conjugal et la passion de l’alcôve. Même lorsqu’elle n’a pas d’amant, elle opère cette scission en faisant de ses enfants les témoins de la faiblesse de leur père, ce qui perpétue chez eux un complexe oedipien non résolu.
Les rôles peuvent évidemment être inversés : il arrive que l’homme soit autoritaire, et la femme, soumise . Il fait l’éloge de sa virilité, en tant que démenti à ses angoisses de castration et à ses tendances homosexuelles latentes, mais lorsque l’admiration féminine se ternit, son orgueil phallique s’en trouve blessé. Sa femme, qui le sait fragile, veut le rassurer pour une bonne raison : elle sait qu’il n’existe que dans la mesure où il peut se prouver à lui-même sa virilité au point que s’il en était autrement, il irait voir ailleurs. Si, dans cette situation, s’ajoute le facteur d’une grande différence d’âge, les compromis sont inévitables. Un homme plus âgé est attiré par l’idée d’initier une femme plus jeune à la vie conjugale, tandis qu’elle lui remet entre les mains son insécurité. Une femme plus âgée assume auprès d’un homme plus jeune et privé d’autonomie, un rôle essentiellement maternel. Elle devient à ses yeux une reine et une madone; une femme plus jeune lui semblerait trop immature. Il arrive qu’il accompagne sa dépendance d’un net penchant pour la boisson et les jeux de hasard.
L’alccol n’est qu’un moyen de se soustraire à la tutelle de son épouse, mais il finit en définitive par légitimer l’autorité de celle qui va le récupérer dans les bars ou paie la caution pour le sortir de prison.
En conclusion, ce type de collusion remet en cause la relation horizontale et tente de maintenir la dichotomie entre conjoint fort et conjoint faible. Il faut pourtant garder à l’esprit le fait que le partenaire dominant n’est pas toujours le plus fort. Combien de fois, lors des séances de psychothérapie, découvre-t-on la force cachée des faibles ?
COLLUSION : CONCEPT
Dans notre société post moderne, les références sont plurielles. Certains ont une vision romantique du couple, issue de la lecture des classiques. D'autres nourrissent à son égard des préjugés qui datent des années 60 et 70, aux couleurs de la révolution sexuelle et du conflit des générations. Pour d'autres encore, le couple est une association qui n'existe que pour satisfaire une volonté d'affirmation sociale. Enfin, il y a ceux qui ne désirent que des histoires d'une nuit, et , inversement, ceux qui espèrent que l'union couronnera le rêve de leur vie.
Dans le foisonnement de ces attitudes, il est devenu impossible d'identifier la direction qu'emprunte la modernité: nous avons tous raison ou tous tort, selon les circonstances.
Mais, quels qu'ils soient, ces modèles ont à se confronter au cadre d'une société de consommation qui accorde de moins en moins de place au privé et à la préoccupation morale. Le couple romantique n'existe donc que dans l'imagination. Dans la réalité, il est écrasé par les impératifs du quotidien.
1. LE COUPLE ET LA COLLUSION INCONSCIENTE
Quand le corps est malade, le diagnostic est rapide et le traitement à portée de main. Lorsqu’il s’agit d’un couple, l’issue du pronostic est beaucoup plus incertaine. La complexité des interactions humaines étant un labyrinthe dans lequel même le médecin de l’âme le plus expert risque de se perdre. Les fonctions que l’inconscient attribue à l’union ramènent aux images de l’enfance, qui sont celles vers lesquelles on régresse en cas de crise. À ces démons du passé que nous décrirons volontairement en faisant référence aux figures mythiques étudiées par la psychologue Jungienne, VERENA KOST, on demande parfois de compenser ou de réparer une souffrance, ou encore de se répéter tout simplement dans le temps.
Dans ces lignes, nous limiterons notre examen à quatre types de couples en lutte, en nous inspirant des travaux du psychiatre ZURG WILLI. Si par hasard vous vous reconnaissez dans l’une de ces typologies, ne vous alarmez pas : le fait qu’une relation soit saine ou non ne dépend pas de son appartenance à l’une de ces catégories, mais à l’intensité de la collusion en cause.
L’AMOUR COMME FUSION : LA COLLUSION NARCISSIQUE
Pour former un tel couple, un narcisse ne suffit pas, il en faut deux : un qui exhibe son narcissisme et un autre qui l’inhibe. Pour l’un comme pour l’autre, la pathologie est la même.
Le monde est plein de ces narcisse expressifs. On les reconnaît au premier coup d’œil; dès la première rencontre, ils racontent tout d’eux-mêmes. Ils posent parfois des questions, non par curiosité, mais dans le seul but de souligner l’infériorité de leur interlocuteur. Ils n’ont qu’un désir, que l’on s’intéresse à eux, et même plus : que l’on voit en eux des êtres extravagants, pervers, révolutionnaires ou géniaux. Ils ne demandent qu’une chose, qu’on fasse savoir ainsi à quel point ils sont extraordinaires. Les narcisse vivent de l’admiration d’autrui, ce qui leur fait rechercher la compagnie de personnes insignifiantes, qui ne leur proposent que le reflet d’eux-mêmes.
Fragiles, les narcisse expressifs ont besoin d’être admirés. Incertains de leur propre valeur, ils ne peuvent voir en l’autre que le simple instrument d’une confirmation du soi, et non pas un individu autonome. Ils s’entourent donc de béni-oui-oui et laissent flotter autour d’eux un halo de démocratie marquant leur autoritarisme : leur monde n’est fait que d’amis ou d’ennemis, qui sont, selon le cas, une source d’harmonie ou la cible d’une amertume et d’une agressivité débordantes. A ces derniers, ils livrent de véritables guerres saintes, et enrôlent tous leurs amis affectés sans exception à la dévotion exclusive du général. Il est inutile de préciser que le plus petit signe de dissension signifie la fin de leur amitié. Par définition, un narcisse expressif entretient un rapport de collusion violente avec tout le monde, sans excepter son partenaire inhibé, celui que le jargon médical définit comme un « schizo ide empathique : » Celui-ci n’attend que la reconnaissance de son talent caché d’écoute, qui lui permet de conquérir la confiance d’autrui. Quand deux archétypes de ce genre se rencontrent, c’est l’amour à coup sûr.
Avant de s’aventurer dans les dédales de ce rapport, il est bon de faire un petit retour aux origines de la structure narcissique. Elle est propre aux individus que leur mère a empêchés d’acquérir un soi autonome et qui ont dû apprendre à décrypter ses moindres désirs de peur de ne pas être aimés en retour ou d’être taxés d’ingratitude.
Le couple narcissique reproduit le modèle : l’un des partenaires y abdique en faveur de l’autre. Mais tous les narcissiques n’ont pas le même bonheur en amour. Et ceux qui ne rencontrent pas le bon comportement connaissent des destins divers et variés.
Certains restent attachés à l’objet principal de leur désir, leur mère. D’autres se rabattent sur des prostituées qui leur offrent contre de l’argent des prestations sexuelles qui répondent à leurs désirs : pour d’autres encore, l’onanisme permet de débrider l’imagination. Ce que les relations humaines qu’ils entretiennent habituellement leur interdisent, puisqu’elles mettent en jeu une personne autre, aux rythmes et aux manières qui leur sont propres. D’autres enfin, officiellement unis, vivent des passions narcissiques parallèles et leurs amants doivent être extrêmement stimulants pour mériter les cadeaux que le narcisse aime dispenser avec beaucoup de fierté. Une seule chose est interdite à ces amants d’un jour : compliquer la vie.
Les vrais amours narcissiques sont quant à eux de véritables coups de foudre. Malheureusement, ils sont passagers. Notre narcissique expressif n’étant capable de se livrer totalement que pendant peu de temps, la fée qu’il choisit se transforme rapidement pour lui en sorcière sans intérêt petit à petit exclue de son monde affectif. La personnalité narcissique de type inhibé favorise son autocritique qui veut qu’elle ne mérite pas l’amour de l’autre, et se mésestime. Le fait même d’avoir été choisie la rend prête à n’importe quel sacrifice. Elle rêve de se perdre dans l’autre, dont elle égrène dons et succès, sans laisser la moindre place à un autre type de rapport humain.
C’est le cas de Marthe, une femme de quarante ans que m’a envoyée un gynécologue parce qu’elle refuse depuis six mois tout rapport sexuel. Elle est déprimée et elle a pris du poids. Selon ses dires, son mari Laurent est coupable de tout. Il a quinze ans de plus qu’elle et la retraite anticipée l’a transformé en véritable tyran. C’est du moins la façon dont elle le décrit lorsqu’elle raconte à quel point les exigences sexuelles de son mari ont augmenté. « J’ai du temps libre; profitons-en » semble t-il dire avant de harceler littéralement sa femme. Elle souligne que cette Satyriasis n’est que la dernière d’une longue suite de brimades. Il a commencé par l’empêcher de travailler, la privant ainsi de son seul espace d’autonomie. Puis il l’a contrainte à subir une stérilisation sous prétexte de ne pas augmenter la progéniture qu’il a eu d’un premier lit. Enfin, il a fini par l’obliger à vivre sous le même toit que sa belle-mère. À tant de violence s’ajoutent des relations sexuelles insatisfaisantes : l’éjaculation précoce est le seul épilogue possible des rapports intimes avec Laurent.
Pourquoi Marthe reste-t-elle avec un tel homme? Le seul mot qui me vienne à l’esprit, à l’écoute de l’histoire de sa vie, est celui de masochisme. Cette femme a en effet passé son enfance à s’occuper de son père aveugle. Infirmière de métier et de cœur, elle a réalisé bien tard que son mari n’était guère que le dernier d’une longue liste de personnes qu’elle a assistées depuis toujours. Laurent a certes pourvu aux besoins matériels de la famille, mais son comportement affectif a largement compensé cet échange. Avant d’en avoir une perception claire, Marthe a ressenti cette collusion narcissique dans son corps sous forme de migraines et d’un refus total de la relation sexuelle. Il ne s’agit là que du premier « non » qu’elle devra apprendre à prononcer afin de recouvrer son bonheur.
L’AMOUR COMME NOURRITURE RÉCIPROQUE : LA COLLUSION ORALE
La collusion orale tourne autour de la thématique de la sustentation réciproque. Imaginons que les partenaires soient une mère et son fils. La première doit continuellement répondre aux besoins inépuisables de l’autre. Elle jouit de l’apaisement de son enfant après la tétée, et lui de la nourriture qu’il a reçue.
La relation mère-enfant est la première expérience de la réciprocité. Certaines mères sont tellement remplies d’amour pour leur enfant, qu’elles se sentent offensées et frustrées lorsqu’arrive le moment où il ne se laisse plus manipuler passivement comme une poupée, première séparation qui leur procure un sentiment d’infériorité et de dépression. Le rôle que l’enfant joue dans cette relation, est important. Nous l’imaginons souvent comme une victime inerte : en réalité, il a toute la force de ses cris et de ses caprices pour s’opposer à sa mère. S’il n’évolue pas, sa personnalité orale adulte cherchera un partenaire qui le soignera et s’occupera de lui comme le faisait sa maman. Parfois cette avidité se transforme en boulimie.
Paradoxalement les personnalités orales finissent par haïr ceux qui satisfont à leurs désirs, parce qu’ils sont le témoignage vivant des besoins dont ils sont esclaves. Leurs partenaires idéaux sont donc rarement pétris d’ambitions personnelles. JURG WILLI explique qu’ils ont une prédilection pour les gros pulls, les grandes écharpes, bref, pour tout ce qui leur confère un sentiment de sécurité. Ils aiment la chaleur, s’assoient volontiers devant un feu de cheminée et aiment vivre dans des maisons lambrissées ou remplies de meubles en bois. On est frappé par la hâte avec laquelle ils se mettent à la disposition des autres. Mais leur désintéressement n’est qu’apparent. Ils craignent en réalité que la relation se rompe, si jamais on les trouvait inutiles.
Le rôle du bébé est tenu par celui des deux qui ne parvient pas à s’identifier au rôle maternel, les frustrations vécues avec sa mère ayant été trop nombreuses. Les fonctions maternelles sont donc transférées sur le partenaire qui doit correspondre à l’image idéale d’une mère gratifiante. En revanche, celui (ou celle ) qui assume le rôle maternel cherche sans arrêt à prendre soin de l’autre, n’étant pas capable de s’occuper de lui-même. En projetant sur l’autre le rôle du nourrisson, c’est son côté enfant qu’il prend en charge. Dans une telle collusion, le « bébé » vit une situation de régression. La « mère » de progression. Le premier renonce volontiers à une relation horizontale et compense sa position d’infériorité par toute la « nourriture » qu’il reçoit. Le partenaire-mère éloigne le danger de la régression, en maintenant l’autre à la place infantile qu’il refuse d’occuper lui-même. Le couple ne risque la rupture que lorsque l’envie prend le dessus. La « mère » est alors jalouse de l’attention portée à « l’enfant » qui est à son tour angoissé par la position régressive dans laquelle il est tombé. Ce n’est pas par hasard si, dès que le partenaire-mère tombe malade, le partenaire-bébé fait de même. Ces couples oraux sont prêts à tout lorsqu’il s’agit d’éviter d’échanger les rôles.
Claude se saoulait parfois et frappait alors à la porte de ses voisins, pensant que c’était la sienne. Il est aussi arrivé qu’il urine sur leur paillasson, mais il a été vite pardonné. Ses voisins savent qu’il est veuf, que sa femme est morte d’un cancer de la vessie et qu’elle était à la fois pour lui une mère, une épouse et une infirmière. En tout état de cause, elle était plus qu’une simple partenaire. Claude le sait aussi. C’est ce qu’il exprime en tout cas quand il retrouve sa lucidité. Il redevient un homme d’âge mûr, aisé et sympathique, qui partage sa vie entre ses demeures entre Montréal et Québec. Il parvient même à raconter son histoire, celle d’un jeune homme de bonne famille qui ne s’est révolté contre la sévérité maternelle qu’après l’âge de vingt ans, en quittant le poste dans une compagnie d’assurance, pour se consacrer à sa vraie vocation, la musique.
Il a rencontré sa femme, Huguette, au cours d’une fête à laquelle il participait avec son petit orchestre. Il était alors un playboy qui aimait s’étourdir dans la fête, elle était avocate et dotée d’une personnalité vive et de goûts marqués. Bref, ils formèrent un couple oral typique; pendant douze ans, il se réfugia dans ses bras maternels ou elle l’accueillait comme la plus aimante des mères. Ils n’ont jamais eu d’enfant, il travaillait trop, elle redoutait de perdre sa liberté et ils étaient si bien ensemble! Parfois la nuit, Claude se réveille encore brusquement pour parler à Huguette. Mais elle n’est plus là depuis des mois. Il s’est mis à boire, voulant oublier sa femme, mais il n’y arrive pas. Il vit seul, a abandonné la musique, et son unique plaisir réside dans des repas somptueux qu’il s’offre parfois au restaurant. Huguette avait façonné la personnalité de Claude. Mais celle-ci s’est évanouie avec sa mort. Avant tout, il a fallu mettre un frein à son alcoolisme, puis nous l’avons aidé à parler, à exprimer sa tristesse. Maintenant qu’il va mieux, il pense aller vivre aux U.S.A. ou la vie est plus facile pour les veufs, surtout quand ils sont aisés.
L’AMOUR COMME POSSESSION RÉCIPROQUE : LA COLLUSION SADICO-ANALE
Ce qualificatif peut sembler étrange; il se réfère en fait à l’art des stades de développement décrit par Freud. Celui pendant lequel l’enfant prend plaisir à contrôler ses sphincters. Parallèlement, il existe des couples qui prennent plaisir à satisfaire leur goût du pouvoir en multipliant les conflits dont le seul objectif est que l’autre n’ait pas gain de cause. Tous les prétextes à se quereller sont bons : l’activisme du partenaire ou sa passivité, son autonomie ou sa dépendance, son obstination ou sa souplesse, son amour de l’ordre ou son laisser-aller. Les deux composantes de ces pôles dialectiques sont comme souvent présentes en chacun de nous, mais le rapport pervers de domination pousse à plaquer l’un ou l’autre sur le partenaire dans le seul but de pouvoir le critiquer.
Dans de tels couples, le partenaire dominant fait preuve d’attitudes véritablement despotiques. Non seulement il exige une fidélité absolue, mais il voudrait de plus qu’elle soit le fruit d’une décision spontanée de conjoint : en bref, il a l’ambition de contrôler autant l’esprit de l’autre que ses comportements. Le partenaire passif supporte tout, satisfait de pouvoir déléguer les prises de décision, et de vivre sous la protection de l’autre.
Il s’agit pourtant, encore une fois, d’un mécanisme de pouvoir : la résistance passive n’est guère que le meilleur moyen de dominer son compagnon, tout en feignant d’être sous sa domination. Même violents, les conflits issus de ces collusions ne se placent pas dans une logique de séparation. Sans bouc émissaire il n’y aurait plus de conflit.
L’émergence de tendances jusqu’alors refoulées et protégées sur l’autre déclenche en revanche la véritable crise. Imaginons que le sujet dominant veuille vérifier jusqu’où va son ascendant sur l’autre, alors que celui-ci a décidé d’exprimer sa propre autonomie, le premier affirmera qu’il se comporte de façon aussi tyrannique parce que l’autre fuit et ne se laisse plus contrôler, alors que l’autre prétend qu’il ne se laisse plus contrôler, parce que son partenaire ne lui veut plus que du mal. Il est évident que ces relations trouvent un débouché naturel dans le sado masochisme, ne serait-ce que psychologique.
Dans la vie quotidienne, un rien suffit à exaspérer le litige. Lui serait prêt, par exemple, à préparer de temps en temps le petit déjeuner, mais il ne supporte pas que sa femme le lui demande. «Si pour une fois seulement il me montrait un peu d’attention! » soupire-t-elle. « Si je lui donne le petit doigt, elle me mangera la main. », se dit-il.
L’idée fixe de ces couples est de dominer sans être dominé. Personne ne prend d’initiative, de peur que son geste ne soit interprété comme un signe de faiblesse et ne donne lieu à des revendications. Leur sexualité fonctionne selon le même mécanisme : il n’est pas rare que la femme masque son orgasme, tandis que l’homme tente de précipiter son éjaculation. Bref, personne ne désire montrer à son partenaire qu’il a gain de cause.
C’est le plaisir que procure la peur de l’autre qui rend les conflits de pouvoir inépuisables, à la manière d’une grotesque guerre de tranchées. JURG WILLI cite le cas d’un couple dont les membres s’accusaient mutuellement d’égotisme : ils avaient construit chez eux une cloison mobile qui divisait le couloir de leur maison en deux parties égales, ce qui leur permettait d’entrer et de sortir sans être vu par l’autre. Ils ne communiquaient que par écrit et faisaient preuve d’un sens de la provocation toujours plus raffiné. Le mari en particulier était maître en la matière : avant que sa femme n’entre dans la salle de bain, il urinait dans le lavabo, ou bien il vomissait dans les casseroles à l’heure de la préparation des repas. Elle ne décida de s’en aller que le jour où il la menaça de mettre le feu à l’appartement.
Quelle surprise. Ce départ le rendit apathique et il dut être hospitalisé, ne parvenant plus à se nourrir seul. Il ne se rétablit que le jour où elle devint son infirmière, à leur commune satisfaction. Ce fut la fin de cette lutte conjugale qui n’avait été pour lui qu’une dernière tentative pour exprimer son autonomie. L’échec de ce modèle avait ramené leurs rapports dans un cadre quasi normalisé.
C’est peu dire que pour un thérapeute, ce genre de couple est exaspérant. Les exercices de communication, tellement utiles dans d’autres circonstances, se limitent pour eux à des tentatives de prise de contrôle de l’un par l’autre ou même du thérapeute, comme ce fut le cas avec Élisabeth. En entrant dans mon cabinet, elle tenait presque par les oreilles son mari Fernand. Elle voulait que je le réprimande parce qu’il refusait de subir une vasectomie et parlait le doigt pointé sur son ventre, rond d’une grossesse de cinq mois. Il m’a fallu un peu de temps pour réussir à éclairer la situation, par ailleurs très simple. Plus jeune qu’elle de cinq ans, il avait un an auparavant fait un enfant à l’une de ses maîtresses, qui avait décidé de le garder. À l’annonce de ces faits, la réaction d’Élisabeth avait été explosive : non seulement elle l’avait contraint à lui faire immédiatement un enfant, mais elle le sommait aussi de se faire stériliser. Une conclusion qui correspond bien à l’histoire de ce Canadien installé aux États-Unis depuis dix ans et qui s’est rapidement fait accaparer par l’énergique Élisabeth. Après s’en être emparé, elle voulait le castrer. Elle m’a même trouvé un rôle tout fait : celui du juge qui blâme le mari. Ma première tâche fut de lui démontrer que je ne pouvais être complice d’une telle manipulation.
Dans ces couples, plus l’élément dominateur poursuit l’autre de sa jalousie, plus celui-ci le trompe pour affirmer son autonomie. Mais plus il cherche à fuir, plus son partenaire prétend faire de lui sa propriété privée. Le premier dit : « Je suis jaloux parce que tu es infidèle », ce à quoi l’autre réplique : « je suis infidèle parce que tu m’étouffes avec ta jalousie ».Et la seule envie que nous ayons, nous les thérapeutes, c’est d’abandonner ces couples à leurs inépuisables prises de bec.
L’AMOUR COMME DEVOIR : LA COLLUSION HYSTÉRIQUE
Ce type de rapport est aussi appelé la collusion oedipienne par les psychiatres. Ses origines symboliques se situent dans les manifestations affectueuses que le fils adresse à sa mère : il arrive qu’il se rende compte qu’elle les apprécie, surtout lorsqu’elle est sexuellement insatisfaite, et qu’elle bloque tout à coup le processus de séduction. L’incohérence de ce comportement empêche l’enfant de renoncer à sa mère en tant qu’objet sexuel et le blesse dans son identité masculine. Un phénomène analogue active et interrompt les mouvements oedipiens de la fillette avec son père.
La collusion hystérique reproduit le même modèle comportemental. Superficielle, incohérente dans sa vie sentimentale, la femme hystérique a tendance à transformer les conflits à l’extérieur du couple ou à les transformer en des maladies impromptues. Pour séduire, elle se croit obligée de jouer à la femme désinhibée.
Mais elle évite d’avoir des rapports personnels trop intimes et sexualise tous les autres rapports, au risque de se faire molester par ceux qui ne comprennent pas ses provocations.
En général, l’homme hystérophile a vécu longtemps avec sa mère et son émancipation sexuelle a été tardive. Passif par nature, il évite de le montrer. Il rompt le lien qu’il entretient avec la terre ( à ses yeux la plus importante de toutes les mères ) en choisissant des sports virils et ascensionnels comme l’alpinisme, le parachutisme ou le deltaplane. Il s’occupe des autres pour dissimuler son besoin d’attention. Mais sa vraie nature se révèle dans une sexualité pauvre, qu’il néglige pour mieux cultiver des liens affectifs qui lui permettent de jouer les sauveteurs.
Leur mal de vivre les rapproche. C’est toujours le même schéma qui se répète : une femme qui cherche de l’aide et un homme que sa famille a convaincu de rentrer dans le rang. Elle se marie sans être amoureuse mais pense qu’un jour ou l’autre l’amour viendra. Lui n’aspire qu’à la consoler, mais il est constamment frustré puisque, malgré toutes ses tentatives, sa compagne ne peut sortir de son état d’insatisfaction chronique. Si par hasard il se permet de lui demander de l’aide en cas de maladie ou de difficulté professionnelle, elle le repousse avec dédain. Comment pourrait-elle porter à son mari la moindre attention maternelle?... Yolaine est une femme de la haute bourgeoisie, formaliste et égocentrique. Elle a toujours souffert de maux imaginaires qui n’ont fait qu’augmenter avec l’âge. Lorsque son mari a commencé à souffrir de dysfonctionnements de la prostate, une migraine soudaine l’a mise dans l’impossibilité de s’en occuper . Elle raconte à ses amies à quel point il est difficile de vivre avec un homme atteint de tels maux. Ce qui est loin de déplaire à son mari qui préfère être plaint plutôt que de devoir prendre l’initiative, notamment en matière sexuelle.
Rapidement, ils se comportent comme frère et sœur et elle commence à collectionner les amants en prenant comme prétexte l’indifférence de son mari. Situation qu’il accepte, puisqu’il considère que la virilité des autres est une forme d’agression très éloignée de la noblesse et de la tolérance qu’il manifeste.
Ce type de femme a beaucoup de succès, car les hommes aiment les femmes imprévisibles : elle veut systématiquement le contraire de ce qu’on lui offre, un vieux subterfuge qui lui permet d’avoir toujours raison. Ses amants sont des hommes forts, l’hystérique désirant toujours que soient bien séparés la douce routine du lit conjugal et la passion de l’alcôve. Même lorsqu’elle n’a pas d’amant, elle opère cette scission en faisant de ses enfants les témoins de la faiblesse de leur père, ce qui perpétue chez eux un complexe oedipien non résolu.
Les rôles peuvent évidemment être inversés : il arrive que l’homme soit autoritaire, et la femme, soumise . Il fait l’éloge de sa virilité, en tant que démenti à ses angoisses de castration et à ses tendances homosexuelles latentes, mais lorsque l’admiration féminine se ternit, son orgueil phallique s’en trouve blessé. Sa femme, qui le sait fragile, veut le rassurer pour une bonne raison : elle sait qu’il n’existe que dans la mesure où il peut se prouver à lui-même sa virilité au point que s’il en était autrement, il irait voir ailleurs. Si, dans cette situation, s’ajoute le facteur d’une grande différence d’âge, les compromis sont inévitables. Un homme plus âgé est attiré par l’idée d’initier une femme plus jeune à la vie conjugale, tandis qu’elle lui remet entre les mains son insécurité. Une femme plus âgée assume auprès d’un homme plus jeune et privé d’autonomie, un rôle essentiellement maternel. Elle devient à ses yeux une reine et une madone; une femme plus jeune lui semblerait trop immature. Il arrive qu’il accompagne sa dépendance d’un net penchant pour la boisson et les jeux de hasard.
L’alccol n’est qu’un moyen de se soustraire à la tutelle de son épouse, mais il finit en définitive par légitimer l’autorité de celle qui va le récupérer dans les bars ou paie la caution pour le sortir de prison.
En conclusion, ce type de collusion remet en cause la relation horizontale et tente de maintenir la dichotomie entre conjoint fort et conjoint faible. Il faut pourtant garder à l’esprit le fait que le partenaire dominant n’est pas toujours le plus fort. Combien de fois, lors des séances de psychothérapie, découvre-t-on la force cachée des faibles ?
mardi 7 juin 2011
LA NOTION DU DÉSIR CHEZ LE COUPLE 114 partie
Chaque couple, dans sa vie sexuelle, a des forces et des faiblesses bien particulières. Un autre atout, dans le couple que forment Claire et Thomas, est qu’ils ont tous deux un sujet : « Parfois, j’attends que Thomas soit excité car je ne veux pas faire les premiers pas. Mais si ça n’arrive pas, alors je lui fais des avances. Et il semble toujours prêt. Il n’est pas du genre ‘pas ce soir chérie’. L’envie est mutuelle. »
Un autre avantage est que Claire atteint facilement l’orgasme. Mais ce n’est pas seulement un cadeau de la nature : elle a trouvé le moyen de se relaxer et de se mettre dans un état d’esprit positif, ce qui l’aide à avoir des orgasmes plus intenses. « J’essaye de ne pas lutter pour atteindre l’orgasme, » dit-elle. « Il m’arrive parfois d’avoir à l’esprit l’image de l’orgasme que je désire avoir, puis je m’astreins à penser à certaines choses dont je sais qu’elles vont me conduire à l’orgasme. Par ce moyen, j’obtiens des orgasmes satisfaisants sur le moment, mais pas entièrement satisfaisants au fond Je connais deux sortes d’orgasmes. Lors des orgasmes profondément satisfaisants, mon corps tout entier réagit. Les pensées viennent à moi sans que je les appelle. C’est une expérience beaucoup plus profonde. Elle demande plus de temps, mais après une expérience de ce type, je me sens davantage prête à affronter le monde. »
Là où Claire et Thomas ont dû fournir les plus gros efforts, c’est dans le domaine de l’intimité émotionnelle. Claire avait eu une enfance malheureuse. Son père était alcoolique et sa mère enchaînait les dépressions nerveuses. Étant fille unique, Claire a passé son enfance à se sentir seule et mal aimée. Ces émotions ont très vite fait surface dans sa relation avec Thomas. « Lors de nos premiers rapports sexuels, il suffisait à Thomas de me caresser la tête pour que je me mette à pleurer. Il y avait en moi des flots de douleur que je n’avais encore jamais laissés échapper. J’aurais pu recueillir des litres de larmes. »
À cette époque, Claire a fait l’expérience du phénomène « plaisir/douleur » dont j’ai parlé plus haut dans le livre. Un phénomène qui se produit quand quelqu’un reçoit enfin l’amour qu’il a toute sa vie attendu. Beaucoup de gens n’ont pas le courage de remuer des émotions aussi intenses et ils préfèrent bloquer leurs émotions ou interrompre leur relation plutôt que de réveiller des souffrances. Claire estime que c’est grâce à la réaction calme de Thomas, face à ses torrents de larmes, qu’elle a été capable de surmonter sa douleur. « Ce qu’il y a de merveilleux avec Thomas, c’est qu’il ne se laisse pas emporter par la tristesse, » a-t-elle dit. « Il ne rentrait pas dans mon histoire en se disant ‘Mon Dieu, comme elle a dû souffrir’, il me permettait simplement d’exprimer mes émotions Nos relations sexuelles, nos caresses et mes pleurs ont été le début de ma guérison. Je pense toujours à mon enfance comme à une période malheureuse, mais elle n’influe plus sur ma vie actuelle. À présent, je vois tellement plus clairement pourquoi je suis sur cette planète, une sensation que je n’éprouvais presque jamais auparavant. »
J’ai demandé à Thomas d’où lui venaient son désir de protéger Claire et sa capacité de l’accepter telle qu’elle était. « Nous sommes un peu les tenons et les mortaises », a-t-il expliqué. « Je suis arrivé à l’âge adulte avec le besoin inassouvi de m’occuper des autres et de leur faire du bien. Je voulais toujours aider mes parents, mais ils ne me laissaient jamais faire. Ma mère avait la conviction qu’elle devait tout faire elle-même. Elle rejetait mon aide. Quant à mon père, il était meurtri sur le plan affectif, et je n’ai jamais su pourquoi. Par je ne sais quel miracle, quand j’ai rencontré Claire, j’ai su voir les souffrances qu’elle avait en elle et ne me suis pas senti menacé par elles, ni n’ai voulu l’en délivrer. J’ai eu la sensation qu’il me suffisait simplement d’être près d’elle, à ses côtés, présent, à son écoute. »
Claire et Thomas sont la preuve vivante que l’une des meilleures façons d’instaurer dans un couple la passion sexuelle est d’être vraiment à l’écoute de l’autre.
À plusieurs reprises, pendant cet entretien, j’ai été tellement touché de l’amour entre Claire et Thomas que les larmes sont montées aux yeux. De par mes fonctions de psychothérapeute, j’ai passé tellement de temps à dénouer les conflits des couples que j’ai ressenti cet entretien avec Claire et Thomas, ayant réussi eux-mêmes à surmonter leurs propres difficultés, comme un réel privilège. Leur profonde connaissance l’un de l’autre, leur haut niveau d’acceptation mutuelle et leurs capacités de se révéler eux-mêmes à travers leur sensualité, ont été une merveilleuse source d’inspiration pour moi.
Le sexe peut être une rencontre brève et incendiaire entre deux personnes presque étrangères l’une à l’autre; il peut aussi être un acte mécanique entre deux personnes ayant fini par se lasser l’une de l’autre ou il peut être une expérience magique, étincelante, salvatrice et durable entre deux personnes étroitement connectées sur le plan des sentiments, de l’esprit et de l’âme. Claire et Thomas font partie de ces couples exceptionnels qui vivent la passion au jour le jour. En faisant de moi le témoin de l’amour qu’ils avaient construit ensemble, ils m’ont donné l’impression de marcher sur une terre sacrée. Ils avaient profondément assimilé tout le sujet de ce livre « Bien vivre une relation. »
Un autre avantage est que Claire atteint facilement l’orgasme. Mais ce n’est pas seulement un cadeau de la nature : elle a trouvé le moyen de se relaxer et de se mettre dans un état d’esprit positif, ce qui l’aide à avoir des orgasmes plus intenses. « J’essaye de ne pas lutter pour atteindre l’orgasme, » dit-elle. « Il m’arrive parfois d’avoir à l’esprit l’image de l’orgasme que je désire avoir, puis je m’astreins à penser à certaines choses dont je sais qu’elles vont me conduire à l’orgasme. Par ce moyen, j’obtiens des orgasmes satisfaisants sur le moment, mais pas entièrement satisfaisants au fond Je connais deux sortes d’orgasmes. Lors des orgasmes profondément satisfaisants, mon corps tout entier réagit. Les pensées viennent à moi sans que je les appelle. C’est une expérience beaucoup plus profonde. Elle demande plus de temps, mais après une expérience de ce type, je me sens davantage prête à affronter le monde. »
Là où Claire et Thomas ont dû fournir les plus gros efforts, c’est dans le domaine de l’intimité émotionnelle. Claire avait eu une enfance malheureuse. Son père était alcoolique et sa mère enchaînait les dépressions nerveuses. Étant fille unique, Claire a passé son enfance à se sentir seule et mal aimée. Ces émotions ont très vite fait surface dans sa relation avec Thomas. « Lors de nos premiers rapports sexuels, il suffisait à Thomas de me caresser la tête pour que je me mette à pleurer. Il y avait en moi des flots de douleur que je n’avais encore jamais laissés échapper. J’aurais pu recueillir des litres de larmes. »
À cette époque, Claire a fait l’expérience du phénomène « plaisir/douleur » dont j’ai parlé plus haut dans le livre. Un phénomène qui se produit quand quelqu’un reçoit enfin l’amour qu’il a toute sa vie attendu. Beaucoup de gens n’ont pas le courage de remuer des émotions aussi intenses et ils préfèrent bloquer leurs émotions ou interrompre leur relation plutôt que de réveiller des souffrances. Claire estime que c’est grâce à la réaction calme de Thomas, face à ses torrents de larmes, qu’elle a été capable de surmonter sa douleur. « Ce qu’il y a de merveilleux avec Thomas, c’est qu’il ne se laisse pas emporter par la tristesse, » a-t-elle dit. « Il ne rentrait pas dans mon histoire en se disant ‘Mon Dieu, comme elle a dû souffrir’, il me permettait simplement d’exprimer mes émotions Nos relations sexuelles, nos caresses et mes pleurs ont été le début de ma guérison. Je pense toujours à mon enfance comme à une période malheureuse, mais elle n’influe plus sur ma vie actuelle. À présent, je vois tellement plus clairement pourquoi je suis sur cette planète, une sensation que je n’éprouvais presque jamais auparavant. »
J’ai demandé à Thomas d’où lui venaient son désir de protéger Claire et sa capacité de l’accepter telle qu’elle était. « Nous sommes un peu les tenons et les mortaises », a-t-il expliqué. « Je suis arrivé à l’âge adulte avec le besoin inassouvi de m’occuper des autres et de leur faire du bien. Je voulais toujours aider mes parents, mais ils ne me laissaient jamais faire. Ma mère avait la conviction qu’elle devait tout faire elle-même. Elle rejetait mon aide. Quant à mon père, il était meurtri sur le plan affectif, et je n’ai jamais su pourquoi. Par je ne sais quel miracle, quand j’ai rencontré Claire, j’ai su voir les souffrances qu’elle avait en elle et ne me suis pas senti menacé par elles, ni n’ai voulu l’en délivrer. J’ai eu la sensation qu’il me suffisait simplement d’être près d’elle, à ses côtés, présent, à son écoute. »
Claire et Thomas sont la preuve vivante que l’une des meilleures façons d’instaurer dans un couple la passion sexuelle est d’être vraiment à l’écoute de l’autre.
À plusieurs reprises, pendant cet entretien, j’ai été tellement touché de l’amour entre Claire et Thomas que les larmes sont montées aux yeux. De par mes fonctions de psychothérapeute, j’ai passé tellement de temps à dénouer les conflits des couples que j’ai ressenti cet entretien avec Claire et Thomas, ayant réussi eux-mêmes à surmonter leurs propres difficultés, comme un réel privilège. Leur profonde connaissance l’un de l’autre, leur haut niveau d’acceptation mutuelle et leurs capacités de se révéler eux-mêmes à travers leur sensualité, ont été une merveilleuse source d’inspiration pour moi.
Le sexe peut être une rencontre brève et incendiaire entre deux personnes presque étrangères l’une à l’autre; il peut aussi être un acte mécanique entre deux personnes ayant fini par se lasser l’une de l’autre ou il peut être une expérience magique, étincelante, salvatrice et durable entre deux personnes étroitement connectées sur le plan des sentiments, de l’esprit et de l’âme. Claire et Thomas font partie de ces couples exceptionnels qui vivent la passion au jour le jour. En faisant de moi le témoin de l’amour qu’ils avaient construit ensemble, ils m’ont donné l’impression de marcher sur une terre sacrée. Ils avaient profondément assimilé tout le sujet de ce livre « Bien vivre une relation. »
lundi 6 juin 2011
LA NOTION DU DÉSIR CHEZ LE COUPLE 113 partie
CLAIRE ET THOMAS : UNE RELATION PRIVILÉGIÉE
Pour que vous ayez une meilleure idée de ce qui vous attend, je vais vous parler d’un de ces couples exceptionnels qui savent maîtriser l’art de créer et de persévérer entre eux un climat sexuel passionné.
Claire et Thomas, 45 ans environ, sont mariés depuis seize ans. Il s’agit pour tous deux d’un remariage. Thomas est administrateur dans une agence de services sociaux, et Claire est graphiste. Ils ont été parmi les premiers que j’ai interviewés pour ce livre. En relisant mes notes pour la rédaction de ce chapitre, j’ai été à nouveau frappé de voir à quel point ce couple illustrait bien la plupart des éléments-clés de ce programme.
Je leur ai d’abord demandé de remplir le questionnaire sur le Style de sexualité. Ensuite, j’ai comparé leurs résultats. D’après leurs commentaires, il était évident que tous deux avaient du mal à séparer la sexualité de l’intimité. Thomas a dit : « J’ai eu quelques difficultés pour répondre aux affirmations concernant le désir sexuel. Je ne peux séparer le désir sexuel du romanesque ou de l’intimité. Se focaliser sur le sexe, c’est rétrécir son champ de vision et son champ d’action. »
Claire a ajouté : « En effet, tout est intimement mêlé. Le toucher, par exemple. Pour moi, tout contact physique entre nous est une partie de l’acte sexuel. Laver la vaisselle ensemble. Être assis côte à côte sur un canapé. Je ne sépare pas les choses. Si je sens l’affection présente dans la journée, je suis plus sexuelle le soir, au lit » Pour eux, les neuf domaines du questionnaire forment un tout homogène et indissociable.
Plusieurs fois au cours de l’interview, j’ai remarqué qu’ils associaient l’acte d’amour à une étroite connexion réciproque. Cela transparaissait même dans leur langage. Ils remplaçaient volontiers l’expression « faire l’amour » par « être connecté à ». Ils considèrent le sexe comme une façon de se connecter l’un à l’autre sur un certain nombre de points importants.
Ce qui est exceptionnel dans leur relation est leur façon d’utiliser délibérément le sexe comme un moyen d’instaurer entre eux l’intimité. Généralement, c’est plutôt le contraire qui se passe. Les couples arrivent à créer entre eux un climat d’intimité émotionnelle qui les conduit spontanément à l’acte sexuel. Claire a expliqué ainsi leur approche inverse : « Quand nous avons du mal à communiquer pour quelque raison que ce soit, si par exemple, nous avons des ennuis d’argent, ce qui peut être un problème grave, il y a un fossé entre nous. Mais nous avons remarqué que faire l’amour nous mettait en étroite connexion l’un avec l’autre, et que le fossé disparaissait instantanément, ce qui nous permettait d’envisager nos problèmes plus sereinement, main dans la main. Pour nous, le sexe est le meilleur moyen de communication qui soit. »
Thomas a ajouté : « Pour faire l’amour de cette façon, vous devez vous débarrasser de l’idée selon laquelle il faut être dans un certain état d’esprit, être excité et se sentir proche de l’autre pour engager un rapport sexuel avec lui (elle). Or, rien de tout ça n’est nécessaire. Vous décidez de faire l’amour, et c’est tout. Pour nous, l’intimité et la proximité sont générées par le sexe.
« Nous avons même inventé un mot pour ce type de relations sexuelles. Nous les appelons nos ‘rencontres maritales’. Nos ne recherchons pas forcément l’orgasme, ni ne sommes nécessairement très romantiques. Ce peut être simplement mécanique parfois. Mais cela rétablit entre nous cette connexion physique et sexuelle qui nous permet d’envisager nos problèmes d’une manière plus positive. »
Un peu plus tard, au cours de l’interview, Claire a dit qu’un des aspects lui plaisant le plus dans l’acte d’amour était simplement ce long moment de contact physique. « Le contact physique est incroyablement important pour moi. Même s’il s’agit seulement d’une petite caresse sur le bras. Me sentir rassurée, sur le plan physique, peut entièrement changer mon humeur. Pour moi, le sexe est la force ultime du contact physique. »
« Claire vient de prononcer un mot sur lequel je voudrais insister », a dit Thomas. « C’est le mot ‘rassuré’. Quand je traverse une période difficile dans ma vie, j’ai l’impression d’avoir des œillères qui limitent considérablement mon champ de vision. Dans ces moments-là, je me sens facilement très seul et j’ai l’impression que personne ne voit ce que je suis en train de traverser. Il n’est pas facile de traduire en mots ce type d’impressions. Quand Claire et moi sommes en étroite connexion l’un avec l’autre, il n’est pas nécessaire que je cherche des mots pour exprimer cela. Mes œillères disparaissent et je me sens plus détendu, plus en sécurité, plus accessible. Et cela influe sur ma façon d’envisager mes problèmes professionnels ou autres. »
Malgré leur emploi du temps chargé, Claire et Thomas s’arrangent pour que le sexe soit une priorité dans leur vie. « Dans les premiers temps de notre relation, nous pouvions passer des heures entières ensemble dans un lit. », a dit Claire en souriant. « Il nous arrivait de passer une demi-journée au lit à parler et à nous caresser. Nous avions tous deux conscience que ce temps consacré à l’amour pouvait créer entre nous un profond climat d’intimité, mais nous n’avions pas imaginé à quel point. »
« Naturellement passer autant de temps au lit n’est maintenant plus possible! » a ajouté Thomas en riant.
« Mais même aujourd’hui, quand nous n’avons pas eu de connexion sexuelle pendant un certain temps, j’ai besoin de faire l’amour pendant un long moment », a dit Claire. « Pendant aussi bien des heures! J’ai besoin de le toucher, de parler, de me sentir bien, dans un nid douillet, de me sentir soutenue. Pour moi, le sexe est un grand moment de détente. J’ai toujours pensé que je devais faire les choses rapidement. Mais ça ne marche pas avec le sexe. »
Au cours de notre conversation, j’ai demandé à Claire et à Thomas s’ils étaient toujours bien entendus sexuellement ou s’ils avaient dû faire des efforts mutuels pour y arriver.
« C’est venu avec le temps », a répondu Thomas. « Ce n’était pas le cas au début. »
Ce qui a évolué en premier dans leur relation a été leur image mutuelle de leur corps. « Au but de notre quatrième ou cinquième rencontre », a dit Thomas, «j’ai eu une intuition soudaine. Je me souviens encore de ce que je me suis dit à ce moment-là : ‘Cette femme va m’aider à connaître mon corps’. Et cela s’est avéré. Si j’avais rempli votre questionnaire avant de connaître Claire, j’aurais obtenu de piètres résultats dans le domaine de l’image de soi. »
Claire a aussitôt enchaîné : « Moi non plus je n’ai pas toujours eu une image forte ou positive de moi-même. Le fait que je me sente aujourd’hui tellement bien dans ma peau vient de ce que Thomas m’accepte telle que je suis. C’est un des merveilleux cadeaux de cette relation avec lui. »
Thomas est issu d’un milieu catholique et il est conscient du fait que, par certains côtés, sa religion l’a restreint sexuellement. Mais il préfère insister sur les aspects positifs : « Je respecte beaucoup de choses dans la religion catholique », dit-il. « On y insiste beaucoup sur la retenue de soi, et je pense que c’est un point crucial. Sans la retenue de soi, et je pense que c’est un point crucial. Sans la retenue de soi, je ne pense pas qu’il puisse y avoir de relations sexuelles extra-ordinaires. Cela peut sembler contradicatoire. »
« Tu veux dire par exemple comme d’attendre que j’aie un orgasme en premier? » lui a demandé sa femme.
« C’est un exemple, oui » a répondu Thomas.
« Et il est très fort à ce jeu! »
Éclat de rire de Thomas
« C’est encore un des points satisfaisants de notre relation », a dit Claire. « Notre technicité. Nous avons peu à peu résolu tous les problèmes ‘techniques’. Et ça n’a pas été trop difficile. Si vous aimez quelqu’un, avez confiance en lui, vous pouvez lui dire simplement ce que vous aimez. C’est une question de confiance et de communication. »
« Il y a un autre aspect de la retenue de soi que je trouve important », a ajouté Thomas, « c’est de ne pas me concentrer sur mes propres besoins. Je sais généralement ce que je veux à chaque moment précis. Mais si je ne savais pas aussi ce que Claire veut, je pense que je serais assez dur à vivre. J’essaye d’être entièrement à son écoute, faisant aussi bien attention à ses propos qu’à ses sensations ou à ses messages non verbaux. Cela m’empêche d’être trop concentré sur moi-même. » Il évoquait là le concept d’équipe et d’accommodement à l’autre, un point essentiel des relations amoureuses qui durent longtemps. Thomas a appris à équilibrer ses propres besoins en étant conscient de ceux de Claire. Il n’y a pas entre eux cette mentalité « moi d’abord » qui est tellement nocive à l’intimité des couples.
Pour que vous ayez une meilleure idée de ce qui vous attend, je vais vous parler d’un de ces couples exceptionnels qui savent maîtriser l’art de créer et de persévérer entre eux un climat sexuel passionné.
Claire et Thomas, 45 ans environ, sont mariés depuis seize ans. Il s’agit pour tous deux d’un remariage. Thomas est administrateur dans une agence de services sociaux, et Claire est graphiste. Ils ont été parmi les premiers que j’ai interviewés pour ce livre. En relisant mes notes pour la rédaction de ce chapitre, j’ai été à nouveau frappé de voir à quel point ce couple illustrait bien la plupart des éléments-clés de ce programme.
Je leur ai d’abord demandé de remplir le questionnaire sur le Style de sexualité. Ensuite, j’ai comparé leurs résultats. D’après leurs commentaires, il était évident que tous deux avaient du mal à séparer la sexualité de l’intimité. Thomas a dit : « J’ai eu quelques difficultés pour répondre aux affirmations concernant le désir sexuel. Je ne peux séparer le désir sexuel du romanesque ou de l’intimité. Se focaliser sur le sexe, c’est rétrécir son champ de vision et son champ d’action. »
Claire a ajouté : « En effet, tout est intimement mêlé. Le toucher, par exemple. Pour moi, tout contact physique entre nous est une partie de l’acte sexuel. Laver la vaisselle ensemble. Être assis côte à côte sur un canapé. Je ne sépare pas les choses. Si je sens l’affection présente dans la journée, je suis plus sexuelle le soir, au lit » Pour eux, les neuf domaines du questionnaire forment un tout homogène et indissociable.
Plusieurs fois au cours de l’interview, j’ai remarqué qu’ils associaient l’acte d’amour à une étroite connexion réciproque. Cela transparaissait même dans leur langage. Ils remplaçaient volontiers l’expression « faire l’amour » par « être connecté à ». Ils considèrent le sexe comme une façon de se connecter l’un à l’autre sur un certain nombre de points importants.
Ce qui est exceptionnel dans leur relation est leur façon d’utiliser délibérément le sexe comme un moyen d’instaurer entre eux l’intimité. Généralement, c’est plutôt le contraire qui se passe. Les couples arrivent à créer entre eux un climat d’intimité émotionnelle qui les conduit spontanément à l’acte sexuel. Claire a expliqué ainsi leur approche inverse : « Quand nous avons du mal à communiquer pour quelque raison que ce soit, si par exemple, nous avons des ennuis d’argent, ce qui peut être un problème grave, il y a un fossé entre nous. Mais nous avons remarqué que faire l’amour nous mettait en étroite connexion l’un avec l’autre, et que le fossé disparaissait instantanément, ce qui nous permettait d’envisager nos problèmes plus sereinement, main dans la main. Pour nous, le sexe est le meilleur moyen de communication qui soit. »
Thomas a ajouté : « Pour faire l’amour de cette façon, vous devez vous débarrasser de l’idée selon laquelle il faut être dans un certain état d’esprit, être excité et se sentir proche de l’autre pour engager un rapport sexuel avec lui (elle). Or, rien de tout ça n’est nécessaire. Vous décidez de faire l’amour, et c’est tout. Pour nous, l’intimité et la proximité sont générées par le sexe.
« Nous avons même inventé un mot pour ce type de relations sexuelles. Nous les appelons nos ‘rencontres maritales’. Nos ne recherchons pas forcément l’orgasme, ni ne sommes nécessairement très romantiques. Ce peut être simplement mécanique parfois. Mais cela rétablit entre nous cette connexion physique et sexuelle qui nous permet d’envisager nos problèmes d’une manière plus positive. »
Un peu plus tard, au cours de l’interview, Claire a dit qu’un des aspects lui plaisant le plus dans l’acte d’amour était simplement ce long moment de contact physique. « Le contact physique est incroyablement important pour moi. Même s’il s’agit seulement d’une petite caresse sur le bras. Me sentir rassurée, sur le plan physique, peut entièrement changer mon humeur. Pour moi, le sexe est la force ultime du contact physique. »
« Claire vient de prononcer un mot sur lequel je voudrais insister », a dit Thomas. « C’est le mot ‘rassuré’. Quand je traverse une période difficile dans ma vie, j’ai l’impression d’avoir des œillères qui limitent considérablement mon champ de vision. Dans ces moments-là, je me sens facilement très seul et j’ai l’impression que personne ne voit ce que je suis en train de traverser. Il n’est pas facile de traduire en mots ce type d’impressions. Quand Claire et moi sommes en étroite connexion l’un avec l’autre, il n’est pas nécessaire que je cherche des mots pour exprimer cela. Mes œillères disparaissent et je me sens plus détendu, plus en sécurité, plus accessible. Et cela influe sur ma façon d’envisager mes problèmes professionnels ou autres. »
Malgré leur emploi du temps chargé, Claire et Thomas s’arrangent pour que le sexe soit une priorité dans leur vie. « Dans les premiers temps de notre relation, nous pouvions passer des heures entières ensemble dans un lit. », a dit Claire en souriant. « Il nous arrivait de passer une demi-journée au lit à parler et à nous caresser. Nous avions tous deux conscience que ce temps consacré à l’amour pouvait créer entre nous un profond climat d’intimité, mais nous n’avions pas imaginé à quel point. »
« Naturellement passer autant de temps au lit n’est maintenant plus possible! » a ajouté Thomas en riant.
« Mais même aujourd’hui, quand nous n’avons pas eu de connexion sexuelle pendant un certain temps, j’ai besoin de faire l’amour pendant un long moment », a dit Claire. « Pendant aussi bien des heures! J’ai besoin de le toucher, de parler, de me sentir bien, dans un nid douillet, de me sentir soutenue. Pour moi, le sexe est un grand moment de détente. J’ai toujours pensé que je devais faire les choses rapidement. Mais ça ne marche pas avec le sexe. »
Au cours de notre conversation, j’ai demandé à Claire et à Thomas s’ils étaient toujours bien entendus sexuellement ou s’ils avaient dû faire des efforts mutuels pour y arriver.
« C’est venu avec le temps », a répondu Thomas. « Ce n’était pas le cas au début. »
Ce qui a évolué en premier dans leur relation a été leur image mutuelle de leur corps. « Au but de notre quatrième ou cinquième rencontre », a dit Thomas, «j’ai eu une intuition soudaine. Je me souviens encore de ce que je me suis dit à ce moment-là : ‘Cette femme va m’aider à connaître mon corps’. Et cela s’est avéré. Si j’avais rempli votre questionnaire avant de connaître Claire, j’aurais obtenu de piètres résultats dans le domaine de l’image de soi. »
Claire a aussitôt enchaîné : « Moi non plus je n’ai pas toujours eu une image forte ou positive de moi-même. Le fait que je me sente aujourd’hui tellement bien dans ma peau vient de ce que Thomas m’accepte telle que je suis. C’est un des merveilleux cadeaux de cette relation avec lui. »
Thomas est issu d’un milieu catholique et il est conscient du fait que, par certains côtés, sa religion l’a restreint sexuellement. Mais il préfère insister sur les aspects positifs : « Je respecte beaucoup de choses dans la religion catholique », dit-il. « On y insiste beaucoup sur la retenue de soi, et je pense que c’est un point crucial. Sans la retenue de soi, et je pense que c’est un point crucial. Sans la retenue de soi, je ne pense pas qu’il puisse y avoir de relations sexuelles extra-ordinaires. Cela peut sembler contradicatoire. »
« Tu veux dire par exemple comme d’attendre que j’aie un orgasme en premier? » lui a demandé sa femme.
« C’est un exemple, oui » a répondu Thomas.
« Et il est très fort à ce jeu! »
Éclat de rire de Thomas
« C’est encore un des points satisfaisants de notre relation », a dit Claire. « Notre technicité. Nous avons peu à peu résolu tous les problèmes ‘techniques’. Et ça n’a pas été trop difficile. Si vous aimez quelqu’un, avez confiance en lui, vous pouvez lui dire simplement ce que vous aimez. C’est une question de confiance et de communication. »
« Il y a un autre aspect de la retenue de soi que je trouve important », a ajouté Thomas, « c’est de ne pas me concentrer sur mes propres besoins. Je sais généralement ce que je veux à chaque moment précis. Mais si je ne savais pas aussi ce que Claire veut, je pense que je serais assez dur à vivre. J’essaye d’être entièrement à son écoute, faisant aussi bien attention à ses propos qu’à ses sensations ou à ses messages non verbaux. Cela m’empêche d’être trop concentré sur moi-même. » Il évoquait là le concept d’équipe et d’accommodement à l’autre, un point essentiel des relations amoureuses qui durent longtemps. Thomas a appris à équilibrer ses propres besoins en étant conscient de ceux de Claire. Il n’y a pas entre eux cette mentalité « moi d’abord » qui est tellement nocive à l’intimité des couples.
vendredi 3 juin 2011
LA NOTION DU DÉSIR CHEZ LE COUPLE 112 partie
COMMENT CONNAÎTRE UNE PASSION PLUS INTENSE
En plus de reconnaître vos peurs, en général, de la sexualité et de l’intimité, vous devez aussi surmonter les difficultés spécifiques qui se dressent sur votre chemin, telles que le manque de désir, les inhibitions sexuelles, le manque de romanesque ou d’intimité émotionnelle. Le but de ce livre ‘Bien vivre la relation’ est de vous y aider. Voyons ensemble ce que vous avez déjà accompli jusqu’à maintenant. En répondant au questionnaire sur votre Style de sexualité, vous avez mis en lumière vos forces et vos faiblesses dans les neuf domaines-clés de votre relation amoureuse. En lisant très attentivement les chapitres concernant ces domaines particuliers, vous avez eu des réponses à certaines de vos questions et j’espère qu’à présent les choses sont plus claires pour vous. Et puis, en pratiquant les exercices proposés à la fin de chaque chapitre, vous avez progressivement transformé vos connaissances toutes fraîches en nouveaux modes de comportement. Maintenant que vous avez accompli la plupart des exercices proposés, je vous conseille de remplir à nouveau le questionnaire pour que vous puissiez constater vos progrès.
Ne l’oubliez pas, vous n’êtes pas toujours en mesure de prédire le domaine à explorer qui va le plus faire progresser votre couple. Les progrès les plus significatifs viendront peut-être d’un domaine que vous avez préféré éviter jusqu’à maintenant. Reprenez les différents chapitres de ce livre, ainsi que les résultats du questionnaire, et repérez les domaines où vous avez encore fort à faire. (Si vous avez un doute, demandez à votre partenaire les domaines sur lesquels il (elle) aimerait que vous concentriez vos efforts.) Comme tous les gens avec lesquels j’ai travaillé, vous pouvez faire de grands progrès dans les domaines que vous hésitez le plus à explorer.
En résumé, voici la liste des idées qui, je l’espère, sont maintenant claires pour vous après la lecture de ce livre et la pratique des exercices :
LES IDÉES-CLÉS
- L’intense attraction biologique que vous ressentez pour votre partenaire tend à décroître au bout de quelques mois ou de quelques années. C’est normal.
- Le désir sexuel est un phénomène complexe dont les composantes sont à la fois biologiques et émotionnelles.
- La plupart du temps, un des deux partenaires est plus enclin que l’autre à faire l’amour.
- La plupart des hommes ont des besoins sexuels plus grands que ceux des femmes.
- Les hommes et les femmes ont le plus souvent des conversations situées sur un registre différent.
- Dans la plupart des couples, les deux partenaires ont des comportements qui font barrage à l’intimité.
- Les hommes ont plutôt des dispositions envers l’autonomie et les femmes envers le relationnel. Mais tous sont capables des deux.
- L’anatomie humaine favorise l’orgasme masculin.
- La majorité des femmes, pour atteindre l’orgasme, ont besoin d’une stimulation du clitoris ou du Point G, en plus du coït.
- Les femmes qui ont les vies sexuelles les plus satisfaisantes sont celles qui prennent aussi en charge leur propre excitation.
- Chaque corps est unique. Il n’existe aucune position ou technique amoureuse qui fonctionne pour tous les hommes et toutes les femmes.
- Beaucoup de couples sont trop restrictifs dans leurs pratiques sexuelles.
- Plus la relation et les membres du couple gagnent en maturité, plus ils ont besoin de stimulations physiques pour être totalement excités, aussi bien les hommes que les femmes.
- L’amour romantique est un phénomène délicieux mais de courte durée.
- Pour maintenir au fil du temps un climat romantique dans votre couple, vous devez découvrir ce que veulent dire les mots « Je t’aime » pour votre partenaire et agir dans ce sens.
- Améliorer l’image que vous avez de votre corps vous permet de vous détendre pendant vos rapports amoureux et de jouir pleinement de votre sexualité.
- Dans la plupart des couples, la sensualité est une ressource inexploitée.
- La plupart des couples doivent accorder à leur sexualité une place plus grande dans leur vie.
- La plupart des gens ont peur d’une trop grande intimité ou d’une passion trop forte.
Acquérir de nouvelles connaissances sur la sexualité humaine est un élément-clé de ce programme. Mais je veux insister encore sur l’importance des exercices proposés en fin de chapitres. Ils vont vous faire connaître un degré d’intimité plus profond. Ils vont vous donner des idées pour renouveler vos relations sexuelles et les diversifier. Ils vont vous donner des talents amoureux plus sophistiqués. Ils vont vous aider à vous débarrasser de vos inhibitions et augmenter votre taux de désir sexuel. Une vie entière de plaisirs physiques et de proximité émotionnelle vous attend…..
En plus de reconnaître vos peurs, en général, de la sexualité et de l’intimité, vous devez aussi surmonter les difficultés spécifiques qui se dressent sur votre chemin, telles que le manque de désir, les inhibitions sexuelles, le manque de romanesque ou d’intimité émotionnelle. Le but de ce livre ‘Bien vivre la relation’ est de vous y aider. Voyons ensemble ce que vous avez déjà accompli jusqu’à maintenant. En répondant au questionnaire sur votre Style de sexualité, vous avez mis en lumière vos forces et vos faiblesses dans les neuf domaines-clés de votre relation amoureuse. En lisant très attentivement les chapitres concernant ces domaines particuliers, vous avez eu des réponses à certaines de vos questions et j’espère qu’à présent les choses sont plus claires pour vous. Et puis, en pratiquant les exercices proposés à la fin de chaque chapitre, vous avez progressivement transformé vos connaissances toutes fraîches en nouveaux modes de comportement. Maintenant que vous avez accompli la plupart des exercices proposés, je vous conseille de remplir à nouveau le questionnaire pour que vous puissiez constater vos progrès.
Ne l’oubliez pas, vous n’êtes pas toujours en mesure de prédire le domaine à explorer qui va le plus faire progresser votre couple. Les progrès les plus significatifs viendront peut-être d’un domaine que vous avez préféré éviter jusqu’à maintenant. Reprenez les différents chapitres de ce livre, ainsi que les résultats du questionnaire, et repérez les domaines où vous avez encore fort à faire. (Si vous avez un doute, demandez à votre partenaire les domaines sur lesquels il (elle) aimerait que vous concentriez vos efforts.) Comme tous les gens avec lesquels j’ai travaillé, vous pouvez faire de grands progrès dans les domaines que vous hésitez le plus à explorer.
En résumé, voici la liste des idées qui, je l’espère, sont maintenant claires pour vous après la lecture de ce livre et la pratique des exercices :
LES IDÉES-CLÉS
- L’intense attraction biologique que vous ressentez pour votre partenaire tend à décroître au bout de quelques mois ou de quelques années. C’est normal.
- Le désir sexuel est un phénomène complexe dont les composantes sont à la fois biologiques et émotionnelles.
- La plupart du temps, un des deux partenaires est plus enclin que l’autre à faire l’amour.
- La plupart des hommes ont des besoins sexuels plus grands que ceux des femmes.
- Les hommes et les femmes ont le plus souvent des conversations situées sur un registre différent.
- Dans la plupart des couples, les deux partenaires ont des comportements qui font barrage à l’intimité.
- Les hommes ont plutôt des dispositions envers l’autonomie et les femmes envers le relationnel. Mais tous sont capables des deux.
- L’anatomie humaine favorise l’orgasme masculin.
- La majorité des femmes, pour atteindre l’orgasme, ont besoin d’une stimulation du clitoris ou du Point G, en plus du coït.
- Les femmes qui ont les vies sexuelles les plus satisfaisantes sont celles qui prennent aussi en charge leur propre excitation.
- Chaque corps est unique. Il n’existe aucune position ou technique amoureuse qui fonctionne pour tous les hommes et toutes les femmes.
- Beaucoup de couples sont trop restrictifs dans leurs pratiques sexuelles.
- Plus la relation et les membres du couple gagnent en maturité, plus ils ont besoin de stimulations physiques pour être totalement excités, aussi bien les hommes que les femmes.
- L’amour romantique est un phénomène délicieux mais de courte durée.
- Pour maintenir au fil du temps un climat romantique dans votre couple, vous devez découvrir ce que veulent dire les mots « Je t’aime » pour votre partenaire et agir dans ce sens.
- Améliorer l’image que vous avez de votre corps vous permet de vous détendre pendant vos rapports amoureux et de jouir pleinement de votre sexualité.
- Dans la plupart des couples, la sensualité est une ressource inexploitée.
- La plupart des couples doivent accorder à leur sexualité une place plus grande dans leur vie.
- La plupart des gens ont peur d’une trop grande intimité ou d’une passion trop forte.
Acquérir de nouvelles connaissances sur la sexualité humaine est un élément-clé de ce programme. Mais je veux insister encore sur l’importance des exercices proposés en fin de chapitres. Ils vont vous faire connaître un degré d’intimité plus profond. Ils vont vous donner des idées pour renouveler vos relations sexuelles et les diversifier. Ils vont vous donner des talents amoureux plus sophistiqués. Ils vont vous aider à vous débarrasser de vos inhibitions et augmenter votre taux de désir sexuel. Une vie entière de plaisirs physiques et de proximité émotionnelle vous attend…..
jeudi 2 juin 2011
LA NOTION DU DÉSIR CHEZ LE COUPLE 111 partie
AFFRONTER VOTRE PEUR DE LA PASSION
Une fois que votre partenaire et vous n’êtes plus retenus par l’une ou l’autre de ces peurs, cela mérite d’être dignement fêté! Vous faites alors partie de ces heureux élus capables de connaître des degrés intenses de passion sexuelle. Dès lors, votre tâche est de continuer à alimenter les neuf aspects de la sexualité précédemment décrits afin de maintenir votre relation dans les hautes sphères de l’intimité et de la sexualité. Il n’y a aucune limite à la passion.
Mais si vous avez l’impression que vos rapports amoureux sont toujours inhibés par l’une de ces peurs, ou plusieurs, il y a beaucoup de choses à faire pour arriver à les surmonter.
Déjà, et avant tout, le fait de reconnaître ces peurs va beaucoup vous aider. En identifiant une angoisse spécifique (la peur de perdre le contrôle, la peur de perdre l’autre, etc.), vous commencez à sortir de l’impasse où vous vous étiez mis(e). C’est déjà un grand pas en avant car nier un fait demande énormément d’énergie.
Une fois que vous aurez identifié en quoi vous empêchez la passion d’exister au sein de votre couple, vous aurez moins tendance à projeter vos difficultés sur votre partenaire. Exorciser nos peurs en les projetant sur nos partenaires est une réaction typiquement humaine. Par exemple, les personnes bloquées sexuellement ont tendance à projeter leur peur de la sexualité sur leur partenaire, leur reprochant d’être insatiable, obsédé, immoral et pervers. Ainsi peuvent-elles se conforter d’être « normales » et accuser leur partenaire d’être « anormal ». De même, les personnes qui ont peur de ce qu’elles éprouvent ont tendance à accuser leur partenaire d’être trop émotif. « Sois plus rationnel(le)! », « Tes réactions sont toujours disproportionnées! »
À court terme, la projection peut vous soulager psychologiquement. Mais elle induit des difficultés relationnelles qui, elles, vont durer longtemps. Vous ne pouvez avoir une relation sexuelle passionnée avec votre partenaire si vous le (la) blâmez pour des choses qui vous incombent.
Après avoir reconnu en vous-même les peurs qui vous oppressent, le mieux est d’avoir le courage d’en parler à votre partenaire. C’est un somptueux cadeau. En dévoilant ainsi des années de dénégation, vous faites tomber vos défenses et admettez votre fragilité : « C’est la première fois, que je formule cette sensation, mais j’ai peur d’une trop grande proximité avec toi pendant que nous faisons l’amour. Je ne sais pas pourquoi. Cela me rend anxieux(se) d’être à la fois sexuel(le) et intime. » Ou « J’ai toujours peur de perdre le contrôle de moi-même quand nous faisons l’amour. Alors je me retiens. Je ne sais pas exactement de quoi j’ai peur. Je sens venir l’orgasme, et puis je me bloque. » Ou « Quelque chose en moi me dit que c’est mal d’être ouvertement sexuel. C’est quelque chose qui me vient de mon enfance. » Ou « Je pense que je me suis désintéressé(e) du sexe pour ne pas te donner ce que tu voulais. Je ressentais cela comme une concession trop importante. »
Comme dans ces différents exemples, vous n’avez pas à connaître tous les tenants et les aboutissants de vos peurs pour en parler à votre partenaire. Ce qui est important, c’est de lui faire percevoir l’existence de vos luttes intérieures. En travaillant avec les couples, j’ai eu le privilège d’être le témoin d’une aussi profonde honnêteté et je n’ai encore rencontré personne qui ne soit profondément touché d’une telle expérience. Dévoiler une pensée intime produit l’effet inverse de la critique. En révélant vos faiblesses à votre partenaire, vous l’incitez à vous dévoiler les siennes, et cela augmente le degré de confiance qui existe entre vous. D’une façon générale, la critique et la projection créent une distance, tandis que la révélation de soi suscite l’intimité.
Une fois que votre partenaire et vous n’êtes plus retenus par l’une ou l’autre de ces peurs, cela mérite d’être dignement fêté! Vous faites alors partie de ces heureux élus capables de connaître des degrés intenses de passion sexuelle. Dès lors, votre tâche est de continuer à alimenter les neuf aspects de la sexualité précédemment décrits afin de maintenir votre relation dans les hautes sphères de l’intimité et de la sexualité. Il n’y a aucune limite à la passion.
Mais si vous avez l’impression que vos rapports amoureux sont toujours inhibés par l’une de ces peurs, ou plusieurs, il y a beaucoup de choses à faire pour arriver à les surmonter.
Déjà, et avant tout, le fait de reconnaître ces peurs va beaucoup vous aider. En identifiant une angoisse spécifique (la peur de perdre le contrôle, la peur de perdre l’autre, etc.), vous commencez à sortir de l’impasse où vous vous étiez mis(e). C’est déjà un grand pas en avant car nier un fait demande énormément d’énergie.
Une fois que vous aurez identifié en quoi vous empêchez la passion d’exister au sein de votre couple, vous aurez moins tendance à projeter vos difficultés sur votre partenaire. Exorciser nos peurs en les projetant sur nos partenaires est une réaction typiquement humaine. Par exemple, les personnes bloquées sexuellement ont tendance à projeter leur peur de la sexualité sur leur partenaire, leur reprochant d’être insatiable, obsédé, immoral et pervers. Ainsi peuvent-elles se conforter d’être « normales » et accuser leur partenaire d’être « anormal ». De même, les personnes qui ont peur de ce qu’elles éprouvent ont tendance à accuser leur partenaire d’être trop émotif. « Sois plus rationnel(le)! », « Tes réactions sont toujours disproportionnées! »
À court terme, la projection peut vous soulager psychologiquement. Mais elle induit des difficultés relationnelles qui, elles, vont durer longtemps. Vous ne pouvez avoir une relation sexuelle passionnée avec votre partenaire si vous le (la) blâmez pour des choses qui vous incombent.
Après avoir reconnu en vous-même les peurs qui vous oppressent, le mieux est d’avoir le courage d’en parler à votre partenaire. C’est un somptueux cadeau. En dévoilant ainsi des années de dénégation, vous faites tomber vos défenses et admettez votre fragilité : « C’est la première fois, que je formule cette sensation, mais j’ai peur d’une trop grande proximité avec toi pendant que nous faisons l’amour. Je ne sais pas pourquoi. Cela me rend anxieux(se) d’être à la fois sexuel(le) et intime. » Ou « J’ai toujours peur de perdre le contrôle de moi-même quand nous faisons l’amour. Alors je me retiens. Je ne sais pas exactement de quoi j’ai peur. Je sens venir l’orgasme, et puis je me bloque. » Ou « Quelque chose en moi me dit que c’est mal d’être ouvertement sexuel. C’est quelque chose qui me vient de mon enfance. » Ou « Je pense que je me suis désintéressé(e) du sexe pour ne pas te donner ce que tu voulais. Je ressentais cela comme une concession trop importante. »
Comme dans ces différents exemples, vous n’avez pas à connaître tous les tenants et les aboutissants de vos peurs pour en parler à votre partenaire. Ce qui est important, c’est de lui faire percevoir l’existence de vos luttes intérieures. En travaillant avec les couples, j’ai eu le privilège d’être le témoin d’une aussi profonde honnêteté et je n’ai encore rencontré personne qui ne soit profondément touché d’une telle expérience. Dévoiler une pensée intime produit l’effet inverse de la critique. En révélant vos faiblesses à votre partenaire, vous l’incitez à vous dévoiler les siennes, et cela augmente le degré de confiance qui existe entre vous. D’une façon générale, la critique et la projection créent une distance, tandis que la révélation de soi suscite l’intimité.
mercredi 1 juin 2011
LA NOTION DU DÉSIR CHEZ LE COUPLE 110 partie
8. La peur des attitudes sexuelles en dehors du couple : faire taire votre sexualité est une façon de vous protéger de la tentation. Tant que vous restez bloqué(e) sexuellement, vous n’avez pas à craindre que d’autres personnes soient attirées sexuellement par vous, ou que vous soyez attiré(e) par elles. Si vous libérez votre sexualité, vous ne disposez plus de cette protection. Vous pouvez craindre de ne plus être capable de résister aux avances sexuelles des autres ou de contrôler vos propres désirs.
Savoir imposer des limites sexuelles appropriées et s’y tenir, est une condition indispensable à ‘bien vivre la relation’. L’idée selon laquelle le sexe est une force toute puissante que vous ne pouvez contrôler est purement un mythe. En libérant votre sexualité, vous allez certainement sentir les attirances sexuelles venant de vous ou des autres. Cependant, vous pouvez très bien décider de ne pas entrer dans le jeu. La maturité, c’est précisément de faire constamment le choix de ne pas suivre ses impulsions sexuelles envers les autres, et de maîtriser celles des autres. En approfondissant le degré d’intimité et de passion entre votre partenaire et vous, cela deviendra de plus en plus facile car votre satisfaction au sein de votre relation surpassera, de loin, le plaisir momentané que vous pourriez connaître avec d’autres.
9. La peur de perdre le contrôle : certaines personnes s’inquiètent de savoir ce qu’elle feraient ou de quoi elles auraient l’air si elles vivaient une expérience sexuelle vraiment intense. Elles craignent de ne pas avoir une attitude attirante ou d’agir d’une façon inappropriée.
Au fond, ce qu’elles craignent, c’est de perdre le contrôle. L’acte sexuel est un processus instinctif. Votre corps a des réactions imprévisibles. Vos hanches se mettent à bouger. Votre gorge émet spontanément des sons. Votre visage grimace. Vos muscles se convulsent. Des mots interdits s’échappent de votre bouche. Si vous avez l’impression que vous devez garder le contrôle strict de vous-même pendant que vous faites l’amour, pour vous sentir en sécurité, attirant(e) ou acceptable, vous ne connaîtrez pas la passion. Pour faire l’expérience de la passion, vos devez renoncer à exercer le contrôle de votre corps.
10. La peur de perdre son (sa) partenaire : vous n’êtes pas garanti(e) d’avoir votre partenaire toujours à vos côtés. La mort, le divorce ou les circonstances de la vie peuvent vous laisser seul(e) et désemparé(e). Dès l’instant que vous prenez le risque de vous ouvrir complètement à quelqu’un et de vous impliquer totalement dans votre relation avec lui (elle), vous êtes confronté(e) à la possibilité de perdre cet amour.
Les personnes ayant déjà vécu, dans leur vie, des chagrins intenses dus à la perte d’un amour, sont particulièrement réticentes à renouveler l’expérience de la passion. Sans réfléchir, elles érigent entre elles et les autres des barrières émotionnelles pour se protéger des peines à venir.
Savoir imposer des limites sexuelles appropriées et s’y tenir, est une condition indispensable à ‘bien vivre la relation’. L’idée selon laquelle le sexe est une force toute puissante que vous ne pouvez contrôler est purement un mythe. En libérant votre sexualité, vous allez certainement sentir les attirances sexuelles venant de vous ou des autres. Cependant, vous pouvez très bien décider de ne pas entrer dans le jeu. La maturité, c’est précisément de faire constamment le choix de ne pas suivre ses impulsions sexuelles envers les autres, et de maîtriser celles des autres. En approfondissant le degré d’intimité et de passion entre votre partenaire et vous, cela deviendra de plus en plus facile car votre satisfaction au sein de votre relation surpassera, de loin, le plaisir momentané que vous pourriez connaître avec d’autres.
9. La peur de perdre le contrôle : certaines personnes s’inquiètent de savoir ce qu’elle feraient ou de quoi elles auraient l’air si elles vivaient une expérience sexuelle vraiment intense. Elles craignent de ne pas avoir une attitude attirante ou d’agir d’une façon inappropriée.
Au fond, ce qu’elles craignent, c’est de perdre le contrôle. L’acte sexuel est un processus instinctif. Votre corps a des réactions imprévisibles. Vos hanches se mettent à bouger. Votre gorge émet spontanément des sons. Votre visage grimace. Vos muscles se convulsent. Des mots interdits s’échappent de votre bouche. Si vous avez l’impression que vous devez garder le contrôle strict de vous-même pendant que vous faites l’amour, pour vous sentir en sécurité, attirant(e) ou acceptable, vous ne connaîtrez pas la passion. Pour faire l’expérience de la passion, vos devez renoncer à exercer le contrôle de votre corps.
10. La peur de perdre son (sa) partenaire : vous n’êtes pas garanti(e) d’avoir votre partenaire toujours à vos côtés. La mort, le divorce ou les circonstances de la vie peuvent vous laisser seul(e) et désemparé(e). Dès l’instant que vous prenez le risque de vous ouvrir complètement à quelqu’un et de vous impliquer totalement dans votre relation avec lui (elle), vous êtes confronté(e) à la possibilité de perdre cet amour.
Les personnes ayant déjà vécu, dans leur vie, des chagrins intenses dus à la perte d’un amour, sont particulièrement réticentes à renouveler l’expérience de la passion. Sans réfléchir, elles érigent entre elles et les autres des barrières émotionnelles pour se protéger des peines à venir.
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