mercredi 31 décembre 2008
MÉMOIRE ET IMAGINATION
1) La mémoire est la représentation du passé : a) représentation le plus souvent impliquée dans l’action (mémoire agie ou mémoire habitude de Bergson); représentation parfois explicite (mémoire pensée ou mémoire-souvenir de Bergson). C’est de cette sorte de mémoire qu’il est question ici.
2) L’imagination est la faculté de penser par images. Cette pensée par images consiste : a) soit à reproduire le passé : dans ce cas l’imagination se confond avec la mémoire imaginative; b) soit à construire des représentations nouvelles à l’aide d’éléments fournis par l’expérience passée : dans ce cas se manifeste une fonction spéciale, qui, sans doute suppose la mémoire, à laquelle sont empruntés les éléments de la nouvelle représentation, mais qui consiste essentiellement dans un pouvoir particulier d’analyse et de synthèse.
3) Mais, entre la mémoire et l’imagination, il y une compénétration profonde : a) la mémoire se mêle d’imagination : si le souvenir n’est pas une création il contient toujours une part de transformation; le rappel des souvenirs et surtout leur localisation se fait par une reconstruction du passé dans laquelle entre beaucoup d’invention; b) par ailleurs, l’imagination créatrice elle-même dépend étroitement de la mémoire; non seulement parce que la mémoire lui fournit des éléments de ses créations, mais encore parce que l’habitude acquise au cours des réactions antérieures (mémoire-habitude de l’imagination) lui donne une facilité précieuse et aussi parce que les constructions passées sont comme des bases de départ pour des constructions nouvelles.
On peut conclure en disant qu’il semble bien, en définitive, que mémoire et imagination ne désignent que deux degrés de l’activité spontanée de l’esprit qu’on ne trouve d’ailleurs jamais à l’état pur : la mémoire se réduirait à la répétition mécanique du passé; l’imagination consisterait dans une invention que le passé ne prépare point.
mardi 30 décembre 2008
RAPPORTS ENTRE LA VOLONTÉ ET L'HABITUDE 8e
Le sens commun, instruit par l’observation vulgaire, considère l’habitude et la volonté comme des fonctions opposées et des puissances antagonistes. Mais un examen plus attentif nous a fait découvrir des faits qui justifient le jugement contraire.
Ne pourrait-on pas réduire cette contradiction et déterminer quelles sont les habitudes qui minent la volonté, et quelles sont celles qui la fortifient? Quelles habitudes la volonté est-elle créatrice et quelles sont celles dont elle empêche la formation?
La réponse donnée par Maine de Biron est classique, il est des habitudes actives, comportant une certaine tension de la volonté, et des habitudes passives, qui n’ont rien de volontaire. Avec les premières la volonté a une affinité étroite : C’est avec les secondes seulement qu’elle se trouve en antagonisme il ne faut pas considérer l’habitude comme une faculté analogue à l’intelligence ou à la volonté et composent en quelque sorte avec elles. L’habitude n’est qu’une manière d’être que peuvent acquérir toutes les facultés comme tous les organes! Toutes les fonctions, en vertu de l’habitude, ont une puissance renforcée, un exercice plus aisé et plus sûr : mais l’habitude n’est rien par elle-même. La volonté peut donc, comme l’intelligence et comme la sensibilité, comme la langue ou comme la main, acquérir des habitudes qui lui donnent, à elle aussi, force, aisance, sûreté. Elle est gênée parfois ou même annihilée par une habitude qui, suivant le mot de Sully Prudhomme, « endort la jeune liberté », Mais ce n’est pas l’habitude comme telle qui endort la liberté et entrave l’activité volontaire : C’est le développement, résultant de l’habitude, d’une fonction dont l’exercice s’oppose à celui de la volonté, par exemple la sensibilité ou l’automatisme physiologique. On réduirait sensiblement les difficultés que pose le fait de l’habitude si l’on se rappelait qu’elle n’est pas une chose ou une faculté mais un mode d’être ou d’agir de toutes les facultés, de la volonté comme des autres.
lundi 29 décembre 2008
RAPPORTS ENTRE LA VOLONTÉ ET L'HABITUDE 7e
Les habitudes acquises involontairement, elles-mêmes, ne restent pas longtemps en marge de toute activité volontaire. Les impressions habituelles deviennent agréables et, pour nous procurer le plaisir que nous y trouvons, l’intelligence et la volonté entrent en jeu, se mettant, en quelque sorte, au service de l’habitude, et par là, la renforcent. Le petit fonctionnaire réglé comme une horloge aime cette vie sans imprévu. Aussi tend-il de tout son effort à éviter ce qui le troublerait, faisant preuve parfois, d’une irrésistible énergie pour se dispenser de toute dépense d’énergie. Si les animaux ont beaucoup moins d’habitudes que l’homme, n’est-ce pas parce qu’il leur manque la raison et la volonté, facteurs puissants de la formation et du maintien des habitudes?
Mais, en revanche, la puissance de la volonté tient beaucoup moins à sa force primitive qu’aux habitudes qui, au cours de la vie, sont venues la renforcer. L’habitude de l’action use peu à peu les résistances que les choses et les impressions subjectives lui imposent : les difficultés qui paraissent insurmontables à l’origine s’évanouissent, et on écarte comme en se jouant des obstacles autrefois redoutés. En même temps, la force de la volonté est multipliée par son exercice même, et il arrive un moment où elle exige, pour se dispenser, un effort à sa mesure. Si l’officier des troupes coloniales ne peut pas se faire à la vie routinière des garnisons de la métropole, c’est qu’il a l’habitude d’une existence plus active demandant une tension constante de tout son être; cette activité et cette tension sont pour lui un besoin comme, pour d’autres, le calme plat des journées de bureau. Au lieu de s’affaiblir à mesure que les habitudes se fortifient, la volonté est, dans une grande mesure, faite d’habitudes.
* à suivre *
dimanche 28 décembre 2008
RAPPORTS ENTRE LA VOLONTÉ ET L'HABITUDE 6e
Habitude et volonté ne sont pas nécessairement des forces antagonistes tendant à s’annihiler l’un l’autre. Au contraire, dans une certaine mesure, elles se prêtent une aide efficace, et la volonté collabore à l’activité habituelle, tout comme l’habitude est, dans bien des cas, un secours précieux de l’activité volontaire.
Un grand nombre d’habitudes, nous l’avons dit, n’ont été acquises que grâce à un effort volontaire prolongé. Mais il ne faudrait pas croire qu’une fois acquises elles subsistent par elles-mêmes, indépendantes de la volonté. Elles ont coûté si cher que l’on ne saurait s’en désintéresser. Le sportif est soucieux de se conserver en forme, le tireur de ne pas perdre sa rapidité de visée, la pianiste de ne pas laisser ses doigts s’engourdir : si l’habitude péniblement acquise se maintient, c’est grâce à un effort diffus de volonté.
* à suivre *
samedi 27 décembre 2008
RAPPORTS ENTRE LA VOLONTÉ ET L'HABITUDE 5e
Réciproquement, il serait erroné de concevoir l'habitude comme un mode d'être totalement passif ou un mode d'agir purement mécanique, bref comme l'antithèse de la volonté.
L'action habituelle ne se réduit pas à de purs réflexes, sans la moindre pensée, sans l'intention la plus vague.
Prenez l'opération qui vous paraît la plus mécanique, par exemple la récitation d'une prière dite des milliers de fois ou les mouvements de la tricoteuse. Si vous essayez d'éxécuter, tout en vous livrant à un calcul mental difficile, un de ces actes qui paraissent se dérouler machinalement, vous commettez, ici ou là, quelque erreur: il n'y a de bon fonctionnement de l'automatisme psychologique que grâce à une attention diffuse et au contrôle inconscient de l'esprit. D'ailleurs, si les mouvements élémentaires que l'analyse discerne dans les opérations habituelles sont, dans une grande mesure, stéréotypés, il n'en est pas de même de leur groupement. Nous utilisons toujours les mêmes mots, et la plupart de nos formules ne sont que des clichés: Mais ces clichés sont groupés différemment suivant les circonstances, et on pourrait faire consister l'art ou l'habitude d'écrire dans le talent d'utiliser opportunément le mot ou le cliché connus de tous. Ainsi l'apprentissage consiste bien à multiplier les automatismes, mais encore plus à celui que la réflexion nous ferait choisir. Bref, la perfection de l'habitude serait, non pas de se passer d'intelligence, mais, au contraire, d'en pénétrer si intimement notre activité spontanée que nous n'ayons plus besoin d'y faire appel; de rendre son exercice si aisé qu'il devienne inconscient.
vendredi 26 décembre 2008
RAPPORTS ENTRE LA VOLONTÉ ET L'HABITUDE 4e
Habitude et volonté ne sont peut-être pas aussi dissemblables qu'on le pense, et l'action qu'elles exercent l'une sur l'autre n'est peut-être pas nécessairement une action destructrice.
Il est essentiel à l'acte volontaire d'être conçu et dirigé par l'intelligence; un acte qui serait éxécuté sans intervention de pensée ne pourrait être attribué à la volonté. Mais il n'est pas nécessaire, pour qu'une action puisse être volontaire, que tous les éléments qu'elle comporte soient chaque fois, étudiés avec précision, réfléchis dans le moindre détail. Le chirurgien novice qui prépare une opération revoit avec soin l'anatomie de la partie du corps dans laquelle il doit intervenir, détermine le lieu et la forme des incisions; au cours de la séance opératoire, son esprit est complètement absorbé par l'examen des organes que son intervention met à nu. Dirons-nous qu'il a manifesté plus de volonté que le Vieux praticien qui, comme en se jouant, en quelques coups rapides et décidés, a tranché dans les chairs et atteint l'organe qui réclamait des soins? Au contraire, on trouvera que la prudente lenteur du jeune chirurgien témoigne d'une volonté qui n'est pas encore assez forte, et on hésitera à se confier à lui. Un acte volontaire est donc dirigé par l'esprit, mais il n'est pas nécessaire que l'esprit soit tout entier appliqué à son éxécution. Il suffit qu'on se soit representé le but et que, une fois pour toutes, on ait déterminé les moyens: l'habitude, contrôlée par une attention diffuse, fait le reste.
jeudi 25 décembre 2008
RAPPORTS ENTRE LA VOLONTÉ ET L'HABITUDE 3e
Mais, volontaires à l'origine. Ces attitudes de l'esprit, une fois devenues de vraies habitudes, sont indépendantes de la volonté. Bien plus, elles tiennent la volonté sous leur dépendance: elles se transforment, en effet, en besoins impérieux exigeant d'être satisfaits, même lorsque la raison conseille d'y renoncer. N'a t-on pas vu les savants incapables de maîtriser leur aspiration à savoir et sacrifier à leur passion des devoirs supérieurs, comme le soin de leur famille?
À plus forte raison la volonté est-elle affaiblie par une habitude qui s'est créée sans elle. Regardons ce vieux fonctionnaire à qui l'administration a assuré une existence facile et unie. Tout, dans sa vie professionnelle et dans sa vie domestique, est réglé sans qu'il ait jamais à prendre une décision de quelque importance.
Bientôt, il se trouve pris dans un cadre d'habitudes dont il est prisonnier: l'heure des repas, sa place au café, le trajet suivi pour aller au bureau, tout, jusqu'aux plaisanteries échangées quotidiennement avec ses collègues, est stéréotypé. Aussi le moindre changement le déconcerte; l'innovation la plus insignifiante pose pour lui des problèmes pratiques devant lesquels il s hésite; si jamais il était acculé à prendre en lui, l'habitude a supplanté la volonté.
Voici maintenant, à l'opposé, de type de l'homme chez qui le développement de la volonté a presque supprimé la faculté de contracter des habitudes. C'est un officier qui s'est proposé pour un territoire à organiser et à purger des dissidents dans le Haut-Atlas. Il dort quand il en a le temps, mange ce qu'il trouve, se le pose en changeant d'occupation, se trouve constamment devant des problèmes imprévus qu'il résout comme il peut. Que nous sommes loin de la routine bureaucratique! Pour tenir dans ces avant-postes de la civilisation, il faut l'action inventive et novatrice d'un esprit toujours en éveil et d'une volonté aussi souple que tendue. Que ce chef de poste soit rappelé dans une garnison de la métropole, il lui sera bien difficile de s'adapter aux corvées ennuyeuses et faciles devenues pour ses camarades d'école un passe-temps nécessaire. Il piaffe d'impatience et, au bout de quelques mois, ayant vainement essayé de rénover des méthodes qu'il juge surannées, il demande à rejoindre son Atlas sauvage.
Le développement de sa volonté semble avoir supprimé en lui le pouvoir de s'adapter dans une vie enserrée dans un cadre d'habitudes.
Ainsi, habitude et volonté paraissent comme les deux pôles opposés de la vie de l'esprit, deux forces antagonistes qui se disputent la prééminence.
Et comme la volonté seule est spécifiquement humaine, tandis que l'habitude est un mode d'être ou d'agir commun à tous les êtres vivants, le mot d'ordre à donner à qui veut développer en soi l'humaine nature devrait être celui-ci: cultivez en vous la faculté de vouloir, mais gardez-vous, comme du plus grand obstacle à votre progrès, de toute habitude; que toute votre activité soit toujours commandée par la volonté.
mardi 23 décembre 2008
RAPPORTS ENTRE LA VOLONTÉ ET L'HABITUDE 2e
Cette lenteur devrait lui donner encore plus de sûreté; au contraire , elle la déconcerte; la tricoteuse s'embrouille et ne retrouve sa facilité de travail que lorsqu'elle a repris son allure normale et son mode d'activité purement mécanique, l'habitude supprime l'effort et la difficulté, sans lesquels la conscience peu à peu s'assoupit et s'endort. On le dit couramment: l'effort résulte d'un manque d'habitude. Le jeune, conscrit, fatigué après quelques kilomètres de marche, doit faire effort pour arriver jusqu'à l'étape: il n'est pas entraîné, il manque d'habitude. L'apprenti chauffeur est toujours tendu, l'oeil fixé sur la route, les mains crispées sur le volant, le pied toujours en alerte pour freiner au moindre incident: Seule, l'habitude, résultant de nombreux kilomètres parcourus, fera tomber cette épuisante tension. Le jeune latiniste doit bouder son esprit pour suivre l'argumentation de Cicéron, tandis qu'il comprend aisément les motifs mis en avant par un député en faveur d'un projet de loi: C'est que le latin ne lui est pas familier, tandis que le français est sa langue habituelle, là où il y a habitude, il n'y a plus d'effort.
lundi 22 décembre 2008
RAPPORTS ENTRE LA VOLONTÉ ET L'HABITUDE
N'est volontaire, en effet, que l'acte éxécuté avec la connaissance du but poursuivi et des moyens mis en oeuvre pour aboutir au résultat désiré. Ainsi, voulant traiter ce sujet et obtenir une appréciation meilleure que celle que me mérita un sujet antérieur, je me suis organisé, en tenant compte des recommandations qui me furent faites et de ce que m'a appris l'expérience: J'ai longuement réfléchi sur le texte proposé, sachant combien il est fréquent de "passer à côté de la question"; une fois la question précisée, j'ai fait quelques lectures dans l'espoir de trouver un peu de lumière sur le problème à résoudre; enfin, connaissant la paresse naturelle de mon esprit, facilement disposé à recevoir et à assimiler, mais porté à esquiver l'effort nécessaire pour créer et pour produire, j'ai pris mon courage à deux mains et j'ai commencé à écrire.
Nous arrivons à un second élément que, plus ou moins consciemment, nous jugeons indispensable à l'acte volontaire: l'effort, c'est à dire un déploiement supplémentaire d'énergie pour surmonter une difficulté particulière. Sans doute, on reconnaîtra bien à l'acte global constitué par mon sujet la qualité de volontaire.
Mais, s'il faut préciser dans quelles opérations particulières est intervenue la volonté, on signalera celles dans lesquelles j'ai dû vaincre un obstacle: l'examen approfondi du texte qui donnait le thème du sujet, la mise en train de la rédaction. Une fois bien en train, la plume court toute seule sur le papier. Si j'arrive au bout de mon travail, c'est bien en vertu de l'acte de volonté qui a déclenché la série des mouvements qui aboutissent au but visé, mais ce n'est plus la volonté qui dirige mon activité: je marche grâce à la vitesse acquise, automatiquement, par suite de l'habitude de penser et d'écrire.
samedi 20 décembre 2008
RÔLE DE L’AFFECTIVITÉ DANS L’ACTIVITÉ
C’est quoi la conception du primat de l’activité dans la vie psychique de l’homme?
Introduction
La philosophie moderne issue de Descartes, penseur féru des « idées claires et distinctes », fut foncièrement intellectualiste : ce sont les opérations intellectuelles qui retinrent le plus l’attention des psychologues (rappelons-nous les multiples « Essais sur l’Entendement »); par suite, sauf quelques écrivains moralistes plus hommes qu’hommes de leur temps – tel Pascal, qui avouait que « le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas » - , les philosophes de cette époque trouvent l’explication essentielle de la vie intérieure de l’homme dans l’intelligence ou la raison.
La période contemporaine marque une forte réaction contre l’intellectualisme classique. Un courant de pensée parti de Rousseau, continué par les romantiques, a mis en relief l’importance de l’affectivité.
Que doit-on penser de cette conception? Faut-il admettre le primat de l’affectivité dans la vie psychique de l’homme?
I. La primauté de l’affectivité sur l’intelligence paraîtra évidente à qui fera réflexion sur les faits suivants.
A. Du point de vue du temps ou de la durée, l’affectivité l’emporte sur l’intelligence :
a) par sa priorité d’apparition : « Je sentis avant de penser; c’est le sort commun de l’humanité ». (Rousseau, Confess., Partie 1re, Livre I);
b) par sa permanence : la pensée est intermittente, mais il n’y a pas de conscience sans une certaine affectivité;
c) par son ordre de disparition : l’affectivité survit à la pensée.
B. Du point de vue de son action, l’affectivité est le ressort de toute la vie psychique, l’intelligence ne faisant que montrer les buts et les moyens.
a) C’est le plaisir et la douleur qui sont les stimulants nécessaires de l’activité et de l’activité intellectuelle en particulier.
b) De plus l’intérêt personnel et les sentiments influent sur les jugements portés par l’intelligence.
c) Enfin, dans le cas de la passion, nous assistons à la domestication de l’intelligence par l’affectivité.
II. Mais, en se plaçant à d’autres points de vue, on peut faire ressortir la subordination de l’affectivité, d’abord à l’activité, ensuite à l’intelligence.
A. Dans les êtres vivants, c’est l’activité qui est première et non l’affectivité : les psychologues contemporains l’ont bien montré.
a) Le besoin d’agir précède la conscience du plaisir ou de la douleur, aussi bien dans l’échelle animale que dans le développement individuel.
b) Le besoin d’agir l’emporte sur le plaisir et la douleur : songeons aux privations et aux fatigues que s’imposent les sportifs, les chefs d’industrie, les hommes politiques.
Le vrai ressort de la vie est dans la tendance à l’action : « Sensations et pensées ne sont, pour ainsi dire, que des coupes transversales de courants qui tendent à l’action comme à leur fin essentielle » (W. James, Précis, p.568).
B. C’est l’intelligence qui, chez l’homme, tend à prendre la première place. Cette prédominance se manifeste :
a) biologiquement, par l’extraordinaire développement des centres de la pensée (les hémisphères cérébraux) par rapport aux centres de l’affectivité (la couche optique);
b) psychologiquement, par la rationalisation progressive de l’affectivité grâce à la connaissance de soi-même et de l’homme en général (la connaissance des lois de l’affectivité nous permet d’agir sur elle); ensuite par ce qu’on pourrait appeler la « sensibilisation » du rationnel (l’homme cultivé parvient à trouver son plaisir dans l’activité intellectuelle : le « sentiment mathématique » de H. Poincaré).
Conclusion
Le primat de l’affectivité ne caractérise donc qu’un moment de l’évolution de l’être vivant. Au point de départ, nous conjecturons qu’il y a activité sans affectivité; chez les animaux supérieurs et dans la plus grande portion de la vie humaine, c’est l’affectivité qui prime; au terme de l’évolution, dans la mesure même où l’homme s’humanise, c’est-à-dire se pénètre de raison, le primat est passé à l’intelligence.
Nous n’en revenons pas pour cela à la conception purement intellectualiste de la vie psychologique. Nous ne méconnaissons pas le rôle de l’affectivité; mais nous pensons que le progrès est dans une information de plus en plus profonde de l’affectivité par l’intelligence et de l’intelligence par l’affectivité.
Le plaisir du repos
Introduction
Aristote, suivi par la plupart des psychologues, jugeait que le plaisir était dans l’action. Comment se fait-il donc que l’on prenne du plaisir dans le repos et même que le repos soit considéré comme le suprême bonheur?
I. C’est que le repos n’est pas une inaction quelconque. Il est une inaction venant à la suite d’une activité qui laisse après elle un reliquat de fatigue à éliminer et son but est de refaire l’organisme pour une nouvelle période d’activité. Par suite, il y a dans le repos considéré comme tel :
a) un plaisir physique : 1º négatif : la cessation de l’effort pénible; 2º positif : la conscience de la régularisation de ses fonctions vitales;
b) un plaisir moral : 1º la joie du travail accompli; 2º la préparation du travail ultérieur, jeu de l’imagination qui charme. Mais nous voyons par là qu’il n’y a pas de repos absolu et que le repos se mêle de travail.
II. Le repos, en effet, n’est pas nécessairement de l’inaction : il consiste souvent dans un changement de travail. Dans ce cas, le repos consiste dans l’accomplissement d’un travail de notre choix, étranger à notre tâche, d’un travail de jeu.
a) Cette activité de jeu, dans la plupart des cas, rétablit l’équilibre détruit par le travail : ainsi, l’élève qui a des forces physiques surabondantes et des forces mentales épuisées dépense son énergie musculaire dans une partie de barres ou de football.
b) L’activité de repos ou de jeu permet à l’individu de satisfaire son désir de travail personnel et indépendant : à côté du travail professionnel, moyen de gagner sa vie, on se fait une occupation personnelle, moyen de se réaliser; et parfois, comme pour certains écrivains, l’activité extraprofessionnelle devient si importante qu’elle amène à renoncer à sa profession première.
Conclusion
Le repos n’est donc un plaisir que dans la mesure où il se glisse dans des intervalles de travail. En définitive, le fond du plaisir est bien, comme l’avait vu Aristote, dans l’activité, et le plaisir ne suit l’action que s’il n’est pas cherché.
mercredi 17 décembre 2008
Le Travail sur le Rêve
Meltzer (1984a) propose d’aborder le travail sur le rêve en deux étapes, une première d’exploration et une seconde d’analyse. Il voit ce travail comme un périple en spirale où le patient et le thérapeute tentent de se rapprocher progressivement du sens du rêve, reliant ensemble de plus en plus d’éléments jusqu’à formuler une interprétation qui résumerait en quelque sorte ce voyage et dont le sens s’organiserait autour du transfert. L’étape exploratoire est pour lui très importante, puisqu’elle permet au patient de s’identifier à la capacité du thérapeute d’explorer le fantasme. Il rejoint en cela Feigelson (1978) qui mentionne l’importance de montrer au patient à réfléchir sur le rêve.
À l’instar de tout autre matériel produit par l’enfant en psychothérapie, le clinicien doit s’appuyer sur les associations de celui-ci pour réfléchir. Souvent, les associations de l’enfant s’expriment par la succession de thèmes et d’actions qui se déroulent dans son jeu ou encore dans le fil des propos présentés comme du coq à l’âne. Néanmoins, il vaut souvent la peine d’inviter l’enfant à élaborer davantage son rêve en quête d’associations. L’exemple suivant illustre bien la réaction parfois confuse et angoissante de certains enfants suite à la narration de leur rêve.
Jonathan, un enfant psychotique de huit ans, raconte en début de séance qu’un homme a voulu le tuer avec un couteau dans le parc. Il semble ne plus vouloir en parler malgré l’invitation que lui adresse le thérapeute. Peu à peu, il en vient toutefois à situer cette attaque au cours de la nuit précédant la séance! Plus les détails s’ajoutent, plus il devient évident que Jonathan relate, en fait, un rêve. Devant le refus d’élaborer davantage et les manifestations d’angoisse de Jonathan, le thérapeute lui suggère alors qu’il craint peut-être craindre de subir, comme dans son rêve, une attaque de la part du thérapeute. Aussitôt, Jonathan introduit les papiers mouchoirs dans un ventilateur posé sur la table, le papier déchiqueté volant dans tous les sens. Jonathan se met alors à piétiner et à courir dans la pièce visiblement très angoissé. Le thérapeute formule par la suite des interprétations portant sur l’angoisse d’être pris dans une pièce avec quelqu’un qu’il imagine comme pouvant le déchiqueter comme le ventilateur le fait avec le papier. Le rêve puis le jeu du ventilateur pouvant possiblement servir à expulser hors de lui un objet interne déchiquetant afin de ne plus ressentir l’angoisse d’avoir l’ennemi à l’intérieur de soi. Cependant, l’angoisse n’en est pas pour autant conjurée puisque suite à cette tentative d’expulser hors de soi une mauvaise partie, Jonathan se sent dorénavant confronté sur la scène externe avec cette partie persécutrice de lui-même. Ce rêve ainsi que sa mise en scène dans cette séance correspond donc à autant de tentatives d’expulser par identification projective des parties de soi; les interprétations suggérées par le thérapeute cherchent donc à donner un sens à cette projection et à rendre peu à peu le fantasme hostile qu’il représente assimilable et intégrable à la personnalité.
Afin de susciter le matériel associatif, le thérapeute peut poser certaines questions à l’enfant, lui demandant par exemple de décrire certains passages du rêve, les lieux ou encore les personnages qui y sont représentés. Il arrive qu’une question ouverte de ce type fasse démarrer toute une série d’associations, particulièrement chez les enfants moins atteints que ne l’est Jonathan.
Dans un deuxième temps, le thérapeute peut demander à l’enfant de réfléchir avec lui à certains aspects du rêve. Au cours de cette étape d’exploration, le clinicien peut proposer quelques interprétations exploratoires telles que :
· « Est-ce que ce garçon fâché ne pourrait-il pas représenter telle ou telle partie de toi? »
· « Est-ce possible que ce sentiment-là ressemble à la tristesse que tu as ressentie pendant la pause des vacances? »
· « Peut-être que l’on pourrait penser que le professeur sévère de ton rêve ressemble un peu à comment tu t’imagines quelquefois quand je te dis que la séance est terminée? »
D’aucuns diront que de telles interprétations exploratoires ne peuvent qu’augmenter l’angoisse de l’enfant en allant toucher trop rapidement un contenu inconscient. L’expérience démontre cependant bien le contraire car, d’une part, l’angoisse est d’emblée éveillée par le rêve et ressentie comme telle par l’enfant. D’autre part, cette angoisse n’est souvent qu’amplifiée chez l’enfant si aucune tentative de compréhension de la signification inconsciente de son rêve n’est faite avec le thérapeute; ce mutisme par rapport au rêve étant souvent interprété par l’enfant comme la preuve que des pulsions ou désirs transférentiels hostiles exprimés par ce rêve d’angoisse ont réellement atteint le thérapeute et nui ou paralysé sa capacité de penser.
Bégoin et Bégoin (1981) décrivent bien le travail d’analyse constitué par les interprétations exploratoires. Non seulement l’angoisse ressentie par l’enfant qui relate son rêve est-elle contenue par le thérapeute mais de plus, ce dernier montre ainsi à l’enfant qu’il est en mesure de s’identifier aux couches profondes de son inconscient et capable de les contenir et de chercher à les comprendre.
Ainsi, à travers les interprétations exploratoires du rêve, le clinicien cherche à clarifier et à préciser des hypothèses de travail sujettes à modification et à révision en fonction de ce qu’exprime l’enfant verbalement ou à travers son jeu. L’alliance thérapeutique est consolidée par ce type de travail en favorisant une collaboration entre le thérapeute et la partie saine du patient. Cette collaboration prend appui bien sûr sur le rôle de « bon objet » attribué au thérapeute par l’enfant, bon objet qui accepte de prendre en lui un peu de la douleur psychique de son client sans en être contrôlé ni détruit.
Les interprétations exploratoires, en tant qu’hypothèses de travail, suscitent chez l’enfant de nouvelles séries d’associations. Bégoin et Bégoin (1981) accordent de plus à cette façon de faire le mérite de ne pas inviter le patient à croire en l’omniscience du thérapeute. Croyance qui est particulièrement répandue en ce qui concerne l’interprétation du rêve tant chez le patient que chez bon nombre de psychothérapeutes!
Le but du travail associatif et d’interprétation exploratoire est d’en arriver à une interprétation complète du rêve qui inclut les aspects génétiques, structuraux et dynamiques mis en rapport avec l’élucidation de la relation transférentielle. Lorsque le scénario transférentiel est suffisamment clair et élaboré, lorsqu’il est possible d’enfin reconnaître quels objets internes, quelles parties du self sont en jeu et lesquels sont attribués au thérapeute, l’interprétation permet alors à l’enfant de récupérer ces objets internes de façon plus harmonieuse et de les reprendre en lui.
RÊVER LE RÊVE
Grâce au travail d’analyse et d’association, le thérapeute cherche à comprendre et à identifier quels sont les éléments (monstres, humains, animaux, objets concrets) du rêve de l’enfant qui représentent des parties de son monde intérieur.
Le thérapeute s’appuie, pour ce faire, sur ses propres capacités identificatoires et associatives; en bref, il doit être capable de rêver lui-même le rêve. Comme pour tout autre travail analytique, le thérapeute est aux prises dans son travail d’analyse du rêve avec son contre-transfert, ses limites personnelles et sa capacité, toujours menacée, de s’identifier à la douleur et à l’angoisse de celui qu’il veut aider.
Cependant, le thérapeute peut aussi s’appuyer sur sa théorie et sur certains points de repères conscients pour favoriser sa recherche du sens du rêve. Ainsi, il peut être utile de rechercher consciemment à répondre à certaines questions en réfléchissant au rêve :
· Les divers éléments (humains, animaux, objets concrets) du rêve représentent quels objets internes de la fantasmatique du rêveur?
· Ces éléments représentent quelles parties de la personnalité du rêveur?
· Dans quels éléments le thérapeute peut-il être représenté?
· Quelle est la nature des affects et de l’angoisse mis en scène dans le rêve?
· Quels conflits se jouent entre les objets internes figurés dans le rêve?
· Quelle est la solution proposée dans le rêve pour résoudre ce conflit?
· Quel rapport existe-t-il entre le scénario du rêve et la relation transférentielle?
· Quel est le rapport analogique entre le climat du rêve et le climat de la séance au cours de laquelle le rêve est rapporté?
S’aidant d’un questionnement de ce genre, le clinicien recherche les multiples identifications projectives et reconstruit les fantasmes inconscients et les angoisses liant les objets internes du rêveur. Comme dans tout fantasme, les identifications sont multiples et il est habituel que le rêveur se projette à la fois dans l’assaillant et la victime, le bon et le méchant de telle façon que les adversaires représentent souvent deux parties irréconciliables et en conflit de la personnalité du sujet.
INTERPRÉTER LE RÊVE
La recherche des multiples identifications projectives et leur reprise au sein de la personnalité du rêveur grâce aux interprétations du thérapeute permettraient en définitive la croissance psychique du sujet. En effet, Meltzer (1967) conçoit que l’interprétation des identifications projectives, en favorisant la réintégration au sein de la personnalité des objets et parties du self clivés et méconnus du sujet, permet non seulement de soulager la souffrance psychique de l’individu mais également, en diminuant le recours aux mécanismes de défense appauvrissants, permet d’atténuer peu à peu la confusion entre réalité psychique et réalité extérieure.
Pour permettre à l’interprétation d’atteindre un but intégrateur et que le rêveur puisse reprendre en lui ce qu’il a cru devoir expulser, il est nécessaire que l’angoisse, source de la manœuvre projective, puisse être soulagée. C’est pour cette raison que les thérapeutes d’enfant cherchent habituellement, comme Klein (1932) l’avait suggéré, à interpréter là où est l’angoisse latente maximale et à relier cette intervention à une interprétation du transfert. Plutôt que de procéder lentement de la surface vers les couches profondes de l’inconscient, du plus évolué vers le plus archaïque, l’interprétation de l’angoisse, lorsqu’elle est faite sans égard au degré de profondeur qu’on lui attribue, évite à l’enfant l’obligation inconsciente de maintenir de façon rigide des stratégies défensives qui souvent contribuent à un appauvrissement de sa personnalité.
Petot (1979) résume bien les éléments essentiels de la technique utilisée par Klein dans l’analyse d’enfants. Ces balises techniques peuvent avantageusement guider le travail interprétatif du clinicien en thérapie d’enfant. Ils se résument en trois points : l’interprétation centrée sur l’angoisse plutôt que sur les mécanismes de défense, l’interprétation transférentielle et l’interprétation profonde. Ces balises techniques peuvent également être retenues pour ce qui est du travail interprétatif du rêve.
VIGNETTE CLINIQUE : UN RÊVE RÉPÉTITIF
Une adolescente de 15 ans fait une demande d’aide dans une clinique de pédopsychiatrie car elle se sent angoissée et présente des symptômes assez déroutants.
Accompagnée de ses parents, elle raconte que fréquemment au réveil, elle constate douloureusement que ses bras sont tailladés et sanguignolents. Nul ne comprend dans sa famille ce qui se passe dans sa chambre la nuit. On songe à une intrusion et sa porte est verrouillée de l’intérieur. En vain car les étranges marques refont toujours leur apparition.
Des amis de la famille évoquent la possibilité qu’elle soit possédée « d’esprits » maléfiques et suggèrent l’exorcisme. Bien que séduite par l’idée d’être ainsi possédée par « le mal », de concert avec ses parents, elle opte d’abord pour la consultation en santé mentale. L’hypothèse du somnambulisme est retenue, couteaux, ciseaux et instruments tranchants sont retirés de la maison la nuit et les étranges lésions aux bras cessent.
Parallèlement à ces mesures, une psychothérapie psychanalytique à raison de deux séances par semaine est entreprise avec l’adolescente qui confie au psychothérapeute, dès la première séance, être troublée depuis plusieurs semaines par un cauchemar répétitif : elle rêve qu’elle est poursuivie et attaquée par un homme. Le rêve présente peu de variantes, il s’agit toujours d’un homme qui la poursuit avec un couteau pour la tuer. Au cours des six mois qui suivront, ce rêve sera régulièrement repris et retravaillé en psychothérapie.
Lors du travail de son rêve, les associations de Mademoiselle C. se centrent dans un premier temps sur l’idée de la possession par des esprits maléfiques. Elle imagine que son rêve signifie qu’elle a en elle un démon, responsable des mutilations qu’elle présente au réveil. Son seul désir étant d’en être débarrassée, elle craint cependant que le psychothérapeute ait recours à l’hypnose mais se rassure en se rappelant le cadre psychanalytique et les règles de travail suggérées en début de thérapie. « Comme si une partie de toi m’imaginait semblable à cet homme qui t’attaque en rêve » dira le thérapeute.
L’hypnose suggère pour elle la possibilité que le thérapeute n’abuse d’elle… ce qui l’amène à dire qu’elle aurait été violée vers l’âge de quatre ans. Elle pense aussitôt que l’homme du rêve serait le violeur qui revient la hanter parce qu’elle ne lui a jamais pardonné cette agression. Il faudrait donc, selon elle, retrouver la tombe de cet homme (elle le croit mort) et lui pardonner pour qu’elle soit enfin libérée de lui.
L’adolescente ajoute aussi, timidement, que ses cauchemars ont commencé suite à sa première relation sexuelle, vécue quelques semaines plus tôt, qu’elle craint d’être enceinte (il semble aussi qu’elle le désire) et que cette relation sexuelle fut douloureuse et décevante pour elle.
À la séance suivante, Mademoiselle C. se dit très déçue de ne pas être enceinte et passe la séance à explorer le fait qu’elle n’aime pas être une femme. Elle affirme d’ailleurs se considérer comme un garçon et effectivement, son allure est ambiguë : coupe de cheveux et vêtements sont masculins mais les traits et les manières sont féminines. Mademoiselle C. ajoute toujours se vêtir en garçon et ne jamais porter de robe, ni jupe, craignant qu’ainsi vêtue, elle serait alors scrutée d’un regard vicieux par tous les hommes qu’elle croiserait. Elle avoue se sentir plus en sécurité habillée en garçon, n’ayant alors plus peur de sortir de la maison. Tout ce discours éveille de l’angoisse en elle car elle sait fort bien qu’elle est une femme. Plus que tout, elle désire que toute cette confusion cesse, aspirant, découragée, à se sentir « bien dans sa peau ». Une des interprétations proposées à Mademoiselle C. à ce moment tente de réunir ces parties du self clivées : « On dirait qu’une partie de toi voudrait être un homme pour ne plus avoir peur d’être attaquée mais ça te rend malheureuse parce que tu te rends compte que même en t’imaginant ça, tu ressens quand même la peur d’être attaquée ». Une seconde interprétation permet, suite aux associations de Mademoiselle C. et à l’expression de son découragement, de soulager quelque peu son angoisse. En effet, cette interprétation : « J’ai l’impression que, de la même façon que tu te sens en danger d’être attaquée quand tu marches dans la rue, une partie de toi ne peut pas faire autrement que de te sentir ici aussi en thérapie, avec moi, en situation de danger », amène Mademoiselle C. à réaliser le caractère subjectif de sa crainte mais aussi à mieux identifier le sentiment diffus de découragement qu’elle ressentait par rapport à la possibilité d’être aidée par le thérapeute.
Grâce aux associations de plus en plus nombreuses, l’analyse de son cauchemar progresse, révélant un tableau complexe d’identifications projectives. Deux séries principales d’identifications fortement clivées apparaissent donc comme étant plus importantes que les autres, formant, en quelque sorte, la base de deux sentiments d’identité ressentis comme étant irréconciliables.
Le conflit entre les parties masculine et féminine de la personnalité de Mademoiselle C. devient évident pour elle au fil des interprétations exploratoires qui lui sont proposées et des nombreuses associations qu’elles ont suscitées. Bien qu’il serait trop long de décrire ici ce cheminement, il est cependant utile de chercher à cerner ce qui est mis en scène dans ce rêve et tenter de décrire le chemin qu’a pris la compréhension de sa signification.
Il est devenu rapidement clair que le cauchemar de Mademoiselle C. constituait la représentation d’un scénario sado-masochique vécu sur la scène interne. Celle-ci croyait que ce scénario provenait d’un évènement de la réalité : une agression sexuelle subie à l’âge de quatre ans. Bien que ce rêve puisse être envisagé comme une simple répétition sans fin d’un traumatisme, le matériel associatif suggère dans la création de ce rêve. Ceci apparaît d’autant plus certain que la sexualité occupe une place centrale, non seulement dans son rêve, mais dans les préoccupations, les rêveries, les angoisses et le transfert de celle-ci.
Puisque l’apparition du rêve a précédé le début de la psychothérapie, le travail de mise à jour du transfert en est rendu un peu plus ardu pour le thérapeute. Mais les associations de Mademoiselle C., et notamment sa crainte que le thérapeute ne l’agresse sexuellement après l’avoir hypnotisée, permettent cependant de révéler, non seulement comme une partie d’elle ressent dans le transfert le psychothérapeute comme un violeur sexuel potentiel, mais aussi comment au plan symbolique elle le voit comme un « violeur » des parties secrètes et cachées en elle.
Parallèlement, tout comme elle place le thérapeute sur la scène interne comme un objet partiel de violeur, force est-il de constater, suite au travail sur le rêve, qu’elle croit fantasmatiquement avoir en elle, simultanément et conflictuellement, une propre partie violeur et une propre partie violée. La partie self-violeur apparaît être en identification avec la partie masculine alors que la partie self-violée semble associée à la partie féminine de sa personnalité.
Mademoiselle C. constate être tout à la fois : l’homme et la femme, le violeur et la violée, l’homme qui agresse avec un couteau-pénis et la femme attaquée, violée dans son intérieur durant la nuit. Ceci éveille beaucoup d’angoisse en elle car, en tant que femme, elle se sent possédée, habitée par un homme démonique qui la torture. Mais, en raison de son identification projective à une homme violeur en elle, elle n’aime pas ce corps de femme qu’elle désire agresser, percer, dévitaliser; signe d’une identification à un phallus sadique et destructeur. Pour conjurer l’angoisse que cette lutte intérieure provoque en elle, Mademoiselle C. a recours à l’identification à l’agresseur (une forme d’identification projective) en tentant de se définir comme homme. Aussi espère-t-elle pouvoir contrôler la situation intrapsychique sans toujours craindre d’être agressée, vidée et humiliée; bref, être celle qui dominera et attaquera l’autre. Cependant, elle ne peut éviter d’être aussi celle qui est attaquée et en danger d’être dépossédée et vidée des parties bonnes cachées en elle.
Pourquoi ces doubles identifications? Qui sont ces personnages et qui est vraiment cette adolescente? Les séances suivantes amènent Mademoiselle C. à parler de plus en plus abondamment de sa mère. Peu à peu, s’exprime une colère envers elle, allant en s’amplifiant de séances en séances jusqu’au souvenir d’avoir souhaité la tuer vers l’âge de cinq ou six ans lorsque sa mère l’a temporairement confiée à une famille d’accueil. À ce moment, au cours de la séance, l’adolescente ressent avec intensité la colère et l’angoisse d’abandon de ce temps passé. Elle reconnaît l’importance et la violence de ces émotions dont elle tente depuis de protéger sa mère. Il devient assez clair, lors d’une de ces séances, que la jeune fille cherche, à travers son identification à l’homme violeur, à attaquer sa mère, à se venger d’elle et à tuer celle-ci au plan fantasmatique. Ce matériel donne lieu à des interprétations telles : « Peut-être qu’une partie de toi se sent comme un violeur enragé qui aurait le goût de tuer à la fois la partie de toi qui est une femme et ta mère que tu ressens comme si méchante dans ces moments-là ». L’interprétation de ces deux pôles identificatoires n’a pas surpris outre mesure Mademoiselle C. Elle se sent en accord avec ces interprétations, se reconnaissant nettement à la fois dans la peau de l’homme violeur et de la femme-victime. Elle voit aussi le piège dans lequel l’enferment ces identifications et a alors le même désir de pardonner l’autre que celui exprimé lors de la première séance. Plutôt que de retrouver la tombe du violeur, cette fois, c’est à sa mère qu’elle veut pardonner.
Des changements importants surviennent suite à cette série d’interprétations. Le rêve disparaît, tout comme les automutilations auxquelles il donnait naissance. Aussi, Mademoiselle C. changera d’allure, s’habillant, sans en ressentir d’angoisse, en robe, en jupe et se sentant, quant à elle, guérie.
Aussi bien le rêve d’angoisse de Jonathan que le rêve répétitif de Mademoiselle C. et leur élaboration à travers le travail psychothérapique démontrent bien la richesse et la complexité potentielle du rêve, même le plus simple. La technique d’interprétation du rêve proposée à travers ce texte peut en conclusion se résumer ainsi : un premier temps d’association et d’identification au fantasme, un deuxième composé d’interprétations exploratoires et un dernier d’interprétations transférentielles. Bien que la technique d’interprétation du rêve suggéré dans cet article soit proposée avant tout pour le travail auprès des enfants, cette façon d’explorer le rêve et de profiter au mieux du matériel inconscient qui y est associé peut s’appliquer aussi bien au rêve des adultes qu’au matériel provenant des jeux libres et des dessins des enfants au cours de la séance de psychothérapie. En cela, un rapprochement certain peut être fait entre rêve, jeu, dessin et association libre en tant que manifestations du monde fantasmatique de l’individu.
dimanche 14 décembre 2008
Rêve et Transfert
Les concepts du contenant-contenu, d'identification projective et de fonction alpha proposés par Klein (1946) et Bion 1962) et approfondis par Meltzer (1984b) permettent d'entretenir le processus transférentiel et ses manifestations oniriques selon une perspective plus large et plus complexe.
Décrivant l'interaction mère-enfant, Meltzer (1984b) trace un parallèle entre ce qui est vécu au sein de la relation maternelle et ce qui est vécu dans le couple thérapeute-patient.
Ainsi l'enfant, aux prises avec une angoisse intolérable, ressent le besoin de projeter dans la mère cette angoisse afin de s'en soulager lorsque la mère peut s'identifier à cette angoisse et la tolérer, elle joue pour son enfant un rôle de contenant de l'angoisse psychique. Grâce à sa propre capacité de penser ( à sa fonction alpha) et à son désir de réparation, elle cherche à offrir à son enfant une réponse satisfaisante à cette angoisse afin de la soulager - lorsque ce processus de communication entre la mère et l'enfant réussit, ce dernier peut reprendre en lui, maintenant transformée en une forme tolérable, pensable, la partie de sa personnalité d'abord projetée hors de lui dans sa mère. S'identifiant à sa mère et à son produit "pensé", l'enfant pourra reprendre en lui un self réparé, décontaminé, tout en s'identifiant à la capacité maternelle de réparation. En reprenant ce jeu des identifications projectives entre le parent et l'enfant pour l'appliquer au processus thérapeutique, Meltzer (1967) décrit avec soin le processus par lequel le patient vient déposer chez le thérapeute des parties clivées et angoissantes de lui-même. Le simple processus de décharge de ces parties procure certes un soulagement au patient mais à moins de pouvoir profiter de la réintrojection de ces parties décontaminées le soulagement ressenti est bien éphémère. Aussi, le thérapeute doit-il à la fois survivre à cette décharge de projectionner et réussir à digérer, à penser et transformer ces contenus angoissants pour que, selon Meltzer (1967), ces projections deviennent digestibles et assimilables par le patient.
En ce sens, les productions oniriques apparaissent parfois en psychothérapie comme des projections massives de parties clivées angoissantes dont l'enfant cherche à se débarrasser en les expulsant chez le thérapeute. Souvent, l'enfant refusera d'élaborer ou d'associer sur son rêve et cherchera plutôt à s'en éloigner affectivement et à se distancer du même coup du thérapeute qui devient alors à ses yeux, dépositoire de parties clivées dangereuses. Des réactions d'angoisse suivent d'ailleurs souvent le moment de soulagement ressenti par l'enfant qui a relaté son cauchemar en psychothérapie, comme si secondairement, il se sentait de nouveau replongé dans une atmosphère dangereuse de son rêve. Par son interprétation du rêve, le thérapeute remplit alors la fonction alpha décrite par Bion (1962) et Meltzer (1967) en rendant pensable et digestible le contenu angoissant expulsé de par la narration même du rêve.
samedi 13 décembre 2008
Nature et Fonction 4e
Lorsque Gammil (1981) décrit l'espace psychique intérieur du rêveur, il soutient que celui-ci est à la recherche d'une solution réparatrice de la part de ses bons objets internes. Reprenant la formulation de Kanser (1955), il précise que le rêveur ne dort pas seul mais en état d'identification projective avec ses bons objets internes. La solution psychique à laquelle réfère Meltzer (1984a) et Gammil (1981) serait donc la réparation des objets internes, attaqués, fantasmatiquement par d'autres objets internes ressentis comme étant méchants ou encore par des parties du self vécues inconsciemment comme étant persécutrices ou mauvaises.
En ce sens, en plus de jouer le rôle d'un révélateur de l'inconscien tel que d'abord découvert par Freud (1900), le rêve apporte au psychothérapeute non seulement des indications au sujet des conflits entre diverses parties de la personnalité (objets internes, Self) mais également l'informe à propos des différentes solutions prises en oeuvre pour résoudre ces conflits.
jeudi 11 décembre 2008
Nature et Fonction 3e
En outre, en enrichissant la psychanalyse de ces deux notions métapsychologiques, Klein définit mieux le champ d'investigation découvert par Freud et qui est constitué par l'espace psychique. Ce faisant, elle apporte au concept de fantasme une signification plus concrète en tant qu'expression idéationnelle et émotionnelle des relations entre objets internes et parties du Self.
Dans ce sens, les concepts d'objets internes et de monde intérieur permettent au clinicien de comprendre le rêve comme un phénomène d'interaction entre objets internes et parties du Self à l'intérieur du sujet. Cette conceptualisation permet de dépasser la notion limitative de rêve en tant que reflet du monde externe et des interrelations avec des objets réels ou comme simple accomplissement d'un désir (Meltzer, Harris, 1980). Le rêve met ainsi en scène avant tout la fantasmatique individuelle du sujet en rapport avec l'équilibre des objets internes et du Self, constituant en cela une fenêtre privilégiée sur l'inconscient.
mercredi 10 décembre 2008
Nature et Fonction 2e
Les techniques d'interprétation du rêve ont d'abord été centrées sur les mécanismes de déformation du rêve découverts par Freud (1900) dans le but de retracer derrière le contenu manifeste du rêve les éléments inconscients qui en constituent le contenu latent.
Ces contributions de Freud (1900) sur le rêve ont été enrichies plus tard avec les apports de Klein (1946) concernant le monde intérieur du sujet et ceux de Bion (1964) à propos du fonctionnement de la pensée.
C'est en décrivant l'appareil psychique comme un monde intérieur peuplé d'objets internes en interaction entre eux et avec le sujet que Klein (1940, 1955, 1958) a ouvert la voie à une compréhension approfondie de l'inconscient. Le rêve en plus d'être vu comme l'expression symbolique de conflits inconscients, a pu désormais être également vu comme la manifestation des introjets et identifications multiples de l'individu et des fantasmes qu'il entretient à leur sujet.
L'objet interne est donc conceptualisé comme un fantasme. Dépendant des affects qui y sont liés et des mécanismes de défense qui sont utilisés par l'individu, les objets internes peuvent être ressentis comme totaux et/ou persécuteurs. Ils sont, de plus imaginés comme possédant leur vie psychique propre et comme existant concrètement à l'intérieur de la psyché et du corps de sujet selon une organisation fantasmatique nommée 'monde intérieur' par Klein (1940).
lundi 8 décembre 2008
Nature et Fonction du Rêve
Si Freud (1900) voyait dans le rêve un outil idéal pour comprendre l'inconscient, il envisageait d'abaord la production onirique comme le gardien du sommeil. Ainsi le rêve prévenait le réveil du sujet en permettant une satisfaction fantasmatique de désir ou de la pulsion ressentie pendant le sommeil. Pour Freud (1900) donc, le rêve réussit lorsque le sommeil est préservé et échoue si le rêveur s'éveille.
Aujourd'hui, pour L. Brunet et Dianne Casoni, les découvertes scientifiques nous ont permis d'apprendre qu'une fonction neuronale spécifique serait la véritable gardienne du sommeil paralysant les mouvements suscités par les rêves. La remise en question du rôle de gardien de sommeil, attribué par Freud (1900) au rêve a, pour d'autres motifs, également été proposée par Meltzer (1984) qui estimait à l'inverse de Freud (1900) que le sommeil est le gardien de notre capacité à rêver.
Cependant, l'intérêt premier que porte le clinicien au rêve provient de l'accès qu'il permet à l'inconscient du rêveur: derrière le contenu manifeste du rêve se profile, comme l'a énoncé Freud (1900), un contenu latent retraçable en partie grâce aux associations du patient et à la connaissance des divers processus régissant le monde inconscient à condensation, déplacement, symbolisme, déformation ou absence des notions de temps et d'espace.
Le rêve, comme l'association libre, permet donc au thérapeute de poser un regard direct sur le monde intérieur du patient dans le but de le connaître et de le lui interpréter. Meltzer (1984) utilise le terme "monitorer" pour décrire ce travail d'observation.
dimanche 7 décembre 2008
Les Caractères qui Permettent de Distinguer Le Rêve de La Veille 1er
Ces rêves hypnagogiques, les rêves du sommeil léger ou du sommeil profond, peuvent-ils être distingués de l’état de veille? On connaît la boutade de Pascal : «Nul ne sait, hors la foi, s’il veille ou s’il dort». Et Spencer affirme : « Ce qu’un sauvage connaît en rêve est juste aussi réel pour lui que ce qu’il voit quand il est éveillé». (Spencer et Gillen, cités par Lévy-Bruhl, Fonctions mentales dans les sociétés inférieures, 55).
Est-ce vrai? Durant le sommeil évidemment, l’illusion est complète; mais durant la veille bien des caractères peuvent nous aider à faire la distinction.
L’analyse que nous allons en faire montrera que les différences et même les rapports qui existent entre la veille et le rêve et le rêve peuvent aider à établir cette distinction.
I. La veille et le rêve : opposition.
A. Pour que la comparaison ait une base, il faut partir d’exemples vivants et concrets. En ce qui concerne la veille : je suis par exemple dans telle station balnéaire ou estivale, je rencontre tel ami, j’admire tel site, je décide de faire telle excursion. Ou encore : la succession des divers actes d’une de mes journées d’étudiant.
Pour le rêve, tel exemple qui peut m’être personnel, ou de ceux signalés par Maury ou Freud. Celui où la chute d’un ciel de lit sur la tête du dormeur déclenche une série de scènes se rapportant à la Terreur et aboutissant au couperet de la guillotine. Ou cet autre dans lequel, d’un pèlerinage à Jérusalem, il passe chez M. Pelletier, chimiste à Paris, qui lui fait don d’une pelle marchant sur une route et lisant des bornes kilométrique, il est brusquement transporté sur une balance où s’accumulent des kilos dans l’Île de Gilolo, et, après divers épisodes se rapportant à la fleur de Lobélia et au général Lopez, il se réveille faisant une partie de loto (MAURY, Le sommeil et les rêves, p.137-138 et 151).
B. Ces quelques exemples permettent de distinguer dans le rêve les caractères suivants :
a) Les représentations se manifestent souvent imprécises et floues, très vives, mais avec des contours vagues, ce qui facilite les associations et des combinaisons parfois inattendues.
b) L’enchaînement des faits apparaît souvent désordonné et sans suite logique; mais il est à noter que cette incohérence n’est souvent qu’apparente, les images étant dirigées par les lois de l’association et la logique des tendances : les exemples de Maury font ressortir le premier facteur, les exemples de Freud mettent en lumière le second.
Mais, dans un cas comme dans l’autre, le lien d’enchaînement se fait d’une façon qui heurte souvent le sens de la réalité.
c) Cette désadaptation par rapport au réel apparaît plus encore en ceci : l’absence à peu près totale des notions de temps et de lieu : on passe sans transition d’un bout du monde à l’autre; des évènements se déroulent, dont la durée dépasse celle d’une nuit; et si l’on en croit certains exemples ce déroulement ne prendrait que quelques instants et se ferait à une vitesse vertigineuse.
d) Les impressions sont souvent grossies et déformées par rapport à leur origine : une piqûre d’épingle devient un coup d’épée; on rêve à un bain rafraîchissant, et c’est l’air frais du matin qui a envahi la chambre.
e) Enfin ces images sont hallucinatoires, et, si invraisemblables qu’elles soient, elles sont immédiatement objectivées par la conscience du seul sujet sans le contrôle des sens, de la mémoire et de l’esprit coordonnées entre eux.
La rêverie, d’ailleurs, celle de Perrette par exemple, se présente déjà avec les mêmes caractères, mais atténués et limités par une certaine censure des sens externes et de l’esprit.
C. Au contraire, la perception et autres éléments de la veille se présentent comme.
a) précis et de contours plus nets;
b) coordonnée entre eux et se déroulant souvent en une suite qu’on constate;
c) en tenant compte des contingences de lieu et de temps;
d) proportionnés aux excitations et autres causes qui les provoquent;
e) le tout cohérent qu’ils constituent s’objective sous le contrôle de mes facultés diverses et en accord avec mes semblables.
Il est donc aisé déjà d’établir une distinction; un autre aspect de l’analyse vient encore la renforcer.
II. Le veille et le rêve : relations.
Il importe, en effet, de faire trois remarques :
A. La perception ne suppose nullement le rêve et n’en a pas besoin, tandis que le rêve suppose des éléments de l’état de veille : perception antérieure ou concomitante, qu’il réforme, préoccupation, tendances.
B. L’état de veille, du moins normalement, connaît le rêve en tant que tel et le distingue de lui (c’est une constatation psychologique), tandis que le vrai rêve ne connaît pas l’état de veille, en tant que distinct de lui-même.
C. Enfin, il y a entre les deux états un passage généralement observable et connu par l’état de veille : soit transition lente (états hypnagogiques), soit un réveil brusque.
CONCLUSION : Veille et rêve; distinction.
Cette double analyse amène donc aisément à reconnaître.
Dans la veille : un état normal et premier, dans lequel nos représentations cohérentes et coordonnées correspondent à des objets réels, et tous nos états sont contrôlés par l’attention et gouvernés par la volonté
Ainsi s’obtient la conscience nette et le sens du réel.
samedi 6 décembre 2008
PÉDOPHILIE ET SON TRAITEMENT
Sous la plume de Lilianne Lacroix, on pouvait lire : « on ne les guérit pas, mais on les aide à mieux se contrôler. On a ainsi réduit la récidive à moitié ». Psychiatre à l’institut Pinel, le Dr G. Pinard traite les pédophiles. « Si on ne fait rien, ils vont récidiver, c’est sûr. Il ne suffit pas de les punir, il faut aussi les soigner. Tout l’aspect thérapeutique que punitif est nécessaire ».
Si la loi condamne toute relation sexuelle avec une personne de moins de 18 ans, les psychiatres se font plus précis quand il s’agit de décrire la pédophilie et préfèrent parler de victimes de moins de 14 ans ou d’un écart minimum de cinq entre autre les deux personnes. On peut alors parler de pédophilie au sens propre. Plus la victime est jeune, plus l’agression risque d’être dommageable. « Quand la victime a moins de 14 ans, c’est extrêmement grave, tant sur le plan légal qu’émotif », assure le Dr Pinard.
Ce n’est pas une méthode mais bien de multiples moyens qui sont mis en œuvre pour tenter de maîtriser la pédophilie :
- médication anti-androgénique pour réduire les pulsions sexuelles, particulièrement pour les patients qui se sentent envahis par leurs fantasmes et qui disposent de moins de ressources pour y faire face;
- éducation sexuelle : « Pour de nombreux pédophiles, explique le Dr Pinard, la femme est extrêmement mystérieuse. Souvent, ils ont de fausses conceptions qui les terrorisent. Un de mes patients parlait de « MONSTRUATIONS » tandis qu’un autre était persuadé que le vagin avait des dents »;
- effort pour tenter de modifier les préférences sexuelles et d’augmenter l’âge des personnes attirant le pédophile : « certains prennent leurs victimes quasiment au berceau. D’autres préfèrent des adolescents, presque de jeunes hommes ». Pour susciter ce « reconditionnement fantasmique et orgasmique », on utilise des films à connotations érotiques, des revues. Dans le cas où le pédophile ne démontre d’attrait que pour les victimes de son propre sexe, on lui offrira même de la littérature ou du cinéma à tendance homosexuelle;
- la satiétie, on demande alors au pédophile d’associer ses fantasmes à des choses négatives, comme l’arrivée d’une auto de police, un séjour en prison, voire un autre détenu qui veut voir sa peau. De la même façon, juste après une éjaculation, on lui demande de songer à un enfant et de tenter à nouveau de se masturber, ce qu’aura sans doute un caractère fastidieux, achalant, voire foncièrement désagréable. Satiété et reconditionnement orgasmique vont de pair. « Pendant qu’on diminue l’intérêt pour les enfants, on augmente d’attrait pour les adultes », explique le Dr Pinard;
- reconnaître les signaux d’alarme : « le stress, l’ennui, la tristesse, la colère déclencheront souvent un désir de pédophilie. Les pédophiles auront tendance à sexualiser le moindre stress. Ils doivent en être conscients ». La thérapie comprend donc des techniques de gestion du stress.
L’OBSESSION
« Les pédophiles primaires n’ont d’attirance que pour les enfants. S’ils ont beaucoup de temps libre, s’ils ne travaillent pas par exemple, ils peuvent y penser constamment. Par contre, les pédophiles secondaires ont la capacité de fonctionner avec les femmes, mais quand leurs désirs sont trop contrariés, quand ils éprouvent des difficultés, ils peuvent se rabattre sur les enfants, qu’ils jugent plus accessibles, plus à même de les comprendre ».
Parce qu’ils sont capables de relations avec un adulte, les pédophiles secondaires semblent toutefois un peu plus faciles à traiter ou à « reconditionner ». Cela dit, certains des pédophiles les plus redoutables se font justement une spécialité de se promener d’une famille reconstituée à l’autre. « Il ne s’agit pas alors d’inceste mais bien de pédophile », précise le Dr Pinard. Dans la majorité des cas, pédophiles primaires et secondaires se contentent toutefois d’attouchements, ce qui explique leur longue « carrière » et le peu de sévérité des peines qui leur sont souvent imposées. Mais certains, par contre, auront des relations sexuelles complètes avec de très jeunes enfants, presque des bébés parfois.
- Prendre conscience de la gravité de leur geste et de leurs conséquences sur la victime : « Plus la victime est jeune, pire c’est, dit le Dr Pinard. Mais souvent, les pédophiles se trouvent une justification pour légitimer leurs actes. Il n’est pas rare d’entendre des déclarations du genre : « Je m’occupe mieux de lui que ses parents », ou « il veut bien mieux que moi je lui montre, plutôt que de se le faire enseigner mal ailleurs ». Selon le Dr Pinard, il est d’ailleurs quasi-inutile de traiter un patient qui ne veut pas changer d’attitude. « Tous ne sont pas traitables ou intéressés à changer ».
- Travail au niveau des habiletés sociales par des techniques d’affirmation de soi : « ils doivent apprendre à exprimer un désaccord, à s’affirmer dans le monde adulte, à cesser de s’y percevoir comme des victimes ».
- Limiter les occasions de tentation en évitant non seulement les endroits à risque, comme les parcs, pataugeoires, etc. Mais aussi les activités à risque : pas questions donc d’être entraîneur d’une équipe de hockey bantam, gardien d’enfants… « Même la médication ne peut suffire à immuniser un patient, précise le psychiatre. Encore faut-il qu’ils évitent de se mettre dans des situations à risque ».
- Continuer à se considérer toujours à risque : « c’est le jour où ils cessent de se poser des questions qu’il y a risque de récidive » dit le Dr Pinard.
Selon le Dr Pinard, les parents doivent être vigilants et les enfants, sans qu’on les terrorise, doivent connaître le danger et leur droit de dire non à toute avance sexuelle. C’est là la meilleure prévention possible.
« Trop d’enfants à qui Luc a dérobé la jeunesse »
Depuis deux ans, Luc n’a pas mis les pieds dans un parc. « Les enfants ont droit à leur liberté. Le droit de jouer dehors sans être agressés, ils ont droit à leur enfance ». Pendant 17 ans, c’est à plus de 10 enfants que Luc a dérobé la jeunesse. Luc est pédophile. Il le sera toute sa vie. Pendant des années, il a couru les pataugeoires, les parcs, les cours d’école, tous les endroits fréquentés par des enfants. Il a même travaillé dans une garderie. Maintenant, après quatre arrestations et une condamnation à deux ans moins un jour de prison, il évite ces endroits comme la peste. Parce qu’il ne veut pas faire du mal à des enfants, mais aussi parce qu’il sait que, malgré tout, si la tentation se fait trop forte, il ne pourra pas résister à ces pulsions qui le rongent… « Quand je me masturbe chez moi, dans le salon, ce sont des images d’enfants que je vois ». À part une jeune victime de 11 ans, les autres enfants que Luc a agressés n’ont jamais eu plus de huit ans. Le plus jeune avait à peine trois ans.
Pourquoi si jeunes!
Parce qu’ils ne sont pas menaçants. Un enfant, c’est tellement innocent, pas comme un adulte. S’ils ont du poil, s’ils ont un pénis un peu plus gros, ça me fait peur…Ça ressemble trop aux adultes ». Luc a lui-même été agressé. À neuf ou dix ans, quand il demeurait chez sa sœur, il a décidé de fuguer pour aller retrouver sa mère, internée à l’hôpital Louis-h. Lafontaine (psychiatrique). Il a fait du pouce. « Le monsieur était super gentil. Il m’a payé un lunch, il m’a donné des bonbons. Puis, dans l’auto, il s’est approché…je me suis laissé faire. J’étais très fâché, mais j’avais terriblement peur. Quand il m’a demandé de le masturber, j’ai dit non, alors il l’a fait lui-même ».
C’est ce que Luc a fait aussi avec la plupart des enfants. Il avait le tour, savait jouer de patience pour séduire : « Je choisissais toujours des enfants de familles monoparentales, des enfants qui semblaient rejetés par les autres. Vous ne pouvez pas vous imaginer combien c’est facile. Je jouais avec eux, dans le sable, dans l’eau, autour des balançoires, puis je leur offrais des bonbons, un verre de liqueur ou même de l’argent, 5$ la plupart du temps pour m’aider à porter des sacs d’épicerie jusqu’à chez moi, à sortir les poubelles, etc. ».
C’était facile et à peine risqué. « Après une agression, j’avais des regrets. Je savais que ce que j’avais fait était mal et j’avais peur d’être pris… Mais quand je croyais que personne ne frappait à ma porte, la peur partait et l’envie revenait… J’étais tellement bien là-dedans ». Malgré les dizaines d’agressions qu’il a commises, Luc n’a eu que quatre plaintes contre lui et une seule condamnation, en dépit de la violence impliquée dans au moins un de ces cas. « Quand je lui ai touché, le petit bonhomme s’est mis à crier. Il avait peut-être sept ans. Moi, je ne pensais à rien, ni à la prison ni à l’enfant mais seulement à mon plaisir ». Après l’avoir sodomisé, il l’a laissé aller, tout simplement. Avant même qu’il soit arrêté pour la première fois, il a agressé des dizaines d’enfants, dont plusieurs dans sa propre famille.
Une de ses amies, dont il gardait le fils de six ans tous les week-ends, a choisi de se taire en apprenant, de la bouche même de l’agresseur, les caresses que son fils avait dû subir : « Luc, t’as besoin d’être traité, mais je ne te dénoncerai pas ». Pendant des années, il est demeuré avec une amie et son fils. À lui aussi, il donnait des bains. « Il n’a jamais dit non, précise-t-il. Quelques fois, c’est même lui qui venait me rejoindre et qui me faisait des avances. Je le gâtais et il m’aimait gros. J’avais l’impression de vivre le grand amour ». Le petit n’a jamais dit non, mais il s’est mis à avoir des comportements agressifs à l’école. À la maison aussi. Quand il traitait Luc de « cochon », ses parents le corrigeaient d’une bonne claque, malgré les supplications du principal intéressé : « Tape-le pas, c’est un enfant ». Un jour, tout a éclaté : « On était à table. Il m’a regardé et tout a revolé. Il s’est mis à crier, à se lancer par terre. Encore cette fois, il a reçu une volée ». Le lendemain pourtant, le gamin se confiait à l’école et l’enquête approfondie menée par les autorités mettait au jour la vérité. Lors des trois accusations précédentes, les juges avaient considéré son enfance difficile, qu’il a passée en partie en institution, pour lui accorder une condamnation avec sursis. Pas cette fois. « Dans le fond, les autres juges auraient aussi dû me condamner. Peut-être alors que j’aurais compris et qu’il n’y aurait pas eu autant de victimes ». Il n’en revient pas non plus du nombre de jeunes et de parents qui ont tout simplement choisi de se taire, jugeant que l’incident devait être oublié au plus vite.
Parce qu’il disait vouloir être traité, ce dernier juge l’a condamné à deux ans moins un jour de prison : « J’ai rencontré un psychologue. Toute ma rage, toute ma frustration, toutes mes envies de vengeance, c’est sorti avec lui. Ce n’est pas parce qu’un jour un adulte m’avait pris pour un torchon que d’autres enfants devaient subir des agressions. C’est grâce à cette aide que je m’en suis sorti. La prison seule, ça ne sert à rien, il faut aussi de l’aide ». Cette terrible envie des enfants torture toujours Luc : « Je serai pédophile toute ma vie, avoue-t-il, mais plus jamais je ne veux faire du mal à des enfants. La pédophilie, ça ne se guérit peut-être pas, mais ça se contrôle ». Jamais il n’a eu de relation avec un adulte, malgré quelques tentatives homosexuelles. « Je ne suis pas capable. J’ai trop peur d’être trahi ». Ce dont il a peur surtout, c’est de lui-même : « La semaine dernière, ça a passé proche. C’était un petit garçon qui cognait à la porte pour offrir des billets… Heureusement une lumière a allumé et j’ai pris le téléphone ».
Comme un alcoolique en manque, il a appelé un ami, un soutien pour l’empêcher de tomber. « Si jamais ça m’arrive, je demande qu’on me mette en prison ».
Dans le groupe d’entraide comme Amorce, Luc ne peut supporter l’hypocrisie. Pour l’empêcher de prendre lui-même les choses en main, on doit le raisonner. Quand il a appris qu’un pédophile de sa connaissance s’était mis en ménage avec une nouvelle blonde, il est entré dans une terrible rage : « Pour quoi diable avoir encore choisi une femme qui a une petit gars? Des femmes seules, il y en a à la tonne! Alors pourquoi une femme avec un enfant de quatre ans? ».
Au-delà de sa crainte bien légitime qu’un enfant risque d’être agressé, au-delà de ses préoccupations altruistes véritables, il admettait une pointe de jalousie : « Eh oui, quelque part, j’aimerais ça être à sa place… ».
vendredi 5 décembre 2008
Au Compte-goutte - La Sexualité 5e
Sadisme (sexuel) (du nom du marquis de Sade, écrivain français). Trouble psychosexuel caractérisé par le fait que l'excitation et la gratification sexuelles sont obtenues en infligeant à l'autre une douleur physique ou psychologique.
Exhibitionnisme. Trouble psychosexuel caractérisé par le fait que l'excitation et la gratification sexuelles sont obtenues par l'effet de surprise provoqué chez une personne par l'exposition de ses organes génitaux.
Voyeurisme. Trouble psychosexuel caractérisé par le fait que l'excitation et la gratification sexuelles sont le plus souvent obtenues à partir de l'observation de personnes étrangères se déshabillant ou se livrant à une activité sexuelle.
Pédophilie (du grec Paido = enfant, jeune garçon, et-philos). Trouble psychosexuel caractérisé par la préférence marquée pour une activité sexuelle avec des enfants.
jeudi 4 décembre 2008
Au Compte-goutte - La Sexualité 4e
Il existe de nombreuses variations dans l'expression de la sexualité qui enrichissent la vie sexuelle des partenaires. En ce sens, un comportement, même déviant, ne peut être considéré commune pathologique s'il s'exprime entre individus consentants.
Le DSM III ne parle donc de troubles psychosexuels qu'en cas de troubles de l'identité sexuelle, de déviations sexuelles portant sur des objets inhabituels, des troubles de la fonction sexuelle
Les troubles de l'identité de genre comprennent principalement le transexualisme, qui correspond au désir "d'être" de l'autre sexe - trouble psychosexuel caractérisé par le fait que la personne, homme ou femme, se sent profondément comme faisant partie du sexe opposé, au point parfois de prendre en horreur tout ce qui a trait à son propre sexe.
Paraphilie (du grec para = à côté, et-philos = ami). Déviation sexuelle amenant l'individu à rechercher l'excitation et la gratification sexuelles à travers certains objets ou certaines activités - inhabituelles.
Travestisme trouble psychosexuel caratérisé par le besoin qu'éprouve un individu d'adopter, pour être excité sexuellement, les vêtements, l'allure et la voix du sexe opposé.
Fétichisme (du latin factitius = artificiel). Trouble psychosexuel caractérisé par le fait que l'excitation et la gratification sexuelles sont principalement obtenues par la vue d'un objet tel qu'un soulier, un sous-vêtement ou un article de toilette.
Zoophiliie (du latin zoo = animal, et philos). Trouble psychosexuel caractérisé par le fait que l'excitation et la gratification sexuelles sont obtenues à partir d'une relation avec un animal. Cette activité sexuelle bien plus discrète (la victime ne se plaint jamais). La zoophilie, encore appelée bestialité. L'animal-aimant, sans être nécessairement "consentant", n'a d'autres choix que de subir les volontés sexuelles de son propriétaire. Certains animaux (poodle aux tendances mastrubatoires entre autres), ont, il faut le reconnaître, quelques dispositions naturelles à ces ébats amoureux du troisième type. Pour en décourager les amateurs signalons que la bestialité (rapport sexuel avec un animal) est condamné par le code criminel canadien (article 155: "Est coupable d'un acte criminel quiconque commet la bestialité").
mardi 2 décembre 2008
Au Compte-goutte - La Sexualité 3e
Dans la société occidentale, une certaine conception de l'hygiène corporelle a entraîné des pratiques allant des bains et des douches systématiques à l'utilisation de désodorisants, amenant ainsi les odeurs naturelles à perdre tout pouvoir. Une revalorisation de la sexualité passe peut-être par une restitution du droit de parole à ces messages corporels.
L'éthologiste Elbi - Elbesfeldt a rapporté qu'en nouvelle Guinée, dans certaines tribus, on manifeste son amitié envers celui qui va partir en lui passant la main sous l'aisselle pour le sentir et ensuite se frictionner le corps avec l'odeur de l'autre. Aux Philippines, les amoureux qui vont être séparés pendant une longue période échangent traditionnellement les vêtements qu'ils ont porté afin de retenir plus longtemps l'odeur de l'être aimé.
Kraff-Ebing (1840-1906), un psychiatre allemand connu pour son célèbre psychopathia sexualis, rapporte la confidence d'un jeune paysant qui attribuait ses nombreuses conquêtes féminines au fait que, durant la danse, il passait "son mouchoir sous ses aisselles pour en essuyer ensuite le visage de sa danseuse".
lundi 1 décembre 2008
Au Compte-goutte - La Sexualité 2e
Il semble tout d'abord que chacun de nous possède une odeur personnelle qui l'identifie plus ou moins inconsciemment au "nez" des autres. Cette odeur varierait notamment avec la couleur de la peau ou celle des cheveux, mais également selon le sexe; les hommes et les femmes dégagent une odeur différente due à des sécrétions spécifiques.
Trois types de sécrétions joueraient un rôle particulièrement important dans l'attraction exercée entre les êtres humains. Ce sont les sécrétions produites par les organes génitaux féminins, celles présentes dans l'urine chez l'homme et celles contenues dans la sueur.
En ce qui concerne les sécrétions vaginales des chercheurs anglais ont découvert l'existence, chez les femelles de singes rhésus traitées à l'aide d'oestrogènes, de sécrétions odorantes déclenchant une excitation sexuelle spectaculaire chez leurs partenaires mâles. Or, ces substances, baptisées "copulines" par les sécrétions vaginales humaines.
Quant à l'urine des hommes adultes, elle contient en forte concentration une substance musquée dénommée exaltoïde à laquelle les femmes seraient beaucoup plus sensibles que les hommes ou les enfants (le Magnen 1957). La sueur est principalement secrétée sous les aisselles où elle est retenue par les poils axillaires. Lorsqu'elle est fraîche, elle dégage une odeur légère qui, malheureusement, est assez vite corrompue par la fermentation occasionnée par le port des vêtements.
dimanche 30 novembre 2008
Au Compte-goutte - La Sexualité 1e
Avec la reproduction sexuée est née la motivation sexuelle, permettant le rapprochement du mâle et de la femelle, et la survie de toute espèce ayant adopté cette façon de transmettre ses génies.
Certaines espèces ne vivent d'ailleurs que le temps de se reproduire pour mourir une fois cette tâche accomplie.
Et que dire des odeurs........dans la sexualité. Pour Elliot M.F. il n'y a que la vue ou l'audition qui interviennent dans notre façon d'entrer en contact avec les autres; l'affection semble aussi jouer un rôle dans l'attirance ou la répulsion que les autres exercent sur nous.
Les éthologistes avaient déjà montré que les membres de nombreuses espèces animales utilisent les sécrétions de certaines glandes afin de communiquer aux autres, par le marquage, les lmites de leur territoire ou encore pour attirer le ou la partenaire en vue de l'accouplement. Ces sécrétions furent appelées, pour cette raison, "hormones sociales" ou phéromones. Nos connaissances sont encore limitées sur l'olfaction humaine. Pourtant, des expressions telles que "avoir quelqu'un dans le nez" (ce qui paradoxalement signifie qu'on "ne peut pas le sentir") portent à croire que cet organe joue sûrement un rôle plus important qu'on ne le pense sans que nous en prenions nécessairement conscience.
samedi 29 novembre 2008
Au Compte-goutte - La Dépendance Affective 6e
Croire que la dépendance est de l'amour, voilà un autre malentendu très courant auquel les psychothérapeutes sont confrontés quotidiennement. L'un de ses effets les plus spectaculaires apparaît chez l'individu qui menace ou tente de se suicider, ou qui fait de la dépression à la suite du rejet ou de la séparation d'un amant ou d'un époux.
Une telle personne dira:
Je ne peux pas vivre sans mon mari (ma femme, mon amie), je l'aime tellement!
Et je réponds:
Vous faites erreur, vous ne l'aimez pas.
Mais, reprend-elle en colère, je viens de vous dire que je ne pouvais pas vivre sans lui (elle, etc.).
Alors j'essaie d'expliquer:
Ce que vous décrivez, c'est du parasitisme, pas de l'amour. Lorsqu'on a besoin d'un autre individu pour survivre, on est un parasite de cet individu. Il n'y a pas de liberté dans votre relation. Il s'agit de besoin plutôt que d'amour. L'amour est un choix délibéré. Deux personnes ne s'aiment vraiment que lorsqu'elles sont capables de vivre l'une sans l'autre mais choisissent de vivre ensemble.
Je définis la dépendance comme l'incapacité de se reconnaître comme un tout et de fonctionner correctement sans avoir la certitude qu'on est pris en charge par quelqu'un. La dépendance chez les adultes physiquement sains relève de la pathologie; elle est malsaine et toujours la manifestation d'une déficience ou d'une maladie mentale.
Il faut la distinguer de ce qu'on appelle communément les besoins ou sentiments de dépendance que nous avons tous, même si nous affirmons à nous-mêmes et aux autres le contraire. Nous avons tous le désir que quelqu'un s'occupe de nous, le désir de recevoir sans effort, d'être choyés par quelqu'un de plus fort que nous-même si nous sommes des adultes responsables, en regardant au fond de nous-mêmes avec lucidité, nous trouverons toujours un désir d'être chouchoutés.
vendredi 28 novembre 2008
Au Compte-goutte - La Dépendance Affective 5e
Par ailleurs, comment décrire l'indépendance:
- la personne indépendante associe l'estime de soi à l'individualité, cette affirmation d'être à la fois semblable et différent, à cent lieux de l'individualisme qui prône le chacun pour soi et l'égocentrisme.
- Il s'agit de femmes et d'hommes qui se reconnaissent une valeur constante, cultivent leurs relations d'intimité; apprécient l'engagement et multiplient leurs sources d'expériences valorisantes.
- Fidèles en amitié et en amour sans exiger l'exclusivité, centrées sur elles-mêmes mais dénuées d'égoïsme ou d'égocentrisme, recherchent la critique créatrice, ces personnes curieuses se sentent à l'aise à expérimenter et à explorer.
- l'intimité; l'engagement, l'affirmation de soi et la liberté leur apparaissent tout à fait compatibles.
jeudi 27 novembre 2008
Au Compte-goutte - La Dépendance Affective 4e
Dans la notion séparation - individuation, Margaret Mahler, théoricienne et clinicienne de la psychanalyse, a formulé l'hypothèse d'une phase déterminante pour le développement psychologique. Mahler et son équipe (1980) ont observé le processus de séparation individuation entre des enfants, âgés de quelques mois à trois ans, et leur mère. Distincte de la naissance biologique, se ferait par étapes. Les adultes significatifs, notamment la mère, joueraient un rôle-clé en favorisant ou non chez l'enfant l'acquisition de ses propres caractéristiques individuelles.
mercredi 26 novembre 2008
Au Compte-goutte - La Dépendance Affective 3e
- est incapable de prendre des décisions dans la vie de tous les jours sans être rassuré(e) ou conscillé(e) de manière excessive par autrui;
- laisse autrui prendre la plupart des décisions importantes le (la) concernant, par exemple où habiter ou quel emploi prendre;
- se montre "d'abord" avec les gens, même quand il (elle) pense qu'il se trompe, par crainte d'être rejeté(e);
- a du mal à mettre en route des projets ou à faire des choses seul(e);
- se porte volontaire pour faire des choses désagréables ou dévalorisantes pour se faire aimer par les autres;
- se sent mal à l'aise ou impuissant quand il (elle) est seul(e) ou fait des efforts considérables pour éviter d'être seul(e);
- se sent annihilé(e) ou impuissant(e) quand une relation proche s'interrompt;
- est fréquemment préoccupé(e) par la crainte d'être abandonné(e);
- est facilement blessé(e) quand il (elle) est critiqué(e) ou désapprouvé(e) par autrui;
Le DSM III-R retient deux facteurs prédisposants (une maladie physique chronique pendant l'enfance ou l'adolescence, l'angoisse de séparation de l'enfance et conserve les complications potentielles de la première version (dépression majeure, trouble dysthémique).
mardi 25 novembre 2008
Au Compte-goutte - La Dépendance Affectives 2e
Tout au long de son enfance et de sa jeune adolescence, Elizabeth, adulée par un père présent, dynamique et stimulant, se voyait comme une princesse. À 23 ans, elle recherche en des amours multiples et passionnés, éphémères et décevants, ce sentiment si valorisant d'être la personne la plus importante et la plus merveilleuse aux yeux de ses conjoints. Quand ses amies lui soulignent qu'elle semble rechercher un père idéal plus qu'un conjoint à son égal, elle répond qu'elle ne peut pas se contenter de moins que ce qu'elle a connu.
En 1987, le DSM III Révisé présente une seconde définition qui remplace les trois critères monothétiques de 1980 par neuf critères polythétiques, c'est-à-dire que la présence de cinq parmi ceux-ci suffit pour établir un diagnostic de personnalité dépendante. Voici les critères tels que les les présentent loas et Guelfi.
Mode général de comportement dépendant et soumis, apparaissant au début de l'âge adulte et présent dans des contextes divers, comme en témoignent au moins cinq des manifestations suivantes:
lundi 24 novembre 2008
Au Compte-goutte - La Dépendance Affective 1e
La dépendance a une empreinte.
Au cours de leur enfance, de leur adolescence ou au début de leur âge adulte, ces personnes ont vécu une expérience marquante au sein d'une relation affective significative, familiale, amoureuse ou autre. N'ayant pas fait le deuil ou la séparation avec ce passé, elles ne réussissent pas à s'en détacher et interprètent le présent dans la crainte ou l'espoir d'une possible répétition de ce malheur ou de ce bonheur.
Face à une expérience nouvelle, ces femmes et ces hommes tendent à réagir en fonction d'un souvenir-fantasme ayant la force d'une empreinte psychique, plutôt qu'au potentiel d'originalité ou d'exploration de soi et de l'autre qu'offre la réalité du présent.
À 21 ans, Gilles, pour la première fois de sa vie, louait un appartement avec son amie Manon, et non plus avec des copains ou copines d'université. Quatre mois plus tard, en plein hiver, le drame éclatait. Manon annonçait à Gilles sa décision de se séparer et lui demandait d'aller vivre ailleurs.
Quinze ans plus tard, Gilles revivait pour la xième fois une nouvelle séparation d'avec une conjointe parce qu'il lui refusait de partager son projet d'habiter ensemble. Gilles s'était juré de ne jamais plus lier amour et cohabitation. Parfois, il se trouvait trop rigide, mais sa peur finissait toujours par l'emporter.