LES TEMPS DU VERBE
1. Nous le cond_____ au poste et nous acqu______ ainsi une réputation de bravoure dans le quatier.
1 uîmes, érîmes
2 uîmes, îmes
3 uisîmes, érîmes
4 uisîmes, îmes
1. Rép. : conduisîmes, acquîmes
Mais : Fallait-il que nous le conduisissions au poste et que nous acquissions une telle réputation! (formes régulières mais peu usitées.
Et : Il le conduisit au poste et acquit un réel prestige auprès des demoiselles.
Rem. : Le verbe acquérir a la forme acquis au passé simple; les verbes en UIRE : CUIRE, CONDUIRE, CONSTRUIRE, NUIRE, ETC… la forme CONDUISIS, CONSTRUISIS, etc. L’imparfait du subjonctif se forme en remplaçant la terminaison IS du passé simple par : ISSE, ISSES, IT, ISSIONS, ISSIEZ ET ISSENT. (Ex. : Je voulais qu’il acquît de l’aisance, qu’il se conduisît en jeune homme bien éduqué).
2. Je n’avais pas pensé que la recherche des poids moléculaires ______ nécessaire et qu’elle _______ avancer les travaux du groupe (imparfait du subjonctif).
1 fut, fit
2 fût, fit
3 fut, fît
4 fût, fît
2. Rép. : fût, fît
Mais : Ce qui fut le plus nécessaire et qui nous fit vraiment progresser, c’est la présence d’un coordonnateur capable.
Rem. : La troisième personne du singulier du passé simple de l’indicatif est identique à celle de l’imparfait de subjonctif si ce n’est que cette dernière porte toujours un accent circonflexe sur la voyelle finale.
3. Hier, tandis que vous congéd____ notre camarade, nous ignor_____ votre brutalité.
1 iez, ions
2 iez, iions
3 iiez, ions
4 iiez, iions
3. Rép. : congédiiez, ignorions
Mais : Si vous congédiez notre camarade, vous ignorez ce qui seront nos réactions.
Et : Que nous le graciions ou non, il faut que nous soyons impartiaux.
Rem. : Les deux premières personnes du pluriel à l’imparfait de l’indicatif et au présent du subjonctif se terminent par IONS, IEZ (à l’exception de : AYONS, AYEZ, SOYONS, SOYEZ).
Et : Le I du radical des verbes en IER se maintient avec le I de la teminaison.
mardi 31 août 2010
lundi 30 août 2010
VIOLENCE vs RÉFUGIÉS - 8e partie
INTERVENIR…
Seule une intervention sociale qui intègre les principes de base de l’approche inter-culturelle a des chances d’être efficace et de répondre aux besoins des réfugiés. Une telle approche implique, entre autres, beaucoup d’écoute, beaucoup de patience et surtout beaucoup de souplesse et d’ouverture d’esprit. Elle exige qu’on soit continuellement conscient de la distance culturelle, psychologique et parfois linguistique entre l’intervenant et le client, c’est-à-dire qu’il faut se méfier comme de la peste des conclusions faciles, logiques, car peut-être ne possédons-nous pas la même logique que les réfugiés.
Il convient d’accorder une importance capitale aux dynamiques qui se développent chez les jeunes dans les écoles et les centres de loisirs où ils se tiennent. C’est à ces endroits que l’essentiel du travail social auprès des jeunes devrait se faire de façon intense dans le but de promouvoir, dans les faits et non seulement en palabres, l’intégration inter-ethnique et inter-raciale des jeunes sans un travail massif à ce niveau, nous nous préparons des jours très sombres : mon expérience en tant qu’intervenant me fait craindre le pire.
Les intervenants peuvent éventuellement rencontrer dans leur pratique des personnes qui ont subi la torture et portent encore dans leur tête, sinon dans leur corps, les traces traumatisantes de ces expériences. Il est important d’être attentif à certains symptômes, tels que l’insomnie, des angoisses, des phobies insolites, l’irritabilité, etc.
Il est urgent d’inventer de nouvelles formules de soutien aux familles de réfugiés. L’application bureautique et socio-judiciaire de la Loi sur la protection de la jeunesse et de la Loi sur les jeunes contrevenants est peut-être une nécessité sociale incontournable. Mais de nouvelles mesures visant à rejoindre différemment les mêmes objectifs doivent être inventées, et il faut surtout que les parents souvent complètement désemparés et confus soient soutenus plutôt qu’accablés, comme c’est malheureusement bien souvent le cas aujourd’hui.
Sixièmement, il est nécessaire d’évaluer en profondeur l’ensemble des ressources offertes comme milieu de vie substitut, telles que les centres d’accueil, les familles d’accueil, dans le but de rajuster les services aux nouvelles réalités multiculturelles de Montréal.
Enfin, il est essentiel de garder à l’esprit que des personnes rendues très vulnérables par leur passé marqué par des situations de grande violence sont très sensibles à tout ce que véhicule de « violence » l’intervention sociale institutionnalisée et les services publics en général, surtout quand la personne qui est devant nous possède à peine quelques notions de français ou d’anglais. Redoubler de patience et d’empathie constitue le premier service à rendre à ces personnes, souvent lourdement éprouvées par la violence et les autres tracasseries de la vie.
Seule une intervention sociale qui intègre les principes de base de l’approche inter-culturelle a des chances d’être efficace et de répondre aux besoins des réfugiés. Une telle approche implique, entre autres, beaucoup d’écoute, beaucoup de patience et surtout beaucoup de souplesse et d’ouverture d’esprit. Elle exige qu’on soit continuellement conscient de la distance culturelle, psychologique et parfois linguistique entre l’intervenant et le client, c’est-à-dire qu’il faut se méfier comme de la peste des conclusions faciles, logiques, car peut-être ne possédons-nous pas la même logique que les réfugiés.
Il convient d’accorder une importance capitale aux dynamiques qui se développent chez les jeunes dans les écoles et les centres de loisirs où ils se tiennent. C’est à ces endroits que l’essentiel du travail social auprès des jeunes devrait se faire de façon intense dans le but de promouvoir, dans les faits et non seulement en palabres, l’intégration inter-ethnique et inter-raciale des jeunes sans un travail massif à ce niveau, nous nous préparons des jours très sombres : mon expérience en tant qu’intervenant me fait craindre le pire.
Les intervenants peuvent éventuellement rencontrer dans leur pratique des personnes qui ont subi la torture et portent encore dans leur tête, sinon dans leur corps, les traces traumatisantes de ces expériences. Il est important d’être attentif à certains symptômes, tels que l’insomnie, des angoisses, des phobies insolites, l’irritabilité, etc.
Il est urgent d’inventer de nouvelles formules de soutien aux familles de réfugiés. L’application bureautique et socio-judiciaire de la Loi sur la protection de la jeunesse et de la Loi sur les jeunes contrevenants est peut-être une nécessité sociale incontournable. Mais de nouvelles mesures visant à rejoindre différemment les mêmes objectifs doivent être inventées, et il faut surtout que les parents souvent complètement désemparés et confus soient soutenus plutôt qu’accablés, comme c’est malheureusement bien souvent le cas aujourd’hui.
Sixièmement, il est nécessaire d’évaluer en profondeur l’ensemble des ressources offertes comme milieu de vie substitut, telles que les centres d’accueil, les familles d’accueil, dans le but de rajuster les services aux nouvelles réalités multiculturelles de Montréal.
Enfin, il est essentiel de garder à l’esprit que des personnes rendues très vulnérables par leur passé marqué par des situations de grande violence sont très sensibles à tout ce que véhicule de « violence » l’intervention sociale institutionnalisée et les services publics en général, surtout quand la personne qui est devant nous possède à peine quelques notions de français ou d’anglais. Redoubler de patience et d’empathie constitue le premier service à rendre à ces personnes, souvent lourdement éprouvées par la violence et les autres tracasseries de la vie.
vendredi 27 août 2010
VIOLENCE vs RÉFUGIÉS - 7e partie
LA VIOLENCE ET LES JEUNES RÉFUGIÉS À MONTRÉAL
Dans un texte remarquable portant sur « Les enfants de la guerre », Nayiri Tavlian trace un tableau saisissant de ce que signifie pour des jeunes de vivre et de survivre dans un contexte de violence généralisée :
Par un phénomène pervers d’identification aux méthodes utilisées par leurs agresseurs, certaines jeunes victimes de la violence sous toutes ses formes peuvent être amenées à considérer la violence comme un moyen normal et efficace de solutionner les conflits. Et les occasions de conflits ne manquent certes pas dans leur nouvelle société.
Dès leur arrivée, les jeunes réfugiés sont plongés dans une époque et une société où les jeunes valorisent la violence sous toutes ses formes sous l’influence, entre autres, de la télévision et de jeux vidéo. Par ailleurs, on remarque à Montréal une recrudescence des attitudes xénophobes ou racistes, sous l’impulsion de deux facteurs principaux : la récession économique et l’apparition de groupes organisés d’inspiration néo-nazie ou raciste, tels les « skin-heads » et le K.K.K.
Une troisième donnée vient compliquer la situation : les jeunes réfugiés du niveau secondaire entrent dans des polyvalentes en pleine crise où l’anonymat et une règlementation tatillonne sont peu adaptés à leur tempérament et à leurs habitudes culturelles. Comme conséquence, de nombreux jeunes réfugiés du niveau secondaire sont placés sur des voies d’évitement ou envoyés au secteur adulte. Surtout dans le cas des mineurs qui n’ont pas de famille immédiate au Canada, les risques de se retrouver dans les rues de la métropole en train de flâner sont réels et lourds de conséquences.
Ces dernières remarques peuvent laisser un goût alarmiste amer. Elles sont plutôt dictées par le sentiment de l’urgence de la situation : notre avenir à tous comme société tolérante et pacifique va se jouer autour de l’école et des centres de loisirs, là où se regroupent et malheureusement trop souvent s’affrontent les jeunes.
Pour terminer cette partie, je fais mienne la conclusion de Nayiri Tavlian, vu que je partage entièrement sa vision des choses :
Dans un texte remarquable portant sur « Les enfants de la guerre », Nayiri Tavlian trace un tableau saisissant de ce que signifie pour des jeunes de vivre et de survivre dans un contexte de violence généralisée :
« Les enfants qui grandissent dans un environnement de guerre et de violenceMadame Tavlian est d’origine libanaise et sait très bien de quoi elle parle, le Liban étant malheureusement devenu le symbole d’une guerre civile interminable, de massacres, d’attentats, etc.
développent des valeurs d’auto-défense physique et psychologique, qui leur
permettent de pouvoir survivre… »
Par un phénomène pervers d’identification aux méthodes utilisées par leurs agresseurs, certaines jeunes victimes de la violence sous toutes ses formes peuvent être amenées à considérer la violence comme un moyen normal et efficace de solutionner les conflits. Et les occasions de conflits ne manquent certes pas dans leur nouvelle société.
Dès leur arrivée, les jeunes réfugiés sont plongés dans une époque et une société où les jeunes valorisent la violence sous toutes ses formes sous l’influence, entre autres, de la télévision et de jeux vidéo. Par ailleurs, on remarque à Montréal une recrudescence des attitudes xénophobes ou racistes, sous l’impulsion de deux facteurs principaux : la récession économique et l’apparition de groupes organisés d’inspiration néo-nazie ou raciste, tels les « skin-heads » et le K.K.K.
Une troisième donnée vient compliquer la situation : les jeunes réfugiés du niveau secondaire entrent dans des polyvalentes en pleine crise où l’anonymat et une règlementation tatillonne sont peu adaptés à leur tempérament et à leurs habitudes culturelles. Comme conséquence, de nombreux jeunes réfugiés du niveau secondaire sont placés sur des voies d’évitement ou envoyés au secteur adulte. Surtout dans le cas des mineurs qui n’ont pas de famille immédiate au Canada, les risques de se retrouver dans les rues de la métropole en train de flâner sont réels et lourds de conséquences.
Ces dernières remarques peuvent laisser un goût alarmiste amer. Elles sont plutôt dictées par le sentiment de l’urgence de la situation : notre avenir à tous comme société tolérante et pacifique va se jouer autour de l’école et des centres de loisirs, là où se regroupent et malheureusement trop souvent s’affrontent les jeunes.
Pour terminer cette partie, je fais mienne la conclusion de Nayiri Tavlian, vu que je partage entièrement sa vision des choses :
« Les enfants de la guerre (et je me permets d’ajouter : les enfants de la
violence) sont exceptionnels à plusieurs titres. Ils ont pu survivre dans un
enfer dans lequel leurs aînés ont souvent succombé, et ont ainsi développé une
volonté hors du commun, dont ils se servent pour s’enfermer dans leur monde
imaginaire à eux. Si seulement nous pouvions contribuer à libérer ces volontés
emprisonnées. »
* à suivre *
jeudi 26 août 2010
VIOLENCE vs RÉFUGIÉS - 6e partie
Les conséquences psychologiques de cette situation ont été décrites dans diverses enquêtes, comme celles menées par le Comité inter-églises à Toronto et le Dr. Cécile Rousseau à Montréal.
Deuxième élément de déception et de tension : la vie dans le nouveau milieu n’est pas celle dont on avait rêvée; au contraire, elle est souvent très éprouvante. Cinq sortes de difficultés frappent les réfugiés à leur arrivée :
Dans ce contexte, les réfugiés ont en général le sentiment qu’ils ne sont pas les bienvenus dans le nouveau pays. Comme nous l’avons déjà souligné, ils n’étaient pas préparés à cela.
Aux difficultés qui se présentent à l’arrivée viennent s’ajouter d’autres problèmes qui étaient plus latents alors que toutes les énergies des individus et des familles étaient monopolisées par la lutte pour la survie. Sauf des exceptions qui confirment la règle, les conflits intra-familiaux explosent dans une deuxième étape de l’adaptation, sous forme de conflits conjugaux et de conflits entre les parents et leurs enfants. Ces conflits se transforment parfois en violence envers les femmes et envers les enfants.
Plusieurs réfugiés proviennent de sociétés où les rapports hommes-femmes sont de type traditionnel. Il en va de même pour les rapports parents-enfants qui sont axés sur l’autorité quasi despotique du père. La correction physique des enfants et parfois même de l’épouse peut venir en conflit avec nos valeurs modernes qui favorisent d’autres façons de régler les situations conflictuelles ou d’asseoir l’autorité parentale.
Cette inévitable adaptation culturelle à certaines valeurs du nouveau pays, exigée par les lois sociales (Code civil du Québec, Loi sur la protection de la jeunesse, etc.), trouve une réponse positive chez les femmes ou chez les enfants, mais elle affecte souvent négativement les hommes qui perçoivent la limitation de leur pouvoir d’époux et de père comme une dépossession de tous leurs moyens habituels, sans y trouver de succédané. Souvent, leur désarroi se manifeste de double façon : laisser-aller ou violence; parfois les deux attitudes s’alternent selon les humeurs du moment.
En somme, on constate que le stress et la violence subis dans le pays d’origine, combinés aux nombreuses difficultés rencontrées dans le nouveau milieu, rendent les réfugiés particulièrement vulnérables au plan de la résistance au stress; ils peuvent ainsi être amenés à poser, à leur tour, des gestes de violence tout à fait inacceptables. Dans ces cas, les victimes de violence perpétuent à leur tour les gestes de violence, selon un mécanisme psychologique bien connu par les spécialistes .
Deuxième élément de déception et de tension : la vie dans le nouveau milieu n’est pas celle dont on avait rêvée; au contraire, elle est souvent très éprouvante. Cinq sortes de difficultés frappent les réfugiés à leur arrivée :
-Des ressources matérielles très limitées;
-L’accès à l’emploi bloqué ou
très difficile;
-Le choc du déracinement, doublé par le choc culturel chez
ceux qui possèdent un bagage culturel très éloigné du nôtre;
-Les tensions
inter-ethniques et interraciales en recrudescence dans le monde occidental;
-La méfiance de la population envers les réfugiés, accentuée par la question
nationale.
Dans ce contexte, les réfugiés ont en général le sentiment qu’ils ne sont pas les bienvenus dans le nouveau pays. Comme nous l’avons déjà souligné, ils n’étaient pas préparés à cela.
Aux difficultés qui se présentent à l’arrivée viennent s’ajouter d’autres problèmes qui étaient plus latents alors que toutes les énergies des individus et des familles étaient monopolisées par la lutte pour la survie. Sauf des exceptions qui confirment la règle, les conflits intra-familiaux explosent dans une deuxième étape de l’adaptation, sous forme de conflits conjugaux et de conflits entre les parents et leurs enfants. Ces conflits se transforment parfois en violence envers les femmes et envers les enfants.
Plusieurs réfugiés proviennent de sociétés où les rapports hommes-femmes sont de type traditionnel. Il en va de même pour les rapports parents-enfants qui sont axés sur l’autorité quasi despotique du père. La correction physique des enfants et parfois même de l’épouse peut venir en conflit avec nos valeurs modernes qui favorisent d’autres façons de régler les situations conflictuelles ou d’asseoir l’autorité parentale.
Cette inévitable adaptation culturelle à certaines valeurs du nouveau pays, exigée par les lois sociales (Code civil du Québec, Loi sur la protection de la jeunesse, etc.), trouve une réponse positive chez les femmes ou chez les enfants, mais elle affecte souvent négativement les hommes qui perçoivent la limitation de leur pouvoir d’époux et de père comme une dépossession de tous leurs moyens habituels, sans y trouver de succédané. Souvent, leur désarroi se manifeste de double façon : laisser-aller ou violence; parfois les deux attitudes s’alternent selon les humeurs du moment.
En somme, on constate que le stress et la violence subis dans le pays d’origine, combinés aux nombreuses difficultés rencontrées dans le nouveau milieu, rendent les réfugiés particulièrement vulnérables au plan de la résistance au stress; ils peuvent ainsi être amenés à poser, à leur tour, des gestes de violence tout à fait inacceptables. Dans ces cas, les victimes de violence perpétuent à leur tour les gestes de violence, selon un mécanisme psychologique bien connu par les spécialistes .
* à suivre *
mercredi 25 août 2010
VIOLENCE vs RÉFUGIÉS - 5e partie
LES SÉQUELLES DE LA VIOLENCE DANS LE NOUVEAU PAYS
La grande majorité des réfugiés qui arrivent au Québec portent dans leur mémoire et parfois aussi dans leurs chairs les marques de la violence subie dans le pays d’origine.
Dans la phase initiale de la quête de sécurité et de liberté pour lui et pour sa famille, le réfugié concentre toutes ses énergies à la réalisation du projet. Malgré les difficultés et les souffrances, il se projette dans le futur et est poussé à idéaliser le pays vers lequel il se dirige, du moins quand cette terre de sécurité et de liberté est un pays moderne et relativement riche. Parmi les pays occidentaux le Canada et le Québec apparaissent, vus de l’extérieur, comme la terre bénie.
Cette image positive de notre pays trouve naturellement des fondements objectifs dans la réalité d’ici. Par contre, les attentes de départ, nourries et idéalisées, sont trop nombreuses et souvent irréalistes. Face aux premières difficultés dans le nouveau pays, le réfugié devient confus, déçu et parfois amer.
Comme il arrive souvent après un événement traumatisant, par exemple lors d’un accident d’auto, c’est seulement un jour ou deux plus tard que la peur se fera le plus sentir; sur le coup on peut se sentir très calme. Il en va de même pour certains réfugiés qui ont surmonté avec courage d’énormes difficultés dans leur pays et qui se montrent parfois peu résistants face aux difficultés moins graves dans le nouveau pays.
Tout récemment, une famille d’origine libanaise s’est fait expulser de façon brutale de son logement par un propriétaire intraitable. Autant monsieur que madame furent très bouleversés par cette mésaventure évidemment peu agréable. Mais ce qui m’a beaucoup frappé, c’est la réflexion suivante, exprimée par madame et approuvée par monsieur : « Ici, c’est pire qu’au Liban. Dans notre pays, on te tire dessus, on te tue, mais on ne te met pas dehors de ton logement de cette façon! »
Aux premières difficultés dans le nouveau pays, le réfugié risque donc de tomber de très haut. Sa décision peut se manifester sous forme de dépression ou d’agressivité à fleur de peau. Or, les difficultés et les tracasseries de toutes sortes ne manquent certes pas dans le nouveau pays. À leur arrivée, les personnes qui viennent au Canada comme demandeurs d’asile doivent passer par une enquête quasi judiciaire fort éprouvante. Cette étape suscite déjà beaucoup d’insécurité et constitue un mauvais point de départ dans la nouvelle vie. En plus d’être très stressant, le processus visant à établir le bien-fondé de la demande de refuge peut devenir très long et causer à ces personnes de restrictions importantes pendant plusieurs mois, voire même pendant plusieurs années, telles que l’absence d’allocations familiales ou de permis de travail, la séparation des familles, etc.
La grande majorité des réfugiés qui arrivent au Québec portent dans leur mémoire et parfois aussi dans leurs chairs les marques de la violence subie dans le pays d’origine.
Dans la phase initiale de la quête de sécurité et de liberté pour lui et pour sa famille, le réfugié concentre toutes ses énergies à la réalisation du projet. Malgré les difficultés et les souffrances, il se projette dans le futur et est poussé à idéaliser le pays vers lequel il se dirige, du moins quand cette terre de sécurité et de liberté est un pays moderne et relativement riche. Parmi les pays occidentaux le Canada et le Québec apparaissent, vus de l’extérieur, comme la terre bénie.
Cette image positive de notre pays trouve naturellement des fondements objectifs dans la réalité d’ici. Par contre, les attentes de départ, nourries et idéalisées, sont trop nombreuses et souvent irréalistes. Face aux premières difficultés dans le nouveau pays, le réfugié devient confus, déçu et parfois amer.
Comme il arrive souvent après un événement traumatisant, par exemple lors d’un accident d’auto, c’est seulement un jour ou deux plus tard que la peur se fera le plus sentir; sur le coup on peut se sentir très calme. Il en va de même pour certains réfugiés qui ont surmonté avec courage d’énormes difficultés dans leur pays et qui se montrent parfois peu résistants face aux difficultés moins graves dans le nouveau pays.
Tout récemment, une famille d’origine libanaise s’est fait expulser de façon brutale de son logement par un propriétaire intraitable. Autant monsieur que madame furent très bouleversés par cette mésaventure évidemment peu agréable. Mais ce qui m’a beaucoup frappé, c’est la réflexion suivante, exprimée par madame et approuvée par monsieur : « Ici, c’est pire qu’au Liban. Dans notre pays, on te tire dessus, on te tue, mais on ne te met pas dehors de ton logement de cette façon! »
Aux premières difficultés dans le nouveau pays, le réfugié risque donc de tomber de très haut. Sa décision peut se manifester sous forme de dépression ou d’agressivité à fleur de peau. Or, les difficultés et les tracasseries de toutes sortes ne manquent certes pas dans le nouveau pays. À leur arrivée, les personnes qui viennent au Canada comme demandeurs d’asile doivent passer par une enquête quasi judiciaire fort éprouvante. Cette étape suscite déjà beaucoup d’insécurité et constitue un mauvais point de départ dans la nouvelle vie. En plus d’être très stressant, le processus visant à établir le bien-fondé de la demande de refuge peut devenir très long et causer à ces personnes de restrictions importantes pendant plusieurs mois, voire même pendant plusieurs années, telles que l’absence d’allocations familiales ou de permis de travail, la séparation des familles, etc.
* à suivre *
mardi 24 août 2010
VIOLENCE vs RÉFUGIÉS - 4e partie
LES DIFFÉRENTES FORMES DE VIOLENCE SUBIES DANS LE PAYS D’ORIGINE
Certaines populations du globe sont victimes de calamités ou de désastres naturels (famines, ouragans, inondations, tremblements de terre, etc.) qui provoquent leur déplacement forcé. Il s’agit, bien sûr, de situations qui interpellent notre sens de la solidarité humaine. Mais ce n’est pas de ce type de réfugiés dont je désire parler ici.
Les victimes des nombreuses guerres qui affligent encore notre planète risquent de passer par toute la gamme de la violence dont les êtres humains seuls sont capables. Il y a la violence qui frappe de façon aveugle et massive, causant la destruction et la mort sur son passage et il y a les règlements de comptes féroces entre groupes rivaux en quête du pouvoir. Mais les guerres, surtout les guerres civiles, constituent aussi une occasion de dominer par la terreur, ou carrément d’éliminer, des couches entières de la population, sous prétexte de sécurité nationale.
En matière de réfugiés dans le monde, il existe une donnée fondamentale souvent passée sous silence ou oubliée : contrairement aux réfugiés qui arrivent chez nous, la très grande majorité des 15 millions de réfugiés « parqués » dans les pays du Tiers-Monde sont des enfants, des femmes et des vieillards. Ces personnes font face bien souvent à toutes les formes de violence, dont l’agression sexuelle répétée dans le cas des femmes.
Les régimes politiques dictatoriaux (de structure fasciste, communiste ou militaire) n’ont pas besoin de la guerre pour imposer un système répressif axé sur le contrôle autoritaire et l’utilisation de la force brutale contre les classes les plus progressistes du pays, surtout contre tout membre d’un groupe organisé pouvant constituer une menace directe ou indirecte pour le régime en place, comme les organisations syndicales. On assiste, dans ces derniers cas, à l’émergence de la violence érigée en système politique. Seules les personnes qui ont vécu sous de tels régimes peuvent comprendre le climat généralisé de terreur et de méfiance qui s’installe chez les gens.
Voici le témoignage d’une psychiatre uruguayenne qui a vécu directement ce régime de peur :
Parmi l’arsenal des moyens très sophistiqués visant le contrôle politique, la torture sous toutes ses formes est largement répandue. Amnistie Internationale trace chaque année la liste interminable des pays qui ne respectent pas les règles élémentaires de justice naturelle, violent les droits humains fondamentaux et pratiquent la torture sur des prisonniers politiques.
Un de mes collègues d’origine salvadorienne, psychologue de formation, a fait un stage dans une prison d’état du Salvador, il y a quelques années. À ce titre, il avait le droit de circuler aussi dans la section des prisonniers politiques qui était bien garnie. Il m’a assuré que le viol comme moyen de torture était couramment pratiqué, non seulement sur les femmes mais aussi sur les hommes, dans un contexte de dérision et dans le but de les casser.
Une autre technique largement utilisée pour briser la résistance des prisonniers politiques, c’est de torturer un enfant ou une femme pour obtenir l’aveu du père ou de l’époux. Il y a aussi le recours à des haut-parleurs pour amplifier les cris des victimes de torture et ainsi terroriser les autres prisonniers. Malheureusement, ces choses ne se passent pas exclusivement dans des films d’espionnage, mais dans la vraie vie et parfois pas très loin de chez nous.
Certaines populations du globe sont victimes de calamités ou de désastres naturels (famines, ouragans, inondations, tremblements de terre, etc.) qui provoquent leur déplacement forcé. Il s’agit, bien sûr, de situations qui interpellent notre sens de la solidarité humaine. Mais ce n’est pas de ce type de réfugiés dont je désire parler ici.
Les victimes des nombreuses guerres qui affligent encore notre planète risquent de passer par toute la gamme de la violence dont les êtres humains seuls sont capables. Il y a la violence qui frappe de façon aveugle et massive, causant la destruction et la mort sur son passage et il y a les règlements de comptes féroces entre groupes rivaux en quête du pouvoir. Mais les guerres, surtout les guerres civiles, constituent aussi une occasion de dominer par la terreur, ou carrément d’éliminer, des couches entières de la population, sous prétexte de sécurité nationale.
En matière de réfugiés dans le monde, il existe une donnée fondamentale souvent passée sous silence ou oubliée : contrairement aux réfugiés qui arrivent chez nous, la très grande majorité des 15 millions de réfugiés « parqués » dans les pays du Tiers-Monde sont des enfants, des femmes et des vieillards. Ces personnes font face bien souvent à toutes les formes de violence, dont l’agression sexuelle répétée dans le cas des femmes.
Les régimes politiques dictatoriaux (de structure fasciste, communiste ou militaire) n’ont pas besoin de la guerre pour imposer un système répressif axé sur le contrôle autoritaire et l’utilisation de la force brutale contre les classes les plus progressistes du pays, surtout contre tout membre d’un groupe organisé pouvant constituer une menace directe ou indirecte pour le régime en place, comme les organisations syndicales. On assiste, dans ces derniers cas, à l’émergence de la violence érigée en système politique. Seules les personnes qui ont vécu sous de tels régimes peuvent comprendre le climat généralisé de terreur et de méfiance qui s’installe chez les gens.
Voici le témoignage d’une psychiatre uruguayenne qui a vécu directement ce régime de peur :
« Les choses avaient vraiment changé. On ne pouvait plus se promener
tranquillement dans la ville. Il devenait dangereux de sortir sans papiers.
Déjà, nous regardions différemment nos voisins, toute personne de notre
connaissance (…) Le soupçon, la peur, la crainte de la dénonciation nous
envahissaient peu à peu. »
Parmi l’arsenal des moyens très sophistiqués visant le contrôle politique, la torture sous toutes ses formes est largement répandue. Amnistie Internationale trace chaque année la liste interminable des pays qui ne respectent pas les règles élémentaires de justice naturelle, violent les droits humains fondamentaux et pratiquent la torture sur des prisonniers politiques.
Un de mes collègues d’origine salvadorienne, psychologue de formation, a fait un stage dans une prison d’état du Salvador, il y a quelques années. À ce titre, il avait le droit de circuler aussi dans la section des prisonniers politiques qui était bien garnie. Il m’a assuré que le viol comme moyen de torture était couramment pratiqué, non seulement sur les femmes mais aussi sur les hommes, dans un contexte de dérision et dans le but de les casser.
Une autre technique largement utilisée pour briser la résistance des prisonniers politiques, c’est de torturer un enfant ou une femme pour obtenir l’aveu du père ou de l’époux. Il y a aussi le recours à des haut-parleurs pour amplifier les cris des victimes de torture et ainsi terroriser les autres prisonniers. Malheureusement, ces choses ne se passent pas exclusivement dans des films d’espionnage, mais dans la vraie vie et parfois pas très loin de chez nous.
* à suivre *
lundi 23 août 2010
VIOLENCE vs RÉFUGIÉS - 3e partie
LE RÉFUGIÉ : UN PRODUIT DE LA VIOLENCE ORGANISÉE
Le réfugié est avant tout une victime de la violence réelle ou potentielle.
On pourrait discourir longtemps sur les causes qui ont provoqué l’aberrant renversement de situation où les victimes de violence sont perçues parfois elles-mêmes comme un danger public, en d’autres mots comme des gens qui nous font…violence!
Pourtant, seul l’aveuglement pourrait nous faire banaliser la situation des réfugiés et faire oublier le fait fondamental que la grande majorité d’entre eux sont d’abord et avant tout des personnes qui ont fui un danger bien réel. Rarement, ils ont pu éviter pour eux-mêmes la violence physique ou morale, en se sauvant de façon préventive. Mais, même dans ces cas, la violence a frappé durement leur famille immédiate, leurs amis, etc. La plupart du temps, cette violence était organisée en système puissant, laissant peu de possibilités de défense : ils ont dû faire face à la « persécution politique » et parfois même à la « torture ». Ces derniers termes évoquent une violence qui perdure et qui s’acharne : la « persécution » consiste en un « traitement injuste et cruel infligé avec acharnement », alors que la « torture » est une « peine grave, (un) supplice pouvant entraîner la mort ». Il faudrait ajouter que les tortionnaires d’aujourd’hui ont appris des techniques hallucinantes pour essayer d’atteindre et d’anéantir l’esprit par les souffrances du corps; même la science leur vient puissamment en aide!
Au cours de ses vingt années d’intervention sociale auprès des nouveaux arrivants dont une grande partie était des réfugiés, Giovanni Fiorino a souvent été l’ « oreille compatissante » pour de nombreux individus ou familles ayant subi des violences à peine croyables pour quelqu’un qui vit dans un pays démocratique comme le nôtre.
Qui, au Québec, n’a pas entendu parler de Carmen Quintana, cette jeune Chilienne qui avait été aspergée d’essence et transformée en torche humaine par des militaires haineux ? Grâce, entre autres, à l’aide des Québécois, cette jeune fille a survécu à ses blessures.
Le réfugié est avant tout une victime de la violence réelle ou potentielle.
On pourrait discourir longtemps sur les causes qui ont provoqué l’aberrant renversement de situation où les victimes de violence sont perçues parfois elles-mêmes comme un danger public, en d’autres mots comme des gens qui nous font…violence!
Pourtant, seul l’aveuglement pourrait nous faire banaliser la situation des réfugiés et faire oublier le fait fondamental que la grande majorité d’entre eux sont d’abord et avant tout des personnes qui ont fui un danger bien réel. Rarement, ils ont pu éviter pour eux-mêmes la violence physique ou morale, en se sauvant de façon préventive. Mais, même dans ces cas, la violence a frappé durement leur famille immédiate, leurs amis, etc. La plupart du temps, cette violence était organisée en système puissant, laissant peu de possibilités de défense : ils ont dû faire face à la « persécution politique » et parfois même à la « torture ». Ces derniers termes évoquent une violence qui perdure et qui s’acharne : la « persécution » consiste en un « traitement injuste et cruel infligé avec acharnement », alors que la « torture » est une « peine grave, (un) supplice pouvant entraîner la mort ». Il faudrait ajouter que les tortionnaires d’aujourd’hui ont appris des techniques hallucinantes pour essayer d’atteindre et d’anéantir l’esprit par les souffrances du corps; même la science leur vient puissamment en aide!
Au cours de ses vingt années d’intervention sociale auprès des nouveaux arrivants dont une grande partie était des réfugiés, Giovanni Fiorino a souvent été l’ « oreille compatissante » pour de nombreux individus ou familles ayant subi des violences à peine croyables pour quelqu’un qui vit dans un pays démocratique comme le nôtre.
Qui, au Québec, n’a pas entendu parler de Carmen Quintana, cette jeune Chilienne qui avait été aspergée d’essence et transformée en torche humaine par des militaires haineux ? Grâce, entre autres, à l’aide des Québécois, cette jeune fille a survécu à ses blessures.
* à suivre *
samedi 21 août 2010
VIOLENCE vs RÉFUGIÉS - 2e partie
…ET LES RÉFUGIÉS
« Réfugiés », voilà un autre mot qui est devenu familier à la plupart des Québécois, grâce surtout aux médias tant électroniques qu’écrits. Mais il s’agit d’une autre réalité qui ne se laisse pas facilement déchiffrer par le commun des mortels. On entend souvent parler de vrais et de faux réfugiés…
Tantôt on nous présente les réfugiés comme des victimes innocentes, tantôt comme des abuseurs de notre grande générosité…tantôt comme des personnes valeureuses et héroïques, tantôt comme des êtres dépendants, gâtés, et fraudeurs. Il y a quelques années, le sort des « réfugiés de la mer » du sud-est asiatique avait suscité au Québec un mouvement massif de sympathie et de solidarité; aujourd’hui se dessine de plus en plus un certain courant d’opinion publique qui assimile allègrement la venue des réfugiés chez nous à une espèce de fléau dont il faudrait se protéger à tout prix.
Pour nous y retrouver, contentons-nous pour l’instant du sens général du mot « réfugié ».
Il y a donc deux sortes de réfugiés : ceux qui sont victimes de désastres naturels ou de guerres généralisées et ceux qui sont victimes de persécution personnelle. La Convention des Nations Unies sur les réfugiés vise ces derniers, mais dans les faits le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés aide aussi les autres groupes de réfugiés. Le Canada a pris des engagements légaux envers les réfugiés qui répondent à la définition de la Convention de Genève, laquelle statue que le réfugié est
« Réfugiés », voilà un autre mot qui est devenu familier à la plupart des Québécois, grâce surtout aux médias tant électroniques qu’écrits. Mais il s’agit d’une autre réalité qui ne se laisse pas facilement déchiffrer par le commun des mortels. On entend souvent parler de vrais et de faux réfugiés…
Tantôt on nous présente les réfugiés comme des victimes innocentes, tantôt comme des abuseurs de notre grande générosité…tantôt comme des personnes valeureuses et héroïques, tantôt comme des êtres dépendants, gâtés, et fraudeurs. Il y a quelques années, le sort des « réfugiés de la mer » du sud-est asiatique avait suscité au Québec un mouvement massif de sympathie et de solidarité; aujourd’hui se dessine de plus en plus un certain courant d’opinion publique qui assimile allègrement la venue des réfugiés chez nous à une espèce de fléau dont il faudrait se protéger à tout prix.
Pour nous y retrouver, contentons-nous pour l’instant du sens général du mot « réfugié ».
« Réfugié : se dit d’une personne qui a dû fuir le lieu qu’elle habitait afin
d’échapper à un danger (guerre, persécution politique ou religieuse, etc.). »
Il y a donc deux sortes de réfugiés : ceux qui sont victimes de désastres naturels ou de guerres généralisées et ceux qui sont victimes de persécution personnelle. La Convention des Nations Unies sur les réfugiés vise ces derniers, mais dans les faits le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés aide aussi les autres groupes de réfugiés. Le Canada a pris des engagements légaux envers les réfugiés qui répondent à la définition de la Convention de Genève, laquelle statue que le réfugié est
« (une personne) qui craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race,* à suivre *
de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe
social ou de ses opinions politiques (…) ne peut ou, du fait de cette crainte,
ne veut se réclamer de la protection de ce pays ».
jeudi 19 août 2010
VIOLENCE vs RÉFUGIÉS - 1e partie
VIOLENCE
Le mot « violence » est partout dans mes écrits.
Dans le cadre du présent texte, mes préoccupations se situent à un niveau proche de mon expérience professionnelle auprès des réfugiés. Il convient cependant de rappeler d’abord le sens général du mot « violence ».
Ce mot évoque des notions comme : attaque, virulence, démesure, brutalité, contrainte, abus, hostilité, agressivité, guerre…L’idée contraire est exprimée par les mots : douceur, mesure, calme, paix. De fait, les auteurs s’entendent pour dire que si tout homme possède un « instinct inné d’agressivité », cette agressivité peut dégénérer en violence lorsqu’il y a débordement d’émotions, de passions. Face à cette violence, nous sommes amenés à l’une ou l’autre des réactions suivantes : la fuite ou la contre-attaque.
Les expressions de la violence prennent la forme d’agressions psychologiques, physiques et sexuelles. La violence intrafamiliale et celle contre les femmes en général sont le plus souvent étudiées, alors qu’il n’existe que peu de littérature sur la violence subie par les réfugiés.
* à suivre *
Le mot « violence » est partout dans mes écrits.
« ce vocable inonde notre quotidien, on en parle constamment, bien secondé enMais la réalité évoquée par ce terme n’est pas facile à cerner et l’analyse conceptuelle et théorique présente des embûches de taille.
cela (…) par les médias. Ceux-ci, bien équipés, sans cesse sur le qui-vive,
contribuent à rendre le phénomène omniprésent, trop souvent même menaçant ».
Dans le cadre du présent texte, mes préoccupations se situent à un niveau proche de mon expérience professionnelle auprès des réfugiés. Il convient cependant de rappeler d’abord le sens général du mot « violence ».
Ce mot évoque des notions comme : attaque, virulence, démesure, brutalité, contrainte, abus, hostilité, agressivité, guerre…L’idée contraire est exprimée par les mots : douceur, mesure, calme, paix. De fait, les auteurs s’entendent pour dire que si tout homme possède un « instinct inné d’agressivité », cette agressivité peut dégénérer en violence lorsqu’il y a débordement d’émotions, de passions. Face à cette violence, nous sommes amenés à l’une ou l’autre des réactions suivantes : la fuite ou la contre-attaque.
Les expressions de la violence prennent la forme d’agressions psychologiques, physiques et sexuelles. La violence intrafamiliale et celle contre les femmes en général sont le plus souvent étudiées, alors qu’il n’existe que peu de littérature sur la violence subie par les réfugiés.
* à suivre *
mardi 17 août 2010
FEMME VIOLENTÉE (VIOLENCE CONJUGALE) - 8e partie
CONCLUSION
Pour Marie –José Parent
La relative tolérance des femmes à l’égard de la violence de leur conjoint ne devrait pas signifier pour nous qu’elles soient sans pouvoir. Le rapport de force qui prévaut lors d’épisodes violents nous démontre visiblement un déséquilibre où la femme est battue, meurtrie et momentanément désavantagée. Il est probable que certains intervenants puissent être choqués que je souligne le caractère temporellement limité qu’emprunte la position de faiblesse à laquelle les femmes sont contraintes par la force de leur partenaire violent.
Il ne s’agit pas de minimiser les impacts destructeurs qu’engendre toute cette violence, mais bien de souligner l’extraordinaire vigueur des femmes à tenter coup après coup l’insurmontable mission de changer leur compagnon. Néanmoins, j’ai constaté qu’une intervention qui concentre ses efforts sur leur position de femmes dominées produisait l’effet contraire au but recherché produisait l’effet contraire au but recherché et ne faisait qu’entretenir cette position et favoriser la dépendance. Si la femme violentée doit composer avec les positions désavantageuses qui peuvent découler de l’appartenance à un sexe ou à une classe sociale, force nous est de nous rendre à l’évidence qu’elle rejoint alors en très grand nombre d’autres femmes. À cet égard, l’inéquité salariale, le niveau de pauvreté des familles monoparentales et les emplois précaires constituent des facteurs socio-économiques qui ont une influence sur son processus de changement.
Aussi, sans exclure l’importance de ces facteurs, l’intervention d’aide directe auprès des femmes violentées peut s’avérer un terrain fertile au changement individuel et collectif. Mais sans la reconnaissance de leurs pouvoirs, où réside une grande part de dignité, les femmes violentées ne trouvent que des sauveurs qui perpétuent dans leur rapport avec elles ce qu’elles ont-elles-mêmes tenté de faire auprès de leur partenaire : le changer!
« Les solutions reflètent souvent la colère des personnes militant pour la cause
» (MacLeod). »
Pour Marie –José Parent
La relative tolérance des femmes à l’égard de la violence de leur conjoint ne devrait pas signifier pour nous qu’elles soient sans pouvoir. Le rapport de force qui prévaut lors d’épisodes violents nous démontre visiblement un déséquilibre où la femme est battue, meurtrie et momentanément désavantagée. Il est probable que certains intervenants puissent être choqués que je souligne le caractère temporellement limité qu’emprunte la position de faiblesse à laquelle les femmes sont contraintes par la force de leur partenaire violent.
Il ne s’agit pas de minimiser les impacts destructeurs qu’engendre toute cette violence, mais bien de souligner l’extraordinaire vigueur des femmes à tenter coup après coup l’insurmontable mission de changer leur compagnon. Néanmoins, j’ai constaté qu’une intervention qui concentre ses efforts sur leur position de femmes dominées produisait l’effet contraire au but recherché produisait l’effet contraire au but recherché et ne faisait qu’entretenir cette position et favoriser la dépendance. Si la femme violentée doit composer avec les positions désavantageuses qui peuvent découler de l’appartenance à un sexe ou à une classe sociale, force nous est de nous rendre à l’évidence qu’elle rejoint alors en très grand nombre d’autres femmes. À cet égard, l’inéquité salariale, le niveau de pauvreté des familles monoparentales et les emplois précaires constituent des facteurs socio-économiques qui ont une influence sur son processus de changement.
Aussi, sans exclure l’importance de ces facteurs, l’intervention d’aide directe auprès des femmes violentées peut s’avérer un terrain fertile au changement individuel et collectif. Mais sans la reconnaissance de leurs pouvoirs, où réside une grande part de dignité, les femmes violentées ne trouvent que des sauveurs qui perpétuent dans leur rapport avec elles ce qu’elles ont-elles-mêmes tenté de faire auprès de leur partenaire : le changer!
lundi 16 août 2010
FEMME VIOLENTÉE (VIOLENCE CONJUGALE) - 7e partie
Le changement des attitudes
Toutes les attitudes relatives à la dépendance affective, la dévalorisation de soi, les sentiments d’omnipotence dans la gestion des désirs et besoins de l’autre contribuent à maintenir la femme dans une manière d’être en relation qui devient intensément frustrante et blessante. C’est bien souvent le degré de frustrations rendu intolérable qui génère la motivation au changement, tout autant sinon davantage que la nature du geste violent.
Le processus de changement de ces attitudes est long et se compose d’étapes où les femmes peuvent ressentir un regain d’énergie et de vigueur, suivies d’impressions de recul, de stagnation ou de douloureuses prises de conscience : perte des illusions, sentiment d’échec, d’insécurité affective et matérielle. Si, comme le soulignait Ginette Larouche :
Mais la continuité du soutien thérapeutique individuel et de groupe doit être disponible pour ces femmes bien au-delà de l’étape de crise.
Ce n’est pas parce qu’une femme retourne ou continue de vivre avec l’homme qui la violente qu’il faille conclure qu’il n’y a pas de changement. Inversement, ce n’est pas forcément parce qu’une femme battue quitte son conjoint qu’il y a un changement conséquent. En effet, on a parfois constaté que la violence peut resurgir, même après une rupture. Outre les menaces ou le harcèlement éventuels de l’ex-conjoint, la violence peut se manifester chez les enfants ou les adolescents, chez la femme elle-même à leur endroit ou de la part du nouveau partenaire. Même après une rupture, elles peuvent ressentir des états de tension et d’anxiété importants venant s’ajoutant à des difficultés d’adaptation. Chénard et al. Soulignaient dans le cadre de leur recherche que :
Sans ses expériences concrètes qui viennent renforcer l’estime de soi et l’épanouissement de l’intégrité et de la créativité, le changement ne peut se réaliser et sera même pressenti aussi insupportable sinon davantage que le statu quo, voire inutilement pénible!
* à suivre *
Toutes les attitudes relatives à la dépendance affective, la dévalorisation de soi, les sentiments d’omnipotence dans la gestion des désirs et besoins de l’autre contribuent à maintenir la femme dans une manière d’être en relation qui devient intensément frustrante et blessante. C’est bien souvent le degré de frustrations rendu intolérable qui génère la motivation au changement, tout autant sinon davantage que la nature du geste violent.
Le processus de changement de ces attitudes est long et se compose d’étapes où les femmes peuvent ressentir un regain d’énergie et de vigueur, suivies d’impressions de recul, de stagnation ou de douloureuses prises de conscience : perte des illusions, sentiment d’échec, d’insécurité affective et matérielle. Si, comme le soulignait Ginette Larouche :
« La mobilisation occasionnée par la situation de crise peut permettre à la
cliente d’amorcer des changements importants qui auraient nécessité, en d’autres
temps, une longue démarche. Il faut donc utiliser cette énergie pour mobiliser
la victime et l’inciter à agir."
Mais la continuité du soutien thérapeutique individuel et de groupe doit être disponible pour ces femmes bien au-delà de l’étape de crise.
Ce n’est pas parce qu’une femme retourne ou continue de vivre avec l’homme qui la violente qu’il faille conclure qu’il n’y a pas de changement. Inversement, ce n’est pas forcément parce qu’une femme battue quitte son conjoint qu’il y a un changement conséquent. En effet, on a parfois constaté que la violence peut resurgir, même après une rupture. Outre les menaces ou le harcèlement éventuels de l’ex-conjoint, la violence peut se manifester chez les enfants ou les adolescents, chez la femme elle-même à leur endroit ou de la part du nouveau partenaire. Même après une rupture, elles peuvent ressentir des états de tension et d’anxiété importants venant s’ajoutant à des difficultés d’adaptation. Chénard et al. Soulignaient dans le cadre de leur recherche que :
« (…) la peur des représailles, la désorganisation matérielle et affectiveLes plus pénibles étapes du changement ne peuvent s’assumer de façon significativement positive si la femme peut en même temps expérimenter concrètement le développement de ses potentialités affectives, sociales, professionnelles ou financières. En d’autres termes c’est ce que d’aucuns appellent la réappropriation du pouvoir vers soi, en soi et non plus celui qui se centre vers le contrôle du comportement de l’autre.
s’ajoutent aux problèmes déjà vécus par ces femmes et peuvent constituer en soi
des sources supplémentaires de stress et d’anxiété affectant notamment leurs
habitudes de vie. »
Sans ses expériences concrètes qui viennent renforcer l’estime de soi et l’épanouissement de l’intégrité et de la créativité, le changement ne peut se réaliser et sera même pressenti aussi insupportable sinon davantage que le statu quo, voire inutilement pénible!
* à suivre *
vendredi 13 août 2010
FEMME VIOLENTÉE (VIOLENCE CONJUGALE) - 6e partie
Si l’on considère la femme violentée qui retourne comme le chaperon rouge qui s’en va se jeter encore dans la gueule du loup, le risque de sombrer nous-mêmes dans un état d’impuissante détresse s’accroît et c’est ce dont elle n’a pas besoin. Il est cependant bien légitime d’avoir peur pour elle, et nous sommes parfois effleurés par la peur de la perdre! Après lui avoir fourni toutes les informations nécessaires, notre inquiétude peut lui être communiquée en espérant que notre préoccupation pour sa sécurité saura aiguiser la conscience des risques qu’elle peut encourir. Ensuite, que faire d’autre que d’accepter ce sourire parfois presque condescendant qu’elle nous retourne en guise de réponse : « Non, ne t’inquiète pas pour moi… » Elle a tout fait l’air de savoir des choses qu’on ne sait pas, elle à l’air d’avoir oublié tout à coup le motif pour lequel elle est venue nous consulter. On dirait qu’elle a laissé à la maison un ouvrage qu’elle est brusquement empressée de terminer!
C’est pourquoi j’ai souvent fait la constatation que pour aider efficacement une femme violentée, il faut surtout s’intéresser à son entourage : ses pouvoirs réels ou idéalisés, ses projets, ses relations sociales, son travail, mais aussi au sens que prend pour elle la relation avec son partenaire. Étonnamment, les femmes violentées minimisent souvent leurs pouvoirs réels pour les substituer à l’idéalisation d’un pouvoir magique : celui de changer leur partenaire et de le rendre, par la force de leur amour, désintéressé, attentif et sincère, un homme plus doux et moins contrôlant.
En effet, les femmes violentées surestiment fréquemment leur capacité à modifier le comportement du partenaire et à agir en fonction de la réaction qu’elles espèrent susciter (pouvoir magique). Simultanément, elles éprouvent de grandes difficultés à prendre des décisions pour elles-mêmes et font souvent une estimation négative de leurs capacités à agir pour leur propre compte (pouvoirs réels). Cette attitude vient de façon paradoxale, mais combien complémentaire, confirmer la perception de l’homme qui croit que sa femme a le pouvoir de le rendre violent.
* à suivre *
C’est pourquoi j’ai souvent fait la constatation que pour aider efficacement une femme violentée, il faut surtout s’intéresser à son entourage : ses pouvoirs réels ou idéalisés, ses projets, ses relations sociales, son travail, mais aussi au sens que prend pour elle la relation avec son partenaire. Étonnamment, les femmes violentées minimisent souvent leurs pouvoirs réels pour les substituer à l’idéalisation d’un pouvoir magique : celui de changer leur partenaire et de le rendre, par la force de leur amour, désintéressé, attentif et sincère, un homme plus doux et moins contrôlant.
En effet, les femmes violentées surestiment fréquemment leur capacité à modifier le comportement du partenaire et à agir en fonction de la réaction qu’elles espèrent susciter (pouvoir magique). Simultanément, elles éprouvent de grandes difficultés à prendre des décisions pour elles-mêmes et font souvent une estimation négative de leurs capacités à agir pour leur propre compte (pouvoirs réels). Cette attitude vient de façon paradoxale, mais combien complémentaire, confirmer la perception de l’homme qui croit que sa femme a le pouvoir de le rendre violent.
* à suivre *
jeudi 12 août 2010
FEMME VIOLENTÉE (VIOLENCE CONJUGALE) - 5e partie
Le pouvoir des femmes violentées
Une femme ayant subi de la violence conjugale reste toujours une femme. Néanmoins, il nous arrive souvent de l’oublier lorsque dans nos CLSC, nos maisons d’hébergement, nos postes de police ou nos urgences d’hôpitaux, elle arrive tremblante, fébrile et blessée. Et c’est fréquemment à cette étape de l’invention que nous glissons de l’empathique sollicitude vers la surprotection. Des femmes violentées nous disent régulièrement qu’une des plus importantes vexations lors des épisodes violents qu’elles ont traversés fut de se sentir comme des petites filles apeurées devant leur partenaire…Et nous l’accueillons souvent comme un petit chaperon rouge qui se serait dégagé à temps des dents du grand méchant loup!
Bien qu’il demeure essentiel et inaliénable de leur prodiguer les soins et toute l’attention relatifs à leur état, nous ne devons jamais outrepasser les limites de leur dignité. En d’autres termes, aborder une femme violentée comme si elle était une enfant sans pouvoir constitue l’erreur la plus fondamentale et la plus fréquente.
Pourtant, certaines femmes semblent particulièrement conditionnées à ce rôle de petit chaperon rouge. Ce sont celles qu’on dit les plus victimisées, celles dont on croirait à première vue qu’elles n’ont aucun pouvoir. Alors que ce sont justement elles qui souvent en ont le plus…sur les intervenants! Car leur profond état de détresse psychologique et leur isolement social leur font trouver un sauveur.
Si nous refusons de remplir ce rôle avec elles, nous constaterons inévitablement toute la violence et la rage que peuvent avoir retenues les femmes qui furent longtemps et souvent poussées! Ce sont ces femmes qui, au grand désarroi des policiers, vont déverser sur eux toute leur colère, au moment où ces derniers décident de procéder à l’arrestation du conjoint. Ces réactions peuvent nous suggérer l’hypothèse voulant que l’autorité policière puisse représenter, pour ces femmes, une « menace » qui viendrait perturber le rapport de dépendance qui s’est établi entre elles et leur conjoint. Le facteur de dépendance économique peut certes venir influencer de telles réactions, mais les enjeux en présence sont beaucoup plus complexes pour qu’on les réduise à cette seule explication.
Mais nombreuses sont les femmes violentées qui rebutent à se reconnaître face à elles-mêmes ou aux intervenants en tant que victimes de l’homme qu’elles ont choisi pour compagnon. Cette attitude ne signifie pas nécessairement qu’elles dénient la violence, mais qu’elles exercent, directement ou indirectement sur lui. Elles cherchent principalement à se voir reconnues selon leur valeur et leurs potentialités. Une intervention à caractère « protectionniste » à leur égard ne peut que venir renforcer une position de victimisation.
* à suivre *
Une femme ayant subi de la violence conjugale reste toujours une femme. Néanmoins, il nous arrive souvent de l’oublier lorsque dans nos CLSC, nos maisons d’hébergement, nos postes de police ou nos urgences d’hôpitaux, elle arrive tremblante, fébrile et blessée. Et c’est fréquemment à cette étape de l’invention que nous glissons de l’empathique sollicitude vers la surprotection. Des femmes violentées nous disent régulièrement qu’une des plus importantes vexations lors des épisodes violents qu’elles ont traversés fut de se sentir comme des petites filles apeurées devant leur partenaire…Et nous l’accueillons souvent comme un petit chaperon rouge qui se serait dégagé à temps des dents du grand méchant loup!
Bien qu’il demeure essentiel et inaliénable de leur prodiguer les soins et toute l’attention relatifs à leur état, nous ne devons jamais outrepasser les limites de leur dignité. En d’autres termes, aborder une femme violentée comme si elle était une enfant sans pouvoir constitue l’erreur la plus fondamentale et la plus fréquente.
Pourtant, certaines femmes semblent particulièrement conditionnées à ce rôle de petit chaperon rouge. Ce sont celles qu’on dit les plus victimisées, celles dont on croirait à première vue qu’elles n’ont aucun pouvoir. Alors que ce sont justement elles qui souvent en ont le plus…sur les intervenants! Car leur profond état de détresse psychologique et leur isolement social leur font trouver un sauveur.
Si nous refusons de remplir ce rôle avec elles, nous constaterons inévitablement toute la violence et la rage que peuvent avoir retenues les femmes qui furent longtemps et souvent poussées! Ce sont ces femmes qui, au grand désarroi des policiers, vont déverser sur eux toute leur colère, au moment où ces derniers décident de procéder à l’arrestation du conjoint. Ces réactions peuvent nous suggérer l’hypothèse voulant que l’autorité policière puisse représenter, pour ces femmes, une « menace » qui viendrait perturber le rapport de dépendance qui s’est établi entre elles et leur conjoint. Le facteur de dépendance économique peut certes venir influencer de telles réactions, mais les enjeux en présence sont beaucoup plus complexes pour qu’on les réduise à cette seule explication.
Mais nombreuses sont les femmes violentées qui rebutent à se reconnaître face à elles-mêmes ou aux intervenants en tant que victimes de l’homme qu’elles ont choisi pour compagnon. Cette attitude ne signifie pas nécessairement qu’elles dénient la violence, mais qu’elles exercent, directement ou indirectement sur lui. Elles cherchent principalement à se voir reconnues selon leur valeur et leurs potentialités. Une intervention à caractère « protectionniste » à leur égard ne peut que venir renforcer une position de victimisation.
* à suivre *
mercredi 11 août 2010
FEMME VIOLENTÉE (VIOLENCE CONJUGALE) - 4e partie
Dans les rapports de couple d’où surgissent des agirs violents, la question du pouvoir devient diffuse, les territoires respectifs sont flous et, en conséquence, les positions se fixent jusqu’au durcissement dans la dépendance réciproque. Après l’éclatement de la violence, les femmes peuvent simuler parfois, par manque de moyens, une certaine soumission. En effet, elles feront montre d’abdiquer afin de ménager l’orageuse susceptibilité de leur conjoint. Elles renonceront temporairement à l’expression directe de leur colère, de leur peur ou de leur peine.
Il ne faut jamais oublier, quand on intervient auprès des femmes violentées, que leur position de soumission ou de faiblesse constitue dans la très grande majorité des cas une réaction défensive qui force le maintien d’une cohésion.
Une réaction défensive qu’adoptent de nombreuses femmes violentées consiste à développer des comportements d’indifférence à l’endroit de la violence de l’autre afin de ne pas se montrer perdantes. Certaines diront : « Je ne veux pas qu’il se rende compte qu’il me fait mal, je veux montrer que je suis aussi forte que lui, qu’il ne gagnera pas ». Ces comportements engendrent un triple effet négatif : Ils contribuent à couper la femme de son expérience émotionnelle réelle, induisent chez le conjoint violent la perception que la femme est insensible à ses agirs et alimentent le jeu de pouvoir.
Ainsi, pour aider une femme qui a vécu longtemps de mauvais traitements, il est primordial de la soutenir dans la libération de ses mécanismes défensifs. Ces mécanismes se sont imposés, non seulement par la nature des circonstances violentes mais comme une réponse qui a pu servir à la femme pour ne plus sentir sa souffrance et aussi pour maintenir intactes ses idéalisations (couple harmonieux, famille unie). Parfois, ces mécanismes de défense peuvent la conduire à retourner sa colère et son ressentiment contre elle-même ou contre ses enfants et parfois contre le partenaire, si aucun changement n’intervient.
L’affection que les partenaires pouvaient encore se témoigner ne se manifeste déjà plus. La femme tente de préserver une position qui sauvegarde sa vision du conflit et son dernier espoir pour qu’enfin son partenaire comprenne qu’il doit changer. Certains psychiatres ont appelé ce phénomène, chez certaines victimes, comme le « syndrome d’accommodation » (Talbot). C’est fréquemment à ce stade que la violence physique du partenaire est la plus intense et la plus grave. Fort heureusement, la majorité des femmes violentées auprès desquelles nous travaillons atteignent de plus en plus rarement ce stade.
* à suivre *
Il ne faut jamais oublier, quand on intervient auprès des femmes violentées, que leur position de soumission ou de faiblesse constitue dans la très grande majorité des cas une réaction défensive qui force le maintien d’une cohésion.
Une réaction défensive qu’adoptent de nombreuses femmes violentées consiste à développer des comportements d’indifférence à l’endroit de la violence de l’autre afin de ne pas se montrer perdantes. Certaines diront : « Je ne veux pas qu’il se rende compte qu’il me fait mal, je veux montrer que je suis aussi forte que lui, qu’il ne gagnera pas ». Ces comportements engendrent un triple effet négatif : Ils contribuent à couper la femme de son expérience émotionnelle réelle, induisent chez le conjoint violent la perception que la femme est insensible à ses agirs et alimentent le jeu de pouvoir.
Ainsi, pour aider une femme qui a vécu longtemps de mauvais traitements, il est primordial de la soutenir dans la libération de ses mécanismes défensifs. Ces mécanismes se sont imposés, non seulement par la nature des circonstances violentes mais comme une réponse qui a pu servir à la femme pour ne plus sentir sa souffrance et aussi pour maintenir intactes ses idéalisations (couple harmonieux, famille unie). Parfois, ces mécanismes de défense peuvent la conduire à retourner sa colère et son ressentiment contre elle-même ou contre ses enfants et parfois contre le partenaire, si aucun changement n’intervient.
L’affection que les partenaires pouvaient encore se témoigner ne se manifeste déjà plus. La femme tente de préserver une position qui sauvegarde sa vision du conflit et son dernier espoir pour qu’enfin son partenaire comprenne qu’il doit changer. Certains psychiatres ont appelé ce phénomène, chez certaines victimes, comme le « syndrome d’accommodation » (Talbot). C’est fréquemment à ce stade que la violence physique du partenaire est la plus intense et la plus grave. Fort heureusement, la majorité des femmes violentées auprès desquelles nous travaillons atteignent de plus en plus rarement ce stade.
* à suivre *
mardi 10 août 2010
FEMME VIOLENTÉE (VIOLENCE CONJUGALE) - 3e partie
Si l’amour fait défaut, il y a toujours le pouvoir
Chacun conviendra que l’amour comporte, dans son ferment et sa finalité, une capacité de don et d’abandon de soi-même. Sans ces qualités d’ouverture et de généreuse disponibilité à l’autre (enfant, ami ou amie, amoureux ou amoureuse), l’amour ne peut évoluer. Or, comme l’indique cet état de disponibilité qui attribue, avec notre plein consentement, tant de pouvoir à la personne aimée.
En effet, le rapport amoureux nous incite à abandonner certaines défenses, à accepter nos états de vulnérabilité et de fragilité par la confiance à l’autre. Par le fait même, nous acceptons de nous laisser imprégner par l’influence accrue qu’exerce sur nous la personne aimée. C’est ainsi que l’autonomie affective de chacun des partenaires peut être rudement mise à l’épreuve. Alberoni note encore que l’état amoureux naissant est similaire à un mouvement révolutionnaire par l’énergie, la vitalité et le pouvoir de changement qui s’expérimentent par chacun des membres du couple comme exceptionnellement intenses. Si l’un des partenaires ou les deux vivent respectivement des manques importants sur les plans affectif, social ou économique, il ou elle peut attribuer à l’autre un pouvoir tout aussi important qui viendrait combler ses manques.
Ainsi, plusieurs femmes violentées disent avoir vécu dans les prémisses de leur rapport amoureux la position de la femme adulée et adorée. « Il m’a mise sur un piédestal. » D’ailleurs, bien des femmes, violentées ou non, n’abandonnent pas si facilement leurs rêves des petites filles ; elles ont la perception d’être révélées à elles-mêmes par le prince si longtemps attendu. Et si de surcroît, le prince se fait humble pour adorer sa bien aimée, elle en sera d’autant plus comblée. Christiane Olivier écrit à ce sujet que :
Chez les couples où se manifeste la violence, cette épreuve de réalité n’est pas assumée. Chacun cherche, sur un mode différent, à trouver l’état naissant initial à leur union. L’homme utilise la violence, la femme tentera d’abord toutes les stratégies pour lui plaire.
Elles nous diront fréquemment : « Je voudrais qu’il soit comme avant, il état si doux, si gentil, si prévenant ». Un homme de rêve, un homme idéal…un homme impossible! Mais l’homme réel est violent et après sa crise violente, il cherche à redevenir l’homme « idéal », à conquérir celle qu’il a blessée. Qui parle de conquête ou de reconquête parle de pouvoir.
* à suivre *
Chacun conviendra que l’amour comporte, dans son ferment et sa finalité, une capacité de don et d’abandon de soi-même. Sans ces qualités d’ouverture et de généreuse disponibilité à l’autre (enfant, ami ou amie, amoureux ou amoureuse), l’amour ne peut évoluer. Or, comme l’indique cet état de disponibilité qui attribue, avec notre plein consentement, tant de pouvoir à la personne aimée.
En effet, le rapport amoureux nous incite à abandonner certaines défenses, à accepter nos états de vulnérabilité et de fragilité par la confiance à l’autre. Par le fait même, nous acceptons de nous laisser imprégner par l’influence accrue qu’exerce sur nous la personne aimée. C’est ainsi que l’autonomie affective de chacun des partenaires peut être rudement mise à l’épreuve. Alberoni note encore que l’état amoureux naissant est similaire à un mouvement révolutionnaire par l’énergie, la vitalité et le pouvoir de changement qui s’expérimentent par chacun des membres du couple comme exceptionnellement intenses. Si l’un des partenaires ou les deux vivent respectivement des manques importants sur les plans affectif, social ou économique, il ou elle peut attribuer à l’autre un pouvoir tout aussi important qui viendrait combler ses manques.
Ainsi, plusieurs femmes violentées disent avoir vécu dans les prémisses de leur rapport amoureux la position de la femme adulée et adorée. « Il m’a mise sur un piédestal. » D’ailleurs, bien des femmes, violentées ou non, n’abandonnent pas si facilement leurs rêves des petites filles ; elles ont la perception d’être révélées à elles-mêmes par le prince si longtemps attendu. Et si de surcroît, le prince se fait humble pour adorer sa bien aimée, elle en sera d’autant plus comblée. Christiane Olivier écrit à ce sujet que :
« L’amour a comme particularité de commencer par une douce illusion et de
s’achever sur une cruelle évidence ; l’autre n’est pas comme nous. »
Chez les couples où se manifeste la violence, cette épreuve de réalité n’est pas assumée. Chacun cherche, sur un mode différent, à trouver l’état naissant initial à leur union. L’homme utilise la violence, la femme tentera d’abord toutes les stratégies pour lui plaire.
Elles nous diront fréquemment : « Je voudrais qu’il soit comme avant, il état si doux, si gentil, si prévenant ». Un homme de rêve, un homme idéal…un homme impossible! Mais l’homme réel est violent et après sa crise violente, il cherche à redevenir l’homme « idéal », à conquérir celle qu’il a blessée. Qui parle de conquête ou de reconquête parle de pouvoir.
* à suivre *
lundi 9 août 2010
FEMME VIOLENTÉE (VIOLENCE CONJUGALE) - 2e partie
L’amour attendu…
Il y a pourtant de doux instants entre eux, de plus en plus rares au fil des années. Dans ces doux instants, ils ont l’air d’avoir oublié qu’hier, le mois dernier ou l’année passée, l’orage violent les avait fait trembler. Et puis, la violence revient en s’insinuant plus ou moins subtilement jusqu’à prendre à nouveau toute la place comme si la violence se présentait à titre d’entité extérieure ou de visite importune qui arriverait alors qu’ils attendaient l’amour. Ils luttent tous les deux contre elle, chacun et chacune selon sa différence, pour qu’enfin elle s’en aille!
Mais la violence reste, suspendue jusqu’au prochain éclatement : il accuse sa femme d’avoir invité l’intruse et ainsi de l’avoir provoqué. L’homme frappe ce qu’il perçoit comme une menaçante ennemie qui aurait pris sa partenaire en otage ou à qui elle aurait volontairement offert refuge. Pour la femme, l’ennemie est en lui, mais elle lui prête néanmoins la gîte en la faisant sienne, comme le partage du pain quotidien. Elle supporte le coup encore une fois; elle refoule sa colère et sa rage assourdies par la peur, jusqu’à se replier à nouveau pour que l’amour, croit-elle sincèrement, puisse triompher puisqu’elle ne le peut pas.
En chaque femme battue, il y a la honte, non plus tellement celle de son image sociale, mais la honte d’avoir été battue. Dans les violentes batailles conjugales, il n’y a pas de gagnants et encore moins de bonnes perdantes! L’amour que la femme attend la distrait de la honte et de la colère qu’elle ne montrera pas à cet homme qui, après sa brève et dérisoire victoire, s’offre à elle repentant et souvent aimant. Ainsi, l’homme violent espère quérir rapidement le pardon auprès de sa partenaire pour un acte qu’il a commis et vis-à-vis lequel il peut éprouver de la culpabilité. Le pardon de sa compagne lui permet souvent l’évitement du sens de responsabilité eu égard à sa violence. Comme le mentionne Robert Philippe :
* à suivre *
Il y a pourtant de doux instants entre eux, de plus en plus rares au fil des années. Dans ces doux instants, ils ont l’air d’avoir oublié qu’hier, le mois dernier ou l’année passée, l’orage violent les avait fait trembler. Et puis, la violence revient en s’insinuant plus ou moins subtilement jusqu’à prendre à nouveau toute la place comme si la violence se présentait à titre d’entité extérieure ou de visite importune qui arriverait alors qu’ils attendaient l’amour. Ils luttent tous les deux contre elle, chacun et chacune selon sa différence, pour qu’enfin elle s’en aille!
Mais la violence reste, suspendue jusqu’au prochain éclatement : il accuse sa femme d’avoir invité l’intruse et ainsi de l’avoir provoqué. L’homme frappe ce qu’il perçoit comme une menaçante ennemie qui aurait pris sa partenaire en otage ou à qui elle aurait volontairement offert refuge. Pour la femme, l’ennemie est en lui, mais elle lui prête néanmoins la gîte en la faisant sienne, comme le partage du pain quotidien. Elle supporte le coup encore une fois; elle refoule sa colère et sa rage assourdies par la peur, jusqu’à se replier à nouveau pour que l’amour, croit-elle sincèrement, puisse triompher puisqu’elle ne le peut pas.
En chaque femme battue, il y a la honte, non plus tellement celle de son image sociale, mais la honte d’avoir été battue. Dans les violentes batailles conjugales, il n’y a pas de gagnants et encore moins de bonnes perdantes! L’amour que la femme attend la distrait de la honte et de la colère qu’elle ne montrera pas à cet homme qui, après sa brève et dérisoire victoire, s’offre à elle repentant et souvent aimant. Ainsi, l’homme violent espère quérir rapidement le pardon auprès de sa partenaire pour un acte qu’il a commis et vis-à-vis lequel il peut éprouver de la culpabilité. Le pardon de sa compagne lui permet souvent l’évitement du sens de responsabilité eu égard à sa violence. Comme le mentionne Robert Philippe :
« Il accuse la femme de le rendre violent. Pourtant, lorsque la même logiqueQuand on intervient en matière de violence conjugale, on entend très souvent parler d’amour. Tout aussi souvent sans doute, se demande-t-on ce que l’amour peut bien venir faire dans tous ces coups, ces injures et ces menaces? Je n’ai pas encore trouvé de réponse. Mais j’ai la vive intuition que tant qu’on dira, écrira ou chantera que l’amour est bien plus fort que nous, il y aura de la violence conjugale. La violence se manifestera dans ses conséquences désastreuses tant que chacun croira que cette violence vient d’ailleurs, toujours de l’autre ou qu’elle est plus forte que nous…elle aussi.
est appliquée, mais à l’inverse ce système de croyance n’est plus fonctionnel :
si elle a le pouvoir de le rendre malheureux et violent, alors comment expliquer
qu’elle n’ait pas le pouvoir de l’empêcher d’être violent? »
* à suivre *
vendredi 6 août 2010
FEMME VIOLENTÉE (VIOLENCE CONJUGALE) - 1e partie
Femme Violentée
Me limiterai-je à aborder les aspects souvent brouillons et apparemment contradictoires qui émergent lorsqu’on intervient auprès des femmes violentées. En effet, il m’apparaît essentiel de soulever l’épineuse question : pouvons-nous la percevoir autrement que comme une victime?
Également, je veux remercier toutes ces femmes que j’ai rencontrées et qui ont su ébranler certaines de mes convictions, dont la plus persistante était justement celle qui veut que le pouvoir soit surtout une affaire d’hommes, et que les femmes, elles, elles aiment!
Il y a parmi les femmes violentées que nous recevons en consultation, des femmes qui ont des comportements dominateurs, parfois même violents. Il y a des femmes violentées qui sont financièrement autonomes, pouvant même être très instruites, des professionnelles jouissant d’une position socio-économique avantageuse, mais qui dans l’intimité de leur rapport à l’homme expérimentent une forte dépendance. Il y a, parmi les femmes violentées, des femmes de ménage qui balaient avec la poussière des années de domination et retrouvent leur dignité et leur autonomie.
Aux attitudes et comportements typiques aux femmes violentées, tels que définis par plusieurs auteures et notamment Ginette Larouche, Deborah Sinclair et Linda MacLeod, se joignent une variété de manifestations « atypiques » qui obligent à l’ouverture vers d’autres pistes d’exploration à cet égard, Linda MacLeod notait que :
* à suivre *
Me limiterai-je à aborder les aspects souvent brouillons et apparemment contradictoires qui émergent lorsqu’on intervient auprès des femmes violentées. En effet, il m’apparaît essentiel de soulever l’épineuse question : pouvons-nous la percevoir autrement que comme une victime?
Également, je veux remercier toutes ces femmes que j’ai rencontrées et qui ont su ébranler certaines de mes convictions, dont la plus persistante était justement celle qui veut que le pouvoir soit surtout une affaire d’hommes, et que les femmes, elles, elles aiment!
Il y a parmi les femmes violentées que nous recevons en consultation, des femmes qui ont des comportements dominateurs, parfois même violents. Il y a des femmes violentées qui sont financièrement autonomes, pouvant même être très instruites, des professionnelles jouissant d’une position socio-économique avantageuse, mais qui dans l’intimité de leur rapport à l’homme expérimentent une forte dépendance. Il y a, parmi les femmes violentées, des femmes de ménage qui balaient avec la poussière des années de domination et retrouvent leur dignité et leur autonomie.
Aux attitudes et comportements typiques aux femmes violentées, tels que définis par plusieurs auteures et notamment Ginette Larouche, Deborah Sinclair et Linda MacLeod, se joignent une variété de manifestations « atypiques » qui obligent à l’ouverture vers d’autres pistes d’exploration à cet égard, Linda MacLeod notait que :
« (…) nous devons oser assumer l’incertitude d’une vision embrouillée et faire
l’essai de nouvelles directions. C’est à ce prix que nous pourrons préserver
notre intégrité, notre engagement envers les femmes battues et leurs enfants, et
notre vision d’une société plus juste et plus sûre ».
* à suivre *
jeudi 5 août 2010
AGRESSIVITÉ - 11e partie
POUR CONCLURE
Si la violence existe, c’est parce que l’être humain est naturellement constitué de pulsions agressives; ces pulsions « logées » dans l’inconscient échappent à nos modes de pensée rationnels. La théorie psychanalytique a largement contribué à l’étude de la vie pulsionnelle, tant chez l’adulte que chez l’enfant, et constitue une grille d’analyse essentielle des phénomènes cliniques liés à l’agressivité.
Chez l’enfant, nous détectons plus rapidement les cas où l’agressivité se décharge excessivement sur l’entourage. Nous mettons, beaucoup plus de temps à identifier les cas où les pulsions agressives sont éteintes ou inutilisées car ces cas ne dérangent pas, ils n’ont pas la force d’appeler au secours par des symptômes vigoureux. En réalité, dans ces deux types de cas, les pulsions agressives sont au cœur du problème.
Pour aider l’enfant à parvenir à une meilleure utilisation de ses pulsions, il faut pouvoir situer les symptômes dans le champ relationnel, rétablir l’histoire de l’enfant et de ses relations affectives précoces avec sa famille. Lorsque pour diverses raisons cette histoire n’est pas accessible, le traitement est plus ardu et prend souvent un caractère palliatif.
Enfin, en tant que cliniciens, nous devons nous rappeler que nous ne sommes jamais à l’abri de nos propres tendances. L’exploration des phénomènes liés à l’agressivité nous confronte à nos propres résistances; vouloir connaître l’être humain finit toujours par nous ramener à nous-mêmes.
NOTE
(1) Le mot objet (objet d’amour, relation d’objet, objet libidinal) est utilisé dans le texte selon le sens psychanalytique, c’est-à-dire qu’il représente une personne et non une chose inanimée.
Si la violence existe, c’est parce que l’être humain est naturellement constitué de pulsions agressives; ces pulsions « logées » dans l’inconscient échappent à nos modes de pensée rationnels. La théorie psychanalytique a largement contribué à l’étude de la vie pulsionnelle, tant chez l’adulte que chez l’enfant, et constitue une grille d’analyse essentielle des phénomènes cliniques liés à l’agressivité.
Chez l’enfant, nous détectons plus rapidement les cas où l’agressivité se décharge excessivement sur l’entourage. Nous mettons, beaucoup plus de temps à identifier les cas où les pulsions agressives sont éteintes ou inutilisées car ces cas ne dérangent pas, ils n’ont pas la force d’appeler au secours par des symptômes vigoureux. En réalité, dans ces deux types de cas, les pulsions agressives sont au cœur du problème.
Pour aider l’enfant à parvenir à une meilleure utilisation de ses pulsions, il faut pouvoir situer les symptômes dans le champ relationnel, rétablir l’histoire de l’enfant et de ses relations affectives précoces avec sa famille. Lorsque pour diverses raisons cette histoire n’est pas accessible, le traitement est plus ardu et prend souvent un caractère palliatif.
Enfin, en tant que cliniciens, nous devons nous rappeler que nous ne sommes jamais à l’abri de nos propres tendances. L’exploration des phénomènes liés à l’agressivité nous confronte à nos propres résistances; vouloir connaître l’être humain finit toujours par nous ramener à nous-mêmes.
NOTE
(1) Le mot objet (objet d’amour, relation d’objet, objet libidinal) est utilisé dans le texte selon le sens psychanalytique, c’est-à-dire qu’il représente une personne et non une chose inanimée.
mercredi 4 août 2010
AGRESSIVITÉ - 10e partie
Du point de vue social dans le traitement accordé à l'Agressivité.
Nous avons évoqué en début d’article les grandes campagnes de lutte contre certains types de violence ou certains agents identifiés de la violence : violence conjugale, enfants battus, drogues, délinquance, jouets violents…Ce type d’actions sociales contribue-t-il à nous rendre plus sensibles ou plus défensifs face à nos propres tendances, aux aspects cachés de nous-mêmes?
J. Bergeret regrette que l’on parte trop facilement en guerre contre des symptômes; il se méfie de la dimension spectaculaire de ce type d’interventions, que sous-tendent souvent des enjeux politiques et qui tendent à conforter l’opinion publique dans une forme de contre-violence répressive. IL propose plutôt de diriger les crédits disponibles vers des interventions moins spectaculaires et moins visibles mais plus payantes à long terme : c’est-à-dire des interventions s’adressant directement aux familles et visant des modifications du fonctionnement de l’entourage de l’enfant.
Nous avons saisi par les auteurs cités dans cet article à quel point l’environnement affectif et relationnel précoce de l’enfant était une condition déterminante de l’intégration de sa vie pulsionnelle.
Il faudrait encourager un retour vers des pratiques cliniques privilégiant l’aide à l’enfant au sein de sa famille et les traitements portant sur les relations parents-enfant. C’est encore à ce niveau que l’on obtient les résultats cliniques les plus probants et les plus durables.
Nous avons évoqué en début d’article les grandes campagnes de lutte contre certains types de violence ou certains agents identifiés de la violence : violence conjugale, enfants battus, drogues, délinquance, jouets violents…Ce type d’actions sociales contribue-t-il à nous rendre plus sensibles ou plus défensifs face à nos propres tendances, aux aspects cachés de nous-mêmes?
J. Bergeret regrette que l’on parte trop facilement en guerre contre des symptômes; il se méfie de la dimension spectaculaire de ce type d’interventions, que sous-tendent souvent des enjeux politiques et qui tendent à conforter l’opinion publique dans une forme de contre-violence répressive. IL propose plutôt de diriger les crédits disponibles vers des interventions moins spectaculaires et moins visibles mais plus payantes à long terme : c’est-à-dire des interventions s’adressant directement aux familles et visant des modifications du fonctionnement de l’entourage de l’enfant.
Nous avons saisi par les auteurs cités dans cet article à quel point l’environnement affectif et relationnel précoce de l’enfant était une condition déterminante de l’intégration de sa vie pulsionnelle.
Il faudrait encourager un retour vers des pratiques cliniques privilégiant l’aide à l’enfant au sein de sa famille et les traitements portant sur les relations parents-enfant. C’est encore à ce niveau que l’on obtient les résultats cliniques les plus probants et les plus durables.
* à suivre *
mardi 3 août 2010
AGRESSIVITÉ - 9e partie
Quel traitement accorder à l’agressivité?
Entendons ici « traitement » dans un sens double : autant dans le sens d’une attitude adoptée devant un phénomène que dans le sens clinique d’une thérapeutique.
Du point de vue individuel
Nous avons voulu faire ressortir la nécessité de comprendre d’une façon très large l’ensemble des manifestations reliées à l’existence des pulsions agressive chez tout être humain. Le schéma théorique qui se dégage de la reconnaissance de la vie pulsionnelle duelle nous sera utile dans notre abord des cas cliniques individuels.
Nombreuses sont les consultations pédo-psychiatriques où le symptôme d’appel est de type agressif. Les parents, l’entourage, nous demandent d’éteindre le symptôme agressif, mais c’est aussi ce symptôme qui motive la consultation, la rend nécessaire. Il nous faudra chercher à saisir l’origine du symptôme, le type d’organisation de la personnalité dans laquelle il s’inscrit, ce qui contribue à le rendre nécessaire pour l’enfant même s’il est reconnu comme nuisible par tous. La répression trop intempestive du symptôme avant d’en avoir recherché le sens peut devenir à son tour un acte violent. Dans nos professions, il faut toujours nous méfier de nos propres tendances à faire violence à l’enfant et à la famille qui nous consultent, du fait d’un type de pouvoir que nous sommes en mesure d’exercer sur eux, à notre insu bien souvent.
Nous tenons à faire à nouveau allusion aux problèmes aussi nombreux et secrètement destructeurs de l’agressivité retournée contre soi, de l’inhibition et des tendances masochiques; ces problèmes sont naturellement plus difficiles à détecter puisqu’ils n’attaquent pas l’entourage. Les exemples cités plus haut témoignent des ravages silencieux entraînés par l’incapacité de faire usage des pulsions agressives.
Entendons ici « traitement » dans un sens double : autant dans le sens d’une attitude adoptée devant un phénomène que dans le sens clinique d’une thérapeutique.
Du point de vue individuel
Nous avons voulu faire ressortir la nécessité de comprendre d’une façon très large l’ensemble des manifestations reliées à l’existence des pulsions agressive chez tout être humain. Le schéma théorique qui se dégage de la reconnaissance de la vie pulsionnelle duelle nous sera utile dans notre abord des cas cliniques individuels.
Nombreuses sont les consultations pédo-psychiatriques où le symptôme d’appel est de type agressif. Les parents, l’entourage, nous demandent d’éteindre le symptôme agressif, mais c’est aussi ce symptôme qui motive la consultation, la rend nécessaire. Il nous faudra chercher à saisir l’origine du symptôme, le type d’organisation de la personnalité dans laquelle il s’inscrit, ce qui contribue à le rendre nécessaire pour l’enfant même s’il est reconnu comme nuisible par tous. La répression trop intempestive du symptôme avant d’en avoir recherché le sens peut devenir à son tour un acte violent. Dans nos professions, il faut toujours nous méfier de nos propres tendances à faire violence à l’enfant et à la famille qui nous consultent, du fait d’un type de pouvoir que nous sommes en mesure d’exercer sur eux, à notre insu bien souvent.
Nous tenons à faire à nouveau allusion aux problèmes aussi nombreux et secrètement destructeurs de l’agressivité retournée contre soi, de l’inhibition et des tendances masochiques; ces problèmes sont naturellement plus difficiles à détecter puisqu’ils n’attaquent pas l’entourage. Les exemples cités plus haut témoignent des ravages silencieux entraînés par l’incapacité de faire usage des pulsions agressives.
* à suivre *
lundi 2 août 2010
AGRESSIVITÉ - 8e partie
VOIES DE CANALISATION ET DE SUBLIMATION DES PULSIONS AGRESSIVES : LE JEU, LA CRÉATION, LE TRAVAIL
C’est dans le jeu symbolique que nous voyons apparaître chez l’enfant les premières solutions adaptées en rapport avec l’agressivité. Winnicott a conceptualisé de façon très originale le phénomène du jeu qu’il situe dans un espace intermédiaire, entre le monde interne de l’enfant et la réalité extérieure. Le jeu absorbe des éléments du monde extérieur qui se mêlent aux éléments du monde intérieur de l’enfant, i.e. pulsions, désirs, fantasmes; il permet ainsi l’exploration de ces deux mondes et des conflits qui s’y trouvent. Le jeu est la pensée de l’enfant, son travail psychique. C’est sur l’élaboration du jeu personnel de l’enfant que s’établira la richesse de la personnalité adulte.
Des gens s’inquiètent du fait que les enfants jouent avec des armes-jouets et croient que pour prévenir la guerre, il faudrait interdire ces jouets. Si nous acceptons le fait que l’enfant ait besoin d’explorer l’agressivité qu’il est conscient de posséder en lui, nous comprenons alors la nécessité chez l’enfant d’exprimer ses sentiments agressifs dans le jeu qui est essentiellement sans danger réel puisqu’il est symbolique. Le jeu est une alternative à l’agressivité agie dans une crise de rage par exemple. On peut penser qu’on prépare mieux un enfant à devenir un citoyen responsable si on lui offre la possibilité d’explorer ses conflits internes, d’en prendre conscience grâce au jeu.
La création artistique, issue du développement du jeu et de l’espace intermédiaire tels que conçus par Winnicott, s’alimente de l’énergie pulsionnelle et du conflit interne surmonté. Ainsi est-il intéressant de penser que pour bâtir une statue, même une statue dédiée à la Paix, un sculpteur doit pouvoir utiliser une bonne dose d’agressivité s’il veut s’attaquer à son matériau, le façonner, le transformer. La réalisation de la statue elle-même témoigne de l’existence des pulsions agressives et de la sublimation.
Spitz a conceptualisé l’avènement des processus de pensée chez l’être humain comme une fonction adaptative dans l’évolution de l’espèce, fonction adaptative née de la pulsion agressive elle-même. C’est la pulsion agressive qui stimule l’évolution vers des niveaux adaptatifs supérieurs, par le biais de l’activité mentale et du travail intellectuel, eux-mêmes liés au principe de réalité.
Le travail intellectuel de l’élève, du chercheur, comme le travail qui engage le corps du sculpteur, impliquent donc des pulsions agressives canalisées, réorientées vers de nouveaux buts, sublimées
* à suivre *
C’est dans le jeu symbolique que nous voyons apparaître chez l’enfant les premières solutions adaptées en rapport avec l’agressivité. Winnicott a conceptualisé de façon très originale le phénomène du jeu qu’il situe dans un espace intermédiaire, entre le monde interne de l’enfant et la réalité extérieure. Le jeu absorbe des éléments du monde extérieur qui se mêlent aux éléments du monde intérieur de l’enfant, i.e. pulsions, désirs, fantasmes; il permet ainsi l’exploration de ces deux mondes et des conflits qui s’y trouvent. Le jeu est la pensée de l’enfant, son travail psychique. C’est sur l’élaboration du jeu personnel de l’enfant que s’établira la richesse de la personnalité adulte.
Des gens s’inquiètent du fait que les enfants jouent avec des armes-jouets et croient que pour prévenir la guerre, il faudrait interdire ces jouets. Si nous acceptons le fait que l’enfant ait besoin d’explorer l’agressivité qu’il est conscient de posséder en lui, nous comprenons alors la nécessité chez l’enfant d’exprimer ses sentiments agressifs dans le jeu qui est essentiellement sans danger réel puisqu’il est symbolique. Le jeu est une alternative à l’agressivité agie dans une crise de rage par exemple. On peut penser qu’on prépare mieux un enfant à devenir un citoyen responsable si on lui offre la possibilité d’explorer ses conflits internes, d’en prendre conscience grâce au jeu.
La création artistique, issue du développement du jeu et de l’espace intermédiaire tels que conçus par Winnicott, s’alimente de l’énergie pulsionnelle et du conflit interne surmonté. Ainsi est-il intéressant de penser que pour bâtir une statue, même une statue dédiée à la Paix, un sculpteur doit pouvoir utiliser une bonne dose d’agressivité s’il veut s’attaquer à son matériau, le façonner, le transformer. La réalisation de la statue elle-même témoigne de l’existence des pulsions agressives et de la sublimation.
Spitz a conceptualisé l’avènement des processus de pensée chez l’être humain comme une fonction adaptative dans l’évolution de l’espèce, fonction adaptative née de la pulsion agressive elle-même. C’est la pulsion agressive qui stimule l’évolution vers des niveaux adaptatifs supérieurs, par le biais de l’activité mentale et du travail intellectuel, eux-mêmes liés au principe de réalité.
Le travail intellectuel de l’élève, du chercheur, comme le travail qui engage le corps du sculpteur, impliquent donc des pulsions agressives canalisées, réorientées vers de nouveaux buts, sublimées
* à suivre *
dimanche 1 août 2010
AGRESSIVITÉ - 7e partie
Troisième vignette clinique
Un jeune garçon âgé de quatre ans et demi est évalué pour un retard développemental : le langage et le développement affectif sont très atteints et il y a un retard de croissance. L’enfant n’a jamais démontré les signes d’anxiété typiques de la petite enfance, n’a jamais fait de colère, ne s’est jamais opposé ouvertement, ne semble pas distinguer le bon du méchant. Il a l’apparence artificielle d’un petit personnage de bande dessinée et est investi par l’entourage comme un gros bébé.
L’histoire révèle qu’il y a eu arrêt développemental à la suite d’un traumatisme familial. L’enfant semble avoir été identifié à l’objet de réconfort dans la détresse maternelle, sorte de témoignage vivant du bonheur familial disparu; on a mis du temps à s’inquiéter de son état dévitalisé et à y voir le symptôme d’un problème développemental. Alors que le frère aîné exprimait ouvertement sa souffrance et sollicitait ses parents au moment de l’éclatement familial, le plus jeune a éteint sa vie pulsionnelle au point de cesser de grandir. Il vit maintenant ses pulsions agressives « par procuration », en faisant éclater la colère de son frère; il est tenu à l’abri de tous les conflits normaux de l’existence, innocenté par son apparence de petit nain.
La mise à l’écart de la vie pulsionnelle peut engendrer un arrêt de la croissance et du développement affectif et cognitif chez un enfant probablement porteur d’une fragilité constitutionnelle neurophysiologique ou psychologique.
Un jeune garçon âgé de quatre ans et demi est évalué pour un retard développemental : le langage et le développement affectif sont très atteints et il y a un retard de croissance. L’enfant n’a jamais démontré les signes d’anxiété typiques de la petite enfance, n’a jamais fait de colère, ne s’est jamais opposé ouvertement, ne semble pas distinguer le bon du méchant. Il a l’apparence artificielle d’un petit personnage de bande dessinée et est investi par l’entourage comme un gros bébé.
L’histoire révèle qu’il y a eu arrêt développemental à la suite d’un traumatisme familial. L’enfant semble avoir été identifié à l’objet de réconfort dans la détresse maternelle, sorte de témoignage vivant du bonheur familial disparu; on a mis du temps à s’inquiéter de son état dévitalisé et à y voir le symptôme d’un problème développemental. Alors que le frère aîné exprimait ouvertement sa souffrance et sollicitait ses parents au moment de l’éclatement familial, le plus jeune a éteint sa vie pulsionnelle au point de cesser de grandir. Il vit maintenant ses pulsions agressives « par procuration », en faisant éclater la colère de son frère; il est tenu à l’abri de tous les conflits normaux de l’existence, innocenté par son apparence de petit nain.
La mise à l’écart de la vie pulsionnelle peut engendrer un arrêt de la croissance et du développement affectif et cognitif chez un enfant probablement porteur d’une fragilité constitutionnelle neurophysiologique ou psychologique.
* à suivre *
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