mardi 19 octobre 2010

COUPLE ET MÉDIATION - 11e partie

4. Critique de la médiation dans les situations de violence conjugale

« Une femme dont le couple se brise à cause de la violence conjugale est assez
déprimée et a peu d’estime d’elle-même. J’étais à me reconstruire. Je n’étais
pas encore capable de me tenir debout devant lui. Il me faisait très peur!
D’ailleurs, la preuve c’est qu’en médiation, j’avais très peur de lui.
J’essayais bien de lui donner la réplique, de prendre la place que j’avais le
droit de prendre et qu’il était nécessaire que je prenne. Mais je ne pouvais le
faire. Et je ne sentais pas l’appui de la médiatrice même si elle disait : ‘Oui,
mais monsieur, vous prenez trop de place, madame a sûrement des choses à dire’.
Je ne me sentais pas appuyée. J’aurais eu besoin de plus que ça. D’abord
peut-être d’être plus reconstruite…C’était évident qu’il n’y avait pas de
communication possible. C’était juste de l’écrasement, de la peur…La médiation
nous a permis de se parler à nouveau. Mais à partir du moment où j’ai dit non à
certaines de ses demandes, les menaces ont recommencé. » (INTER’ELLES).

Nous trouvons inapproprié le processus de médiation dans les cas de violence conjugale. Dans un tel contexte, les critères de la médiation, tels que la volonté de coopération, le respect de l’autre dans la recherche de solutions et la croyance d’une possibilité réelle pour chacun de trouver des solutions valables et mutuellement acceptables dans l’intérêt de la famille et des enfants, deviennent difficilement applicables. Ces critères réfèrent à un état d’esprit absent chez les conjoints violents, à un contexte de liberté de pensée et d’expression impossible pour les femmes violentées, de même qu’à une égalité de pouvoir inexistante dans ces couples.

Dans un contexte de violence, les femmes sont en danger et ont peur.

« Quand il y a séparation, c’est parce que la vie de la femme est en danger.

On le regarde, parce qu’il faut le regarder pour jaser avec, pour ‘médiatiser’. Mais on sait ce qui se passe. On sait le danger qu’on coure. On ne veut pas partir en même temps que lui. Il faut rester après ou partir avant. Quand je suis partie, parce que je suis partie avant, je savais que je risquais quelque chose. J’avais peur de lui.

Dès le départ de la rencontre, on pense déjà comment on va sortir… »
(INTER’ELLES).


Et le danger réel est accentué au moment de la séparation. Tous les médiateurs n’ont pas une connaissance de la problématique de violence conjugale ainsi que du dépistage. Ils ne sont alors pas conscients que la médiation peut constituer une arme supplémentaire pour le conjoint violent (Kingston Interval House), un outil lui permettant à la fois de raffermir son pouvoir et son contrôle et de se soustraire au processus judiciaire. Loin de solutionner les problèmes liés au divorce, la médiation associée à une méconnaissance de la problématique et à l’absence de dépistage peut même augmenter le niveau de dangerosité (Kingston Interval House).



* à suivre *

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