jeudi 30 septembre 2010

LE DEUIL - 5e partie

LES SUJETS

Afin de faciliter notre démarche, nous avons choisi cent quarante-sept familles qui habitaient Montréal et la périphérie et qui y ont vécu un deuil se situant entre quelques semaines et deux ans. Chacune reçut une lettre demandant une collaboration volontaire, l’invitant à nous rencontrer.

Neuf pour cent des lettres nous sont revenues en raison des déménagements, situation souvent provoquée par la désorganisation familiale et sociale suivant un décès; ceci constitue un deuil supplémentaire et alourdit le travail à faire.

Cinq familles ont demandé à recevoir le questionnaire par la poste; c’est avec hésitation et inquiétude que nous avons accédé à leur demande parce que notre expérience des premières entrevues nous a fait réaliser tout l’impact émotionnel que pouvait susciter ce questionnaire. Il nous apparaît essentiel d’utiliser ce questionnaire uniquement dans le cadre d’une relation thérapeutique où un support peut être apporté sur le champ.

Deux pour cent des familles sollicitées ont expliqué leur refus à cette collaboration par l’incapacité émotionnelle de faire face à cette rencontre; elles croyaient devoir revivre le décès, ce qui exacerberait une douleur encore trop présente. Cette crainte traduit à nos yeux un très grand besoin d’aide.

Quarante-huit pour cent des lettres sont restées sans réponse. Par ailleurs, nous avons reçu la collaboration de 41.8% des familles, ce qui amena soixante personnes à accepter le rendez-vous. Cinquante-cinq entrevues ont été réalisées dont trente-trois, à l’hôpital et vingt-deux à domicile. Deux praticiens ayant une expérience clinique auprès des patients en phase terminale ont mené ces entrevues; elles avaient participé étroitement à l’élaboration du questionnaire avec l’équipe de l’unité de Soins Palliatifs.


DISCUSSION

I. Parmi les manifestations de deuil que Freud appelle le travail de deuil, nous avons retenu les comportements symptômatiques de dépression réactionnelle pour lesquels les médecins sont souvent consultés; les troubles de sommeil, l’inappétence, les maux de têtes, la fatigue, l’épuisement inexplicable, la perte de mémoire, la tristesse, le retrait, l’isolement, l’irritabilité et la colère (annexe a).

II. l’expérience de deuil nous ramène à une constatation fondamentale : l’anxiété de séparation provoque occasionnellement une réaction pathologique; nous en avons donc étudié les manifestations.

Intellectuellement, on peut accepter le décès puisque l’on participe au rituel social mais émotionnellement il n’est pas nécessairement intégré. Dès 1917, Freud insistait sur l’ambivalence et l’identification comme facteurs primordiaux du deuil non résolu.

La négation peut se présenter par l’incorporation du défunt en imitant ses manières, ses façons d’agir, son langage en s’identifiant ainsi au disparu, on le retient. La négation se manifeste par l’identification, en s’appropriant les malaises qu’a subis le défunt : on éprouve les mêmes symptômes et les mêmes effets secondaires de la douleur. (annexe b).

Quant à l’ambivalence, elle suscite des sentiments contradictoires. Dans toutes relations humaines, même les plus tendres, il est normal de retrouver des moments d’ambivalence, d’amour et d’hostilité, voire même de rage pouvant aller jusqu’à souhaiter la mort de l’autre. Il nous apparaît important d’en encourager l’expression et ainsi aider au processus de déculpabilisation.

La culpabilité chez l’adulte peut se transformer en hostilité envers les gens qui viennent le réconforter, comme le médecin et le personnel soignant taxés d’incompétence et de négligence. Il peut être utile de permettre aux proches d’exprimer ce que cette mort peut avoir pour eux d’insupportable, d’odieux et de frustrant, en leur donnant la possibilité d’apaiser progressivement la violence de leur sentiment vis-à-vis la situation et arriver ainsi à une certaine sérénité dans le deuil avant le décès.


* à suivre *

mercredi 29 septembre 2010

LE DEUIL - 4e partie

IDENTIFICATION DU PROBLÈME

L’équipe de l’Unité de Soins Palliatifs, ayant identifié un problème concernant le suivi de deuil, a d’abord voulu l’étudier et a cherché à le solutionner. Nous avons donc regardé de plus près le vécu des personnes en deuil, les différences et les ressemblances de leur cheminement selon la nature et la qualité du lien avec la personne décédée.

MÉTHODOLOGIE

La première étape de cette recherche a été de constituer un questionnaire afin d’étudier les réactions de deuil et d’en évaluer les manifestations normales ou pathologiques, en décomposant les phénomènes décrits par divers auteurs dont évidemment Freud, Linderman, Parkes, Hanus, De M’Uzan, Pincus, et plus près de nous, J.F. Saucier.

Notre questionnaire comprend donc quarante-trois questions avec des choix gradués de réponses; il est présenté en trois volets qui couvrent les aspects suivants :

I. Symptômes de dépressions réactionnelles
A) Troubles d’ordre physique : Difficultés de sommeil
Inappétence
Fatigue
Maux de tête
Faiblesse
B) Troubles d’ordre social : Isolement
Indifférence
C) Troubles d’ordre émotionnel : Tristesse
Irritabilité
Colère
D) Troubles de la pensée : Mémoire
Difficultés de concentration
Distraction

II. Manifestations de deuil pathologique
Absence de deuil
Deuil anticipé
Prolongement de la nostalgie
Auto-punition
Tendances suicidaires

III. Perception de l’aide reçue à l’unité
A) Avant le décès : Support
Disponibilité du personnel
Respect de l’intimité
Évaluation de la présence
B) Après le décès : Aide psychologique
Maintien du contact
Besoin de suivi du deuil

Ces phénomènes ont été étudiés à trois moments du deuil :
1) pendant les trois premières semaines
2) six semaines plus tard
3) six mois après le décès


* à suivre *

mardi 28 septembre 2010

LE DEUIL - 3e partie

La symptômatologie du deuil normal a été décrite abondamment par plusieurs auteurs. Linderman a identifié cinq catégories de symptômes qui englobent ceux décrits par plusieurs auteurs :
1) les malaises somatiques : les maux de tête
les troubles du sommeil
l’inappétence
la faiblesse
la distraction
les tensions
le sentiment d’irréalité
l’état de choc
l’engourdissement de la conscience.

2) difficultés à composer avec l’image du défunt :
introjection temporaire de l’objet dans le but de prolonger la relation (Abraham), l’identification au défunt dans les aspects gratifiants de la relation qui peut amener le parent en deuil à s’engager dans des activités autrefois significatives pour le défunt, ou l’identification à la maladie du défunt qui peut favoriser la somatisation importante ou le désinvestissement. (Siggins).

3) la culpabilité qui se manifeste par un besoin d’être rassuré, de savoir que tout a été fait pour le défunt. La culpabilité entraîne aussi des comportements auto-punitifs de même que l’incapacité d’accepter d’être consolés.

4) l’hostilité, la colère, dont les manifestations sont l’irritabilité et l’humeur instable, ainsi que l’incapacité d’établir des rapports chaleureux avec l’entourage.

5) la perte de comportement habituel, la perte d’intérêt dans le monde extérieur, l’inhibition de l’activité, l’incapacité d’investir de nouveaux objets, l’isolement émotionnel et social, pleurs, tristesse et parfois une très grande détresse.


* à suivre *

lundi 27 septembre 2010

LE DEUIL - 2e partie

MANIFESTATIONS DU DEUIL, NORMALES ET PATHOLOGIQUES

À l’exception de certaines manifestations cliniques particulières, les indications d’un deuil normal et d’un deuil pathologique se ressemblent mais se différencient selon l’intensité des symptômes et selon leur durée.

Parmi les manifestations de deuil pathologique nous avons retenu tout d’abord l’absence de manifestations de deuil. À partir d’observations cliniques d’absence de réactions de deuil, Hélène Deutch maintient que le deuil doit s’exprimer tôt ou tard d’une manière ou d’une autre.

Deuxièmement, les deuils anticipés peuvent constituer les deuils pathologiques. Souvent avant le décès le deuil est déjà amorcé ou par la famille ou par le malade. Il faut bien distinguer cependant entre les sentiments de tristesse, d’abandon ou de désespoir éprouvés dans l’attente d’un décès prochain et le deuil anticipé qui peut conduire à un désinvestissement prématuré de la part de la famille ou de la part du malade. Ainsi, le patient peut se retirer prématurément de ses proches et augmenter ainsi son sentiment de solitude et d’isolement; la famille par ailleurs peut également s’éloigner émotionnellement du malade et arriver à croire que le processus du deuil se termine avant ou au moment du décès.

Troisièmement, Hélène Deutch dès 1937 a souligné que les deuils difficiles à résoudre ne sont pas les reflets de liens affectifs solides nécessairement mais plutôt le résultat de la présence d’ambivalence importante et de culpabilité. L’incapacité de faire face à des sentiments inavouables envers le défunt peuvent conduire à des états névrotiques de rumination compulsive, à la mélancolie et même au suicide.

Il y a plus d’éléments inconscients dans le deuil pathologique. L’ambivalence de la relation est une condition du deuil pathologique d’où tendances à la culpabilité, à l’auto-punition qui s’installent dans le temps et se manifestent de différentes manières. Freud a parlé de deuil mélancolique où on est en présence d’insomnie grave, de refus de nourriture, de perte de goût à la vie, de risques suicidaires, et d’incapacité prolongée d’investissement dans un nouvel objet.


* à suivre *

vendredi 24 septembre 2010

LE DEUIL - 1e partie

LE DEUIL

Le deuil est l’exercice de détachement qui doit nécessairement s’effectuer dans le temps, après la perte d’un proche. La mort d’un parent est la fin d’une relation intime. Que le deuil soit normal ou pathologique, la mort est une perte qui engendre de la souffrance plus ou moins intense, à différents niveaux de conscience, d’une durée plus ou moins longue selon la nature et l’intensité du lien, et il faut du temps et de l’énergie pour se détacher et investir de nouveau dans la vie.

Le deuil n’est pas un phénomène pathologique en soi, bien au contraire. John Bowlby, dit qu’il est nuisible à l’enfant de ne pas vivre la phase de protestation violente, d’accepter trop vite ou trop rationnellement la perte parentale; nous retrouvons chez certains adultes les mêmes réactions, l’effet d’un deuil mal engagé. On peut s’inquiéter d’un enfant sage devant la perte d’un parent mais également d’un adulte vite résigné.

Le syndrôme du deuil peut apparaître immédiatement après le décès, il peut même apparaître avant le décès (deuil anticipé), il peut être retardé, excessif ou inexistant. Mais le deuil ne peut pas être reporté indéfiniment. Plus l’inhibition des émotions est forte, plus les émotions seront intenses au moment où le deuil sera vécu (Parkes). Certains auteurs ont identifié différentes étapes dans le processus du deuil (Bowlby), mais les transitions d’une phase à l’autre ne sont pas toujours perceptibles.

La durée de la réaction de deuil dépend du succès du processus de résolution. Parmi les obstacles à la résolution du deuil, le refoulement de la douleur intense et l’inhibition des émotions associées sont importants.


* à suivre *

jeudi 23 septembre 2010

Vieillissement et le moment présent - 11e partie

Bilan de l’expérience sur le plan professionnel et conclusion

L’observation de notre clientèle de personnes âgées de l’Hôpital de jour et notre expérience de groupe auprès de quelques clients nous ont enseigné que la menace venant du temps qui se rétrécit avec l’âge ne pouvait être ignorée dans l’intervention auprès des personnes du troisième âge. « Certains diront que la mort n’est pas le fait de la personne âgée; on peut mourir, en effet à tout âge. Pourtant, à la mort accidentelle ou de maladie s’ajoute celle, moins risquée et plus implacable encore, de la mort de vieillesse ».

En effet, une participante nous a dit en atelier qu’elle sent parfois la vie se retirer en elle, qu’elle n’est plus la même personne depuis qu’elle éprouve des déficits sensoriels. Elle se sent vaincue d’avance par cette atteinte perfide du temps.

À l’Hôpital de jour, la prise en charge de la clientèle s’effectue autour des atteintes fonctionnelles et de l’autonomie physique. Cette perception des besoins de la clientèle peut constituer, selon nous, un écran à la connaissance et à la compréhension des problèmes existentiels de ces personnes. Elle utilise une grille de lecture médicale des difficultés de la vie quotidienne en substitution à une grille de lecture sociale ou psychosociale. Dès lors, les difficultés de la vie quotidienne ne sont pas perçues comme des problèmes de morbidité individuelle et sont susceptibles d’être traitées comme telles. Cette grille de lecture médicale focalise les déficiences chez le client et encourage l’activisme thérapeutique.

La démarche que nous avons entreprise avec quelque personnes âgées de l’Hôpital de jour nous a démontré que celles-ci désiraient être acceptées dans la projection de leur être acceptées dans la projection des leur être et avec leurs problèmes existentiels. Elles vivent dans le regret du passé, lieu de leur identité perdue, et dans un présent destructuré par l’angoisse du futur. La prise en considération de toutes ces dimensions nécessite l’implication émotive de l’intervenant pour qu’il arrive à partager ces conflits avec la personne âgée.

Nous avons constaté par leurs propos que les clients avec qui nous avons vécu l’expérience faisaient semblant de se soumettre quand ils avaient le sentiment de ne pas être acceptés dans la projection de leur être. Ils adoptaient le stéréotype du bon patient, en demandant à l’intervenant d’oublier leur angoisse. C’était une façon pour eux de se maintenir dans le cadre du système social organisé, de continuer à jouer un rôle sans remettre en cause le savoir des intervenants. Ils se protégeaient contre ces derniers.

Cette attitude démontre qu’il ne peut y avoir de prise en charge en gérontologie sans que soient abordés les problèmes que posent la projection du vieillard et sa vulnérabilité au temps. À ce point de vue, nous pensons que notre démarche de groupe à l’Hôpital de jour devrait être systématisée.

mercredi 22 septembre 2010

Vieillissement et le moment présent - 10e partie

Atelier 6 : Exercice simplifié pour identifier quelqu’un de significatif pour soi et la fréquence des rapports

Il s’agissait au cours de cet atelier d’amener les participants à identifier quelqu’un de significatif pour eux, c’est-à-dire quelqu’un à qui ils accordaient une importance plus grande et une signification particulière. Selon Poush-Tedrow, il s’agit d’une personne aimée, respectée et valorisée qui procure à l’individu plus qu’à toute autre personne, amour, respect et valorisation.

Les participants disaient entretenir avec leurs enfants des relations efficaces de qualité plus qu’avec toute autre personne de leur réseau personnel : ils les identifiaient aussi en premier lieu comme personnes ressources. Ils étaient en relation régulière avec leurs enfants par des visites dont la fréquence variait entre deux à quatre visites une fois par semaine. Selon leurs dires, ils ont peu d’activités avec leurs enfants principalement à cause de leurs déficits physiques.

Deux des participants n’ont pas d’enfants et ont identifié comme personnes significatives pour eux des amis de longue date. Les contacts avec ceux-ci sont plutôt téléphoniques, les visites sont rares. Ces deux participants ont reconnu avoir reçu à l’occasion des services du réseau socio-familial de leurs amis.

Les différentes formes de support identifiées par les participants peuvent se regrouper selon trois dimensions : une dimension affective, une dimension matérielle et une dimension normative. Nous emprunterons à Lucien Bozzini et à Roger Tessier la définition qu’ils donnent à chacune de ces dimensions.
1. La dimension affective.
« On peut aider quelqu’un en l’aimant, en l’écoutant, en le réconfortant émotivement. »
2. La dimension matérielle.
« On peut aider quelqu’un en lui facilitant l’accès à certaines ressources matérielles, en agissant pour ou avec lui dans l’environnement pour le modifier favorablement. »
3. La dimension normative.
« On peut aider quelqu’un en validant son comportement de rôle, en lui suggérant des comportements adéquats eu égard à des modèles et à des normes de façon, entre autres, à maintenir élevée son estime de lui-même. »

En fait, toutes les rétroactions positives venant de personnes significatives contribuent à augmenter l’estime de soi… La rétroactivité des personnes significatives est incorporée à la vue de la personne sur elle-même. C’est pour renforcer les perceptions positives des participants que nous avons été chercher leurs sentiments face aux relations entretenues avec les personnes significatives pour eux. Ils ont pu constater qu’ils recevaient beaucoup de rétroaction positive des gens qui les entouraient et qu’ils étaient considérés comme très importants pour beaucoup d’entre eux.

Les participants de cet atelier se considéraient en général comme des êtres valables qui sont satisfaits de ce qu’ils ont réalisé dans la vie pour eux-mêmes, pour leurs enfants et pour leurs pays.


* à suivre *

mardi 21 septembre 2010

Vieillissement et le moment présent - 9e partie

Atelier 5 : Échange sur la façon dont se vivent les valeurs des années 1980 et rappels historiques de ses propres valeurs

Au stade de développement où il était rendu, le groupe connaissait une certaine intimité. Les participants s’exprimaient plus authentiquement sur leurs sentiments. Ils pouvaient aborder sans crainte excessive des sujets plus personnels, plus difficiles, tels que leurs peurs, leurs désirs, leurs banalités, leurs aspirations et leurs raisons de vivre.

Les participants à l’atelier appartenaient à cette génération qui avait des idées bien précises du bien et du mal et une éducation teintée de valeurs religieuses, du permis et de l’interdit, de ce qui se faisait et ce qui ne se faisait pas. Ils disaient avoir assisté à la mutation de leurs propres valeurs.

Les messages qu’ils recevaient des jeunes étaient qu’ils n’étaient plus dans la course. Leurs valeurs n’avaient plus cours. Ils n’appréciaient pas toujours l’éducation donnée à leurs petits-enfants et leur liberté excessive. Ils acceptaient mal la franchise de leurs propos ainsi que leurs comportements. Un participant a raconté qu’il tolérait mal que ses deux petits-enfants se servent dans son frigo sans sa permission. Il a avoué en même temps être plus irrité par l’attitude permissive des parents. Une autre dame a raconté avec humour son étonnement quand pour la première fois elle a croisé dans la rue des jeunes avec des cheveux colorés et des vêtements hétéroclites. Elle les a cru très instables et sans grande volonté de réussir dans la vie.

D’après les participants, le mode de vie actuel est dominé par une culture exclusivement orientée vers la jeunesse et ses valeurs.

Ils ont évoqué, pour étayer leurs affirmations, l’émergence d’un nouveau type de famille représenté par la jeune génération. Selon eux, ce type de famille est caractérisé par le travail de la femme à l’extérieur, et par le fait que celle-ci n’est plus identifiée à l’univers domestique. Les motivations de ces couples, d’après les participants, sont guidées par la recherche d’un plus grand bien-être matériel et l’accès à plus de loisirs. À l’opposé, les membres du groupe se sont félicités d’avoir pu élever de grosses familles dans des conditions plus difficiles que les couples d’aujourd’hui et sans aucune protection sociale. Nous avions renforcé chez eux le sentiment du devoir accompli et leur part énorme dans la construction de ce pays.

Ces changements qui sont survenus au niveau du couple s’accompagnent de problèmes sociaux que les participants disent n’avoir pas connu de leur temps. Il s’agit de la baisse généralisée de la durée des mariages, de l’augmentation du nombre d’enfants issus de ces foyers brisés et du taux élevé de délinquance juvénile qui en résulte.

Les participants avaient le sentiment que l’épanouissement individuel était à la mode et que le souci de la parenté était devenu secondaire. Ils avaient l’impression de gêner. Mais ils ont exprimé tout cela avec un sourire ou par une boutade.

La vie actuelle leur semblait bien compliquée; ils voyaient les jeunes sans emploi et parallèlement, le monde de la consommation qui les entourait. Comment s’en sortir? D’un côté, ils voulaient avoir tout tout de suite, mais de l’autre ils manquaient de moyens. Ils estimaient que les choses étaient plus claires de leur temps; ils devaient travailler dur, parfois dès l’âge de 14 ans, mais ils ne ménageaient pas leur peine alors que maintenant il leur semblait que la notion d’effort a disparu.

Les participants traduisaient par ces propos l’anomie de la société actuelle, son absence de normes.

La grande majorité des membres du groupe croyaient que le système de crédit diluait l’effort des jeunes, parce que s’endetter faisait partie des mœurs. Ils pensaient que la valeur sociale du travail n’est pas une préoccupation majeure pour les jeunes.

Les participants à l’atelier ont exprimé un certain désarroi et un sentiment d’insécurité face à l’agression venant de ces valeurs nouvelles auxquelles ils n’arrivaient pas à s’adapter et ne le voulaient pas non plus. Ils étaient sûrs de leurs convictions. Néanmoins, ils ne contestaient pas ouvertement ces valeurs, ils ne luttaient pas contre elles; ils les contournaient simplement ou pratiquaient l’évitement. C’est une attitude faite de distance intérieure, de résistance passive qui permet d’être étranger à ce qui paraît gênant.

Michel Maffessoli constate que cette attitude donne lieu à un « …rétrécissement sur le quotidien pour se protéger contre ce qui est extérieur ou surplombant ». En fait, le propre de cette attitude est de favoriser la préservation de soi.


* à suivre *

lundi 20 septembre 2010

Vieillissement et le moment présent - 8e partie

Atelier 4 : La signification du passé dans le présent vécu : le passé est invoqué comme support au présent

Il s’agissait dans cet atelier d’aider les participants à rassembler leurs forces pour pouvoir sauvegarder et protéger leur moi et mieux faire face au présent. C’est dans leur vie passée qu’ils ont trouvé cette base.

En effet, presque tous les participants vivaient le présent en référence à leur passé. Nous avons ressenti dans ce qu’ils ont exprimé que le passé était le lieu de leur identité sociale et individuelle.

Qu’ils proviennent d’un milieu rural ou de Montréal, les participants ont dit que leur identité était liée à leurs familles, à leur parenté et que la tradition leur dictait ce qu’ils devaient faire de leur vie.

Les histoires de vie des participants sont constituées de nœuds formés par les événements cruciaux comme l’âge d’entrée sur le marché du travail, le mariage, les décès et la grande dépression de 1929. Ils se sont exprimés sur ces faits qui ont ponctué leur vie comme ces vieilles dames dont nous a parlé Christian Combaz dans l’Éloge de l’âge : « …enfin toutes ces choses qui vous dévorent l’âme à trente ans et dont vous n’avez pas le cœur à rire, deviennent presque plaisanterie à soixante-dix. » (…) « Des fois, je me dis que c’est quelqu’un d’autre qui a vécu tout ça… ».

Une veuve de 75 ans a raconté qu’il était très courant dans son milieu que les jeunes soient impatients d’atteindre l’âge de 14 ans pour aller travailler, ceci dans l’unique but de participer à l’économie de la famille et à l’amélioration de son bien-être matériel. Elle dit s’être débrouillée toute sa vie avec peu de moyens.

Son expérience de vie lui a appris à aborder avec frugalité les problèmes existentiels et elle peut maintenant se contenter de joies simples. Peu de participants se sont plaints d’ailleurs d’insuffisance de revenus, bien que ceux-ci se limitent à une simple pension.

Les femmes du groupe ont échangé avec fierté sur leurs habiletés passées à refaire les vieux vêtements, les vieilles literies afin de reculer l’échéance de l’usure. Elles se sentaient complices; pouvoir faire de l’économie dans les choses courantes était une grande satisfaction dans leur vie. Le temps de ces femmes a toujours été captif des soucis familiaux et du travail.

Un homme de 75 ans, survivant d’une famille de cinq frères et sœurs, s’est exprimé ainsi en regardant les vieux albums de famille : « J’ai l’impression d’être le seul rescapé d’une catastrophe ». Il a ainsi souligné les effets néfastes du temps. Nous avons surtout exalté son courage et sa ténacité pour avoir su affronter toutes ces pertes. Suite à notre intervention, d’autres participants ont exprimé leurs sentiments dans le même sens, en se référant à leurs expériences personnelles. Ils se sont félicités d’avoir eu une bonne dose de courage pour affronter tous les événements de leur vie. En l’actualisant, ils pensaient pouvoir poursuivre avec la même détermination.

* à suivre *

vendredi 17 septembre 2010

Vieillissement et le moment présent - 7e partie

B. La répétition dans la quotidienneté

Nous vivons tous de la répétition dans notre vie de tous les jours. Notre univers spatio-temporel est structuré jusqu’à la retraite en fonction de l’objet du travail, l’heure du lever, du déjeuner, du transport, de la tâche à accomplir, des pauses et des départs. L’activité de travail est le structurant de notre vie quotidienne. Cependant, nous comprenons difficilement comment des personnes âgées qui jouissent de la possibilité d’occuper leur temps comme elles le désirent s’imposent une ponctualité même si personne ne les y oblige, une répétition dans les moindres gestes de leur vie que d’autres adultes actifs prendraient pour une contrainte.

C’est à ce type d’organisation quotidienne de leur vie que les participants aux ateliers sont confrontés. La routine commande presque tout : leurs gestes quotidiens, leurs courses, leur promenade, la récupération du courrier, le ménage, l’achat du journal, l’usage de la télé, etc., s’effectuent aux mêmes heures. Leurs journées sont stéréotypées et semblent se ressembler.

En effet, par leurs rituels de vie, ils ont tendance à immobiliser la vie autour d’eux. En d’autres termes, on peut dire qu’ils effectuent des mouvements en cercle pour ne pas s’éloigner de leur base. Ils semblent de prime abord vivre dans un présent statique, parce qu’ils ne remarquent plus les changements.

Au fur et à mesure que les participants s’impliquaient émotivement dans le déroulement de l’atelier, nous nous sommes aperçus que la routine ne leur était pas désagréable, que la répétition était une façon pour eux de ruser avec le temps, une façon de se protéger contre le temps qui passe et de gérer son angoisse face à l’accélération du temps. C’est une forme de résistance.

Michel Maffessoli nous suggère de « …comprendre la répétition comme la négation du temps » (…) « elle accentue le présent et son vouloir vivre. Répéter revient à nier le temps, c’est le signe d’un ‘non-temps’ qui caractérise le concret de la vie quotidienne, l’instant vécu ».

La répétition transforme le présent en une éternité, elle fait vivre les participants dans l’intemporel. « L’éternel retour permet à la vie sociale et individuelle de se rejouer toujours et nouveau. En ce sens, le passé et le présent maîtrisés comportent un présent éternel ».

Nous avons renforcé les sentiments exprimés voulant que la répétition apaise l’esprit des participants, les sécurise et peut être le lieu de la préservation de soi. Elle permet aussi de donner significations aux multiples situations et pratiques quotidiennes car « …dans la répétition s’exprime un relativisme créateur ». « La répétition archétypale ne signifie pas forcément stagnation, car il peut y avoir dans celle-ci réappropriation effective et originale de pratiques et de situations qui s’enracinent fortement dans une qualité de vie ».


* à suivre *

jeudi 16 septembre 2010

Vieillissement et le moment présent - 6e partie

Nous avons approfondi avec les participants cette dimension de la transcendance de soi évoquée par l’exemple précédent et nous les avons amenés à réfléchir sur une vision de la mort comme le prolongement de soi dans les autres.

Deux des participants ont pour leur part fait valoir des points de vue différents. Ils nous ont expliqué l’importance pour eux d’éviter de trop gesticuler dans leur vie de tous les jours. Ils ressentent le besoin de diminuer leurs activités, grandes consommatrices de temps, pour mettre l’accent sur les demandes qui leur sont faites sur leur temps et qui leur procurent des satisfactions existentielles, du plaisir ou une certaine utilité.

Prenons comme exemple le cas de cette dame célibataire de 78 ans. Elle habite seule un logement voisin de celui de sa nièce qui lui fournit de l’aide pour l’entretien ménager. Elle dit passer la majeure partie de ses journées à lire et avoue ‘bâcler’ les tâches ménagères qui ne l’intéressent pas. Elle a déjà subi une opération pour un glaucome qui a été un échec mais, malgré son handicap visuel, elle concentre ses efforts pour satisfaire son plaisir de lire en utilisant toutes sortes de matériel de compensation visuelle qu’elle achète ou qu’elle se fabrique. D’un autre côté, elle ne prend plus la peine de se préparer des repas élaborés, se limitant à l’essentiel.

Cette femme nous a donné l’impression de mener une vie réellement épanouissante malgré ses déficits. Au cours de cet atelier, nous avons fait remarquer aux participants que le fait pour eux de s’abandonner à des sentiments négatifs, comme la démission face aux difficultés de l’existence et les sentiments d’inutilité, les soumettait aux influences de ces sentiments. Nous les avons amenés à prendre conscience qu’ils pouvaient au contraire se laisser gagner par ce qui les entoure, qu’ils pouvaient rechercher les environnements et les circonstances qui donnent du plaisir à l’existence. Nous les avons encouragés à s’aménager en espace vital pour rendre le quotidien plus agréable et acceptable.

Pour accomplir cela, certains membres du groupe ont souligné qu’ils se butaient à leurs déficits fonctionnels. Nous avons émis l’idée qu’il ne fallait rien exiger de son corps qui ne fût à sa portée, qu’il fallait apprendre à vivre avec ses capacités d’autonomie restantes. « On peut continuer à aller au bingo en fauteuil roulant avec l’aide de bénévoles ou du transport adapté », comme l’a souligné un des participants.


* à suivre *

mercredi 15 septembre 2010

Vieillissement et le moment présent - 5e partie

A. le vécu quotidien

Quatre des six participants ont exprimé sur le vécu quotidien des réactions que l’on peut regrouper autour des trois idées suivantes :

L’appréhension face à la journée qui commence
Dès les premières heures de la matinée, les participants disent voir se dérouler leur journée avec ses problèmes et éventuellement ses crises. Ils se sentent habités par les menaces de circonstances plus âpres et plus impitoyables, comme la réactivation de malaises physiques, de difficultés de fonctionnement, de solitude, etc.

Les frustrations par rapport à l’accélération du temps.

Les participants se fatiguent de constater qu’ils n’avancent pas dans une journée et que le temps passe plus vite. Ils attribuent cela au fait qu’ils ont moins de capacités physiques pour effectuer les mêmes tâches qu’auparavant, qu’ils se fatiguent à les accomplir et prennent donc plus de temps pour y arriver. Ils s’énervent à penser qu’à la fin de la journée, ils n’auront pas eu le temps de faire ce qu’ils avaient prévu de faire. Effectivement, une partie du travail reste inachevée à cause de leur épuisement et, en le constatant, ils sont quelque peu pris de panique à l’idée de ne plus pouvoir maîtriser leurs activités quotidiennes.

Le sentiment que plus ils avancent en âge, plus le temps est limité.

Au cours de cet atelier, il s’est dégagé chez les participants le sentiment très net que leur propre durée est comptée et que chaque jour qui passe ampute ce qui en reste. « Le temps n’est plus pour eux un chemin que l’on suit mais un panier où l’on puise ».
Les récits des faits quotidiens par les participants ont traduit cette tension qui existe entre la conscience de leurs limites et le vouloir de vivre. Ils ont exprimé un scepticisme sans illusion sur ce qui leur reste encore à entreprendre. Pour certains, il est trop tard pour tout.

Les propos d’une dame de 70 ans sont révélateurs. Cette personne est veuve, vit seule et sans enfant. Elle souffre d’arthrose à un degré avancé et a connu un épisode d’accident cérébro-vasculaire; elle circule en fauteuil roulant. Elle nous dit que les seuls signes tangibles du passage du temps pour elle sont la prise de médicaments et les repas. Ses contacts avec l’extérieur se limitent à ses traitements à l’Hôpital une fois par semaine et aux visites de son frère. Son attente face à la vie est de voir son unique nièce terminer ses études universitaires et se marier. Elle se projette dans celle-ci, mais elle craint que ce projet qui s’inscrit dans le futur ne soit pas réalisable. Cette dame a trop conscience de ses limites pour prétendre agir sur les événements.


* à suivre *

mardi 14 septembre 2010

Vieillissement et le moment présent - 4e partie

Sélection des participants

Les futurs membres des ateliers de groupe ont été choisis parmi les clients du service social de l’Hôpital de jour. Leur sélection s’est fait en fonction des plaintes et des insatisfactions exprimées face à un vécu du temps présent non significatif par rapport à leur passé. Ces mêmes clients disaient avoir de la difficulté à maintenir les acquis obtenus à l’Hôpital de jour.

La plupart des bénéficiaires sélectionnés se connaissaient, ayant déjà eu l’occasion d’échanger à la salle d’attente de l’Hôpital de jour. Chaque participant a été informé des objectifs du projet au cours d’une rencontre individuelle et a été invité à faire un investissement affectif dans les ateliers. Nous lui avons précisé à cet égard qu’il devrait échanger sur les événements significatifs de son passé, sur les hauts et les bas de sa vie de tous les jours, sur sa perception des gens qui l’entourent et sur les valeurs qui se vivent actuellement.

Nous avons sélectionné six femmes et deux hommes ayant entre 70 et 78 ans. Deux des femmes sélectionnées se sont désistées, l’une pour des raisons de santé et l’autre ne se disant pas prête à faire une telle expérience de groupe.

Les animations ont eu lieu les vendredis de 13h30 à 15h00, le transport étant assuré par l’Hôpital de jour.

Analyse des ateliers

Nous avons eu sept rencontres d’animation avec le groupe. Cependant, nous ne nous proposons pas d’analyser dans cet article l’ensemble de ces rencontres. Notre attention se porte plus spécifiquement sur les ateliers 3, 4, 5 et 6 qui, selon nous, ont le plus favorisé l’expression du vécu émotionnel des participations face au passage du temps présent. L’atelier 7 était un atelier contrôle : il reprenait une activité de complétion d’un test qui s’est déroulée à l’atelier 1.


Atelier 3 : Les réactions affectives des participants envers le vécu quotidien, les gestes quotidiens, l’organisation et la planification de la vie quotidienne.

Cet atelier avait pour but, d’une part de favoriser l’expression des affects sous-jacents au mode de vie actuel des participants et de renforcer leur satisfaction à ce sujet. Il visait, d’autre part, à éveiller les participants aux possibilités de satisfaction dans la vie quotidienne.

Les membres du groupe ont fait un bref retour sur le deuxième atelier pour dire que ceux de leur génération qui se bercent à longueur de journée en répétant : « Je suis malade » connaissaient déjà la mort psychologique parce qu’ils n’avaient aucune motivation à entreprendre quoi que ce soit.

Les échanges entre les participants dans cet atelier ont été principalement tournés autour de deux axes majeurs de discussion : le vécu quotidien et la répétition dans la quotidienneté.


* à suivre *

lundi 13 septembre 2010

Vieillissement et le moment présent - 3e partie

Objectifs

Dans cette expérience de groupe, nous avons poursuivi les objectifs suivants :
1. Faciliter une meilleure adaptation sociale et psychologique des participants au passage du temps présent :
2. Les aider à donner plus de consistance et d’orientation à leur vécu quotidien;
3. Les amener à valoriser les éléments favorables de leur environnement et de leur autonomie physique.

Sous-objectifs

Les trois sous-objectifs suivants devaient nous permettre d’atteindre les objectifs que nous venons d’énumérer :
• Aider les participants à assumer le deuil de ce qu’ils ne sont plus pour qu’ils puissent davantage investir dans ce qu’ils sont encore. En d’autres termes, nous avons cherché à les amener à regarder ensemble ce qui leur est encore possible plutôt que d’insister sur ce qui ne l’est plus.
• Les encourager à prendre confiance en leurs moyens.
• Leur faire prendre conscience que le fait de vieillir ne doit pas rendre passif, désengagé, résigné et qu’on peut avoir un vécu de satisfaction relié au quotidien.

Moyens

Afin de transformer la situation actuelle que vivent certains clients de l’Hôpital de jour et atteindre les objectifs que nous venons de décrire, nous avons choisi d’organiser des rencontres hebdomadaires de groupe d’une durée d’une heure et demie. Nous avons sélectionné six à huit patients parmi notre clientèle de l’Hôpital de jour pour composer le groupe.

Au cours des rencontres hebdomadaires, nous avons voulu amener les participants à échanger sur leur fonctionnement quotidien. Les échanges ont été axés sur le mode de vie actuel des participants, sur des rappels historiques des événements et des expériences de leur passé et sur la façon dont ils ont résolu les crises et les problèmes du passé. Cela devait, nous l’espérions, valoriser leur capacité de survie, leur courage, leur détermination, leur ténacité, leur endurance et, de façon plus générale, la manière dont ils avaient affronté jusqu’à présent les événements de leur vie.


* à suivre *

vendredi 10 septembre 2010

Vieillissement et le moment présent - 2e partie

Pour E. Casseus, l’intervenant auprès des personnes âgées devra donc aider celles-ci à restructurer leur identité perdue par une relecture de leur passé, comme il devra tenir compte des affects sous-jacents au sentiment d’un avenir qui rétrécit et qui fuit. C’est là tout le soutien à apporter au vécu émotionnel du temps des personnes âgées de l’Hôpital de jour pour faciliter leur adaptation dans le temps présent et faire en sorte qu’elles actualisent leurs potentialités et ce, pour mieux profiter des traitements et éviter le repli sur soi et la régression, ces personnes étant aux prises avec des perspectives d’avenir qui évoquent pour elles l’idée de la mort, le sentiment de finitude et de néantisation.


Deux chercheurs québécois font remarquer dans une étude que les sujets québécois (de cette étude) éprouveraient des difficultés relativement sérieuses, presque problématiques, à vivre dans le présent, à être assidûment en contact avec leur vécu immédiat et donc à en prendre conscience et à agir en fonction de lui.

Selon ces chercheurs, les personnes âgées participantes « …auraient plutôt une tendance non actualisante à vivre soit en fonction du passé fait de regrets, de nostalgie, de sentiments de culpabilité ou de ressentiment, soit en fonction de l’avenir avec des attentes, des anticipations, des projets idéalistes, des appréhensions ». S’appuyant sur cette recherche et notre connaissance de la clientèle, le projet part de l’hypothèse selon laquelle les personnes âgées ont une tendance à vivre en fonction du passé et nourrissent des craintes face au futur. Nous tenterons cependant, par notre démarche de groupe avec les participants, de renforcer le sentiment d’exister dans le présent.

Nous avons observé que l’attitude de certains bénévoles de l’Hôpital de jour face au temps n’encourageait pas les bénéficiaires à maintenir leurs acquis. Selon le point de vue qu’ils ont exprimé, leur suivi à l’Hôpital ne représentait qu’un acte ponctuel, une simple sortie. Leurs propos illustrent que ces personnes ont tendance à désinvestir et à adopter une attitude de vie qui peut se résumer à : « À quoi bon ? »

Notre observation de la clientèle nous a permis aussi de constater que celle-ci désire donner plus de consistance, de vigueur et d’orientation à sa vie de tous les jours. Ces personnes expriment le besoin de reprendre confiance en leurs moyens, leurs capacités de survie, leur courage et leurs convictions pour continuer à mieux affronter la vieillesse. Elles souhaitent pouvoir revaloriser les éléments favorables de leur environnement et de leur autonomie physique.

C’est pour faciliter l’adaptation sociale et psychologique de cette partie de la clientèle de l’Hôpital de jour au passage du temps présent que nous avons entrepris la démarche de groupe dont nous vous présentons maintenant les résultats.


* à suivre *

jeudi 9 septembre 2010

Vieillissement et le moment présent - 1e partie

Le vieillissement et le moment présent


« …la personne âgée a conscience, d’une certaine façon, du rapprochement du
terme de son existence. Cette angoisse de mort quasi constante chez le sujet
vieillissant n’a pas de traitement spécifique : seule l’écoute bienveillante
avec son contact de sympathie réelle peut l’adoucir ».
En effet, nous avons observé que la question centrale, pour certaines personnes âgées de notre clientèle à l’Hôpital de jour, en est une qui a trait à leur vécu émotionnel du temps comme facteur lié à l’idée de finitude, de néantisation et à la remise en cause de l’identité personnelle et sociale.

Selon-Houde : « Le sens du temps joue une rôle dans la transformation de l’identité au cours de la vie adulte ». Elle émet l’hypothèse qu’à partir de 50 ans, c’est la vie dirigée de l’intérieur qui prévaut, l’intériorité de l’être prenant le dessus sur les autres préoccupations.

Pour cette auteure, cette transformation de l’identité coïncide avec la formation d’un cadre de référence non compétitif qui prend parfois les accents de l’expérience religieuse. La personne en vient à s’accepter davantage : « C’est ainsi que va le monde. Et me voilà comme je suis ». Elle le fait sans pointe de résignation, mais au contraire avec une reconnaissance positive : « C’est moi ça », appuyée par le sentiment que le sens que l’on donne aux choses réside à l’intérieur de nous-mêmes.

Cette intériorité est renforcée aussi par le fait que l’horizon des personnes âgées est restreint parce qu’il est très rapproché de leur espérance de vie et de la fin de leur existence. La projection dans le futur est limitée comme ‘un fond’ qui n’a ni contours ni limites et provoque un sentiment de néantisation; il se désorganise aussi comme projet. Leurs préoccupations se situent le plus souvent dans un futur relativement très rapproché.

« L’avenir devient une instance temporelle qu’il faut repousser ou, du moins, ne plus considérer. L’avenir sera certainement, par la charge anxieuse qui l’accompagne, un élément de crise et de destructuration de la notion de présent. Il s’agira donc d’une perte de l’identité qui s’y rattachait et d’une impossibilité d’exister, de se savoir exister ».


* à suivre *

mercredi 8 septembre 2010

IDENTITÉS CULTURELLES - 5e partie

DIALOGUE

L David : Vos écrits passionnants m’ont toujours plu, ils sont d’actualité et m’aident à vivre. Aussi, je vais essayer de profiter de votre expérience pour vos poser quelques questions :

Tout comme vos confrères ethnoculturelles, vous avez souvent rappelé que les zones aveugles de la culture québécoise nous empêchent de comprendre la culture de l’autre. Quels seraient ces zones aveugles?

Pierre E Constant : Celle qui m’apparaît primordiale, c’est la difficulté de prendre conscience de notre ethnocentrisme.

L David : C'est-à-dire la tendance à présumer que l’autre est comme soi?

Pierre E Constant : Tout à fait si l’autre n’est pas comme moi, c’est qu’il lui manque quelque chose et ce quelque chose il a intérêt à l’adopter au plus vite…c’est lui qui n’est pas correct. Cela peut se traduire de manière particulièrement éloquente dans la notion qu’on se fait du corps dans une culture donnée. Ainsi, du pont de vue de ma culture d’origine, on a l’impression que la culture nord-américaine souffre d’un « blocage négation » dans ses rapports au corps énergétique par exemple. Mais il y a aussi certains aspects troublants de « votre » réalité qu’un regard transculturel aiderait à éclairer : la phobie de la mort (qui nous coûte une fortune) l’approche de suicide, la violence indicible des rapports mère-fille, les rapports famille-société, le contexte particulier de l’inceste et des abus sexuels, le détournement de la pulsion artistique etc.

L David : Vous parlez de la convivialité un peu comme d’un remède à l’ethnocentrisme d’un mode d’enrichissement mutuel.

Pierre E Constant : En effet, si nous sommes réunis autour de la même table à partager le même repas, l’immigrant y transmettra sa ressemblance et sa différence….

L David : Mais certains pourront se dire de façon primaire « je ne l’ai pas invité, je ne suis pas allé le chercher, qu’il s’adapte! »

Pierre E Constant : C’est exact. Mais là aussi il est urgent que média et hommes politiques soient honnêtes et « systémiques »…Cessons de nous raconter des balivernes : s’il est vrai que le Canada et le Québec sont exceptionnellement généreux envers les réfugiés, il n’en demeure pas moins que la vérité pure et dure de l’immigration est que nous écrémons les jeunes élites des pays en voie de développement pour qu’elles payent nos pensions de vieillesse – surtout depuis que nous sommes devenus incapables de nous reproduire nous-mêmes…cela les médias ne le disent pas! Pas plus d’ailleurs qu’ils n’indiquent que l’état des « pays sous-développés » « est lié » à un ordre mondial dont les pays riches tirent les ficelles.

mardi 7 septembre 2010

IDENTITÉS CULTURELLES - 4e partie

UN PACTE CIVIQUE

Pour la directrice du CRIEC, le grand défi en matière d’intégration consiste à promouvoir un pacte civique commun à tous, fondé sur un socle de principes et de valeurs politiques fondamentaux auxquels les citoyens seraient invités à adhérer, en dépit de leurs différences : la laïcité, le français langue officielle, la résolution pacifique des conflits, le pluralisme, l’égalité entre les hommes et les femmes, le respect des droits fondamentaux de la personne, ainsi que celui des droits des autochtones et de la minorité anglophone « Aucun accommodement ne devrait aller à l’encontre de ces valeurs. Et c’est autour d’elles que peuvent se rassembler des gens ayant une histoire et une culture différentes. »

L’ouverture au pluralisme peut se concilier avec la volonté d’affirmation culturelle et politique de la majorité franco-québécoise, affirme Éric Bédard, professeur d’histoire à la TÉLUQ. Mais les Québécois doivent mieux expliquer aux nouveaux arrivants qui ils sont, précise-t-il. « Le message est souvent confus. On sabre dans les programmes de francisation, on crée un nouveau programme d’enseignement de l’histoire au secondaire qui insiste davantage sur l’histoire de la modernité occidentale que sur le récit national des Canadiens français. Ce n’est pas ainsi que l’on fera connaître aux néo-Québécois les grandes particularités de la société d’accueil, soit son histoire, sa culture et sa langue. »

Selon Jacques Beauchemin, si les Québécois doivent s’ouvrir au pluralisme, ils doivent aussi s’assumer, sans mauvaise conscience, et reconnaître dans leur histoire un parcours singulier et inachevé. « L’histoire est comme un train en marche et permet à ceux qui le veulent d’y monter depuis la gare de leur choix, avec leurs différences et leurs convictions. Il est parfaitement possible pour un Québécois qui n’est pas de souche canadienne-française de s’associer à l’histoire québécoise, il pourra notamment y reconnaître un parcours qui, sans être le sien propre, évoque celui de tous les peuples minoritaires animés du désir de durer dans l’histoire. »

Le combat pour assurer la pérennité d’une société francophone en Amérique du Nord, le mouvement inachevé vers la sécularisation, le développement d’un projet politique national reposant sur une volonté d’autonomie ou d’indépendance…tous ces traits font partie de l’identité québécoise, note Micheline Labelle. Avec son collègue Éric Bédard, elle croit qu’un débat sur un éventuel projet de constitution québécoise, charte du vivre-ensemble, permettrait de rappeler ces particularités et de définir les valeurs collectives que le Québec veut se donner.

« Que partagent les Québécois et les immigrants? Se demande Agusti Nicolau Coll. La Charte des droits et des libertés, c’est l’apéro, car un peuple n’est pas qu’une addition de droits individuels, dit-il. Il faut aussi le plat de résistance, soit la mémoire et la culture qui sont portées par chacun d’entre nous. Moi, j’ai commencé à comprendre ce qu’est le Québec en lisant la poésie de Gaston Miron. »


« L’histoire est comme un train en marche et permet à ceux qui le veulent d’y monter depuis la garde de leur choix, avec leurs différences et leurs
convictions. Il est parfaitement possible pour un Québécois qui n’est pas de souche canadienne-française de s’associer à l’histoire québécoise. Il pourra notamment y reconnaître un parcours qui, sans être le sien propre, évoque celui de tous les peuples minoritaires animés du désir de durer dans l’histoire. » - Jacques Beauchemin, professeur au Département de sociologie.

* à suivre *

lundi 6 septembre 2010

IDENTITÉS CULTURELLES - 3e partie

Pour Yolande Geadah, deux pièges sont à éviter : le racisme (« Les immigrants sont tous pareils ») et le relativisme culturel (« satisfaire toutes leurs revendications pour ne pas les stigmatiser »). Elle estime que les Québécois ont le droit d’exprimer un malaise face à des revendications qui remettent en question des valeurs démocratiques, comme l’égalité entre les hommes et les femmes. « Pour protéger l’espace public de l’empiètement du religieux, il faut rejeter certaines demandes concernant le port de symboles religieux dans les institutions, affirme-t-elle. Il faut refuser la séparation des sexes dans l’espace public, l’aménagement de salles de prières dans les écoles et l’application de principes religieux au plan juridique comme c’est le cas dans les tribunaux islamiques. »

Agusti Nicolau Coll est en faveur de la déconfessionnalisation des institutions, mais ne croit pas qu’il faille interdire pour autant toute manifestation du religieux dans l’espace public. « Pourquoi une dimension aussi importante que la religion devrait être confinée à la sphère privée? Dans une société pluri-religieuse, les institutions doivent s’adapter à la diversité tout en assurant que certaines demandes d’accommodements n’entravent pas leur fonctionnement », soutient-il. Instructeur d’une équipe de soccer dans ses temps libres, il n’interdirait pas à une joueuse musulmane de porter le foulard islamique si elle le désire.


« Ce qui m’inquiète surtout, c’est moins le fait de permettre à des jeunes
filles de porter le hidjab à l’école, par souci d’inclusion, que l’augmentation
du nombre d’écoles confessionnelles privées financées par l’État, dit Micheline
Labelle. Ces écoles sont passées d’une trentaine, il y a quelques années, à une
soixantaine aujourd’hui. »


* à suivre *

vendredi 3 septembre 2010

IDENTITÉS CULTURELLES - 2e partie

UN SENTIMENT D’INSÉCURITÉ

Sa collègue Micheline Labelle, directrice du Centre de recherche sur l’immigration, l’ethnicité et la citoyenneté (CRIEC), n’est pas d’accord. Elle insiste sur le caractère émancipateur des revendications afro-américaines, du mouvement des femmes ou des peuples autochtones, qui reposent sur des valeurs universalistes de justice et d’égalité, et dénonce la montée, depuis une vingtaine d’années, d’une pensée conservatrice qui perçoit les revendications identitaires comme des facteurs de fragmentation sociale et politique. « Plus récemment, souligne la sociologue, les attentats du 11 septembre 2001 ont engendré un discours réducteur sur le choc des civilisations, contribué au durcissement des politiques d’immigration et alimenté un sentiment d’insécurité au sein de la population. »


« Ce qui m’inquiète surtout, c’est moins le fait de permettre à des jeunes
filles de porter le hidjab à l’école, par souci d’inclusion, que l’augmentation
du nombre d’écoles confessionnelles privées financées par l’État. Ces écoles
sont passées d’une trentaine, il y a quelques années, à une soixantaine
aujourd’hui. » - Micheline Labelle, professeure au Département de sociologie et
directrice du Centre de recherche sur l’immigration, l’ethnicité et la
citoyenneté »


Mais comment expliquer que les Québécois francophones, en particulier, réagissent si vivement aux accommodements raisonnables? Selon Jacques Beauchemin, cette sensibilité exacerbée est liée à un sentiment de fragilité identitaire propre aux petites nations. « Bien que les Québécois francophones aient appris à s’affirmer depuis 40 ans, ils vivent encore une profonde insécurité, note-t-il. Un Américain ne se demande pas s’il pourra encore, dans 50 ans, parler anglais dans son pays, alors que de nombreux Québécois s’inquiètent pour la survie de la langue française. »

Le fait que les Québécois forment une minorité au Canada et en Amérique du Nord contribue certainement à leur malaise identitaire, admet Micheline Labelle. « C’est le cas également d’autres populations minoritaires, tels les Catalans et les Irlandais qui doivent, eux aussi, intégrer de nouveaux arrivants tout en cherchant à préserver leur identité nationale. »

D’origine égyptienne, la chercheuse Yolande Geadah, membre associée de l’institut de recherches et d’études féministes (IREF) de l’UQAM, vit au Québec depuis 40 ans. Oeuvrant dans le domaine du développement international et des relations interculturelles, elle est l’auteure d’un essai intitulé Accommodements raisonnables. Droit à la différence et non différence des droits, qui critique sévèrement cette notion juridique qualifiée de « logique individualiste des droits ». « Tout en visant l’inclusion restreinte des immigrants à court terme, on ignore les objectifs d’intégration à long terme », dit-elle, ajoutant que le gouvernement a le devoir de financer adéquatement des programmes qui facilitent l’intégration économique des nouveaux arrivants, condition importante pour éviter la ghettoïsation.


* à suivre *

jeudi 2 septembre 2010

IDENTITÉS CULTURELLES - 1e partie

LE CHOC DES IDENTITÉS

C’est quoi pour vous?

On pouvait lire sous la plume de Claude Gauvreau que l’intégration des immigrants, relations interculturelles, identité québécoise, laïcité…autant de sujets qui soulèvent les passions depuis le débat déclenché il y a un an par la question des accommodements raisonnables. Quels rapports établir entre la majorité francophone et les minorités ethnoculturelles et religieuses? Comment concilier le respect des différences et la préservation de valeurs communes? Comment s’ouvrir à l’autre sans se renier soi-même?

Ces questions, sur lesquelles ont pu se pencher la Commission présidée par Gérard Bouchard et Charles Taylor, surgissent dans une société de plus en plus confrontée au pluralisme des identités. Sur les 42,000 nouveaux immigrants que le Québec accueille en moyenne chaque année, la majorité provient de l’Afrique et de l’Asie et non plus de l’Europe, culturellement plus proche de nous. Mais le choc des identités auquel on a assisté depuis quelques mois est également le reflet d’un contexte politique favorable à l’expression des différences.

« Depuis les années 60 et 70, l’espace politique en Occident s’est reconfiguré autour des revendications identitaires », affirme le professeur de sociologie Jacques Beauchemin. Après les luttes menées par les Noirs américains et par le mouvement des femmes pour l’égalité sociale et sexuelle, on a vu, dit-il, se multiplier les groupes exigeant le respect de leur différence : jeunes, homosexuels, membres de minorités ethniques ou religieuses. Or, une société qui se définit uniquement dans la diversité, sans lieu de rassemblement, peut difficilement porter un projet d’avenir. « La reconnaissance élargie des droits de chacun est devenue le seul projet que poursuivent les sociétés multiculturelles comme le Canada et le Québec », déplore Jacques Beauchemin.

« Le message est souvent confus. On sabre dans les programmes de
francisation, on crée un nouveau programme d’enseignement de l’histoire au secondaire qui insiste davantage sur l’histoire de la modernité occidentale que sur le récit national des Canadiens français. Ce n’est pas ainsi que l’on fera connaître aux néo-Québécois les grandes particularités de la société d’accueil, soit son histoire, sa culture et sa langue. » - Éric Bédard, professeur d’histoire à la TÉLUQ.


* à suivre *

mercredi 1 septembre 2010

LES TEMPS DU VERBE - 2e partie

4. Les gars construi____ un canot et l’endui____ de goudron (verbes au passé simple).
1 rent, sirent
2 sirent, rent
3 rent, rent
4 sirent, sirent

4. Rép. : construisirent, enduisirent
Mais : Ceci fait, ils s’enfuirent
Rem. : Les verbes en UIRE : CONDUIRE, CONSTRUIRE, NUIRE, CUIRE, etc. se terminent par UISIS, UISIS, UISIT, etc., au passé simple. Les verbes FUIR et S’ENFUIR se terminent par UIS, UIS, UIT, etc., au passé simple.


5. De telles calomnies nui_____ à sa réputation.
1 sirent
2 rent
3 (au choix)
4 (autre chose)

5. Rép. : nuisirent
Rem. : Les verbes en UIRE : CONDUIRE, CONSTRUIRE, NUIRE, CUIRE, etc. se terminent par UISIS, UISIS, UISIT, etc., au passé simple.
Mais : On assiste ici à une lutte entre les grammairiens (NUISIRENT, seul conforme à la règle et à Littré) et le peuple (NUIRENT, plus simple). Esquivant le problème, beaucoup d’écrivains évitent d’employer LUIRE, CUIRE et NUIRE au passé simple…
Et : Remarquer que la forme écourtée est équivoque aux personnes du sing. : JE NUIS, TU NUIS.