mardi 10 janvier 2012

LA DÉTRESSE DES HOMMES - 26e partie

LA DÉTRESSE DES HOMMES VS PAUVRETÉ ET VIOLENCE

"Cette constatation nous suggère que le stress engendré par la pauvreté pourrait être épargné à un nombre important de familles si les politiques économiques de notre société visaient à empêcher les familles de tomber sous la barre critique d'un revenu insuffisant durant certaines périodes de transition."

"Une autre raison explique le scepticisme de plusieurs à vouloir attribuer à la pauvreté économique un poids important dans l'explication de la violence familiale. Même si la relation est forte, elle n'est pas pour autant comprise, ni exclusive, après tout, la très vaste majorité des familles pauvres ne présentent pas de violence."


"Les mécanismes qui font de la pauvreté un élément de risque dans le genèse de la violence sont peu ou mal connus. On affirme le lien, mais on tente rarement d'en expliquer les processus. L'état de la recherche nous permet cependant d'avancer avec plus de fermeté des hypothèses explicatives aptes à mieux nous faire saisir la dynamique engendrée par la pauvreté dans certaines familles."

"La pauvreté c'est comme une courbe réputée dangereuse sur une route nationale, disait l'autre. Bien que les automobilistes soient avertis par des poteaux indicateurs de la difficulté de la courbe, bon an mal an, on rapporte un nombre plus élevé d'accidents mortels sur ce segment de la route que n'importe où ailleurs. Tous les automobilistes ne s'y cassent pas la figure."

"La pauvreté engendre des problèmes au niveau des ressources personnelles, des ressources sociales et des ressources familiales elles-mêmes. Parce que la pauvreté ne dure pas longtemps pour certaines familles, ou parce qu'elles ont en réserve des ressources financières, personnelles sociales ou familiales qui leur permettent de mieux résister au stress de la pauvreté, certaines familles s'en tirent mieux que d'autres. Mais cela ne devrait pas nous faire oublier que le risque de discorde ou de violence n'en demeure pas moins plus élevé pour les familles placées en situation de pauvreté. Les données sont impitoyables: comme dans le cas des courbes dangereuses, il nous est possible, à partir du taux de familles pauvres dans les voisinages, de prédire avec énormément d'exactitude là où l'on trouvera le plus d'accidents intra-familiaux durant les six prochains mois."

"En reconnaissant ce lien, ce ne sont pas les familles pauvres que l'on interpelle; c'est plutôt la situation qui leur est faite qui est mise en cause. Se cacher cette partie de la réalité nous éloigne d'interventions socio-économiques nécessaires à la prévention de la violence familiale. La résistance à reconnaître l'impact négatif de la pauvreté sur la qualité des relations entre les membres de la famille permet ou conduit l'ensemble de la société à retarder le moment où elle devra prendre des décisions majeures concernant la prévention des incidents de violence intra-familiale, car, il faut bien le constater et mesurer le formidable effort de changement que cela implique; si une cause importante de la détérioration des relations familiales est d'ordre économique, c'est aussi à ce niveau que doit porter l'intervention préventive."

"En refusant de reconnaître ou en ignorant cette relation entre la misère économique et la misère dans les relations entre les membres des familles ou a cru longtemps, et souvent en toute bonne foi, protéger la réputation de ces personnes. Toutefois, ce faisant, on obtient exactement l'effet inverse. Ne pas vouloir divulguer cette réalité de crainte d'accabler les familles pauvres, c'est implicitement donner crédit à ceux qui mettent le blâme sur les familles plutôt que la situation très éprouvante dans laquelle elles se retrouvent. On est en fait alors confiné à développer des programmes qui s'attaquent aux prétendus déficits ou faiblesses de ces familles."


Les tergiversations concernant le poids réel joué par la pauvreté dans 'l'acidification' des relations intra-familiales n'est pas sans évoquer les lenteurs à reconnaître le rôle des pluies acides dans la détérioration et le déséquilibre de l'écosystème arboricole et aquatique.
Cette résistance tient aussi à la représentation que l'on se fait de la pauvreté. Les pauvres seraient des personnes qui vivraient sous le seuil de la pauvreté depuis longtemps, qui recevraient des prestations d'assurance chômage ou de bien-être social durant de longues années et qui partageraient de génération en génération des valeurs culturelles et sociales qui en feraient un sous-groupe à part. Or, les études viennent complètement bouleverser cette représentation. On estime à cinq pourcent à peine les familles qui correspondent à cette image d'une pauvreté chronique, presque apprise et enfermée dans un cercle de transmission intergénérationnelle. Les personnes pauvres, qui représentent grosso modo le quart de la population totale d'une métropole comme Montréal, le deviennent en grande majorité lorsqu'il y a rupture familiale, ajout d'un membre, ou perte d'un emploi.
Ces situations se redressent après quelques mois pour les uns ou plus longtemps pour d'autres dépendant de leur succès à se retrouver un emploi ou à s'accaparer un travail plus rémunérateur. Le groupe des personnes pauvres est un groupe mouvant, beaucoup plus hétérogène que prétendu; sur dix personnes pauvres cette année, trois ou quatre de ces personnes le seront encore l'an prochain. Les autres s'en seront sorties et seront remplacées par de nouvelles familles.



"Les expressions de violence prennent la forme d'agressions psychologiques, physiques et sexuelles.
Ce mot évoque des notions comme : attaque, virulence, démesure, brutalité, contrainte, abus, hostilité, agressivité, guerre. L'idée contraire est exprimée par les mots : douceur, mesure, calme, paix. D'aucuns s'entendent pour dire que si tout homme possède un "instinct inné d'agressivité", cette agressivité peut dégénérer en violence lorsqu'il y a débordement d'émotions, de passions. Face à cette violence, nous sommes amenés à l'une ou l'autre des réactions suivantes : la fuite ou la contre attaque."

"En chaque femme battue, il y a la honte, non plus tellement celle de son image sociale, mais la honte d'avoir été battue. Dans les violentes batailles conjugales, il n'y a pas de gagnants et encore moins de bonnes perdantes! L'amour que la femme attend la distrait de la honte et de la colère qu'elle ne montrera pas à cet homme qui, après sa brève et dérisoire victoire, s'offre à elle repentant et souvent aimant. Ainsi, l'homme violent opère quérir rapidement le pardon auprès de sa partenaire pour un acte qu'il a commis et vis à vis lequel il peut éprouver de la culpabilité. Le pardon de sa compagne lui permet souvent l'évitement du sens de responsabilité eu égard à sa violence."


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