dimanche 26 février 2012

LA DÉTRESSE DES HOMMES - 47e partie


CROÎTRE
Ne nous fions pas aux apparences: maladies et crises de tous genres ne signifient pas désordre - seule est désordonnée la matière inerte (Charon, 1976) dont les molécules figées sont distribuées au hasard.  La structure de tout être vivant est organisée, ordonnée vers un but précis : participer par son action à l’action de son milieu environnant. La qualité de cette participation va déterminer la qualité de croissance de l’être et, par conséquent, la qualité de sa vie.
Lock Land (1973) perçoit trois alternatives de croissance. La plus élémentaire, la forme “d’accrétion”, est une tentative d’expansion de soi.  À ce stade, l’organisme vivant cherche à amplifier son volume et l’être humain cherche à étendre sa puissance.  Dans une forme supérieure de croissance que Lock Land nomme “réplicative”, l’être vivant tente d’essainer dans l’environnement des copies exactes de lui-même.  L’être humain de ce stade ne s’accoie qu’avec des gens qui partagent ses propres vues.  La forme la plus élevée de croissance, dite de “mutualité”, est basée sur l’échange entre le moi et le monde extérieur.  L’ëtre se transforme et grandit à travers ses multiples expériences avec l’environnement , l’environnement se transforme avec lui.  Dans les systèmes biologiques, ce sont ces dernières formes de croissance, assure Lock Land, qui se développent avec le plus de succès, le fait d’affecter les autres et d’ëtre affecté avec eux dans l’échange et le partage.
Le comportement humain ne se manifeste pas seulement dans le développement de l’autonomie ou la manifestation de son contraire, la dépendance, constate Argyal (1965) .  L’homme adulte ne fait pas que s’affirmer, devenir maître de soi, agir en être libre.  Il éprouve aussi la soif de se trouver une place dans l’environnement, il se bat pour avoir un sentiment d’appartenance: C’est ce qu’Argyal (1965) dénomme l’homonomie, ce que Lard Land (1973) appelle la mutualité, ce besoin de faire partie d’un tout qui est plus grand que nous-mêmes. Et (Charon 1974), en donnant l’exemple de la cellule, reprend le même concept à peu près dans les mêmes termes.
Le rôle de la cellule est de participer directement à la vie du milieu qui l’entoure (le tissu vivant auquel elle appartient) la cellule consacre sa vie à faire vivre un vivant plus grand qu’elle-même. La vocation profonde du vivant est sa participation à l’évolution de l’univers. “Heraclite ne concevait l’humain qui fonde dans la pensée universelle, l’homme ressent la nécessité de vivre dans l’union, la participation.  Ce concept d’homonomie est à la fois opposé et complémentaire au concept d’autonomie.  Ces deux forces s’expriment simultanément lors du développement de l’enfant; celui-ci se permet d’autant plus de grandir et de se séparer de sa mère qu’il la sent proche et attentive.  En l’absence de tout égard; il perd son désir de croissance, du même qu’en l’absence d’une rétroaction positive et nourrissante de l’environnement, l’ëtre vivant s’étiole, stagne et s’oriente vers la mort.

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