mardi 20 novembre 2012

LITTÉRATURE HAÏTIENNE - 33e partie


Ne faut-il pas vénérer en J.C. Dorsainvil l’initiateur et le régulateur d’une pensée, plus tard approfondie par le Dr Jean Price-Mars, et à laquelle se référaient volontiers les tenants de la génération indigéniste ainsi que les clercs du mouvement nationaliste, déconcertés par la diffusion des analyses a priori, mais satisfaits d’avoir trouvé, dans les écrits de l’éminent sociologue, des matériaux dont la résistance vérifiée par des techniciens de métier s’avérait d’une grande utilité pour les ouvriers de disciplines diverses.

Devant tant de capacités, le Dr Duvalier ne pouvait se permettre d’ignorer les problèmes soulevés par son aîné, ainsi que la technique utilisée par ce dernier pour exercer une admirable séduction sur ses contemporains et sur les générations successives d’intellectuels, enthousiasmés par la façon dont le maître avait abordé les questions d’histoire haïtienne et essayé de les résoudre en proposant une méthodologie qui avait définitivement capté l’imagination du médecin attaché à la campagne anti-pianique.

Le travail de sociologie historique entrepris plus tard par le Dr François Duvalier constituait donc le prolongement de l’oeuvre littéraire et scientifique du Dr Jean Chrysostome Dorsainvil. Il existe dans la pensée de l’un comme dans la réflexion intellectuelle de l’autre une part d’observations et de conclusions dont la validité enrichit la portée de l’effort des deux penseurs haïtiens, témoins de deux époques différentes.  Le lien qui les unit ne représente pas seulement la soudure entre deux générations, mais une contribution éminente à l’édification de la pensée historique haïtienne.

Le développement de la crise nationale avec le débarquement des marines et la persistance de l’occupation américaine a élargi le contexte de la problématique à laquelle se trouvaient confrontés deux écrivains, parmi d’autres, dont l’orientation politique et philosophique devait stimuler l’effort de générations soucieuses de valoriser l’héritage pour imposer la tonalité d’une voix qui évoquait, sous tous ses aspects, le drame haïtien.

À ce moment, les illusions étaient détruites.  Les intellectuels haïtiens commençaient à se découvrir entre eux des affinités profondes et à penser haïtien à la faveur de principes professés par le Dr Dorsainvil et qu’il était permis désormais de tenir pour acquis.

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